Mesure compensatoire

Mesure compensatoire
Page d'aide sur l'homonymie Ne doit pas être confondu avec mesure conservatoire.

Une mesure compensatoire vise à compenser ou contrebalancer les effets négatifs pour l'environnement, ou créateurs de nuisances pour l'homme, d'un projet (urbanisme, infrastructures, zone d'activité commerciale ou Industrie, etc.), quand on a échoué à supprimer ou atténuer les impacts négatifs de ce projet.

La "Nederlands eerste internetbos" ou première forêt-Internet néerlandaise est un exemple de compensation-carbone ; Ce boisement de bouleaux (essence à croissance rapide) a été planté le 22 avril 2008 près d'Apeldoorn aux pays bas à l'initiative de Cleanbit, une entreprise visant à compenser les émissions de dioxyde de carbone induites par les serveurs de l'Internet. Ce boisement encore symbolique, illustre le principe de la compensation carbone appliqué aux serveurs de l'Internet

Ces compensations peuvent par exemple être :

Elles doivent théoriquement rétablir une situation d'une qualité globale au moins proche, si ce n'est meilleure, de la situation antérieure, ou un état de l'environnement jugé fonctionnellement normal ou idéal (La directive cadre sur l'eau a par exemple comme objectif le "bon état écologique" des milieux aquatiques.

Depuis les années 1980, en Amérique du Nord surtout, une approche libérale et économique de la compensation a donné lieu à de divers programmes de compensation et à l'apparition d'un "marché des compensations"[2] et à une constellation de « banques de compensation »[3]

De telles mesures sont aussi évoquées pour la compensation d'impacts socio-économiques ou sanitaires (par exemple pour des projets de grands barrages nécessitant des déplacements de population).

Sommaire

Le principe de l'« offre de compensation » ou des « banques de compensation »

C'est une notion d'application récente, et parfois controversée ; Des ONG américaines dont Defenders of Wildlife[4] ont ainsi en 2008 alerté sur le risque que le nouveau système "recovery crediting system"[5] pourrait « saper les actions du gouvernement fédéral pour protéger les espèces en péril » en transférant des responsabilités complexes et importantes nécessitant un travail dans la longue durée à des propriétaires privés, sans garanties possibles de pérennité. Ce système visait à autoriser des aménagements détruisant la nature sur des terres fédérales en les « compensant » sur du foncier privé, alors que selon la Loi en vigueur sur les espèces menacées et d'autres lois fédérales, les organismes fédéraux de gestion des terres fédérales ont une obligation spéciale de conservqtion de populations viables de plantes et d'animaux squvqges sur le domaine public de l'Etat, dont d'espèces menacées et en danger[6].

Le principe de l'« offre de compensation » est que face au constat que les aménageurs peinent à acquérir, restaurer et gérer des espaces naturels en guise de compensation, surtout sur le long terme, le principe de l’offre de compensation est d'anticiper la demande en créant un stock permanent de compensation (ou de projets de compensation) que ces aménageurs pourront acheter, parfois sous forme d’unité de biodiversité au lieu de s’occuper eux-mêmes de les mettre en œuvre.

La compensation reste néanmoins le dernier moyen d'intervenir, une fois que l’on a - dans la mesure du possible - évité et réduit les impacts d’un projet sur les espèces et leurs habitats (ce qui est en France obligatoire, depuis 1976, mais uniquement pour les grands projets, projets dépassant certains seuils de coût, ou en cas de présence d’espèces protégées).
L'approche est globale et plutôt quantitative, présupposant qu’un « impact positif net », ou autrement dit une « absence de perte nette » sont ainsi possible, où un impact négatif résiduel et inévitable serait compensé par des actions de conservation ou de restauration de milieux naturels ailleurs. Elle peut rappeler le principe de l'équivalence en substance, utilisé dans les années 1990/2000 en Amérique du Nord pour évaluer la dangerosité des OGM ou de certains additifs alimentaires.

Un aménageur peut (volontairement, et/ou par respect de la loi) compenser ses impacts environnementaux ; La compensation volontaire est encouragée par le « livre blanc » anglais (2011) sur la protection de l’environnement [7]. Le Royaume-Uni y propose de tester expérimentalement de 2012 à 2014 un « programme de compensation », avec « Natural England » (qui fixera des orientations par zones pilotes). Dans ce cadre, la «Compensation de la biodiversité» désigne des « activités de conservation conçue pour offrir, de manière mesurable, des bénéfices à la biodiversité en compensation de pertes. La production de biens prend en compte la biodiversité dès la conception, mais reste susceptible d'entraîner une certaine perte de biodiversité. Une façon de contrebalancer cette perte est de la compenser : Pour cela, l’aménageur garantit une création ou un agrandissement d’Habitat naturel ailleurs »[7].).

Histoire

Les statistiques américaines disponibles montrent un grand nombre de banques de compensation ou de mitigation, dont certaines ont fermé, qui rendent une analyse globale de leurs performances difficile[8]

Les systèmes testés dans quelques pays sont généralement inspirés d’un des mécanismes financiers de « mitigation » testés depuis les années 1980/90 aux États-Unis [8](et moindrement en Allemagne ou en Australie ou d'autres pays)[2].
Des actions de conservation (de zones humides surtout) puis des "unités de biodiversité" peuvent ainsi être achetées par des maîtres d'ouvrage en guise de mesure compensatoires (obligatoire ou volontaires).
Concernant la compensation d'impacts sur des espèces, en 2004 il existait aux États-Unis au moins 47 « banques de compensation » permettant de financer, en compensation d'une action de destruction de la nature, des programmes de protection d'espèces protégées (« endangered-species conservation banks »), mais dont l'évaluation était difficile en raison du manque de base de donnée centralisée[9].

Les unités de biodiversité doivent notamment tenir compte de la patrimonialité, de la rareté et du degré de menace des espèces et habitats du site qui sera dégradé[10],[11]. Dans ce pays, une approche spécifique de « mitigation » a été développée pour les milieux aquatiques et les zones humides qui par exception relèvent aux États-Unis du ministère de la défense[12] et en particulier de l'U.S. Army Corps of Engineers qui dispose d'une base de donnée, publique, sur sa banque de compensation[13],[14].
Les carrières sont les activités les plus impactantes sur les zones humides américaines. Un marché de services écosystémiques ou de « crédits » de biodiversité dit « Wetland Mitigation Banking » a ainsi été créé aux États-Unis (valeur : 1,8 milliards de USD en 2010), où les carriers sont à la fois acheteurs et vendeurs.

Effets pervers

Plusieurs effets pervers ou collatéraux sont possibles :

  • risque de déresponsabilisation partielle, quand il y a déconnexion spatiotemporelle de la compensation de l’impact réel ; En effet, dans ce système l’achat d’une unité de biodiversité vaut acquittement d’obligations de compensation, alors qu’en réalité, souvent les fonctions écosystémiques du milieu dégradé ne seront pas compensé localement ou typologiquement.
  • les acteurs les plus riches peuvent se permettre de détruire plus de milieux naturels, et des milieux plus précieux, tout en évitant d’avoir à proposer une « juste compensation » c'est-à-dire des mesures compensant les services écosystémiques détruits ou dégradés par l’aménagement, là où ils l’ont été ou le seront.
  • Pour limiter ces effets, en France, la CDC qui va expérimenter ce type de compensation en 2011, s'est dotée d’un groupe d’experts compétents en écologie.
  • Un risque existe de laisser croire que tout est compensable, or certaines pertes (un taxon, une espèce, une diversité génétique disparues par ex) ne sont pas compensables.
    Toutes les fonctions écosystémiques d’un chêne de 900 ans ne peuvent être remplacées par celles de 10 petits chênes de 1 ans, et encore moins par 900 chênes de 1 ans (Dans un système à forte naturalité, 1 million de glands donneront un seul chêne dans 500 ans, sans tenir compte des risques climatiques nouveaux. Sur 4000 oeufs de grenouilles rousses, seuls quelques-uns survivront après 1 à 5 ans).

Une « juste compensation » ne peut être évaluée qu’avec des écologues compétents, dans la transparence, en connaissant l’histoire du site et son écopotentialité réelle, en connaissant les effets futurs des polluants dispersés par l’exploitation, et avec une évaluation et d'éventuelles mesures correctrices, ce qui est rarement le cas.

Typologie des impacts à compenser

  • Les impacts directs et locaux : La plupart des lois imposent aux études d'impacts de ne proposer des mesures de compensation que pour les impacts certains et locaux (ex : un aéroport n'envisage pas de compenser ses impacts sur les pays d'arrivée ou survolés) et de court et moyen terme, alors qu'il est démontré par exemple dans le cadre des routes, que les impacts majeurs sont souvent indirects et différés dans l'espace et dans le temps (via les remembrements par exemple)
  • Les impacts non identifié par l'étude préalable, et n'apparaissant que plus tard : Les procédures et législations ne permettent généralement pas de les prendre en compte.
  • Les impacts de destructions faites dans le cadre de dérogation à la destruction d’espèces protégées. Ces mesures compensatoires sont en France examinées ou demandées par le CNPN (Commission Nationale de Protection de la Nature) et les CSRPN dans les régions. Mais de nombreuses destruction échappent sans doute aux observateurs.

Suivi, évaluation rétrospective ou correctrice

En théorie, de telles mesures semblent parfois justifiées ; quand il est suspecté ou démontré que des mesures compensatoires ne fonctionnent pas. Le dysfonctionnement peut provenir de raisons externes, ou d'effets indirects de l'infrastructure ou de la construction. il peut s'agir d'un défaut de conception de l'étude, ou encore d'une sous-évaluation initiale des impacts indirects ou des besoins de compensation fonctionnelle.

Des dispositifs d'évaluation ou de gestion restauratoire a posteriori sont parfois prévus (via des contrats avec un Conservatoire des sites par exemple). Ils posent à long terme des problèmes de financement ou de suivi d'éventuelles mesures « rétrocorrectrices ».

Des directives européennes imposent de meilleures études d'incidences des grands projets, des compensatoires adaptées aux impacts sur les zones Natura 2000 et la loi LOTI impose en France la mise en place d'observatoire des impacts autoroutiers pour les grands projets (mais ils ont rarement été mis en place). D'autres sources permettent éventuellement de constater que les compensations ont été inadaptées ou insuffisantes.

Outre que la part entre effets externes et effets différés est souvent difficile à établir, produire une mesure rétrocorrectrice semble souvent difficile.
Par exemple, L'étude d'impact autoroutière débouche sur des mesures compensatoires, et un budget alloué. Après autorisation, il y a construction de la route et exécution de la mesure compensatoire. Puis le Maître d'ouvrage (groupement) qui n'a alors plus de raison d'être disparaît au profit d'un gestionnaire ou concessionnaire. En admettant qu'on produise une preuve que la régression d'espèces ou d'habitats soit bien un effet de l'autoroute (et non pas d'autres facteurs comme les pesticides ou une zoonose). L'autorisation délivrée par l'État ne peut pas être retirée (ou « renégociée »), le groupement constructeur a disparu, et l'argent supplémentaire est difficile à trouver (le péage quand il existe ?).


Recherche

De nombreux programmes de recherche dans le monde portent sur les mesures compensatoire, leur évaluation, leur acceptabilité sociale, etc. En France un cadre général est le PREDIT (Programme de recherche et d'innovation dans les transports terrestres)[15], et en son sein des organes de recherche tels que ITECOP[16] sur « l’impact des infrastructures sur les paysages et les écosystèmes » ou le programme PRIMEQUAL[17]

Controverse

Le principe de la compensation, tel qu'il est généralement mis en œuvre est jugé éthiquement discutable par certains ;
Des débats éthiques concernent notamment

  • le droit à détruire des espèces ou des milieux naturels extraordinaire,
  • le caractère remplaçable ou compensable des espèces, habitats ou fonctions écosystémiques liés à des milieux.
  • une tendance à la marchandisation voire à la bancarisation[18] du vivant[19] et des services écosystémiques[19].
  • les méthodes d'équivalence pour prévenir, compenser ou réparer des dommages environnementaux ; elles reposent sur des présupposés qui restent à confirmer, notamment dans la durée. Ces mesures semblent parfois avoir remplacé d'autres stratégies telles qu'éviter, ou réduire les impacts en questions.

La notion de « juste compensation » reste quantitativement et qualitativement difficile à évaluer, avec, notamment, des controverses sur les points suivant ;

Tout impact peut-il être compensé ?

Peut-on par exemple compenser la destruction en forêt primaire de parcelles où 50 % des arbres ont plus de 500 ou 600 ans, où de nombreuses espèces ne sont pas même identifiée et dont la complexité écologique ne peut être estimée ? ...en repoussant toujours plus loin des populations autochtones et toujours plus fragmentées et relictuelles. Certains écosystèmes semblent absolument uniques ou particulièrement anciens. Peut-on compenser leur destruction ? Comment prendre en compte les effets cumulés et synergiques ? Peut-on, doit-on et veut on rétroactivement compensé des impacts imprévus au moment du projet (Dans la plupart des pays, la loi n'y oblige pas).

Compensation fonctionnelle (ou « juste compensation »)

Il parait de plus en plus logique de tenter de retrouver ou entretenir les fonctions et services initialement (ou normalement) rendus par l'Environnement et la Biodiversité lorsque ceux-ci sont affectés par un projet. Ceci implique d'aussi compenser les atteintes à la « biodiversité ordinaire », ce qui est souvent impossible en termes de surfaces (enherber une terrasse, et végétaliser des murs ne remplace pas une prairie détruite par l'urbanisation. Restaurer une prairie ailleurs ne permet pas de remplacer toutes les fonctions de la première, et peut causer la suppression d'un autre milieux où s'épanouissaient d'autres espèces, avec des conséquences parfois difficiles à évaluer).

Prenons l'exemple d'un projet nécessitant la destruction 1 ha de forêt. Dans les années 70, on reboisait généralement 1 ha en compensation de l'hectare défriché, mais avec de jeunes plants incapables de rapidement assurer aucune des fonctions d'un hectare de forêt mature. Peu à peu on a cherché à augmenter la surface en reboisant 2 voire 4 ha, croyant améliorer rapidement la capacité en termes de puits de carbone, mais en réalité toujours sans remplacer 1 ha de forêt (pour l'offre en nidification, en nourriture ou en bois mort nécessaire aux espèces forestières par exemple) et nombre des fonctions de la forêt qu'on a éventuellement fragilisé en la fragmentant.

- Une solution est la compensation en biomasse. ex : une tonne d'arbre doit être remplacé par une tonne d'arbre (des mêmes espèces ou d'espèces locales ou d'essences pionnières..), mais cela ne dit rien de l’état du sol, de l’eau, et de la faune et de la flore herbacé qui en dépendent.
- Une autre solution, proche de la précédente, est de compenser en surface terrière
Mais il faudrait en réalité évaluer les fonctions présentes et à venir de la parcelle détruite, et reconstituer, si cela est possible, ces fonctions. Ce type d'approche compensatoire n'est encore que très rarement appliquée, car elle montre le vrai coût des impacts, bien plus élevés que ce qu'estiment généralement les aménageurs.

En France, les nouvelles missions des SAFER leurs permettent d'intervenir pour faciliter des échanges ou mesures foncières nécessaires à certaines mesures compensatoires, dont dans le cadre de boisements compensateurs, de défragmentation écologique des paysages et de la Trame verte et bleue.
De même des opérateurs financiers de la biodiversité tels que la CDC Biodiversité peuvent intervenir.

Portée zonale des mesures compensatoires

Il est courant que ces mesures ne soient proposés que dans une bande d'étude considérée par l'étude d'impact (ex « bande des 300m » d'un projet routier). Parfois, comme pour l'Autoroute A16 en France, c'est le principe de co-visibilité qui prévaut (principe insipiré de celui de visibilité intégré par la loi pour la protection des périmètres de monuments historiques. Le 1% paysage visant à compenser une partie de l'impact de cette autoroute ne pouvait financer que des projets visibles de l'autoroute ou d'où l'on voyait l'autoroute. De telles mesures sont éloignées de l'idée de « compensation fonctionnelle » et de remboursement de la dette écologique.

Localisation fonctionnelle adéquates de la compensation

L'efficience et la justesse de la compensation écopaysagère dépend presque toujours de nécessités biogéographiques strictes. Or les lois imposent souvent d'étudier et compenser les impacts dans un zonage réduit (faisceau de projets, zonages d'études, bande des 300 mètres, « zone de covisibilité », etc.), très inférieur aux zones biogéographiques ou hydrographiques réellement impactées par le projet. Les lois nationales ne permettent en outre pas la préemption hors du zonage d'étude et a fortiori dans d'autres pays pour permettre une compensation fonctionnelle réelle de certains impacts. Les mesures compensatoires se négocient alors - au mieux - par des négociations avec les propriétaires fonciers et les gestionnaires conclues par des contrats (sans garanties juridiques de pérennité la plupart du temps). Finalement on compense souvent mal et ailleurs un impact local. (ex : une forêt linéaire est coupée par une route. L'auteur du projet propose de reboiser le double de la surface coupée, mais les propriétaires locaux refusent de vendre leurs terrains. Le boisement se fera, mais à 60 km de là, sur une zone humide (ce qui est un cas hautement improbable car tout aménagement de zones humides est soumis à autorisation, la France est engagée par la directive 2000/60/CE à protéger les zones humides, tout changement d'occupation des sols est soumis à autorisation...). Non seulement, la forêt linéaire n'a retrouvé ni son continuum écologique, ni même son équivalent-surface au sol, mais on aura dégradé une zone humide. De manière métaphorique, on se trouve en quelque sorte dans une situation où l'on prétendrait réparer le tort d'avoir coupé une main à quelqu'un en en greffant deux sur le bras de quelqu'un d'autre.

Seuil nécessitant des mesures compensatoires

Parfois, c'est uniquement la nature d'une opération ou de l'opérateur(Cf. nomenclature des installations classées pour l'Environnement (ICPE) en France), ou la zone géographique touchée (ou plus précisément son statut juridique) qui motive l'obligation de compenser, et non des raisons écosystémiques ou le niveau de nuisance pour le voisinage. Parfois c'est seulement (comme en France pour le secteur routier) la hauteur du coût de l'opération qui rend l'étude d'impact et les mesures compensatoires obligatoires. Ces questions font l'objet d'études, par exemple en France par le programme INTERMOPES[20], et via des réflexions conduites dans le cadre du Grenelle de l'environnement et sous l'égide de l’autorité environnementale (CGEDD : Conseil Général de l’Environnement et du Développement Durable)

Dette écologique

Quand un environnement a été dégradé bien avant qu'on y conçoive un projet. La compensation doit elle permettre de retrouver la situation juste antérieure aux impacts en question, ou cherche-t-on à restaurer l'environnement tel qu'il serait en l'absence d'impacts significatifs de l'Homme sur l'Environnement. Les études d'impacts se basent sur l'existant, et non sur le potentiel. En additionnant leur absence de prise en compte du potentiel, elles contribuent à empêcher la reconstruction des réseaux écologiques, ne permettant au mieux que de conserver une situation écopaysagère médiocre, là où elle l'était devenu.

Hauteur de la mesure

Peut-on, doit-on ou veux-t-on reconstituer l'écosystème ou le paysage tel qu'il était au moment du projet, au moment de sa mise en œuvre, ou tel qu'il "devrait être", ce qui demande de constituer un "état idéal" qui sera la cible visée par les compensations.

Durée des études d’impacts

Pour les grands projets, la loi fixe généralement une durée minimale d'étude de l'état des lieux correspondant à une saison de végétation (Printemps été automne en zone tempérée) et un temps indéterminé pour l'évaluation des impacts et des compensations nécessaires ou utiles. Quant aux Pays-Bas une étude dure 5 à 8 ans pour positionner un écoduc, elle ne dure parfois que quelques mois dans d'autres pays européens.

Financement des mesures compensatoires

On admet dans une approche de type développement soutenable, que la compensation devrait être proportionnelle aux impacts, systématique et financée par des écotaxes ou par ceux qui conçoivent des projets générant des impacts négatifs, ou qui en bénéficient. Mais comment calculer la hauteur de ces mesures ? ...alors que la complexité de la biodiversité et des chaines d'impacts (synergies, potentialisation..) ne peut totalement être appréhendée avant la réalisation du projet et parfois après plusieurs décennies.

La compensation porte souvent sur la création de milieux de substitution ou de compensation, voire d'infrastructures (de type écoducs). Lorsque leur financement est admis, il y a également débat sur le financement de la gestion des milieux et habitats naturels restaurés ou protégés par ces mesures. Faut-il et si oui durant combien de temps le financer avec le même dispositif de compensation ? Le budget nécessaire à l'évaluation de l'efficacité des mesures et d'éventuelles mesures correctives le cas échéant doit il être prévu initialement, ou faire l'objet d'une somme réservée ?

Il arrive qu'un projet modeste et peu coûteux puisse en raison de son positionnement biogéographique générer des impacts environnementaux majeurs qu'on ne sait pas techniquement ou financièrement compenser. Or les études d'impacts et les mesures compensatoires ne sont généralement obligatoire qu'au-dessus d'un certain seuil de coût de travaux (c'est le cas en France).
De même la dégradation d'un site banal et dépourvu d'intérêt patrimonial direct peut parfois induire des impacts majeurs en aval ou en amont sur une zone d'importance écologique majeure. Elle justifierait des couts de réparation exorbitants ou hors de proportion avec les bénéfices du projet. Faut-il dans ce cas interdire le projet ? Ou faut-il l'autoriser pour des raisons immédiates et apparentes d'intérêt public en acceptant de ne compenser qu'une faible partie des impacts.

Dans certains pays comme aux États-Unis, il existe depuis les années 1980 des « banques de compensation » qui reçoivent de l'argent en compensation de certaines construction pour restaurer ou protéger des milieux naturels ailleurs ou à proximité. En France la CDC a mis en place en 2008, dans le cadre du Grenelle de l'environnement, un « fond de compensation pour la biodiversité »[21]. La plupart des États américains soutiennent des politiques à leur échelle, ciblant souvent prioritairement les zones humides dont par exemple en Californie[22].

En France

La loi sur la protection de la nature de juillet 76 a intégré le principe de compensation après étude des impacts. Elle prévoit que les maîtres d'ouvrage doivent prendre des mesures pour supprimer, réduire ou compenser les impacts négatifs d'un projet sur l'environnement.

La directive européenne environnementale de 2004 a établi un cadre de responsabilité environnementale fondé sur le principe "pollueur-payeur".

Le Grenelle de l'environnement et la loi Grenelle II ont été suivis d'un 1er appel à projet[23] sur l’« offre de compensation » en faveur de la biodiversité[24], lancé par le ministère de l’Écologie et visant à sélectionner des opérateurs sur 4 nouvelles zones en France. Il est ouvert à des entités publiques ou privées (dossiers à renvoyer avant le 26 septembre 2011. Sélection prévue fin octobre 2011) [25].


Il doit soutenir 1 à 4 opérations (représentatives d’une diversité d’habitats et d’espèces) sont attendues dont dans 3 zones pré-identifiées :

  • Alsace (pour sauver le Grand hamster, dont les populations se sont effondrées),
  • Nord-Pas-de-Calais (restaurer, protéger et gérer les coteaux calcaires qui abritent environ 35 % de la biodiversité) ;
  • Poitou-Charentes où la fragmentation écopaysagère et la régression des zones humides ainsi que le mitage des paysages menacent de nombreuses espèces, d’oiseaux notamment (dont l'outarde canepetière qui fait l’objet d’actions de protection à échelle internationale),
  • d’autres propositions sont possibles.

Les opérateurs retenus s’occuperont de la restauration et de la gestion de la biodiversité en étant assistés par un comité de pilotage ad hoc qui suivra l'expérimentation.

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Bauer, M., J. Fox, and M. J. Bean. 2004. Landowners bank on conservation. Environmental Law Reporter 34:10717–10722.
  • Bayon, R. 2002. A bull market in. . .making money in environmental derivatives. The Miliken Institute Review, First Quarter: 30–39.
  • Nathaniel Carroll et al., eds. Conservation and Biodiversity Banking: A Guide to Setting up and Running Biodiversity Credit Trading Systems (London: Earthscan Publications Ltd, 2007).
  • Bean, M. J., and L. E. Dwyer. 2000. Mitigation banking as an endangered species conservation tool. Environmental Law Reporter 7:10537–10556.
  • ten Kate et al. Biodiversity Offsets: Views, Experience, and the Business Case, Gland, Switzerland and Cambridge, UK:IUCN and London, UK: Insight Investment, 2004, available at http://cmsdata.iucn. org/downloads/bdoffsets.pdf
  • Jessica Fox and Anamaria Nino-Murcia, “Status of Species Conservation Banking in the United States,” Conservation Biology 19:4 (2005): 996-1007.
  • Glossaire anglophone : [bbop.forest-trends.org/guidelines/glossary.pdf Business and Biodiversity Offsets Programme (BBOP)], Glossary, 2009.

Liens externes

Notes et références

  1. Ecosystem Marketplace, 2009, via Species Banking
  2. a et b State of Biodiversity Markets Offset and Compensation Programs Worldwide
  3. ELI (Environmental Law Institute), asp?ID=11273 Design of US Habitat Banking System to Support the Conservation of Wildlife Habitat and At-Risk Species, Washington, D.C.: Environmental Law Institute, 2008
  4. ONG présidée par Clark Rappaport, l' ancien directeur de l'US Fish and Wildlife Service sous l'administration Clinton.
  5. Recovery Credit System (RSC), et lignes directrices officielles
  6. Defenders of Wildlife, Communiqué intitulé : New "recovery crediting system" could undermine federal actions to safeguard imperiled species, daté du 1er aout 2008
  7. a et b The Natural Choice: securing the value of nature ; Presented to Parliament by the Secretary of State for Environment, Food and Rural Affairs by Command of Her Majesty June 2011, ISBN 978-0-10-180822-4, , 77 pages
  8. a et b ELI (Environmental Law Institute), 2005 Status Report on Compensatory Mitigation in the United States, Washington, D.C.: Environmental Law Institute, April, 2006, elistore.org/reports_detail.asp?ID=11137 Source
  9. DAVID S. WILCOVE, JOON LEE  ; en ligne :2004-05-10 ; Using Economic and Regulatory Incentives to Restore Endangered Species: Lessons Learned from Three New Programs ; Issue Conservation Biology Conservation Biology Volume 18, Issue 3, pages 639–645, June 2004 ; DOI: 10.1111/j.1523-1739.2004.00250.x (résumé ; en anglais ou espagnol)
  10. Bonnie, R. 1999. Endangered species mitigation banking: promoting recovery through habitat conservation planning under the Endangered Species Act. The Science of the Total Environment 240:11–19.
  11. Jessica Fox and Anamaria Nino-Murcia, “Status of Species Conservation Banking in the United States,” Conservation Biology 19:4 (2005): 996-1007.
  12. Department of defense, Department of the Army, Corps of Engineers 33 CFR Parts 325 and 332 EPA 40 CFR Part 230 ; EPA–HQ–OW–2006–0020; FRL–8545–4 ; RIN 0710–AA55 Compensatory Mitigation for Losses of Aquatic Resources; 19594 Federal Register / Vol. 73, No. 70 / Thursday, April 10, 2008 / Rules and Regulations
  13. ELI’s database of wetland mitigation banks], in-lieu-fee mitigation programs, and umbrella banking agreements is available online, along with copies of many of these programs’ authorizing instruments (Lien pour accès)
  14. Steve Martin, Bob Brumbaugh, Paul Scodari and David Olson, Compensatory Mitigation Practices in the U.S. Army Corps of Engineers : U.S. Army Corps of Engineers Working Paper, mars 2006
  15. PREDIT, avec en particulier le Groupe Opérationnel 1 : Energie et environnement
  16. le programme de recherche ITTECOP sur « l’impact des infrastructures sur les paysages et les écosystèmes »
  17. PRIMEQUAL (programme de recherche interorganisme pour une meilleure qualité de l'air à l'échelle locale) a été lancé en 1995 puis inclus dans le PREDIT.
  18. USFWS (U.S. Fish and Wildlife Service). 2003. conservation-banking.pdf Guidance for the establishment, use and operation of conservation banks. USFWS, Washington, D.C. (accessed November 2004).
  19. a et b Heal, G. 2000. Nature and the marketplace: capturing the value of ecosystem services. Island Press, Washington, D.C.
  20. INTERMOPES (Infrastructures de transport terrestre rail et route et modifications induites sur les paysages, les écosystèmes et la société : analyse, proposition de méthodes et outils opérationnels)
  21. Article du Monde, du 14.05.09, intitulé « Le modèle Crau »
  22. Wheeler, D. P., and J. M. Strock. 1995. Official policy on conservation banks. California Resources Agency, Sacramento. (Consulté juin 2011).
  23. Ministère de l’Écologie, Appel à projet ; « offre de compensation », juin 2011
  24. Batiactu, Offre de compensation : 1er appel à projet en faveur de la biodiversité, 22/06/2011
  25. Florence Roussel, Lancement d'un appel à projet sur la compensation des atteintes à la biodiversité, filet d'information ; Actu environnement ; 21 juin 2011

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