Mariemont

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Mariemont

Mariemont (commune de Morlanwelz dans la province de Hainaut en Belgique) est un ancien domaine royal créé au XVIe siècle par Marie de Hongrie.

Cédé par son dernier propriétaire, Raoul Warocqué (1870-1917), à l'État belge, c'est aujourd'hui un parc ouvert au public dans lequel est situé entre autres le Musée royal de Mariemont.

Le portail grillagé de l’orangerie, le musée et le parc de Mariemont.

Sommaire

Aux origines du domaine

Le domaine de Mariemont doit son nom (le mont de Marie) à sa fondatrice, Marie de Hongrie (1505-1558), sœur de Charles Quint (1500-1558).

Devenue à vingt ans veuve de Louis II de Hongrie, elle est chargée de gouverner les Pays-Bas bourguignons et reçoit le bénéfice viager des villes et terres de Binche.

Alors qu’elle fait construire dans cette ville un palais de style Renaissance, sa passion pour la chasse la pousse à édifier un pavillon de chasse en 1546 dans les bois giboyeux de Morlanwelz : le domaine de Mariemont.

Elle fait appel à un architecte d’origine montoise, Jacques Dubroeucq, qui dessinera pour elle les plans du bâtiment et très probablement des jardins.

Un sphinx du perron septentrional des ruines du château de Marie de Hongrie

Le pavillon de chasse, dont le style architectural oscille entre le Moyen Âge et la Renaissance, se présente sous la forme d’une tour rectangulaire de 19 m sur 17 entourée d’un fossé et augmentée d’une tourelle abritant un escalier en colimaçon.

Il sera le décor en 1549 de réjouissances organisées pour Charles Quint dans le cadre de la présentation de son fils Philippe II (1527-1598) en tant que successeur.

En 1554, le pavillon est incendié par les Français. Il s’agit de représailles d’Henri II (1519-1559) face à la destruction de son château de Folembray.

Une campagne de restauration est de suite lancée et se termine en 1560. Mais Marie de Hongrie est déjà bien loin : suite à l’abdication de son frère, elle s’est retirée dans un couvent espagnol en 1556.

Le domaine reste entretenu mais n’accueillera plus d’hôtes durant près de 40 ans.

L’époque d’Albert et Isabelle d’Autriche (1598-1621)

Les archiducs d'Autriche Albert et Isabelle, eux aussi passionnés de chasse, sont particulièrement séduits par Mariemont et en font une résidence royale.

De grands travaux sont dirigés par l’architecte Wenceslas Coberger. On assèche et restaure les bâtiments et on agrandit : quatre pavillons d’angle sont ajoutés au corps central. On peut désormais réellement parler d’un château à Mariemont.

C’est aussi une période faste pour le jardin qui est confié aux soins de l’architecte Pierre Le Poivre. L’objectif est d’évoquer ceux d’Aranjuez où l’archiduchesse a passé son enfance. Cette influence se lit notamment dans le développement des jeux d’eau.

Le domaine est agrandi et atteint alors une superficie de 500 hectares.

Cette grande époque se termine avec la mort d’Isabelle en 1633.

Les ginkgos biloba remarquables du parc.

La période française

De 1668 à 1678, le domaine de Mariemont est français. Le traité d’Aix-la-Chapelle en fait une possession de Louis XIV. Mais cela ne s’est pas fait sans peine : la reine régente d’Espagne est réticente à l’idée d’inclure Mariemont dans ce transfert de propriétés et Louis XIV s’en empare par la force le 27 octobre 1668.

Mariemont devient une de ses maisons royales. Il y séjourne en 1670 et 1675.

Son attachement à cette terre est illustré par un épisode de la tapisserie dite « tentures des mois ou des maisons royales » où le mois d’août est figuré par une partie de chasse à Mariemont.

Sous l’électeur de Bavière Maximilien-Emmanuel

En 1678, le domaine repasse à l’Espagne. Maximilien-Emmanuel de Bavière entame une série de travaux et d’agrandissements dans les années 1690. Une aile du château est d’ailleurs baptisée à cette occasion « quartier de Bavière ».

Ces attentions sont de courte durée : l’édifice est de nouveau abandonné suite aux troubles causés par la succession des gouverneurs dans nos provinces, certains se désintéressant de leurs possessions. Les avoirs du domaine sont mis à mal par les intempéries, le braconnage et le pillage par la population avoisinante.

Le grand projet de Marie-Élisabeth d'Autriche

En 1714, suite au traité de Rastadt, les Pays-Bas méridionaux passent à la maison d’Autriche et c’est, à partir de 1725, l’archiduchesse Marie-Élisabeth d'Autriche qui les gouverne.

La fontaine archiducale dite de Spa (XVIIe siècle).

Très pieuse, elle fait construire une chapelle à Mariemont en 1739 par l’architecte Jean-André Anneessens.

Elle élabore aussi un projet destiné à mettre en valeur les eaux de Mariemont. Celles-ci ont toujours eu une certaine renommée et leurs vertus sont cautionnées par les scientifiques de l’époque. L’objectif final est de concurrencer les eaux de Spa.

Quelques aménagements sont réalisés dans ce sens : le domaine est agrandi de quelques hectares pour englober la fontaine minérale de Haine-Saint-Pierre qui est reliée par une allée au château. On déplace aussi directement une fontaine spadoise à Mariemont.

Ce projet n’aura pas de réel succès, sans doute en partie à cause du décès de l’archiduchesse survenu un an plus tard.

Sous Charles de Lorraine

En 1754, le nouveau gouverneur des Pays-Bas autrichiens, Charles-Alexandre de Lorraine, décide de raser le château pour en construire un autre totalement neuf au goût du jour. Les plans sont conçus par l’architecte Jean Nicolas Jadot. L’édifice est encore remanié entre 1766 et 1774.

Les jardins sont eux aussi totalement transformés dans le style à la française. C’est à cette époque qu’est construite l’orangerie. Des fêtes démesurées sont organisées au domaine de Mariemont.

Mais ce nouveau château est lui aussi la proie des flammes, victime des combats qui précèdent l’annexion des Pays-Bas autrichiens à la jeune république française en 1794. Les plus gros dégâts sont une fois de plus le fait du pillage systématique par les habitants des régions avoisinantes.

La bourgeoisie s’installe à Mariemont : la dynastie des Warocqué

À la fin du XVIIIe siècle, le domaine de Mariemont est mis en vente parmi une série de biens confisqués par l’Etat français. Le château est en ruine.

La chapelle funéraire de la famille Waroqué.

L’ensemble des terres est acheté par deux frères, Isidore et Nicolas Warocqué (1773-1838), industriels de la région. Aidés de trois actionnaires, ils envisagent d’exploiter les gisements de charbon présents sur le site et fondent en 1802 la « Société minière du parc de Mariemont ». Administrateur habile, Nicolas s’enrichit rapidement.

En 1829, il achète à son compte la forêt de Mariemont pour en faire son domaine privé et y construire son château. De style néo-classique et composé d’une seule aile, il est dessiné par le futur architecte de Léopold Ier, Tilman-François Suys.

Nicolas est le fondateur de ce qu’on a coutume d’appeler « la dynastie Warocqué » ou la dynastie des « maîtres du charbon ».

Grands promoteurs immobiliers, ils participent à la vie politique de la région (ils sont bourgmestres de Morlanwelz de père en fils pendant plus de cent ans), fondent écoles, crèches et internats, sont mécènes de la recherche scientifique et côtoient la famille royale.

Ils envisagent conjointement la gestion de leur société et des habitants de leur commune sur le modèle des grands industriels de l’époque.

Abel Warocqué (1805-1864) succède à Nicolas en 1827. Il embellit le château et se préoccupe particulièrement du parc. C’est de cette époque en effet que date son aménagement « à l’anglaise », toujours d’actualité.

Abel fait comme son père preuve de philanthropie. C’est aussi lui qui met au point la warocquère, machine facilitant les montées et descentes des ouvriers dans la mine.

Léon Warocqué (1831-1868) ne dirigera les charbonnages que durant quatre ans.

Un hêtre pourpre remarquable du parc.

La période de la direction de Mariemont par Arthur Warocqué (1835-1880), son frère sera marquée par les désordres sociaux ambiants bien que sa politique paternaliste lui évite d’être trop touché par les grandes grèves. Les Warocqué veillent en général à améliorer les conditions de vie de leurs ouvriers, que ce soit par des salaires plus élevés et loyers moins chers qu’ailleurs, l’instauration de caisses de pensions, la création de sociétés coopératives ou de secours, de dispensaires, écoles, harmonies et sociétés de loisirs, la mise en place d’infrastructures communales comme la distribution d’eau, l’éclairage au gaz.

Arthur fut le premier vrai collectionneur de la famille. Artiste à ses heures (on lui doit une série de lithographies du parc), il constitue un petit cabinet de peintures.

Son successeur, Georges Warocqué (1860-1899) faillit bien dilapider le patrimoine familial. Son train de vie dispendieux et son goût immodéré pour les jeux d’argent, les chevaux et les orchidées mirent la famille Warocqué dans une situation financière délicate. Elle est rétablie par son frère Raoul qui rachète le domaine pour s’assurer qu’il ne pourra être vendu et met son frère à l’écart de la gestion financière.

À la mort prématurée de Georges en 1889, Raoul Warocqué devient le seul héritier de Mariemont. Industriel habile, il fait fructifier ses avoirs par des participations dans divers charbonnages de la région du Centre, mais aussi dans des sociétés de construction, d’électricité, d’aéronautique, des aciéries, fonderies, émailleries, usine de chocolat, forges.

Sa fortune colossale va lui permettre de s’adonner à sa passion : la collection d’antiquités et d’objets d’art.

Raoul Warocqué collectionneur

Les Bourgeois de Calais de Rodin.

Guidé par ses impulsions artistiques autant qu’épaulé par des spécialistes (on pense à Franz Cumont pour l’Antiquité classique ou à Georges Van der Meylen dans le domaine de la bibliophilie par exemple) Raoul Warocqué (1870-1917) constitue en très peu de temps une collection remarquable. Il complète certains ensembles initiés par ses prédécesseurs tels que la collection de dentelles de sa mère ou les autographes collectés par l’épouse d’Abel.

Les Warocqué possédaient sans doute des objets décoratifs et quelques services de porcelaine, mais Raoul rassemble en son château la collection la plus complète sur le sujet.

Une des volontés de Raoul Warocqué a toujours été de valoriser son terroir. C’est donc tout naturellement qu’une grande partie de sa collection illustre la richesse du Hainaut gallo-romain. Pour compléter celle-ci, il va subsidier une série de fouilles à Houdeng-Goegnies, Fayt-lez-Manage, Chapelle-lez-Herlaimont, Nimy...

Il se passionne très tôt pour le livre. A 16 ans, élève à Paris, il recherche de belles éditions d’auteurs classiques. Il s’intéresse aux ouvrages anciens mais souscrit aussi aux éditions contemporaines.

Il fait construire dans le parc le pavillon dit « bains romains ». Il s’agit d’un bassin rectangulaire entouré d’une colonnade destinée à exposer sa collection d’antiquités grecques et romaines grandissante.

Lors d’un voyage en Égypte en 1911, il fait l’acquisition d’objets remarquables dont un buste colossal d’une reine ptolémaïque.

Le Triomphe de la Femme" (1901) - sculpture de Jef Lambeaux.

C’est sans doute en étudiant la porcelaine de Tournai que Raoul Warocqué découvre et se prend de passion pour la porcelaine chinoise.

Une partie de sa collection est en effet orientée vers le monde sinisé et le Japon. Il est toujours attentif, lors de ses voyages d’affaire ou diplomatiques dans cette région, à ramener quantité d’objets mais aussi des essences d’arbres exotiques pour son parc.

Ce dernier fait lui aussi l’objet de ses attentions. Raoul Warocqué y fait construire des fabriques, répliques de monuments orientaux. Il commande et achète une série d’œuvres sculptées contemporaines comme Les Bourgeois de Calais d’Auguste Rodin (1840-1917) ou plusieurs œuvres de Jef Lambeaux (1852-1908).

Raoul Warocqué s’éteint le 28 mai 1917. Célibataire et sans héritier officiel, il lègue à l’État belge le parc, le château, la bibliothèque et les collections artistiques dans le but d’en faire un musée.

Le musée contemporain

C’est Richard Schellinck, secrétaire et bibliothécaire de Raoul qui devient le premier conservateur du musée de Mariemont. Très fidèle à l’esprit de l’ancien propriétaire des lieux, il met en œuvre ses décisions.

En 1934, Paul Faider prend la tête du Musée royal de Mariemont et y opère des transformations radicales. L’espace est muséographié, des œuvres sont restaurées, le premier catalogue est publié. C’est aussi à cette époque qu’est inauguré le cercle des Amis de Mariemont.

En 1940, Germaine Faider, son épouse qui le seconde de son vivant, lui succède. Totalement dévouée au musée, elle rénove, complète les collections et crée le service pédagogique en 1946.

Un accident tragique survient la nuit de Noël 1960 : un terrible incendie se déclare. Grâce à Germaine Faider, les dégâts dans les collections sont minimes mais le château des Warocqué est ravagé.

Bâtiment du CRIE

Les ruines sont rasées à l’exception d’une petite aile ajoutée par Raoul Warocqué qui abrite aujourd’hui l’accueil du musée. Un bâtiment contemporain est édifié, dessiné par Roger Bastin (1913-1986), qui est aussi architecte du Musée d'art moderne de Bruxelles. Le nouveau Musée royal de Mariemont est inauguré le 8 octobre 1975 sous la direction de Guy Donnay qui poursuit jusqu’en 1993 la politique initiée par Germaine Faider.

Reconnu établissement scientifique depuis 1965, le musée acquiert en 1981 le statut d’Établissement scientifique de la Communauté française de Belgique.

Depuis 2002, la direction du musée est bicéphale puisque partagée entre un directeur, François Mairesse et une directrice scientifique, Marie-Cécile Bruwier.

Le musée de Mariemont a reçu en 2007 le Prix des Musées pour la Wallonie.

Le domaine aujourd’hui

Le bâtiment construit par Roger Bastin abrite le Musée royal de Mariemont ainsi que sa bibliothèque. L’atelier du livre du musée est installé dans la conciergerie du domaine.

Les locaux des anciennes écuries de l’époque des Warocqué sont utilisés par l’Athénée provincial Warocqué de Morlanwelz-Mariemont-Chapelle, sections horticulture, entreprise de parcs & jardins et fleuristerie depuis les années 1920.

Dans l’ancienne habitation du personnel du haras et des jardins se trouve aujourd’hui le CRIE de Mariemont.

Le pommier de l’Amour remarquable du parc.

Bibliographie

  • Domaine de Mariemont. Guide du parc et du musée, dixième édition, Morlanwelz, Musée Royal de Mariemont, 1993.
  • Guy Donnay, Le Musée royal de Mariemont, seconde édition, Bruxelles, Éditions du Crédit communal de Belgique, 1995.
  • N. Massar, Trésors de Mariemont, collection Raoul Warocqué (introduction de Fr. Mairesse), Morlanwelz, Musée Royal de Mariemont, 2007.
  • J-C Baudouin, O.Stassin et M. Pekel Le parc de Mariemont - Inventaire dendrologique 2005 -

Ministère de la Région Wallonne.

  • Y. Quairiaux, R. Platiau et A. Bouilliez, Mariemont côté jardins, Morlanwelz, Musée Royal de Mariemont, 2005.

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