Anthropophagie

Anthropophagie
Scène de cannibalisme au Brésil au XVIe siècle. Gravure tirée du livre de Hans Staden Nus, Féroces et Anthropophages, 1557.

L’anthropophagie (du grec ἄνθρωπος, anthropos signifiant "être humain" et φαγία, phagia qui se rapporte à l'action de "consommer") est une pratique qui consiste à consommer de la chair humaine. Il s'agit d'une forme de cannibalisme mais qui concerne exclusivement l'espèce humaine. On distingue l’endocannibalisme funéraire, qui consiste à manger les membres de son groupe humain, et l’exocannibalisme guerrier, qui consiste à manger des membres d'un autre groupe humain.

Sommaire

Historique

Paléolithique

Il semble que l'anthropophagie ait été pratiquée dès le Paléolithique. Des traces de dépeçage ont été observées sur des ossements humains préhistoriques, mais les indices en question ne sont toutefois pas des preuves d'anthropophagie. Il est en effet souvent difficile de différencier des pratiques funéraires, avec décharnement post-mortem des corps, des actions anatomiquement identiques à but anthropophagique (grotte néolithique de Fontbrégoua, à Salernes et de l'Adaouste, près de Jouques en France). Ainsi dès l'origine, les premiers préhistoriens comme Édouard Piette étudiant les fossiles de Gourdan-Polignan en 1871[1] puis Gabriel de Mortillet attribuaient ces marques de dépeçage à des rites funéraires[2].

L'anthropophagie est considérée comme probable dans certains sites du Paléolithique inférieur comme Gran Dolina à Atapuerca en Espagne ou la Caune de l'Arago en France, du Paléolithique moyen comme la Baume Moula-Guercy à Soyons en France[3], dans des sites mésolithiques (grotte des Perrats à Agris) et dans des populations plus récentes nord-américaines (site de Mancos dans le Colorado).

Si certaines cultures ont eu des pratiques cannibales socialement instituées, l'anthropophagie occasionnelle en cas de pénurie grave (famine ou de perte des réserves de nourriture sur un bateau) a été une pratique récurrente dans toutes les sociétés. L'anthropophagie comme pratique courante est suggérée par l'équipe du paléoanthropologue José María Bermúdez de Castro (es) qui a réétudié les ossements de la grotte de Gran Dolina. Des os portant des traces de découpe faites par des outils en pierre et brisés comme pour en extraire la moelle, ou des crânes (avec des marques de décapitation) de membres jeunes - et donc sans défense - de tribus rivales pour limiter la concurrence sur un même territoire et consommer leur chair pour satisfaire les besoins en protéines, semblerait une stratégie répandue chez Homo antecessor[4].

Antiquité

Les mythes grecs rapportent de nombreux cas de cannibalisme : Cronos dévorant ses enfants, le cyclope Polyphème mis en échec par Ulysse, le peuple anthropophage des Lestrygons dont parle l'Odyssée, etc. D'autres racontent que la culture naît lorsque le cannibalisme cesse, d'où le développement de la notion politique d'allélophagie (anthropophagie des membres de son groupe) qui est progressivement prohibée[5].

Dans son Histoire, Hérodote décrit les traditions funéraires de plusieurs peuples, parmi lesquels les Massagètes, les Padéens, les Issédons, les Scythes et les Thraces, dont certains sont nécrophages et d'autres sacrifient les vieillards et les malades avant de les faire cuire et de les consommer[6].

On peut considérer qu'il ne s'agit que de symboles, mais il est vraisemblable, comme le pense Robert Graves dans son ouvrage Les Mythes grecs, que ces mythes se référaient aux pratiques archaïques et aux luttes menées par les premiers Grecs contre des peuples anthropophages. De nombreuses pratiques religieuses anciennes comportaient des sacrifices humains suivis de cannibalisme.

Du XIe au XIXe siècle

Le christianisme réprouve l'anthropophagie car la chair, à l'image de Dieu, est sacrée (analogies avec la théophagie de l'hostie)[5].

Des cas d'anthropophagie de survie se déroulèrent durant les Croisades selon la Chronique anonyme de la première croisade[7] : « Les Francs s'attardèrent à Maarrat un mois et quatre jours. […] Il y eut là des nôtres qui manquèrent du nécessaire […] Alors, ils ouvraient les cadavres, parce que, dans leurs ventres, on trouvait des besants cachés. Ou bien, ils en découpaient la chair en morceaux, et ils la faisaient cuire pour la manger. »

Au XVIe siècle, on trouvait des cannibales en Amérique centrale (les Aztèques), en Amérique du Sud (Tupinambas et Tupinikims), et jusqu'au début du XXe siècle en Afrique équatoriale ou dans les îles du Pacifique (Fidji, etc.). Pour tous, manger de la chair humaine était un acte normal.

Les Aztèques mangeaient les victimes de leurs sacrifices humains. Au Moyen-Orient, les Hittites empalaient, avec toute leur famille, les chefs des villes qui se révoltaient contre leur domination, les découpaient vivants en morceaux qu'ils mettaient à cuire et distribuaient au peuple pour frapper de terreur les opposants par la cruauté du supplice. Dans Très brève relation de la destruction des Indes, Bartolomé de Las Casas rapporte que certains chefs espagnols, qui s'étaient alliés avec les indigènes pour conquérir le pays, toléraient que ces Indiens traînassent avec eux des prisonniers destinés à nourrir la troupe. Lorsque les campements étaient installés, une boucherie se mettait en place, et des hommes, femmes et enfants étaient abattus, découpés et vendus.

Hans Staden (1525-1576) est un arquebusier allemand qui fut capturé après un naufrage par une tribu Tupi-Guarani pratiquant l'anthropophagie rituelle. De retour en Europe, il écrivit Nus, Féroces et Anthropophages (1557), récit de sa captivité. Son témoignage a inspiré un film intitulé Hans Staden de Luis Alberto Pereira (1999).

André Thévet, prêtre catholique qui avait accompagné Villegagnon jusqu'à la baie de Rio de Janeiro, est ensuite remonté le long des côtes d'Amérique dans les possessions françaises. Après avoir trouvé des cannibales au Brésil (les Tupinambas), il en a aussi trouvé en Guyane et en Floride. Jean de Léry, pasteur protestant qui succéda à Thevet auprès de Villegagnon, rapporte lui aussi les coutumes cannibales des indiens Tupis dans ses écrits.

Pendant la Révolution française, lors de la prise des Tuileries le 10 août 1792, des actes d'anthropophagie sont commis lors du massacre des gardes suisses et du personnel du palais[8]. Lors des massacres de Septembre, des cas de consommation de foies humains et d'hémophagie (consommation du sang) sont également rapportés[9].

Henry B. Parkes dans son livre Histoire du Mexique, préfacé par Jacques Soustelle[10] décrit ceci : en 1844 lorsqu'il fuyait México le président Antonio López de Santa Anna fut capturé par des indigènes cannibales de la région de Xico dans l'État de Veracruz qui allaient le manger et ne dut son salut qu'à l'intervention opportune de troupes gouvernementales.

Dans son livre La Mêlée sociale[11], Georges Clemenceau rapporte qu'à la fin du XIXe siècle, on trouvait sur les marchés d'Afrique équatoriale des individus, hommes et femmes, sur lesquels chacun marquait le morceau qu'il désirait acheter pour manger. Lorsque tout était vendu, la personne était abattue, découpée, et les morceaux distribués aux acheteurs. Il ajoute : « Quelles pouvaient être les pensées de ces noirs qui voyaient leurs frères se partager leur futur cadavre ? Sans doute pensaient-ils que la veille encore, ils en faisaient autant. » Il termine : « Si nous apportons avec la civilisation l'interdiction du cannibalisme, n'allons-nous pas les condamner à la famine ? »

L'anthropophagie fut aussi pratiquée par les Maori de Nouvelle-Zélande jusqu'à l'arrivée des Européens.

Guerre et cannibalisme sont souvent corrélés. L'endocannibalisme pacifique apparaît comme une situation de fuite chez des peuples dominés (notamment en Amérique du Sud) entourés de sociétés pratiquant l'exocannibalisme guerrier ou la traite d'esclaves (les Africains pensaient que les esclavagistes pratiquaient la traite non pour leur économie mais par anthropophagie). L'agriculture semi-itinérante (se déplaçant lentement par écobuage ou essartage) est aussi liée au cannibalisme transitoire en situation de crise[5].

XXe siècle

Union soviétique

Plusieurs cas d'anthropophagie touchant des villages ou des régions entières ont été rapportés durant les périodes les plus noires de l' Union soviétique. Selon un rapport de la Sécurité d'État, en 1922, « la famine atteint des proportions terribles. Les paysans ont mangé tout ce qui pouvait servir de nourriture, chats, chiens. À l'heure actuelle, ils sont en train de déterrer les morts pour les manger (.). Selon les témoignages des membres du comité exécutif de la volost [canton], le cannibalisme dans le bourg de Lioudbimovka prend des proportions dramatiques. »[12]

En septembre 1933, un responsable communiste de l'île de Nazino, en Sibérie, rapporte dans une lettre adressée officiellement à Staline que 4 000 des 6 000 personnes déportées sur ordre de ce dernier sur l'île au mois de mai précédent sont mortes, faute de nourriture, de bâtiments pour se protéger du climat peu clément et de matériel de cuisine, et que beaucoup des survivants ont dû recourir au cannibalisme pour survivre[13].

Japon

De nombreux rapports écrits et témoignages colligés par la section australienne des crimes de guerre du tribunal de Tōkyō et analysés par l'enquêteur William Webb (le futur juge en chef), démontrent que les soldats japonais commirent lors de la Seconde Guerre mondiale des actes de cannibalisme à l'encontre des prisonniers alliés et des populations civiles des territoires occupés. Dans certains cas, ces actes étaient motivés par la famine, mais selon l'historien Yuki Tanaka, « le cannibalisme était souvent une activité systématique menée par des escouades entières et sous le commandement d'officiers. »[14]

Selon le témoignage de plusieurs prisonniers, comme le soldat indien Hatam Ali, les victimes étaient parfois dépecées vivantes. Les plus hauts gradés connus ayant pratiqué l'anthropophagie sont le lieutenant-général Yoshio Tachibana (en) qui, avec onze membres de son personnel, a été jugé pour avoir fait décapiter et mangé un aviateur américain en août 1944 à Chichi Jima et le vice-amiral Mori, pour avoir mangé un prisonnier lors d'une réception tenue en février 1945[15].

République populaire de Chine

L'historien et journaliste anglais Patrick French indique « qu'au milieu des années 1960, lors de la révolution culturelle, on a pratiqué en République populaire de Chine l'anthropophagie pour prouver une doctrine révolutionnaire ». Les organes humains considérés comme supérieur, comme le foie, était réservés aux hauts responsables du parti communiste chinois[16].

L'écrivain chinois Zheng Yi enquêta sur les actes de cannibalisme commis dans la province du Shanxi. Le résultat de cette investigation publié sous le titre de Stèles rouges : du totalitarisme au cannibalisme est accablant pour les autorités locales, qui autorisèrent et institutionnalisèrent à grande échelle cette pratique[17]. Zheng Yi décrit des scènes de cannibalisme et affirme qu'au moins 10 000 personnes furent tuées et mangées en Chine durant cette période[18] D'autres sources évoquent 100 000 cas dans le Guangxi[19].

Accusations de cannibalisme

Assez fréquemment, des accusations d’anthropophagie ont été portées contre tel ou tel groupe, afin de le discréditer ou de le rendre inhumain ; les sources relatant des comportements anthropophagiques sont à prendre avec prudence.

Les témoignages francs et arabes d'anthropophagie des Croisés cités par Amin Maalouf dans Les Croisades vues par les Arabes[20] sont soit circonstanciés soit écartés par les historiens :

En effet, si Amin Maalouf cite le chroniqueur franc Raoul de Caen : « À Maarrat, les nôtres faisaient bouillir des païens adultes dans des marmites, ils fixaient les enfants sur des broches et les dévoraient grillés », l'historiographie ne considère pas Raoul de Caen comme une source fiable : on le voit notamment quand il déclare que les Croisés se sont trouvés face à une « statue de Mahomet » dans le temple de Salomon[21],[22]

Le romancier libanais cite aussi la Chronique anonyme de la première croisade[7] : « Les Francs s'attardèrent à Maarrat un mois et quatre jours. […] Il y eut là des nôtres qui manquèrent du nécessaire […] Alors, ils ouvraient les cadavres, parce que, dans leurs ventres, on trouvait des besants cachés. Ou bien, ils en découpaient la chair en morceaux, et ils la faisaient cuire pour la manger », mais l'historien René Grousset, dans son Histoire des croisades, fait remarquer que les actes incriminés étaient commis sur des cadavres (« ils ouvraient les cadavres ») par les Tafurs, bandes de Ribeauds affamés (« Il y eut là des nôtres qui manquèrent du nécessaire »).

Selon Grousset et aussi selon Xavier Yvanoff dans son Anthropologie du racisme : essai sur la genèse des mythes racistes[23], constatant la terreur que cet acte avait engendré chez leurs adversaires, les chefs croisés en firent courir le bruit : Bohémond de Tarente, voulant brûler les espions musulmans introduits dans son camp, donna l'ordre de le faire sur des broches afin de faire croire qu'ils seraient dévorés. Il y eut donc selon les historiens des cas isolés d'anthropophagie de survie[24] suivie de propagande, d'intox, destinée à terroriser l'adversaire

Pendant la révolte du papier timbré, les soldats de Louis XIV, selon madame de Sévigné, auraient mis un enfant à la broche. Il est par ailleurs vraisemblable que les personnages d'ogres mangeant des enfants dans les contes tels que Le Petit Poucet de Charles Perrault étaient inspirés par les individus ou groupes anthropophages qui sévissaient dans les forêts européennes au moment des famines. Cependant, de telles accusations ont toujours été portées contre ceux que l'on voulait combattre afin de les diaboliser, et ce depuis l'Antiquité. Ainsi les premiers chrétiens étaient-ils accusés de manger des enfants vivants, et diverses sectes combattues par le régime ont toujours subi les mêmes accusations.

Interprétations psychologiques

Chez certaines tribus anthropophages, boire le sang et manger la chair de leurs ennemis était un moyen de s'approprier leur force.

Le délire anthropophagique est une conviction psychotique : boire le sang de l'homme rapprocherait l'anthropophage du divin.

En contact avec les peuples amérindiens, les explorateurs ont cherché à expliquer les motivations des tribus cannibales. Dans son Histoire d'un voyage fait en la terre du Brésil, Jean de Léry explique que « plus que par vengeance et pour le goût (…), leur principale intention est, qu'en poursuivant et rongeant ainsi les morts jusqu'aux os, ils donnent par ce moyen crainte et épouvantement aux vivants ».

L'anthropophagie est généralement considérée comme un acte de folie dans les sociétés occidentales[25]. Il est perçu aussi chez certains peuples comme un acte d'humiliation pour la personne dépecée et sa famille[réf. nécessaire].

L'anthropophagie peut également être vue dans certains cas comme une volonté de s'approprier une partie de quelqu'un, à compter que l'anthropophagie ne nécessite pas forcément de meurtre. Ce n'est pas de la démence dans tous les cas de figure, l'anthropophagie peut être aussi nécessaire pour la survie.

Aspect juridique

En Europe, le capitulaire de Charlemagne de 789 est l'un des premiers textes juridiques à se préoccuper des actes de cannibalisme : « Si quelqu’un, trompé par le diable, croit qu’une femme est une sorcière qui mange des hommes, et que pour cela il la brûle et donne sa chair à manger ou la mange lui-même, il sera puni de la peine capitale »[26].

Aujourd'hui, plusieurs pays, notamment en Afrique, ont inscrit le crime de cannibalisme dans leur législation. Au Gabon, l’article 211 du Code pénal dispose que « tout acte d'anthropophagie, toute cession de chair humaine à titre onéreux ou gratuit faite dans le même but, sera puni de la réclusion criminelle à temps »[27]. Au Burundi, c'est l'article 165 du Code pénal qui s'applique : « Quiconque aura provoqué ou préparé des actes d’anthropophagie, y aura participé, ou aura été trouvé en possession de chair humaine destinée à des actes d’anthropophagie, sera puni de la peine de mort »[28].

Mais dans d'autres pays, notamment en France et en Allemagne, la législation ne prévoit pas de sanction pour les actes d'anthropophagie, car inimaginables en Europe occidentale[29]. Les magistrats français peuvent néanmoins s'appuyer sur l'article 222 du Code pénal qui punit les tortures et actes de barbarie de 15 à 30 ans de réclusion criminelle, et considérer l'anthropophagie comme une circonstance aggravante en cas d'homicide.

Cannibalisme rituel

  • Les Amérindiens Guayaki du Paraguay(lire Pierre CLASTRES, Chronique des Indiens Guayaki, 1972), endocannibales, mangeaient leurs propres morts, ce qui est une nécrophagie[réf. nécessaire], leur assurant ainsi une forme de sépulture humaine. Dans d'autres peuples anthropophages, les vivants pensent s'approprier les mérites et la vigueur de leurs morts.
  • En Amérique du Nord, les Algonquins, les Hurons, les Cris (Crees à Paris selon la mode anglo-saxonne) et les Iroquois étaient strictement exocannibales et ne mangeaient que ceux qui mouraient au combat.
  • Au Brésil, les Amérindiens Tupi, exocannibales, tuaient et mangeaient leurs prisonniers à l'issue de combats avec les peuples voisins. Le prisonnier - ou la prisonnière - était conservé un certain temps dans le village avant d'être tué. Selon Jean de Léry, les victimes ne cherchaient pas à s'enfuir, devenant même joyeux au moment d'être mangés. Léry raconte même qu'arrivant un jour dans un village, et voyant plusieurs indiens préparés et sur le point d'être tués, il aperçut une jeune femme qu'il avait convertie au christianisme lors d'un passage précédent. Il s'approcha d'elle et lui proposa de prier Dieu, lui disant qu'il allait intervenir pour la sauver. La femme se mit alors à rire, déclarant que « Dieu n'y était pour rien, que c'était son tour d'être mangée, et qu'elle espérait que sa viande serait bonne ». Jean de Léry termine : « et, tout en riant, elle s'avança, fit un signe au bourreau et elle mourut ainsi ». Le rituel était immuable : le corps entièrement rasé, l'anus bouché par un bois ou des herbes pour que rien ne se perde, le condamné était maintenu par une corde serrée autour de sa poitrine. Celui qui devait le tuer tenait en main un fort gourdin emplumé, et lui déclarait qu'il allait être tué et mangé. Le prisonnier répondait alors qu'il avait tué et mangé beaucoup de ce village, et que les siens viendraient le venger et les mangeraient tous. Après quoi, d'un grand coup sur la tête, le prisonnier était tué. Les femmes s'en emparaient, raclaient la peau et versaient de l'eau chaude sur le cadavre, comme l'on fait en Europe pour un cochon. Puis un homme coupait les membres, dont les femmes s'emparaient pour danser et courir autour du feu. Enfin, le tronc était ouvert et dépecé, les viscères et la tête mises dans une marmite pour les femmes et les enfants, pendant que les membres et le tronc étaient posés sur une grille en bois au-dessus du feu. Celui qui avait tué se retirait pour jeûner pendant une journée. Sources : Jean de Lery, Hans Staeden, André Thevet, Charles Villeneuve.

Cannibalisme criminel

  • Le fait récent le plus connu est l'œuvre d'un étudiant japonais, Issei Sagawa qui a dévoré une partie de son amie néerlandaise à Paris en 1981. Celui-ci a été libéré le 13 août 1985.
  • Listes de criminels cannibales condamnés après des meurtres et des preuves de consommation (et/ou de revente de chair humaine) :
    • Alferd Packer (américain, arrêté en 1874 et mort en 1907)
    • Georges Grossman (allemand, arrêté en 1921),
    • Karl Denke (allemand, arrêté en 1924),
    • Fritz Haarmann (allemand, 1925),
    • Albert Fish (américain, arrêté en 1934),
    • Anna Zimmerman (allemande, arrêtée en 1981),
    • Mba Ntem (gabonais, arrêté en 1988), a tué et mangé en partie 6 personnes dont deux de ses enfants entre 1979 et 1988[30].
    • Jeffrey Dahmer (américain, arrêté en 1991),
    • Daniel Rakowitz (américain, 1989),
    • Andrei Chikatilo (ukrainien, condamné à mort en 1994),
    • Armin Meiwes (allemand, 2001) : surnommé par les médias le « cannibale de Rotenbourg » avait émasculé, découpé et mangé en partie Bernd Brandes, qui était volontaire. Il a été condamné à Francfort le 9 mai 2006 à la prison à perpétuité[31],
    • Robert Pickton (canadien, condamné à un emprisonnement à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans en 2007) Éleveur porcin, soupçonné d'avoir donné à ses porcs, comme nourriture, les cadavres de certaines victimes et d'avoir vendu des restes humains parmi les restants d'animaux à des sociétés spécialisées dans le recyclage pour les industries cosmétique et agro-alimentaires[32].
    • Nicolas Cocaign (francais, condamné à 30 ans de prison ferme en juin 2010 pour meurtre et actes de torture et de barbarie. Il avait tué puis mangé un morceau de poumon d'un codétenu dans sa cellule de la prison de Rouen en 2007[33]).

Cannibalisme de survie

  • En 1816, suite au naufrage de la frégate La Méduse, 139 marins et soldats s'entassèrent sur un radeau pendant 13 jours, pratiquant l'anthropophagie pour survivre. Il n'y eut que 15 rescapés. Voir également le tableau Le Radeau de la Méduse de Théodore Géricault.
  • Durant l'hiver 1846-1847, dans la Sierra Nevada en Californie, un groupe de colons bloqués par la neige eut recours à l'anthropophagie.
  • On suppose que les membres de l'expédition Franklin en 1847 y eurent également recours.
  • En 1881, l'expédition Greely se termine de manière aussi tragique
  • En 1884, le navire La Mignonette fit naufrage, quatre hommes purent se réfugier sur un canot de sauvetage et trois survécurent en mangeant le quatrième. Sauvés par un autre navire, ils furent jugés et condamnés[34].
  • En 1972, une équipe de rugby uruguayenne se retrouva isolée pendant 72 jours sur un glacier de la cordillère des Andes à la suite d'un accident d'avion avant de recevoir du secours. Les 16 rescapés furent incités à l'anthropophagie par le médecin qui se trouvait parmi eux ; l'histoire retient qu'ils durent leur survie à cette décision. Cette tragédie donna lieu au livre et au film Les Survivants. Voir l'article consacré au vol 571 Fuerza Aérea Uruguaya.
  • Pendant les guerres mondiales, plusieurs actes de cannibalismes ont été commis, non seulement à cause de la famine, mais aussi de façon systématique par les camps ennemis, dont le Japon durant la Seconde Guerre mondiale. Exemple avec l'histoire de Nauru.
  • La chanson traditionnelle Il était un petit navire évoque le cannibalisme de survie.
  • L'affaire de Nazino est un cas saisissant : environ 6000 personnes, considérées comme déclassées, ont été déportées par Staline sur l'île de Nazino au printemps 1933. La nourriture étant rationnée à l'extrême, au moins une dizaine d'actes de cannibalisme humain ont été recensés.

Maladie liée à l'anthropophagie

Article détaillé : Kuru.

Dans les années 1950, de nombreux cas de maladies ont été découverts en Nouvelle-Guinée. Des études menées sur place ont établi un lien entre les rites funéraires cannibales (certains cannibales de Nouvelle-Guinée mangeaient le cerveau de leurs victimes) et les nombreux décès constatés. Les chercheurs ont conclu que les peuples pratiquant le cannibalisme étaient atteint de la maladie de kuru. Le cannibalisme semble s'être arrêté dans les années 1950 sous la pression des autorités australiennes.

Cannibalisme dans la fiction

Série Télévisée

La troisième saison de la série Bones et axée sur la traque de Gormogon,un tueur en série cannibale.

Cinéma

Littérature

Musique

Certains groupes de Death Metal, comme Cannibal Corpse, écrivent des paroles en rapport avec le cannibalisme.

Essais

  • Martin Monestier, Cannibales, histoire et bizarreries de l'anthropophagie, hier et aujourd'hui, Le cherche Midi, 2000
  • Selim Lander, Juste… cannibale !, mondesfrancophones.com
  • Frank Lestringant, Le Cannibale, grandeur et décadence, Perrin, 1994
  • Julien Picquart, Notre désir cannibale, La Musardine, 2011

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. Édouard Piette, Bulletins de la Société d'anthropologie de Paris, 1875, vol. 10, pp. 279-296
  2. Docteur Bordier, Bulletins de la Société d'anthropologie de Paris, Vol 11, n° 11, 1888, pp. 62-82
  3. Voir le chapitre Cannibalisme de l'article Homme de Néandertal
  4. James Owen, « (en) Human Meat Just Another Meal for Early Europeans? » sur National Geographic, 31 août 2010. Consulté le 5 septembre 2010
  5. a, b et c Georges Guille-Escuret, Sociologie comparée du cannibalisme, PUF, 2010 
  6. Hérodote, Histoires [détail des éditions] [lire en ligne], IV-64, I-216, III-99, IV-18 et 106
  7. a et b Traduction d'un document d'époque en latin (par Aude Matignon) Éd. Arléa mars 1998 pages 136-137.
  8. http://books.google.fr/books?id=ZYEikVGoVkkC&pg=PA124&dq=1792+cannibalisme&hl=fr&ei=Vg59TPGDOMyh4Qab7NWQBg&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=1&ved=0CCgQ6AEwAA#v=onepage&q&f=false
  9. Pierre Gaxotte, La Révolution française, Fayard
  10. Histoire du Mexique par Henry B. Parkes - Payot - ISBN|2-228-12790-6
  11. Georges Clemenceau, La Mêlée sociale, Paris, G. Charpentier et E. Fasquelle, 1895
  12. Province de Samara, rapport d'information d'État n°60, du 20 janvier 1922, Archives centrales de la Sécurité d'État. Traduit et présenté par Nicolas Werth dans le n°78 du Bulletin de l'Institut d'histoire du temps présent, second semestre 2001, p. 108.
  13. Documentaire l'Île aux cannibales. Voir aussi Nazino affair (en), sur Wikipédia en anglais.
  14. Tanaka, Hidden horrors : Japanese war crimes in World War II, Westview press, 1996, p. 127
  15. Edward Russell of Liverpool, The Knights of Bushido, a short history of Japanese War crimes, Greenhill books, 2002, p. 236-238.
  16. Patrick French ; Tibet, Tibet Une histoire personnelle d'un pays perdu, pages 225 et suivantes traduit de l'anglais par William Oliver Desmond, Albin Michel, 2005.
  17. Stèles rouges
  18. The cannibal within, par Lewis F. Petrinovich
  19. en:Cultural_Revolution#Persecution
  20. pages 55 et 307 de l'édition J'ai lu, 1983, Paris
  21. http://books.google.fr/books?id=Ny8wiTYHj7YC&pg=PA40&dq=Anthropologie+du+racisme:+essai+sur+la+gen%C3%A8se+des+mythes+racistes+Par+Xavier+Yvanoff+croisade+%22salomon&hl=fr&ei=Gxt9TN3CD5WL4QbnzrylBg&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=1&ved=0CCMQ6AEwAA#v=onepage&q&f=false
  22. http://books.google.fr/books?id=FCp-c_B5NjgC&pg=PA212&dq=croisade+statue+mahomet+salomon&hl=fr&ei=Txp9TO2XLcHT4wasscCvBg&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=1&ved=0CC0Q6AEwAA#v=onepage&q=croisade%20statue%20mahomet%20salomon&f=false
  23. http://books.google.fr/books?id=Ny8wiTYHj7YC&pg=PA77&lpg=PA77&dq=croisade+%22tafur%22&source=web&ots=0u886A-QSN&sig=cmMXRHYsUGuGLI8XRdVokgiQ0pA&hl=fr#v=onepage&q=croisade%20%22tafur%22&f=false
  24. http://www.herodote.net/histoire/synthese.php?ID=83&ID_dossier=144
  25. Lors de « l’affaire du Japonais cannibale », en France, dans les années 1980, les avocats se sont appuyés sur l’article 64 du Code de procédure pénale qui établit qu'« il n'y a ni crime, ni délit lorsque le prévenu est en état de démence au temps de l'action, ou lorsqu'il a été contraint par une force à laquelle il n'a pu résister »
  26. Jean-Paul Doucet, Dictionnaire de droit criminel
  27. Phénomènes occultes : Ces crimes rituels qui ternissent l'image du pouvoir
  28. Décret-loi n°1/6 du 4 avril 1981 portant réforme du code pénal
  29. « Quant au cannibalisme, il n'est tout simplement pas prévu par la législation allemande », dans l'article Le cannibale de Rotenburg devant la justice, Le Figaro, 4 décembre 2003.
  30. Le quotidien gabonais l'union n°3687 du 26 avril 1988
  31. « Le "cannibale de Rotenbourg" condamné à perpétuité », dans Le Monde web, 9 mai 2006
  32. Affaire Robert Pickton - Les aveux d'un tueur en série sur http://www.radio-canada.ca, Société Radio-Canada, 6 août 2010
  33. Article du Nouvel Obs du 24 juin 2010, consulté le 22 janvier 2011.
  34. Alfred William Brian Simpson, Cannibalism and the Common Law: The Story of the Tragic Last Voyage of the Mignonette and the Strange Legal Proceedings to Which It Gave Rise, University of Chicago Press, 1984

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  • anthropophagie — [ ɑ̃trɔpɔfaʒi ] n. f. • XVIe; gr. anthrôpophagia ♦ Pratique des anthropophages. ⇒ cannibalisme. ● anthropophagie nom féminin Comportement qui consiste à ingérer de la chair humaine. ● anthropophagie (synonymes) nom féminin Comportement qui… …   Encyclopédie Universelle

  • Anthropophagie — (griech., »Menschenfresserei«, auch Kannibalismus, abgeleitet von dem menschenfressenden Stamm der Kariben, span. Canibals), die nicht bloß bei niedersten Stämmen vorkommende Sitte, Menschenfleisch zu genießen, für die Feinschmeckerei, religiöse… …   Meyers Großes Konversations-Lexikon

  • Anthropophagie — Anthropophagie,die:⇨Kannibalismus(1) …   Das Wörterbuch der Synonyme

  • Anthropophagie — Leonhard Kern: Menschenfresserin, Elfenbeinskulptur, um 1650 Angebliche Verbreitung des Kannibalismus im späten 19. Ja …   Deutsch Wikipedia

  • anthropophagie — (an tro po fa jie) s. f. Habitude de manger de la chair humaine. •   Si c est un crime détestable et une cruelle anthropophagie (car ce sont les termes ordinaires dont se servent les calvinistes) que de manger le corps de N. S., BOSSUET Euch. III …   Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré

  • ANTHROPOPHAGIE — s. f. Habitude de manger de la chair humaine …   Dictionnaire de l'Academie Francaise, 7eme edition (1835)

  • ANTHROPOPHAGIE — n. f. Habitude de manger de la chair humaine …   Dictionnaire de l'Academie Francaise, 8eme edition (1935)

  • Anthropophagie — Menschenfresserei; Kannibalismus * * * ◆ An|thro|po|pha|gie 〈f. 19; unz.〉 = Kannibalismus (1) ◆ Die Buchstabenfolge an|thr... kann in Fremdwörtern auch anth|r... getrennt werden …   Universal-Lexikon

  • Anthropophagie — ◆ An|thro|po|pha|gie 〈f.; Gen.: ; Pl.: unz.; bei Naturvölkern〉 = Kannibalismus [Etym.: <Anthropo… + …phagie]   ◆ Die Buchstabenfolge an|thr… kann auch anth|r… getrennt werden …   Lexikalische Deutsches Wörterbuch

  • Anthropophagie — An|thro|po|pha|gie die; <zu ↑...phagie> svw. ↑Kannibalismus …   Das große Fremdwörterbuch

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