Marguerite-Thérèse d'Autriche

Marguerite-Thérèse d'Autriche
Portrait de l'infante Marguerite-Thérèse
1659
Musée du Prado, Madrid

Marguerite-Thérèse d'Autriche, infante d'Espagne (12 juillet 1651 - 12 mars 1673) est la fille du roi d'Espagne Philippe IV et de sa seconde épouse et nièce, Marie-Anne d'Autriche, et la demi-sœur de Marie-Thérèse d'Autriche, reine de France, femme de Louis XIV. Son frère Charles II sera le dernier Habsbourg roi d'Espagne.

Sommaire

Biographie

La demi-sœur de Marguerite-Thérèse ayant épousé en 1660 le roi Louis XIV de France en vertu du Traité des Pyrénées, lui avait apporté en dot ses droits successoraux au trône d'Espagne et à son Empire (Amériques, Italie, Pays-Bas).

Philippe IV était alors un homme proche de sa fin. La santé fragile de ses deux enfants survivants l'amenèrent à inclure dans son testament des clauses envisageant avec précision les possibilités de successions. Les descendants de sa sœur Anne d'Autriche et de sa fille Marie-Thérèse d'Autriche, étant membre de la dynastie française ennemie furent exclus en vertu de la renonciation au trône de l’infante Marie-Thérèse à son mariage avec Louis XIV, accord qui faisait partie intégrante du Traité des Pyrénées. À aucun moment Philippe IV n’envisagea que le monarque français ou l’un de ses descendants puissent accéder à la couronne d’Espagne en cas de mort prématurée de son fils Charles II. La succession revenait aux héritiers de l’infante Marguerite-Thérèse, alors promise à l’empereur Léopold Ier, c’est-à-dire qu’était suivie la logique Habsbourg de fidélité à la famille et à la dynastie.

La seconde femme destinée à continuer la ligne de succession était la défunte sœur de Philippe IV, l’impératrice Marie-Anne d’Autriche, épouse de l’empereur Ferdinand III, mère de Marie-Anne d’Autriche, par sa descendance (Léopold Ier, ou les enfants qu’il aurait avec Marguerite-Thérèse, puisqu’on pouvait supposer qu’elle renoncerait à ses droits en se mariant avec l’empereur, si le mariage avait lieu du vivant de Charles II).

Les Habsbourg devaient faire valoir leur droit face à la Maison de Savoie, qui pouvait aussi prétendre à la succession au trône d’Espagne par le biais de la tante de Philippe IV, l’infante Catherine-Michelle, fille de Philippe II, qui avait épousé le duc Charles-Emmanuel Ier de Savoie. Quant aux descendants français du roi, ils étaient écartés du testament d’un Philippe IV fidèle à l’alliance traditionnelle entre les deux branches de la Maison d’Autriche.

En 1657 naquit le prince Philippe Prosper, fils de Philippe IV, qui ne vécut que 4 ans, et mourut le 1er novembre 1661, ce qui souleva à nouveau la délicate question de la succession.

La France risquait de faire valoir ses droits, la reine Marie-Thérèse étant la fille première-née de Philippe IV : si sa sœur se mariait avec l’Empereur et que sa renonciation au trône d’Espagne, clause du Traité des Pyrénées, était annulée, la succession pouvait revenir aux héritiers de Louis XIV. Cependant, cinq jours à peine après la mort de Philippe Prosper naquit le futur Charles II, ce qui rendait à nouveau un héritier masculin à la monarchie espagnole. Malgré tout, la santé fragile du nourrisson fit rapidement craindre pour sa vie, et les principales cours européennes se tenaient prête à jouer leurs atouts dynastiques en cas d’une possible mort prématurée de l’héritier.

Pour contrecarrer cette éventualité et conserver toute sa puissance à la Maison des Habsbourg, l’infante fut très rapidement promise au chef de la branche Autrichiens, l’empereur Léopold Ier du Saint-Empire, frère de sa mère Marie-Anne d’Autriche.

L'envoyé Impérial, le comte de Pötting, fut envoyé à la cour de Madrid début 1663, avec pour mission d’obtenir la main de l’Infante pour son maître Léopold Ier. Les bans furent publiés le 6 avril 1663, confirmés par la signature du contrat par Pötting et le duc de Medina de las Torres le 18 décembre de la même année. Marguerite-Thérèse avait 12 ans et Léopold 23, ce qui était courant dans les milieux curiaux de l'époque. Le lien de parenté qui unissait les deux futurs époux n'était pas non plus un obstacle sinon canonique mais une dispense était souvent délivré par le pape. On ignorait alors les dangers d'unions consanguines répétées dont les conséquences seront l'extinction des Habsbourg d'Espagne.

A la mort du roi en septembre 1665, la reine-mère Marie-Anne d’Autriche était devenue régente de la monarchie au nom du petit Charles II, qui avait à peine 4 ans.

Ascendance

Mariage

Le mariage de Marguerite-Thérèse était d’une importance capitale pour l’avenir de la monarchie, car le testament de Philippe IV prévoyait sans ambigüité que les infantes pouvaient hériter. Le droit castillan n’excluait pas les femmes de la ligne de succession ni ne les privaient de leur droit à monter sur le trône, ce qui avait d’énormes conséquences sur la formulation du testament du roi. Cependant, les héritiers mâles primaient sur les femmes, et les princes héritaient du trône alors que les infantes, au moment de leur mariage à d’autres monarques ou à l’empereur, devaient généralement renoncer à leurs droits de succession.

Les divers cas de figure qui pouvaient se présenter tout au long de la minorité de Charles II obligeaient Philippe IV à prendre beaucoup de précautions. Divers évènements pouvaient survenir : la mort de la reine régente Marie-Anne d’Autriche, celle de Charles II, ou les deux ; la plus importante étant la seconde, qui priverait la monarchie de son héritier universel. Les nombreux héritiers descendant par les femmes de la dynastie Habsbourg, principalement de la branche autrichienne pourraient réclamer le trône.

L’infante Marguerite-Thérèse était la candidate favorite du roi à la succession de la monarchie en cas de décès de Charles II. Elle était promise depuis sa naissance à Léopold Ier, cependant son mariage fut inhabituellement retardé sous le règne de Philippe IV. Les véritables raisons de ce mariage tardif sont à chercher dans la politique internationale de l’époque : la minorité problématique de l’héritier universel, le décès envisageable de ce même héritier, et la lutte acharnée des grandes cours européennes pour obtenir le contrôle des vastes territoires de la Monarchie catholique étaient à prendre en considération. De plus, les noces de l’infante et de l’empereur n’avaient jamais été une certitude, elles correspondaient simplement à la ligne habituelle d’action politique qui n’avait jamais été perçue par Madrid comme une obligation inéluctable ; de fait, Philippe IV avait même pensé à marier Marguerite à Charles II d'Angleterre, afin d’éviter qu’il épouse Catherine de Bragance, princesse de la dynastie rebelle de Bragance que le roi d’Espagne, en pleine guerre contre le Portugal, avait toujours refusé de considérer comme partie intégrante des maisons royales européennes.

Le testament de Philippe IV (rédigé en 1665) ne faisait aucune allusion à un hypothétique mariage entre Marguerite et Léopold Ier, ce qui confirme que le roi oubliait volontairement cette promesse nuptiale dans l’espoir qu’en cas de première nécessité sa fille hérite du trône. D’autre part, Philippe IV, dans la clause 21 de son testament stipulait clairement qu’une fille comme un fils pouvait lui succéder :

« [...]en tant que tutrice de notre fils ou notre fille qui me succèdera elle dirigera et régentera tout mon royaume, en guerre comme en paix, jusqu’à ce que ce fils ou cette fille qui me succèdera ait 14 ans accomplis pour pouvoir gouverner [...] »

Alors qu’à Madrid, le roi Philippe IV gardait sa fille auprès de lui au cas où le problème dynastique viendrait à s’aggraver, à Vienne l’empereur Léopold Ier pressait le mariage avec Marguerite-Thérèse pour trois raisons : la nécessité d’un héritier ; assurer ses prétentions au trône d’Espagne en cas de décès de Charles II, puisque Louis XIV, son grand rival, s’était marié avec la fille aînée de Philippe IV, ce qui faisait de lui le concurrent principal pour la course à la succession ; et enfin raviver les relations entre les deux branches de la Maison d’Autriche qui s’étaient refroidies depuis le milieu du siècle.

Quand Marie-Anne d’Autriche accéda à la régence en septembre 1665, son frère Léopold Ier et ses conseillers virent en elle un bastion essentiel de la politique extérieure de l’Empire. Léopold pensait qu’une fois Marie-Anne au pouvoir, son mariage avec l’infante s’en verrait accéléré mais il n’en fut pas ainsi. Le fait que Philippe IV n’ait pas mentionné son engagement à Marguerite-Thérèse l’obligeait à déployer les plus fines stratégies diplomatiques pour faire venir au plus vite l’infante à Vienne. En plus de son ambassadeur ordinaire, le comte de Pötting, Léopold envoya à Madrid le baron de Lisola comme ambassadeur extraordinaire pour négocier cette union, un renfort diplomatique auquel vint se rajouter le comte de Harrach comme agent temporaire en octobre 1665.

Madrid avança que, si les noces de l’empereur et de l’infante avaient été retardée, c’est qu’il fallait résoudre des problèmes plus urgents en ce début de régence, cependant, la raison de fond demeurait la succession, il fallait attendre prudemment que le petit roi montre des indices qui prouveraient qu’il était suffisamment solide pour survivre à l’enfance.

Finalement, les noces furent célébrées par procuration le jour de Pâques, le 25 avril 1666 à la cour de Madrid. Le duc de Medinaceli représentait l’empereur, le petit Charles II et la reine Marie-Anne étaient présents, ainsi que le comte de Pötting, ambassadeur impérial, et les Grands de la Cour. Le duc d’Alburquerque fut désigné comme grand camérier pour le voyage jusqu’en Allemagne de la princesse.

L’impératrice-infante et sa suite partirent de Madrid le 28 avril pour se rendre à Dénia, où, après un repos de quelques jours, ils embarquèrent sur les bateaux de l’armada royale, qu’escortaient les galères de Malte et celles du grand duc de Toscane le 16 juillet.

L’Armada se dirigea ensuite vers Barcelone, où elle arriva le 18 juillet, accompagnée de 27 galères, et elle fut reçue par de grandes festivités tout le temps qu’elle demeura à la cité comtale. L’impératrice se sentit légèrement indisposée, ce qui retarda le départ jusqu’au 10 août, où elle embarqua de nouveau, direction finale où elle arriva le 20 août et fut reçue par don Luis Guzmán Ponce de León, gouverneur de l’État de Milan. Le cortège reprit la route le 1er septembre et parvint à Milan le 11 du même mois, bien que l’entrée triomphale dans la ville ne se fît que le 15. Le 24 septembre, il quitta la capitale lombarde et pris le chemin de Venise. Le 8 octobre, on fit étape à Roveredo, où le duc d’Alburquerque, au nom du roi et de la reine gouverneur présenta à l’impératrice le prince de Dietrichstein et le cardinal Harrach, évêque de Trente. Le 20 octobre, le nouveau cortège partit de Roveredo, traversa le Tyrol, passa par la Carinthie et la Styrie, et arriva le 25 novembre à Schottwien, à douze lieues de Vienne, où l’empereur vint chercher son épouse. L’entrée officielle à Vienne eut finalement lieu le 5 décembre. Les festivités qui eurent lieu dans la capitale autrichienne pour célébrer le mariage impérial furent parmi les plus splendides de l’époque baroque. La nouvelle impératrice aimait beaucoup la musique. L'opéra "Il pomo d'oro" (Cesti, 1668) fut composé à l'occasion de son mariage. Léopold, qui partageait sa passion pour l'opéra, le fit rejouer pour dix-septième anniversaire.

Dévote, Marguerite-Thérèse incita Léopold Ier à chasser les juifs de Vienne.

Victime des mariages consanguins dont elle était issue, déjà chétive de naissance, ses multiples grossesses l'affaiblirent : elle donna quatre enfants à l'empereur dont une seule fille survivra, Marie-Antoinette, née en 1669, qui épousera l'électeur de Bavière, Maximilien-Emmanuel de Bavière à qui elle donnera trois fils dont Joseph-Ferdinand mort à l'âge de sept ans en 1699 après avoir été déclaré héritier du trône espagnol en 1698. L’impératrice Marguerite mourut à Vienne le 12 mars 1673, à 22 ans, des suites de son quatrième accouchement. Sa dépouille repose dans la crypte des Capucins à Vienne.

Apparition dans l’art

Bien qu'elle soit morte assez jeune, l'infante est restée célèbre en raison des multiples portraits réalisés notamment par Diego Vélasquez la représentant. Ces tableaux, en particulier le remarquable Portrait de l'infante Marguerite-Thérèse de 1659, sont emblématiques du mouvement baroque.

Sources



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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Marguerite-Thérèse d'Autriche de Wikipédia en français (auteurs)

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