Olga Bancic

Olga Bancic

Olga (ou Golda) Bancic dite Pierrette, née le 10 mai 1912[1],[2],[3], le 15 mai 1912[4] ou le 28 mai 1912[5], selon les sources, à Chișinău (Kichinev) en Bessarabie[1],[2], et morte décapitée le 10 mai 1944 à Stuttgart, est une immigrée roumaine, juive et communiste, soldat volontaire de l'armée française de libération (FTP-MOI/ Groupe Manouchian).

Sommaire

Jeunesse

Olga Bancic est née dans une famille nombreuse juive de la province de Bessarabie[1],[2]. Cette région roumanophone fait alors partie de l’Empire Russe (avant de rejoindre la Roumanie en 1918)[1]. En 1924, la jeune Olga participe à une grève dans l’usine de matelas où elle travaille[1],[2]. Elle est arrêtée, incarcérée[2] et maltraitée[1]. De 1933 à 1938, elle est un membre actif du syndicat ouvrier local[1].

En 1938 elle part pour la France[1],[2], pour suivre des études à la faculté de lettres[5]. Elle retrouve un ami roumain, Jacob Salomon[5]. Le couple participe à l'envoi d'armes aux Républicains espagnols. Elle épouse Alexandre Jar (ro)[2] (1911-1988), ancien des Brigades internationales[6]. En 1939 elle donne naissance à une fille, Dolorès[1],[2], prénommée ainsi en hommage à Dolores Ibárruri (La Pasionaria)[7].

Seconde Guerre mondiale

Après l’invasion de la France en 1940, Olga Bancic confie sa fille à une famille française et s’engage dans l'organisation MOI des Franc-Tireurs et Partisans[1],[2]. Elle est chargée de l’assemblage des bombes et des explosifs[1], de leur transport et du convoiement des armes avant et après les opérations[1],[2],[8]. Elle a ainsi participé indirectement à une centaine d'attaques[8].

Jacob Salomon est arrêté en septembre 1941. Un rapport de police, du 15 décembre 1941, mentionne Olga Bancic à propos de l’évasion de son ami de l’hôpital Tenon, le 23 novembre 1941[5]. Celui-ci fut interné au camp de Drancy (Elle dit « ignorer ce qu’il est devenu ».)[5].

Elle est arrêtée à Paris par les Brigades Spéciales (BS2), le 6 novembre 1943[1], en même temps que Marcel Rayman[5] et Josef Svec[2]. Soixante-huit membres des FTP MOI sont interpellés et vingt-trois d’entre eux sont emprisonnés à la prison de Fresnes en attendant d'être jugés[2]. « Avant le procès, des milliers d’exemplaires de « l’Affiche rouge » montrant le visage de dix membres du groupe de Missak Manouchian sont placardés dans tout Paris[2] ». Le 21 février 1944[9], les 23 prisonniers sont condamnés à mort par une cour martiale allemande, réunie à Paris le 15 février 1944[10]. Pour Adam Rayski, l'existence d'un procès public, et l'allégation que les accusés auraient comparu dans une salle d'audience, est « un énorme mensonge de la propagande allemande et vichyssoise[11] ».

Les vingt-deux hommes du groupe Manouchian sont fusillés le 21 février au fort du Mont-Valérien tandis qu’Olga est transférée en Allemagne. Incarcérée à Karlsruhe, puis transférée le 3 mai à Stuttgart[12], elle est décapitée[1],[13] à la prison de Stuttgart, le 10 mai 1944[1], elle avait trente-deux ans.

Son mari, Alexandre Jar, échappe aux arrestations de novembre 1943. Il quitte les FTP-MOI et retourne en Roumanie après la Libération[7],[6].

Derniers témoignages

Olga Bancic, jeta à travers une fenêtre une dernière lettre, datée du 9 mai 1944, adressée à sa fille, pendant son transfert à la prison de Stuttgart, pour y être exécutée[2]. La note jointe, adressée à la Croix-Rouge française[2] précisait (texte dont l’orthographe est corrigée) : « Chère Madame. Je vous prie de bien vouloir remettre cette lettre à ma petite fille Dolorès Jacob après la guerre. C’est le dernier désir d’une mère qui va vivre encore 12 heures. Merci[2]. »

La lettre adressée par Olga Bancic à sa fille (orthographe corrigée) :

« Ma chère petite fille, mon cher petit amour.
Ta mère écrit la dernière lettre, ma chère petite fille, demain à 6 heures, le 10 mai, je ne serai plus.
Mon amour, ne pleure pas, ta mère ne pleure pas non plus. Je meurs avec la conscience tranquille et avec toute la conviction que demain tu auras une vie et un avenir plus heureux que ta mère. Tu n’auras plus à souffrir. Sois fière de ta mère, mon petit amour. J’ai toujours ton image devant moi.
Je vais croire que tu verras ton père, j’ai l’espérance que lui aura un autre sort. Dis-lui que j’ai toujours pensé à lui comme à toi. Je vous aime de tout mon cœur.
Tous les deux vous m’êtes chers. Ma chère enfant, ton père est, pour toi, une mère aussi. Il t’aime beaucoup.
Tu ne sentiras pas le manque de ta mère. Mon cher enfant, je finis ma lettre avec l’espérance que tu seras heureuse pour toute ta vie, avec ton père, avec tout le monde.
Je vous embrasse de tout mon cœur, beaucoup, beaucoup.
Adieu mon amour.
Ta mère[2]. »

La fille d'Olga, Dolores, fut interprétée par Silvia Badescu en 1976 dans le film L'Affiche rouge.

Hommages et mémoire

Olga Bancic est devenue le symbole des femmes étrangères engagées volontaires dans la Résistance. En 1995, la ville de Paris lui a rendu hommage, à la demande de l’Union des résistants et déportés juifs de France, en apposant une plaque à sa mémoire sur un des murs du carré des fusillés du cimetière d’Ivry-sur-Seine, derrière les tombes de ses camarades de combat, Missak Manouchian et Marcel Rayman[2].

Le 26 octobre 1999, sa mémoire fut à nouveau honorée par le Conseil supérieur de la Mémoire auprès du président de la République, avec celle de quatre autres résistants emblématiques, Jean Moulin, Félix Éboué, Pierre Brossolette et Jacques Trolley de Prévaux[2].

Notes et références

  1. a, b, c, d, e, f, g, h, i, j, k, l, m, n et o « Golda (Olga) Bancic », Encyclopédie multimédia de la Shoah, United States Holocaust Memorial Museum, sur le site ushmm.org, consulé le 9 septembre 2008.
  2. a, b, c, d, e, f, g, h, i, j, k, l, m, n, o, p, q, r et s « Bancic Olga, 1912-1944 – Résistante, décapitée en prison à Stuttgart », Présences féminines juives en France (XIXe ‑ XXe siècles), sur le site afmeg.info, consulté le 9 septembre 2008.
  3. « Olga Bancic », Souviens-toi, sur le site souviens-toi.org, consulté le 9 septembre 2008.
  4. Selon le registre de la prison de Stuttgart, conservé au Stadarchiv de Ludwigsburg, reproduit dans : Adam Rayski, L'Affiche Rouge, mairie de Paris, Direction générale de l'information et de la communication, 2003, p. 65 [PDF] [consulter en ligne sur le site paris.fr]
    N.B. : ce même article mentionne à la page 64 : « Golda Bancic naquit le 10 mai 1912, à Kichinev en Bessarabie. »
  5. a, b, c, d, e et f L’interrogatoire d’Olga Bancic par les inspecteurs de la BS2, sur le site afficherouge-manouchian.hautetfort.com, extrait de : Jean-Marc Berlière et Franck Liaigre, Liquider les traîtres – La face cachée du PCF 1941-1943, Robert Laffont, Paris, 2007, p. 442.
  6. a et b Alexandre Jar, écrivain roumain, sera exclu de l'organisation nationale des écrivains en 1956, pour avoir critiqué la politique culturelle du Parti, cf. Armand Gaspard, « Dix années de « dégel », dans Politique étrangère, no 1, 28e année, 1963, p. 75, sur le site persee.fr, consulté le 20 avril 2010.
  7. a et b Grégoire Georges-Picot, « Golda dite Olga Bancic (1912-1944) », sur le site generiques.org, consulté le 20 avril 2010..
  8. a et b « 2. Les F.T.P.- M.O.I. : la guérilla urbaine – Dans le groupe, Olga Bancic, une Roumaine immigrée en France entre les deux guerres. », témoignage d'Arsène Tchakarian du groupe Manouchian, sur le site memoire-net.org, consulté le 20 avril 2010.
  9. Selon La dépêche de l'Office français d'information (OFI) du 21 février, citée en annexe dans le livre d'Arsène Tchakarian.
  10. [PDF] Brochure de l'exposition Manouchian sur le site de la mairie d'Ivry-sur-Seine.
  11. Adam Rayski, L'Affiche Rouge, op. cit., p. 60-62.
  12. Adam Rayski, L'Affiche Rouge, op. cit., p. 66.
  13. Selon les sources le mode d'exécution pratiqué par les nazis à cette occasion varie, il s'agit soit d'une décapitation à la hache : soit il s'agit de décapitation par utilisation de la guillotine :
    • (en) « Olga Bancic », sur le site geocities.com, consulté le 9 septembre 2008 ;
    • Laurence Thibault (dir.), Les Jeunes et la Résistance, Documentation française/ AERI, coll. « Cahiers de la Résistance », 2007 (ISBN 2110060948 et 978-2110060945) ;
    • Benoît Rayski, dans L'Affiche rouge – 21 février 1944, Éditions du Félin, Paris, 2004, p. 116, donne l'explication suivante : « Depuis toujours on décapitait à la hache en Allemagne [...] Il en en fut encore ainsi pendant les premières années du régime hitlérien. Mais très vite les autorités nazies s'aperçurent qu'il y avait trop de têtes à couper [...] D'où la nécessité de la guillotine sur laquelle périt Olga Bancic. » La même page donne des précisions sur le nom, le salaire, et la prime par exécution du bourreau.
    • (en)« The execution of women by the Nazis during World War II », sur le site capitalpunishmentuk.org, consulté le 9 septembre 2008 et le 4 janvier 2009.

Annexes

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