L’Iliade

L’Iliade

Iliade

Achille sacrifiant à Zeus, manuscrit de l’Iliade de la Bibliothèque Ambrosienne de Milan (Ve siècle)
Page de garde de l'édition Rihel datant de 1572.

L'Iliade (en grec ancien Ἰλιάς / Iliás, en grec moderne Ιλιάδα / Iliáda) est une épopée attribuée à l'aède Homère. Son nom provient du grec Ἴλιον / Ilion, nom en grec ancien de la ville de Troie.

Elle est composée de 15 337 hexamètres dactyliques et, depuis l'époque hellénistique, divisée en 24 chants.

Le texte a probablement été rédigé entre 850 et 750 av. J.-C. (dates déjà mentionnées par Hérodote), soit quatre siècles après la période à laquelle les historiens font correspondre la guerre mythique qu’il relate.

Sommaire

Argument

L’Iliade

Μῆνιν ἄειδε, θεά, Πηληιάδεω Ἀχιλῆος
οὐλομένην, ἣ μυρί’ Ἀχαιοῖς ἄλγε’ ἔθηκε,
πολλὰς δ’ ἰφθίμους ψυχὰς Ἄϊδι προῒαψεν
ἡρώων, αὐτοὺς δὲ ἑλώρια τεῦχε κύνεσσιν
οἰωνοῖσί τε πᾶσι· Διὸς δ’ ἐτελείετο βουλή·

« Chante, ô déesse, le courroux du Péléide Achille,
Courroux fatal qui causa mille maux aux Achéens
Et fit descendre chez Hadès tant d'âmes valeureuses
De héros, dont les corps servirent de pâture aux chiens
Et aux oiseaux sans nombre : ainsi Zeus l’avait-il voulu.[1] »

« Déesse chante-nous la colère d'Achille, de ce fils de Pélée,
colère détestable qui valut aux Argiens d'innombrables malheurs,
et jeta dans l'Hadès tant d'âmes de héros,
livrant leurs corps en proie aux oiseaux comme aux chiens :
ainsi s'accomplissait la volonté de Zeus.[2] »

Le premier terme, μῆνις / mênis, qui veut dire « colère », est toujours employé pour qualifier une colère divine, funeste. Achille est le seul mortel dont la colère soit appelée μῆνις dans tout le corpus homérique. C’est bien cette colère inhumaine qui est le thème-clef de l’épopée.

Le récit commencé dans l’Iliade se poursuit dans l’Odyssée et, d’un autre point de vue, dans l’Énéide de Virgile.

Résumé

Article détaillé : Guerre de Troie.

La guerre de Troie dure depuis bientôt dix ans. Elle oppose les Achéens venus de toute la Grèce, aux Troyens et leurs alliés. Face à la cité fortifiée, les centaines de navires des assiégeants reposent sur la plage et leur servent de campement.

Chant I

Chrysès offrant à Agamemnon une rançon pour Chryséis, cratère apulien à figures rouges du Peintre d'Athènes 1714, v. 360350 av. J.-C., musée du Louvre

Agamemnon, le chef des Achéens, retient prisonnière Chryséis, fille d'un prêtre troyen d'Apollon et le dieu a envoyé une peste meurtrière sur l'armée. Le devin Calchas révélant la cause du mal, Achille adjure Agamemnon de rendre la prisonnière. Le roi finit par y consentir, mais décide de prendre en dédommagement Briséis, une belle Troyenne captive d'Achille. Furieux et se sentant spolié, ce dernier décide de cesser de combattre avec ses Myrmidons aux côtés des Achéens. Il invoque sa mère, la Néréide Thétis, qui obtient de Zeus la promesse d'une victoire troyenne.

Chant II

Trompé dans son sommeil par un songe envoyé par Zeus, Agamemnon s'éveille certain de la victoire de ses troupes. À l'agora, il raconte son rêve à ses alliés, puis pour les mettre à l'épreuve, feint de vouloir quitter le siège de Troie. Les guerriers préparent leur retrait, mais Ulysse, roi d'Ithaque parvient à les dissuader de partir. Les deux armées s'apprêtent à combattre : les Achéens venus de toute la Grèce sur un grand nombre de vaisseaux feront face aux troupes des chefs troyens et de leurs alliés dardaniens, lyciens, phrygiens et thraces.

Chant III

Hélène et Pâris, détail d'un cratère en cloche apulien à figures rouges, vers 380-370 av. J.-C., musée du Louvre

Le troyen Pâris, fils du roi Priam, est saisi d'effroi à la vue de Ménélas, dont il a enlevé l'épouse, Hélène, causant par là-même le conflit. Suite aux durs reproches de son frère, le vaillant Hector, Pâris propose aux Achéens un combat singulier l'opposant à Ménélas, afin d'éviter une hécatombe à son peuple. Tandis que, du haut des remparts de Troie, Hélène énonce les chefs grecs à Priam, le pacte est conclu. Le duel s'engage, tournant rapidement à l'avantage de Ménélas, combattant expérimenté, au détriment du frêle et jeune Pâris. Mais celui-ci est sauvé d'une mort certaine par l'intervention divine d'Aphrodite, qui le soustrait au combat et le dépose dans Troie.

Chant IV

Sur l’Olympe, Zeus souhaite faire reconnaître la victoire de Ménélas, afin qu'une paix soit conclue, épargnant ainsi la ville. Mais Héra, qui souhaite ardemment la victoire des Achéens, demande à Athéna de pousser les Troyens à violer leurs serments de paix. Athéna convainc alors Pandare de décocher une flèche à Ménélas afin de briser la trève, ce qui survient effectivement.

Pendant la revue de ses troupes, Agamemnon exhorte au combat les plus grands de ses chefs — Idoménée, les deux Ajax (Ajax fils de Télamon et Ajax fils d'Oïlée), Nestor, Ulysse et Diomède — et les combats reprennent.

Chant V

Dans la furie de la bataille, les Achéens galvanisés massacrent un grand nombre de Troyens. Diomède s'illustre en particulier, soutenu par Athéna, tuant — entre-autres — Pandare et blessant Énée et sa mère, la déesse Aphrodite, venue le secourir. Les Dieux s'impliquent dans la bataille : Apollon sauve Énée et exhorte son frère Arès à s'engager aux côtés des Troyens. Ces derniers se ressaisissent et Hector, enflammé par les paroles de Sarpédon, mène ses troupes au combat. Inquiètes de ce retournement de situation, Héra et Athéna s'arment et apportent leur concours aux Achéens défaits par Arès, qui est à son tour blessé par Diomède. Enfin, dieux et déesses remontent à l'Olympe porter leur discorde devant Zeus.

Chant VI

Astyanax, sur les genoux d'Andromaque, essaie d'attraper le casque de son père Hector, cratère à colonne apulien à figures rouges, v. 370-360 av. J.-C., Musée national du palais Jatta à Ruvo di Puglia (Bari)

Le combat continue de faire rage, les meilleurs guerriers des deux camps s'affrontant mortellement. Cependant, après avoir évoqué les liens d'hospitalité qui unissaient naguère leurs ancêtres, Diomède et Glaucos le Lycien cessent leur duel. Hector se retire du combat et regagne la ville où il demande à Hécube, sa mère, de prier Athéna pour la victoire des Troyens. Les femmes rejoignent le temple de la déesse. Près des portes Scées, Hector fait ses adieux à son épouse, Andromaque, et à son tout jeune fils Astyanax. Il retrouve ensuite son frère Pâris et le convainc de rejoindre la bataille avec lui.

Chant VII

Guidé par les plans d'Apollon et d'Athéna, Hector provoque les chefs grecs en duel. C'est Ajax, le fils de Télamon qui est tiré au sort pour l'affronter. À la faveur de la nuit, le duel doit cesser sans qu'un vainqueur ne puisse être désigné, bien qu'Hector soit blessé. Les deux hommes, en signe d'estime et de respect, s'offrent de nombreux présents. Une trêve temporaire est décidée par les deux camps. Elle est mise à profit pour honorer les nombreux morts qui jonchent le champ de bataille. Les Achéens décident et mettent en œuvre la construction d'un fossé et de solides remparts devants leurs navires déposés sur la plage.

Chant VIII

Au petit jour, Zeus exige des dieux qu'ils restent neutres. Depuis les sommets du mont Ida surplombant le champ de bataille, il pèse sur sa balance d'or les destinées des deux armées. Celle-ci penche en faveur des Troyens et de fait, dès la reprise des combats, ils prennent l'avantage grâce à la fougue d'Hector, qui pousse ses troupes vers le rivage et les remparts des Achéens. Athéna et Héra ne peuvent rester sans agir face au repli des Grecs. Elles désobéissent à Zeus en secourant ces derniers, mais sont rapidement et vertement rappelées à l'ordre. Quand la nuit tombe, pour ne pas perdre leur avantage, cinquante mille Troyens campent dans la plaine.

Chant IX

Dans le campement achéen, l'inquiétude est grande. Agamemnon évoque la possibilité d'abandonner le siège et rejoindre la Grèce, ce à quoi Ulysse et Nestor sont farouchement opposés. La solution serait de ramener Achille à la raison et de le convaincre de se joindre au combat. Agamemnon est prêt à s'excuser, à rendre Briséis et à couvrir Achille de présents. Il lui envoie Ulysse, Ajax et Phénix en ambassade afin de le convaincre. Achille reçoit dignement et écoute ses compagnons mais reste inflexible : il a l'intention de regagner sa patrie dès le lendemain, et propose à Phœnix de se joindre à lui. Ulysse et Ajax s'en retournent annoncer la mauvaise nouvelle à Agamemnon.

Chant X

Dolon vêtu de sa peau de loup, lécythe à figures rouges, v. 460 av. J.-C., musée du Louvre

Afin de connaître les intentions des Troyens, le chef des Achéens, sur les conseils du sage Nestor, décide d'envoyer Diomède et Ulysse espionner leurs ennemis. Dans le camp adverse, Hector envoie Dolon en reconnaissance près du campement des Grecs. Mais Dolon est capturé par les deux espions achéens puis exécuté après avoir livré des renseignements stratégiques. Durant le retour de cette expédition, Ulysse et Diomède massacrent les chefs thraces, alliés des Troyens, endormis près du feu et ramènent leurs chevaux auprès des navires. Cet exploit ravive l'espoir d'une victoire prochaine parmi les Achéens.

Chant XI

Au matin, la bataille reprend, et sous la pression des exploits d'Agamemnon, les Troyens reculent jusqu'aux remparts de leur cité. Mais Zeus envoie sa messagère Iris assurer Hector de son soutien et lui indiquer de contre-attaquer dès qu'Agamemnon sera blessé, ce qui finit par survenir. Ulysse, Diomède, Machaon et Eurypyle sont touchés à leur tour et les Grecs se replient vers leurs tentes. Patrocle, le fidèle ami d'Achille, inquiet de voir revenir tant de braves guerriers durement blessés, s'inquiète de la tournure que prennent les évènements. Sur les conseils de son compagnon, il court s'informer auprès du vieux sage Nestor qui lui demande d'aller convaincre Achille de reprendre le combat. Mais Patrocle va porter secours à Eurypyle dans sa tente. Le moral des Achéens est à nouveau au plus bas.

Chant XII

Ayant poursuivi les fuyards dans la plaine, ce sont désormais les Troyens et leurs alliés qui assiègent leurs ennemis avec une grande force. Sous les violents assauts d'Asios, de Sarpédon et Glaucos, les remparts vacillent, malgré la résistance héroïque des meilleurs combattants achéens. Enfin, Zeus accorde à Hector de franchir le large fossé à la tête de ses troupes et de fracasser les lourdes portes du campement. Les combattants troyens se ruent dans cette brèche. À l'intérieur des remparts, Hector fait rage, selon les desseins de Zeus.

Chant XIII

Poséidon, plaque corinthienne à figures noires, v. 550-525 av. J.-C., musée du Louvre

Refusant la défaite imminente des Achéens et la mise à sac de leur camp et de leurs navires, Poséidon lui-même s'engage dans la bataille. Ainsi stimulés, Idoménée et Mérion, en furie, massacrent de nombreux Troyens, parmi lesquels Asios et son aurige Alcathoos. Les Troyens Énée, Pâris, Hélénos et Déiphobe s'illustrent également par leur bravoure et leurs ravages.

Malgré ces actes valeureux, les combattants troyens se replient temporairement sous une contre-attaque des grecs. Mais épaulés par Zeus, ils reprennent le dessus et réinvestissent rapidement le campement achéen.

Chant XIV

La situation est désespérée et Agamemnon propose à nouveau de sonner la retraite, mais Poséidon exhorte les grecs, leur redonnant confiance. Héra, aidée d'Aphrodite, détourne Zeus de la bataille en le séduisant et le laisse endormi sur les cimes du Gargare. Zeus ainsi neutralisé, Poséidon peut désormais secourir efficacement les Achéens, qui mènent une contre-attaque rageuse et victorieuse, tuant de nombreux Troyens. Hector lui-même est blessé et doit être évacué par ses compagnons auprès du fleuve Scamandre.

Chant XV

A son réveil, Zeus, furieux d'avoir été trompé par sa femme Héra, intime à Poséidon l'ordre de se tenir à l'écart de la lutte. Préoccupé par le sort d'Hector, il envoie à son chevet Apollon, qui a tôt fait de le guérir et l'inspirer. Le valeureux Troyen peut alors à nouveau semer la mort et la panique dans les rangs des Grecs. Patrocle, effrayé quitte son ami Eurypyle pour accourir vers Achille. Malgré une résistance héroïque d'Ajax auprès des navires, les Achéens épuisés cèdent et Hector arrive jusqu'aux nefs pour y mettre le feu.

Chant XVI

Devant l'urgence de la situation, Achille autorise Patrocle à mener les Myrmidons au combat à condition qu'il se contente de repousser les assaillants sans chercher à prendre la cité de Troie. Ayant revêtu les armes divines qu'Achille lui a prêtées, Patrocle exhorte les Myrmidons. Il parvient à faire reculer les combattants troyens et tue Sarpédon que Zeus ne parvient à sauver. Apollon est envoyé pour récupérer son corps sans vie, et pour donner à Hector de l'ardeur au combat. Grisé par ses succès, Patrocle désobéit à Achille et pousse sa contre-attaque jusqu'aux remparts de Troie tuant encore le conducteur du char d'Hector. Il est alors sauvagement tué par le prince troyen.

Chant XVII

S'engage alors une âpre bataille autour du corps de Patrocle : Hector et Énée tentent de s'en emparer ainsi que des chevaux d'Achille. Mais les Achéens, et Ménélas en particulier, défendent héroïquement la dépouille de leur compagnon. Hector parvient cependant à en arracher les armes d'Achille, son casque et son armure. Inspiré par Zeus, il repousse les combattants achéens vers les nefs, qui, soutenus par Mérion et les deux Ajax, finissent par emporter le corps de Patrocle dans leur campement.

Chant XVIII

Thétis donne à son fils Achille ses armes nouvellement forgées par Héphaïstos, détail d'une hydrie attique à figures noires, v. 575-550 av. J.-C., musée du Louvre

C'est à Antiloque que revient la lourde tâche d'informer Achille de la mort de son compagnon. Accablé de douleur, Achille jure de le venger et demande à sa mère Thétis de trouver Héphaïstos pour qu'il lui forge de nouvelles armes. Le dieu se met au travail. Achille quitte sa tente et bondit hors du camp pour crier sa douleur et sa rage, et ses hurlements épouvantent les Troyens. De leur côté, ceux-ci tiennent conseil, et le sage Polydamas prodigue à Hector des conseils de prudence que ce dernier ignore. Son labeur achevé, Héphaïstos remet à Thétis un bouclier magnifiquement orné, une cuirasse, un casque et des cnémides splendides pour Achille.

Chant XIX

Devant l'armée achéenne, Achille se réconcilie avec Agamemnon. En échange de sa bonne volonté, il reçoit comme prévu un grand nombre de présents, dont la belle Briséis, qu'Agamemnon jure n'avoir jamais possédée. En préparation de la bataille à venir, les guerriers se restaurent, mais Achille, voulant se consacrer uniquement à la vengeance de son compagnon, refuse toute nourriture. Équipé de ses nouvelles armes, il souhaite partir au combat sur le champ, malgré les avertissements de son cheval Xanthos qui lui promet une mort prochaine.

Chant XX

La discorde règne chez les dieux, que Zeus autorise à intervenir dans la bataille. Chacun choisit son camp et fourbit ses armes. Malgré l'épouvante des Troyens à la vue d'Achille, Enée s'élance vaillamment contre lui, inspiré par Apollon. Loin d'égaler Achille au combat, il est vaincu mais sauvé par Poséidon. Hector et Achille, parvenus à portée de voix, commencent à s'affronter, mais Apollon, inquiet pour la vie d'Hector, fait disparaitre celui-ci du champ de bataille. Furieux, Achille fait un grand massacre parmi les Troyens affolés.

Chant XXI

Sous les coups d'Achille, de nombreux combattants de Troie se jettent et périssent dans le fleuve Scamandre, révolté d'être ainsi souillé du sang des guerriers. Aidé du fleuve Simoïs, le Scamandre combat farouchement Achille, manquant de le noyer. Héra envoie alors Héphaïstos, qui parvient à faire reculer le fleuve de son souffle brûlant. Dans la bataille, Apollon dresse Agénor contre Achille, puis finit par prendre sa place et simulant la fuite, autorise ainsi la retraite des Troyens vers leur cité.

Chant XXII

Hector, malgré les supplications de ses parents Priam et Hécube, s'est résolu à combattre Achille, et l'attend seul, devant les remparts de Troie. Mais à la vue de son ennemi, il est épouvanté et prend la fuite. Tandis qu'Achille poursuit Hector le temps de faire trois fois le tour de la cité, Zeus pèse sur sa balance d'or les destinées des deux guerriers : Hector est condamné. Athéna, déguisée, ramène Hector à la raison et le convainc d'affronter son destin et Achille. Le combat ne dure guère mais avant de mourir, Hector révèle à Achille qu'il périra sous les coups de son jeune frère Pâris. Le vainqueur se saisit de la dépouille de son ennemi qu'il attache à son char et traîne jusqu'aux vaisseaux grecs sous les yeux éplorés des Troyennes, parmi lesquelles Andromaque, l'épouse d'Hector.

Chant XXIII

Corps d'Hector ramené à Troie, bas-relief d'un sarcophage romain, v. 180-200, musée du Louvre

Patrocle apparait en songe à son compagnon. Tous les Achéens se consacrent au deuil : de nombreux sacrifices sont consentis et la dépouille du jeune homme est brûlée selon la tradition. Un tombeau est élevé, et les cendres et os de Patrocle sont recueillis en attendant d'être réunis avec ceux d'Achille. Ce dernier organise des jeux funèbres qu'il dote de nombreux prix. Ainsi les guerriers peuvent montrer leur valeur à la course de char, à la lutte ou encore à la course à pieds.

Chant XXIV

Achille ne peut trouver le sommeil. Pendant dix jours, il traîne chaque matin le corps d'Hector avec son char autour du tombeau de Patrocle. Mais les dieux, prenant en pitié la famille du Troyen, réprouvent son comportement et, par un procédé divin, conservent à la dépouille son bel aspect. Zeus exige de Thétis qu'elle aille convaincre son fils de rendre la dépouille à Priam. Priam, protégé par Hermès, traverse en secret les lignes ennemies pour être reçu dans la tente d'Achille. Là, il supplie ce dernier au nom de Pélée de lui rendre son fils en échange de présents. Achille y consent et propose à Priam le gîte et le couvert. Conciliant, Achille accepte également de retenir les troupes achéennes pendant douze jours, le temps pour les Troyens d'organiser des funérailles décentes à Hector. De retour à Troie, le corps du prince est présenté à la foule en larmes et de longues funérailles sont organisées.

L’Iliade dans la culture grecque

Statue de la personnification de l’Iliade, placée dans la Bibliothèque de Pantainos à Athènes, Musée de l'Agora antique d'Athènes

Avec l’Odyssée, l’Iliade est le texte majeur de la littérature grecque, aussi important sinon plus que ne le sont les œuvres de Shakespeare pour les anglo-saxons, ou de Dante pour les Italiens. Dans l’Antiquité, il était appris par cœur, in extenso, par les jeunes gens de bonne famille, ce qui faisait d’Homère, selon le mot du personnage Socrate (qui déplorait son influence dans La République de Platon) , l’« éducateur de la Grèce » (τὴν Ἑλλάδα πεπαίδευκεν / tḕn Helláda pepaídeuken, République, X, 606e).

Poème de la guerre ou « poème de la force » (Simone Weil), il résume parfaitement, selon les Grecs anciens, leur modèle aristocratique en la figure d’Achille, prêt à sacrifier une longue vie à une gloire impérissable. Henri-Irénée Marrou, dans son Histoire de l’éducation dans l’Antiquité (1948), explique ainsi :

« Beaucoup plus que l’Ulysse du Retour, c’est la noble et pure figure d’Achille qui incarne l’idéal moral du parfait chevalier homérique ; il se définit d’un mot : une morale héroïque de l’honneur. C’est dans Homère que chaque génération antique a trouvé ce qui est l'axe fondamental de cette éthique aristocratique : l'amour de la gloire. »

Deux types de gloires, d’honneurs (τιμή / timḗ) sont montrées dans l’Iliade :

  • l’honneur du chef, celui d’Agamemnon, le rang social ;
  • l’honneur du guerrier, la gloire personnelle, celle que recherche Achille.

L’Iliade voit le triomphe de la gloire vantée par Achille, κλέος ἄφθιτον / kléos áphthiton, la « gloire impérissable » (IX, 413) qui s’acquiert par une « belle mort », jeune, sur le champ de bataille.

Plus tard, cet amour de la gloire personnelle sera transformé. Tyrtée, le poète spartiate, chante ainsi la gloire immortelle qu'il y a à défendre sa patrie : pour le guerrier mort ainsi, « jamais sa noble gloire ne périt, ni son nom, mais bien qu’il demeure sous terre, il est immortel » (9 D, 27 sq., trad. C. Patro). Dans l’Iliade, Achille n’est pas un guerrier patriote. Quand il reprend les armes, ce n'est pas pour les Grecs qu’il combat. Son départ pour Troie, ses combats, sa colère et sa décision de reprendre les armes sont profondément individuels, voire égoïstes. Et quand il décide d’affronter Hector, sachant qu’il mourra ensuite s’il le fait, ce n’est pas pour les Grecs mais pour venger Patrocle.

En même temps, l’Iliade représente une lente décomposition des valeurs et des codes héroïques et chevaleresques, le cosmos (κόσμος, univers ordonné) pour basculer dans la sauvagerie, le chaos. Ainsi, selon Jean-Pierre Vernant (Entre mythe et politique, Seuil, 1984), les héros grecs comme troyens cessent progressivement de considérer l’adversaire comme le partenaire d’un combat loyal pour le transformer en proie — témoin la mutilation sauvage par Achille du corps d’Hector. Cette sauvagerie n’est rédimée qu’à la fin de l'épopée, quand Priam vient réclamer le corps de son fils et qu’Achille, selon Vernant, comprend les limites du monde héroïque dans lequel il se meut.

Traductions en français

Interlinéaire traductions

Héros de l’Iliade

Carte de la Grèce homérique.

Dans son récit, Homère cite un grand nombre de héros de chaque camp, mais les Dieux et autres divinités sont également présents et influents.

Grecs

Troyens

Divinités

Notes

  1. Les extraits de L’Iliade sont issus de la leçon de Paul Mazon (Belles Lettres). Les extraits traduits viennent de la traduction de Frédéric Mugler, Actes Sud, 1995.
  2. Traduction de Robert Flacelière pour la Bibliothèque de la Pléiade (éd. Gallimard) en 1955.

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Études
  • Rachel Bespaloff, De l’Iliade, Alia, 2004 (1re éd. 1943) (ISBN 9782844851611).
  • (en) Geoffrey S. Kirk (dir.), The Iliad: A Commentary, Cambridge University Press, 6 vol., 1985-1993.
  • Hubert Laizé, Leçon littéraire sur l'Iliade, Paris, PUF, 2000.
  • Hélène Monsacré, Les Larmes d’Achille. Le héros, la femme et la souffrance dans la poésie d’Homère, Albin Michel, 1984.
  • James Redfield, La Tragédie d’Hector. Nature et culture dans l’Iliade, Flammarion, 1984.
  • Jacqueline de Romilly, Hector, De Fallois, 1997.
  • André Sauge :
    • L’Iliade poème athénien de l’époque de Solon, Lang, 2000 (ISBN 3906758435),
    • L’Iliade. Langue récit, écriture. L’Épopée homérique et l’invention de la citoyenneté, Lang, 2007 (ISBN 9783039111381).
  • Pierre Vidal-Naquet, « L’Iliade sans travesti », introduction à l’Iliade, trad. Paul Mazon, Gallimard, coll. « Folio », 1975.
  • Simone Weil, « L’Iliade ou le poème de la force », dans La Source grecque, Gallimard, 1953

Liens externes

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