Antoine-Dominique Bordes

Antoine-Dominique Bordes

Armement Bordes

L'armement Bordes (ou armement A-D Bordes ou Bordes et Fils) fut une compagnie maritime française de 1868 à 1935 principalement nantaise et dunkerquoise qui se retrouva au premier rang mondial du transport maritime à voile dans le premier quart du XXe siècle[1].

Sommaire

Historique

Les débuts

En 1835, Antoine-Dominique Bordes qui a 18 ans part travailler en Amérique du Sud comme agent maritime. Il a 30 ans en 1847 quand il s'associe au capitaine Le Quellec pour commercer entre le Chili et la France. En 1849 les deux associés créent une compagnie de voiliers joignant Bordeaux (où la compagnie originelle est d'abord installée) et Valparaiso. Cela représente 170 jours de mer à l'époque. La nouvelle compagnie dispose alors de dix navires : un voilier en fer Blanche et Louise de 800 tonnes et 9 bâtiments en bois.

Le capitaine Le Quellec décède en 1869 et Antoine-Dominique Bordes devient propriétaire de la flotte de voiliers après s'être rendu à Bordeaux pour racheter la part du fils Le Quellec. La compagnie de navigation Bordes est créée. Jusqu'à la mort du fondateur, la compagnie s'établit rue du conservatoire à Paris et organise son trafic à partir des ports de Nantes et de Dunkerque. La compagnie augmente considérablement sa flotte et étend ses activités. Quatorze clippers trois-mâts en fer sont commandés dès 1869 aux chantiers Ecossais de la Clyde (des trois-mâts barques et trois-mâts carrés de 1200 tonnes), ce qui porte la flotte à 24 unités. En 1898 la compagnie se classe déjà comme la septième flotte française avec 37 navires pour 79 MTx. A partir des années mille huit cent soixante dix, les navires de la compagnie transportent également du nitrate chilien vers sur Liverpool et Glasgow.

L'apogée

La compagnie Bordes profite en 1880 d'une crise grave du fret maritime pour racheter 11 voiliers aux armements en difficulté si bien qu'à la mort du fondateur, en 1881, la flotte comporte 41 unités. Au décès de Antoine-Dominique Bordes, ses fils Adolphe, Antonin et Alexandre Bordes continuent la société.

Poursuivant la politique expansionniste du fondateur, les frères Bordes commandent de nouveaux quatre-mâts, plus performants et plus rentables que leurs aînés les trois-mâts. Quatre de ces grands clippers sont construits en Angleterre en 1888 et un cinq-mâts, le premier battant pavillon français, est lancé deux ans plus tard, le 2 septembre 1890, sous le nom de France. Ce navire de 133 mètres de long pouvait emporter 6 000 tonnes de marchandises. À l’époque il fut considéré comme le plus grand au monde. Il n'effectua cependant que quatorze voyages, dont la moitié au départ de Dunkerque, sombrant en 1901 au large des côtes de l'Argentine[2]. Néanmoins, en 1905, l'armement Bordes était placé premier mondial des compagnies à voile avec 33 voiliers. Puis la flotte augmente encore et passe à 35 grands voiliers cap-horniers, dont 17 trois-mâts[3]. La majorité étaient armés au salpêtre. Ils allaient au Chili, important du charbon qu'ils chargeaient sur les côtes anglaises, puis revenaient en Europe avec le nitrate. La flotte continue de grandir.

Le déclin après la première guerre mondiale

Quand commence la Première Guerre mondiale, l'armement Bordes est constitué de 46 navires, 60 capitaines, 170 officiers et 1400 matelots et maîtres. Il était le spécialiste du transport de nitrate entre le Chili et la France. La compagnie importait d'ailleurs la moitié du nitrate européen. Pendant le conflit, ses navires effectuèrent ainsi cent vingt deux voyages pour approvisionner les ports français, ce qui fut primordial pour l'effort de guerre. En effet, le nitrate était, à cette époque, un constituant des poudres pour les explosifs. Ces rotations auront donc une importance capitale pour le sort des armes. À noter que la compagnie avait été réquisitionnée par l'État début 1917, ce qui avait occasionné un changement de nom, l'armement Bordes devenant la Compagnie d'armement et d'importation des nitrates de soude.

Cependant, les grands navires à voiles, lents et peu manœuvrants, seront des cibles faciles pour les sous-marins allemands. Bien que les voiliers furent écartés du trafic européen à partir de l'été 1917, 23 navires[4] seront coulés durant le conflit.

Après la guerre, l'augmentation des frais généraux due à l'enchérissement des assurances, des salaires et du travail (bordées de 8 heures..) sonne partout le glas du transport maritime à voile supplantée par la marine à vapeur. La compagnie Bordes finit par abandonner ce type de transport en 1925 et son activité périclite. La société est dissoute en 1935.

L'épopée des voiliers Bordes

À son apogée, l'armement Bordes envoyaient ses clippers sillonner les routes maritimes entre le Chili et l'Europe avec les meilleurs équipages. En dehors du facteur éolien, ces traversées étaient fonction de la science maritime et de la ténacité et de l'énergie des capitaines et des équipages. Au commandement des meilleurs voiliers, ils établirent à maintes reprises de véritables records pour l'époque [5] :

  • 67 jours de Port Talbot (Pays de Galles) à Iquique (Chili) avec l'Atlantique.
  • 69 jours de Nantes à Taltal (Chili) avec le Caroline.
  • 66 jours de Portland (Angleterre) à Iquique avec le Loire (quatre-mâts barque en acier construit par les Ateliers et chantiers de la Loire à Nantes en 1897. Démoli en 1924).
  • 66 jours de Shields (Angleterre) à Valparaiso avec le Madeleine.
  • 68 jours de Bishop Rock à Valparaiso avec le Dunkerque.
  • 69 jours d'Iquique au cap Lizard (Angleterre) avec le Madeleine.
  • 97 jours du Havre à la Nouvelle-Calédonie (idem pour le retour) avec le Seine.
  • 70 jours de Douvres à Valparaiso avec le A.-D. Bordes.

L'armement Bordes compta bien d'autres voiliers puisque de 1848 à 1925, la compagnie Le Quellec-Bordes aura au total employé 127 navires :

  • le Cambronne construit pour le compte des Voiliers Nantais et vendu après 12 ans de navigation à l'armement Bordes qui l'utilisa entre l'Europe et le Chili. Il sera torpillé au large d'Ouessant en rentrant de Rio de Janeiro.
  • également : le Wulfran-Puget, la Valentine, l’Antoinette, le trois-mâts barque Jeanne d'Arc (ex-Belen), le Sainte Anne, l’Abeille n°10 et parmi les plus beaux, l'Antonin, le Jacqueline, le Persévérance, le fabuleux France et bien d'autres...(Cf. liens externes, infra)
  • aucun de ces voiliers ne survécut à la crise de la marine à voile et à la disparition de la maison mère. À Dunkerque, le Valparaiso, quatre-mâts barque construit sur place en 1902, fut le denier voilier de l'armement Bordes à disparaître en 1926, raison pour laquelle, plus d'un demi-siècle plus tard, la ville racheta puis sauva un prestigieux trois-mâts, le Duchesse Anne qui, une fois restauré et mis à quai dans le port dunkerquois comme bateau musée, est censé rappeler l'épopée des voiliers Bordes en ces lieux bien qu'il n'en fit pas partie.

Postérité des voiliers Bordes

  • Une maquette de voilier, sur laquelle figure mention de l'armement nantais Bordes, sert d'ex-voto lors des pardons. Elle est conservée dans la chapelle Saint-Michel, à Plogoff.
  • L'église de Plouezoc'h abrite deux maquettes de bateaux dont le trois mâts Sainte-Anne ayant fait partie de l'armement Bordes.
  • Une aquarelle d'Eugène Margueritte-Grandin représente l’abeille n°10, un quatre-mâts barque de l’armement Bordes au mouillage.

Un autre armement Bordes

Un homonyme, Jean-Jacques Bordes (1828-1898) a également créé sous son nom une puissante maison d'armement naval à Bordeaux, constituée pareillement d'une flotte de clippers à voiles, qui ne survécu pas longtemps à son fondateur[6].

Annexes

Notes et références

  1. Sources générales de l'article : les sites internet francois.delboca.free.fr et pavillon.houseflag.free.fr. Par contre, les ouvrages cités en bibliographie ne semblent pas avoir été exploités
  2. L’épopée des grands cap-horniers dunkerquois, Dunkerque magazine, n°184, avril 2008, pp 27 à 30 [1]
  3. Dont quatre trois-mâts seront livrés en 1902 par les Ateliers et Chantiers de France de Dunkerque (ACF) (Cf. Brigitte Le Coat, Yvonnick Le Coat, « Cap-Horniers français » (tome 1), Mémoire de marins des voiliers de l'armement Bordes, Chasse-marée, 2002)
  4. 18 bâtiments, selon d'autres sources [2] et [3]
  5. Cf. sur le site mandragore2.net
  6. Voir la généalogie de la famille Colin, auquel se rattache J.-J. Bordes par sa fille Jeanne, sur le site gitedurenart.fr

Bibliographie

  • (fr) Brigitte et Yvonnick Le Coat, Les voiliers Bordes dans la guerre (1914-1918), Chasse-marée numéro 155, pages 22 à 35, Le Chasse-Marée/ArMen Éditions Ouest-France.
  • (fr) Brigitte Le Coat et Yvonnick Le Coat, « Cap-horniers français » (tome 1), Mémoire de marins des voiliers de l'armement Bordes, Chasse-marée (coéditeur : Ouest-France), 
2002. (ISBN 2-7373-3212-5)
  • (fr) Claude Briot et Jacqueline Briot, « Cap-horniers français » (tome 2), Histoire de l'armement Bordes et de ses navires, Chasse-marée, 2002. (ISBN 2-914208-28-6)
  • (fr) M. Barbance, Vie commerciale de la route du cap Horn au XIXe siècle. L'armement A.-D. Bordes et fils, Éditions de l'École des hautes études en sciences sociales, janvier 1969, 372 p. (ISBN 2-7132-0089-X et ISBN 978-2-7132-0089-2)
  • (fr) L’épopée des grands cap-horniers dunkerquois, Dunkerque magazine, n°184, avril 2008, pp 27 à 30.

Liens externes

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