Les Pauvres Gens

Les Pauvres Gens

Les Pauvres Gens (en russe Бедные люди) est le premier roman de l'écrivain russe Fiodor Dostoïevski, qui commence à l'écrire en 1844, aussitôt après avoir quitté l'armée. Le texte paraît le 15 janvier 1846 dans le Recueil pétersbourgeois et connaît aussitôt un grand succès. Les Pauvres Gens est un roman épistolaire, le seul[1] de Dostoïevski.

Sommaire

« Un nouveau Gogol »

En 1843, Dostoïevski traduit - assez librement - Eugénie Grandet en russe et fait paraître la traduction en 1844[2]. La même année, il écrit Les Pauvres Gens dans le secret[3]. En mars 1845, il annonce à son frère Mikhail : « J'avais à peu près tout à fait terminé en novembre [1844], mais en décembre, j'ai eu envie de le refaire entièrement. Je l'ai refait et recopié, mais en février j'ai à nouveau recommencé à le nettoyer, à le polir, à ajouter et à supprimer[4] ». Lorsqu'il publie le roman dans le Recueil pétersbourgeois[5] en janvier[6] 1846, c'est d'emblée le succès. Le critique Vissarion Belinski, qui connaît le roman par le truchement de Dmitri Grigorovitch, colocataire et ami de Dostoïevski et de Nikolaï Nekrassov[7], le porte aux nues[8]. Eugène-Melchior de Vogüé donne de l'épisode une peinture assez vivante et souvent reprise[9] :

« Le pauvre petit ingénieur [Dostoïevski] ne connaissait pas une âme dans le monde littéraire et ne savait que faire de son manuscrit. Un de ses camarades, M. Grigorovitch, qui tient une place honorée dans les lettres et m'a confirmé cette anecdote, porta le manuscrit chez Nékrassof, le poète des déshérités. À trois heures le matin, Dostoïevski entendit frapper à sa porte : c'était Grigorovitch qui revenait, amenant Nékrassof. Le poète se précipita dans les bras de l'inconnu avec une émotion communicative ; il avait lu toute la nuit le roman, il en avait l'âme bouleversée. [...] l'aube surprit les trois enthousiastes attardés dans une causerie exaltée, dans une communion d'espérances, de rêves d'art et de poésie.
En quittant son protégé, Nékrassof alla droit chez Biélinsky, l'oracle de la pensée russe, le critique dont le seul nom épouvantait les débutants. « Un nouveau Gogol nous est né ! s'écria le poète en entrant chez son ami. - Il pousse aujourd'hui des Gogol comme des champignons » répondit le critique de son air le plus renfrogné ; et il prit le manuscrit comme il eût fait d'une croûte de pain empoisonné. On sait que, par tous les pays, les grands critiques prennent ainsi les manuscrits. Mais, sur Biélinsky aussi, l'effet de la lecture fut magique; quand l'auteur, tremblant d'angoisse, se présenta chez son juge, celui-ci l'apostropha comme hors de lui : « Comprenez-vous bien, jeune homme, toute la vérité de ce que vous avez écrit ? Non, avec vos vingt ans, vous ne pouvez pas le comprendre. C'est la révélation de l'art, le don d'en haut : respectez ce don, vous serez un grand écrivain ! » - Quelques mois après, Les Pauvres Gens paraissaient dans une revue périodique, et la Russie ratifiait le verdict de son critique. »

— Eugène-Melchior de Vogüé, Le Roman russe[10].

Plus tard, l'écrivain raconte comment l'idée lui en vient lors d'une promenade au bord la Neva, dans l'hiver pétersbourgeois : « C'est alors que m'apparut une autre histoire, dans quelque coin sombre, un cœur de conseiller titulaire, honnête et pur, candide et dévoué à ses chefs, et avec lui, une jeune fille, offensée et triste, et leur émouvante histoire me déchira le coeur[11] ».

Le succès, dont le jeune Dostoïevski se rengorge alors, est cependant de courte durée, puisque le deuxième roman, Le Double, est mal accepté par la critique, en particulier par Belinski[12]. Dostoïevski se brouille d'ailleurs avec Nekrassov dès 1846, l'année même de la parution des Pauvres Gens, et avec Belinski dès l'année suivante[13].

Une voix discordante

Ivan Tourgueniev fut l'un des rares écrivains à se montrer critique : « La glorification exagérée des Pauvres Gens fut une des premières erreurs de Belinski, qui témoignait du fait que son organisme commençait à s'affaiblir[14]. »

Résumé

Le roman est constitué par l'échange de lettres de deux personnages seulement. La correspondance se déroule sur quelques mois, du 8 avril au 30 septembre.

Un vieux fonctionnaire, Macaire Alexéïevitch Diévouchkine, correspond avec une jeune fille, Varvara Alexéïevna Dobrossiélova, parente éloignée pour laquelle il s'est pris d'affection. Ils habitent l'un en face de l'autre dans des immeubles délabrés de Saint-Pétersbourg et en se racontant les petits événements de leur quotidien, rendent compte de leurs conditions de vie misérables. Ainsi, Macaire habite dans la cuisine d'un grand appartement qu'il partage avec de nombreux personnages, dont la famille Gorchkov : leurs malheurs essaiment tout au long du roman.

Bien que tous deux soient sans le sou, ils s'entraident autant que faire se peut, tantôt par l'envoi de menue monnaie, tantôt par de petits cadeaux : des bonbons, des dentelles. Macaire Diévouchkine n'hésite pas à s'endetter pour aider Varvara Alexéïevna trop faible et trop malade pour travailler et sombre dans une plus grande misère chaque jour : ses vêtements se délabrent, ses dettes s'accumulent.

L'échange épistolaire est marqué par quelques épisodes un peu plus longs : le récit de l'enfance de Varvara et le début de ses malheurs à Saint-Pétersbourg[15], le premier amour de la jeune fille pour l'étudiant Pokrovski[16], la peinture des habitants de l'appartement communautaire de Macaire ou la quête d'argent de ce dernier auprès de ses collègues ou dans les bas-fonds de la ville.

Cette correspondance, Macaire en résume l'essence dans une dernière lettre, qu'il n'envoie finalement pas : « Vous savez, je ne sais même plus ce que j'écris, je ne sais plus rien, je ne me relis même pas, je ne me corrige pas. J'écris seulement pour écrire, pour m'entretenir avec vous un peu plus longtemps[17]... ». Cette dernière lettre résume l'un des principaux enjeux de cette œuvre : dessiner l'avenir de la littérature. Il s'agit d'une écriture vitale, automatique, une création toute vive, une création brute : c'est le réalisme, enfin. Dostoïevski compose cette œuvre à l'âge de vingt-cinq ans. En même temps qu'il assigne à la littérature sa nouvelle voie, c'est la sienne qu'il annonce. Le Joueur et Les Pauvres Gens sont les œuvres les plus réalistes qu'aient produites Dostoïevski.

Lectures

Les Pauvres Gens s'accommodent d'une double lecture, d'une part, une interprétation « politique », d'autre part une interprétation strictement littéraire. En effet, à côté de la sévère peinture de mœurs de la société pétersbourgeoise dans les années 1840, l'œuvre est truffée d'allusions littéraires. Il s'agit soit de référence à des œuvres déjà parues (Shakespeare, Schiller, Pouchkine, Gogol, etc.), soit de la confession que font les personnages de la difficulté qu'ils ont à écrire, soit de considérations générales sur la littérature.

Un roman « socialiste »

Alexandre Herzen, le « père du socialisme russe », a qualifié Les Pauvres Gens de premier roman véritablement socialiste de la littérature russe[18],[19]. Selon Pierre Pascal, Dostoïevski a défini très tôt sa vocation : « Connaître la vie des prolétaires et la décrire[20] ».

Un pastiche littéraire

Pour D. S. Mirsky, « le roman Les Pauvres Gens est le sommet de la littérature « philanthropique » des années 40 et donne un avant-goût des épouvantables visions de pitié qui caractérisent d'une manière si tragique les grands romans de Dostoïevski[21] ». Selon Joseph Frank, « le roman Les Pauvres gens peut être intégralement considéré comme une parodie, non pas satirique, mais sentimentale et pathétique par le ton, puisqu'il s'agit manifestement d'une transformation de la nouvelle de Gogol intitulée Le Manteau (1842), mentionnée en clair dans le roman[22] et lue par Diévouchkine[23]. Gogol y brosse le portrait railleur d'un personnage ressemblant fort à Diévouchkine qui, à la lecture, y voit bien sûr une attaque personnelle[24] ». Frank donne d'autres exemples de parodie (également tirée de Gogol), mais pour lui, la question centrale de l'œuvre reste celle de la « pitié sociale ».

En 1886, dans Le Roman russe, Eugène-Melchior de Vogüé reprend déjà cette idée dans une formule devenue célèbre :

« Parmi ces compositions inégales, Le Manteau mérite une place à part. Plus je lis les Russes, plus j'aperçois la vérité du propos que me tenait l'un d'eux, très mêlé à l'histoire littéraire des quarante dernières années : « Nous sommes tous sortis du Manteau de Gogol. » On verra plus loin combien la filiation est évidente chez Dostoïevski ; le terrible romancier est tout entier dans son premier livre, Les Pauvres Gens, et Les Pauvres Gens sont en germe dans Le Manteau.
Leur triste héros, le scribe Diévouchkine, n'est qu'une épreuve plus développée et plus noire d'Akaki Akakiévitch[25], le type grotesque d'employé créé par Gogol. »

— Eugène-Melchior de Vogüé, Le Roman russe[26].

Pour Sylvie Luneau[27] également, Les Pauvres Gens sont le roman où l'influence de Gogol est la plus visible : « Akaki Akakievitch, le personnage du Manteau, la célèbre nouvelle de Gogol qui ouvrit le champ à tout le roman russe de la seconde moitié du XIXe siècle, est le frère aîné de Diévouchkine[28] ».

La présence de Pouchkine

Si les critiques s'évertuent à relier Les Pauvres Gens aux personnages de Gogol, Alexandre Pouchkine semble encore plus présent dans le texte de Dostoïevski. Ainsi la jeune fille n'hésite pas à s'endetter pour offrir à Pétinka Prokovski les œuvres complètes de Pouchkine[29]. Le cadeau finit dans les mains de l'odieuse logeuse, Anna Fédorovna et est éparpillé par le père Pokrovski à l'occasion des obsèques de son fils[30].

À la fin du roman[31], Macaire Diévouchkine ne demande à conserver de la jeune fille qu'un des livres qu'elle lui a prêtés[32], Les Récits de Bielkine de Pouchkine.

Notes et références

  1. Si l'on fait exception d’Un roman en neuf lettres, une brève nouvelle d'une dizaine de pages.
  2. Joseph Frank, Dostoïevski. Les années miraculeuses (1865-1871), p. 15.
  3. Efim Etkind, Histoire de la littérature russse, Tome 3, p. 970
  4. Cité par Dominique Arban, Dostoïevski, p. 45
  5. Fiodor Dostoïevski, Journal de l'écrivain, 1877 : décembre chapitre II,1, p. 1313, Bibliothèque de la Pléiade.
  6. en:D. S. Mirsky, Histoire de la littérature russe p. 207.
  7. Dominique Arban, Dostoïevski, p. 50
  8. Joseph Frank, Dostoïevski. Les années miraculeuses (1865-1871), p. 14.
  9. Le récit se base sur le Journal de l'écrivain, que Dostoïevski tient beaucoup plus tard et dont un extrait est donné par Sylvie Luneau p. 1334 de l'édition de la Pléiade. Voir aussi le Journal de l'écrivain, janvier 1977, chapitre IV, p. 871, Bibliothèque de la Pléiade.
  10. Eugène-Melchior de Vogüé, Le Roman russe, p. 208
  11. La citation est donnée par Richard Millet en quatrième de couverture des Pauvres Gens, collection Folio Classique, Gallimard, 2005.
  12. Joseph Frank, Dostoïevski. Les années miraculeuses (1865-1871),p. 18.
  13. Sylvie Luneau, Note p. 1335, La Pléiade
  14. Cité par Leonid Grossman dans Dostoïevski, p. 78
  15. Fiodor Dostoïevski, Les Pauvres Gens, Lettre de Varvava Alexéievna du 1er juin, p. 1174, Bibliothèque de la Pléiade.
  16. Fiodor Dostoïevski, Les Pauvres Gens, Lettre de Varvava Alexéievna du 1er juin, p. 1179, Bibliothèque de la Pléiade.
  17. Fiodor Dostoïevski, Les Pauvres Gens, p. 1293, Bibliothèque de la Pléiade.
  18. Joseph Frank, Dostoïevski. Les années miraculeuses (1865-1871), p. 23.
  19. Efim Etkind attribue une phrase très proche (la même?) à Belinski : Les Pauvres Gens sont « le premier roman social russe » p. 970
  20. Pierre Pascal, Dostoïevski, p. 16, Desclée De Brower, 1969.
  21. D. S. Mirsky, Histoire de littérature russe, p. 209.
  22. Fiodor Dostoïevski, Les Pauvres Gens, Lettre de Varvava Alexéievna du 6 juillet, p. 1222, Bibliothèque de la Pléiade.
  23. Fiodor Dostoïevski, Les Pauvres Gens, Lettre de Macaire Diévouchkine du 8 juillet, p. 1224, Bibliothèque de la Pléiade.
  24. Joseph Frank, ibid.
  25. Akaki Akakievitch Bachmatchkine, le personnage principal du Manteau. Dans la traduction d'André Markowicz, le nom de famille d'Akaki Akakiévitch est « Savatkine »
  26. Eugène-Melchior de Vogüé, Le Roman russe, p. 96
  27. Sylvie Luneau a traduit Les Pauvres Gens et produit les notes dans l'édition de La Pléiade.
  28. Fiodor Dostoïevski, Les Pauvres Gens, note p. 1334, Bibliothèque de la Pléiade.
  29. Les Pauvres Gens, Lettre de Varvava Alexéievna du 1er juin,p. 1193, Bibliothèque de la Pléiade.
  30. op. cit, p. 1200-1201
  31. Les Pauvres Gens, Lettre de Macaire Diévouchkine du 29 septembre, p. 1222, Bibliothèque de la Pléiade.
  32. Les Pauvres Gens, Lettre de Varvara Alexéïevna du 27 juin, p. 1213, Bibliothèque de la Pléiade.

Bibliographie

Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article : Ouvrage utilisé comme source pour la rédaction de cet article

  • Dominique Arban, Dostoïevski, Coll. Écrivains de toujours, Le Seuil, Paris, 1995 (première édition 1962). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Joseph Frank, Dostoïevski. Les années miraculeuses (1865-1871), traduit de l'américain avec la collaboration de l'auteur par Aline Weil, 768 pages, éd. Actes Sud, Arles, 1998, (ISBN 2-7427-1546-0) ; Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Efim Etkind, Georges Nivat, Ilya Serman et Vittorio Strada, Histoire de la littérature russe, t. 3 : Le XIXe siècle. Le temps du roman, Paris, Fayard, 2005, 1553 p. (ISBN 9782213019871)  Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Leonid Grossman (trad. Michèle Kahn), Dostoïevski, Paris, Parangon, coll. « Biographies », 2003, 521 p. (ISBN 978-2-84190-096-7)  Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article

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