Les diaboliques (nouvelles)

Les diaboliques (nouvelles)

Les Diaboliques (nouvelles)

Les Diaboliques est un recueil de six nouvelles de Jules Barbey d'Aurevilly, paru en novembre 1874 à Paris chez l'éditeur Dentu.

Sommaire

Présentation générale

Le projet de ce recueil de nouvelles devait s'intituler à l'origine Ricochets de conversation. Il fallut cependant près de vingt-cinq ans à Barbey pour le voir paraître puisqu'il y travaillait déjà en 1850 lorsqu'il fit paraître Le dessous de cartes d'une partie de whist dans le journal La Mode dans un feuilleton en trois parties, La Revue des Deux Mondes l'ayant refusé. Barbey revint en Normandie à la faveur des événements de la Commune et l'acheva en 1873.

Titres de l'œuvre

L'édition du recueil comprit six « diaboliques » dont voici les titres :

  • Le rideau cramoisi,
  • Le plus bel amour de Don Juan, déjà paru en 1867,
  • Le bonheur dans le crime,
  • Le dessous de cartes d'une partie de whist, déjà paru en 1850,
  • À un dîner d'athées,
  • La vengeance d'une femme.

Résumés de quelques nouvelles

Le rideau cramoisi

Article détaillé : Rideau cramoisi (les diaboliques).

Le Plus Bel Amour de Don Juan

Barbey se plaît à emboîter ses narrateurs comme des poupées russes, et cette nouvelle, représentative de son art de conteur, en fournit un bon exemple. Un premier narrateur nous parle du comte Ravila de Ravilès. Lequel lui raconte un souper que lui offrirent une douzaine de ses anciennes maîtresses.

Une duchesse lui demande : « Vous qui passez pour le Don Juan de ce temps-ci, vous devriez nous raconter l’histoire de la conquête qui a le plus flatté votre orgueil d’homme aimé et que vous jugez, à cette lueur du moment présent, le plus bel amour de votre vie ?... »

Ravila se met donc en scène, déployant devant les douze femmes son talent de conteur. Il prend soin de les désappointer tout d’abord par l’histoire de sa liaison avec une marquise dont il tait le nom. Laquelle, dans le cours du récit, lui raconte une visite que lui a faite M. le curé de Saint-Germain-des-Prés. Lequel, dans cette visite, « extrêmement troublé », détaille la confession d’une pénitente. Laquelle devient narratrice à son tour.

Le bonheur dans le crime

Le narrateur inconnu se voit conter l'histoire principale par le docteur Torty. Les cadres sont le Jardin des plantes, puis la ville de Valognes et le château de Savigny dans l'histoire du docteur. Au début, le docteur Torty et le narrateur se promènent au Jardin des plantes.

Lorsqu'ils sont devant la cage de la panthère, arrivent et attirent l'attention du narrateur le comte et la comtesse de Savigny. Le docteur Torty raconte leur histoire qui s'est déroulée il y a plusieurs années. Il s'agit d'une jeune femme de grande qualité (belle et experte en escrime) et d'un comte. Devenus amoureux, ils préparent un stratagème diabolique pour pouvoir vivre ensemble en se débarrassant de l'épouse du comte. Après cela, le couple vit très heureux, sans aucune culpabilité du crime qu'ils ont commis.

À un dîner d'athées

Lors d'un dîner entre anciens révolutionnaires et militaires, un des invités évoque la présence du dénommé Mesnilgrand à l'église. Il se justifie et raconte son histoire. Mesnilgrand était un soldat. Il eut une relation avec la femme d'un autre soldat, le major Ydow. Cette femme, Rosalba, tomba enceinte. Quelques mois après sa naissance, l'enfant meurt — et le père putatif, fou de douleur, embaume son cœur pour le transporter avec lui, avant de découvrir l'adultère et de le précipiter dans la poussière. Mesnilgrand a alors sauvé le petit cœur et souhaite lui faire enfin trouver le repos en le confiant à l'église.

La vengeance d'une femme

Un jeune dandy nommé Tressignies se promène dans les rues de Paris. Il remarque une prostituée, très belle, et pris d'une attirance incontrôlable et presque animale, il décide de la suivre jusque dans sa chambre sordide. Le visage de la jeune femme lui est familier, mais il est persuadé que cette ressemblance est trompeuse. Pourtant, il a raison : la prostituée est en réalité la duchesse de Sierra-Leone, et sa prostitution infâme est une vengeance. Elle était mariée, mais n'aimait pas son mari. Amoureuse d'un cousin du Duc, elle suggéra à son mari de l'éloigner pour éviter l'adultère, celui-ci refusa en ricanant (« Il n'oserait ! »). La relation amoureuse a donc lieu (mais d'un amour chaste et pur, jamais consommé) jusqu'à ce que le Duc le découvre et fasse tuer l'amant. La Duchesse demande de mourir avec lui, mais son mari refuse, il veut la laisser en vie pour lui infliger ce spectacle: il appelle des chiens pour qu'ils dévorent le cœur de son amant. La Duchesse se bat avec les chiens pour le manger elle-même mais n'y parvient pas. C'est à cause de cet affront, parce que son mari ne lui a pas laissé manger le cœur de son amant, qu'elle décide de se venger, et trouve alors le moyen, en se faisant prostituée, de salir ce qui est le plus précieux aux yeux de son mari : son honneur. Vengeance qui la mènera, comme elle le voulait, à la mort par les maladies les plus infâmes.

Un recueil intrigant

Dans les Diaboliques, les femmes qui sont au centre des nouvelles sont intrigantes, parfois presque irréelles. Le lecteur n'accède jamais à leurs pensées (sauf dans "La Vengeance d'une femme" qui constitue une exception intéressante), il est condamné à tenter de comprendre leur comportement de l'extérieur, avec l'aide du ou des narrateurs. La chute est brève et inattendue, comme souvent dans une nouvelle, et laisse le lecteur dans son incompréhension. Les intentions réelles des Diaboliques ne sont jamais révélées, la nouvelle s'achève toujours sur le même non-dit qui parcourt toute l'œuvre. Philippe Berthier, un critique, qualifie cette poétique de la « carte blanche laissée au rêve pour continuer à sa guise l'œuvre entrevue » (in Barbey d'Aurevilly et l'Imagination, Librairie Droz, 1978, p. 305). C'est dans ce dévoilement inachevé que réside toute la saveur de ces nouvelles.

Les thèmes principaux sont

  • L'amour,
  • L'adultère,
  • Le meurtre,
  • La vengeance,
  • La rancune.

Ces thèmes plongent le lecteur dans un univers scandaleux, ce qui a valu à son auteur d'être accusé d'immoralisme. Pourtant, fervent catholique, Barbey précise dans sa préface qu'il offre ces Diaboliques pour susciter l'horreur de leur comportement, et faire ainsi une œuvre chrétienne. Le recueil est donc censé être didactique, mais la jouissance de l'écriture dans les descriptions et la narration peut parfois rendre perplexe. Cette ambivalence fait partie de la complexité de l'ouvrage et participe à en faire une grande œuvre.

Références

D'autres nouvelles devaient être publiées dans ce recueil parmi lesquelles : Entre adultères ; Les vieux hommes d'État de l'amour ; Madame Henri III ; L'avorteur... (lettre à Trébutien, 1866). Dans la préface de 1874, il écrivait « Voici les six premières ! Si le public y mord, et les trouve à son goût, on publiera prochainement les six autres ; car elles sont douze, comme une douzaine de pêches, — ces pécheresses ! ».

Tiré à 2 200 exemplaires, Les Diaboliques furent épuisées en quatre jours. L'esclandre qui suivit la parution incita le Parquet de Paris à saisir les 480 exemplaires encore en fabrication, pour attentat à la morale publique. Gambetta intervint et le procès n'eut pas lieu. Une nouvelle édition parut en 1882 chez Lemerre.

Anecdote littéraire

Auteur qu'on pourrait presque qualifier d'« aurevillien » pour certaines de ses œuvres, l'écrivain Jean de La Varende inséra dans son roman L'homme au gant de toile deux nouvelles qu'il intitula : la VIIe « Diabolique » ; ...et la VIIIe. Dans un salon de l'abbaye de Blanchelande (Cotentin), demeure de Madame de Tallard (Madame de Robersart, + 1897), fille du héros (ex-duc de Choiseul-Praslin), La Varende place une rencontre entre le duc de Loigny (Gustave, dernier duc de Coigny, 1788-1865) et un jeune dandy que le lecteur devine pour être Barbey d'Aurevilly. Le duc lui conte deux histoires dans le goût des « Diaboliques » qu'il place un demi-siècle auparavant, au temps de la Guerre d'indépendance espagnole (1808-1814). L'écriture de La Varende se révèle ici d'une saveur qui rend hommage au « Connétable des lettres ».

Adaptations

Cinéma

Télévision

  • Hauteclaire, d'après Le Bonheur dans le crime. Réalisation : Françoise Dumayet et Jean Prat, 1961.
  • Le dessous des cartes d'une partie de whist. Réalisation : François Châtel, adaptation : Jack Giaghino, 1971 (ORTF).
  • Le bonheur dans le crime. Réalisation : Denis Malleval, 2009 (France 2) dans la série Contes et nouvelles du XIXè siècle.

Bande dessinée

La série de bande dessinée Hauteclaire est librement inspirée du Bonheur dans le crime.

Wikisource

Le texte de ces nouvelles est disponible sur le lien suivant : s:Les_Diaboliques (texte intégral).

Lien externe

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