Palais idéal

Palais idéal

Ferdinand Cheval

Ferdinand Cheval
Facteur Cheval.jpg

Nom de naissance Joseph Ferdinand Cheval
Naissance 19 avril 1836
Charmes-sur-l'Herbasse Drôme
Décès 19 août 1924 (à 88 ans)
Hauterives
Nationalité France Française
Profession(s) facteur
Autres activités artiste

Joseph Ferdinand Cheval, plus connu sous le nom de Ferdinand Cheval et plus encore sous le nom du facteur Cheval, (19 avril 1836 à Charmes-sur-l'Herbasse, Drôme, France19 août 1924 à Hauterives, Drôme) est un facteur français qui a passé 33 ans de sa vie à édifier un « Palais idéal » et huit années supplémentaires à bâtir son propre tombeau, tous deux considérés comme des chefs-d'œuvre de l'architecture naïve.

« Fils de paysan je veux vivre et mourir
pour prouver que dans ma catégorie
il y a aussi des hommes de génie
et d'énergie. Vingt-neuf ans je suis resté
facteur rural. Le travail fait ma gloire
et l'honneur mon seul bonheur ;
à présent voici mon étrange histoire.
Où le songe est devenu,
quarante ans après, une réalité.  »

— Ferdinand Cheval, 15 mars 1905.

Sommaire

Biographie

Le chalet suisse

Après l'obtention de son certificat d'études primaires, il devient, à l'âge de treize ans, apprenti boulanger, profession dans laquelle il travaille durant quelques années.

Le 12 juillet 1867, il est officiellement nommé « facteur aux postes ».

En 1869, il est affecté à Hauterives, à une douzaine de kilomètres de son village natal, ayant en charge la « tournée de Tersanne », une tournée pédestre quotidienne de 33 km.

Dès le début de ses longues tournées, qui n'avaient pas le même rythme que les tournées cyclistes ou motorisées d'un « préposé » rural du XXIe siècle, il occupe ses heures de randonnée à de longues rêveries au cours desquelles il bâtit un « palais féérique », rêveries qui ne commenceront à être concrétisées qu'une dizaine d'années plus tard.

Le Palais idéal

Les pierres

Selon ses souvenirs, en avril 1879, durant l'une de ses tournées, le pied du facteur bute contre une pierre, manquant de le faire tomber sur le chemin. Son œil ayant été attiré par la forme curieuse de la pierre, il la ramasse et la glisse dans l'une de ses poches avec l'intention de la regarder plus tard à tête reposée.

Dès le lendemain, repassant au même lieu, il constate la présence d'autres pierres ayant des formes encore plus singulières et, à son goût, plus belles que celle qu'il avait trouvée la veille. Il se fait alors la réflexion que, puisque la nature pouvait « faire de la sculpture », il pourrait très bien lui-même, fort de ses longues rêveries préparatoires, se faire architecte, maître d'œuvre et ouvrier dans la construction d'un « Palais idéal ».

Durant les 33 années qui suivent, Ferdinand Cheval ne cesse de choisir des pierres durant sa tournée quotidienne, les portant d'abord dans ses poches, puis se munissant d'un panier, voire d'une brouette en certaines occasions. Revenu à son domicile, il passe de longues heures à la mise en œuvre de son rêve, travaillant de nuit à la lueur d'une lampe à pétrole. Il est alors considéré comme un excentrique par les gens du cru, qui ne disposent pas de la vision d'ensemble qu'avait l'architecte.

L'évolution de la façade est

Vue de la façade est

Cheval passe les vingt premières années à construire la façade est de ce qu'il nommera globalement le Temple de la Nature (Le terme de Palais Idéal n'a été donné par Cheval qu'après sa rencontre avec le barde alpin Émile Roux Parassac en 1904).

On peut suivre là toute l'évolution intuitive, partie par partie, de notre architecte naïf dans l'élaboration de son Palais. C'est une évolution qui va de l'organique, telle une végétation luxuriante qui se répand autour de grottes et d'alcôves, à l'organisation symétrique d'une façade majestueuse[1].

Ferdinand Cheval commença tout d'abord par creuser un bassin et à former autour une cascade : la Source de Vie (1879-1881). Poursuivant vers le nord, prenant de la hauteur, il construisit une seconde cascade, la Source de la Sagesse (1881-1884). Puis vient ce grand temple à la façade symétrique et aux colonnes boursoufflées, le Monument égyptien (1884-1891) qui deviendra le Temple de la Nature. À partir de 1891, comme voulant établir une symétrie de taille avec la partie Nord, Cheval s'attaque au Sud, avec l'édification du Temple Hindou (1891-1895), à la faune et à la flore exotiques, et qui finira gardé par les trois impressionnants Géants (1895-1899) (représentant César, Vercingétorix et Archimède).

« La grotte où il y a 3 géants c'est un peu de l'égyptien, en dessous on voit 2 momies que j'ai façonnées et sculptées. Ces 3 géants supportent la Tour de Barbarie où dans un oasis croissent les figuiers, les cactus, des palmiers, des aloès, des oliviers gardés par la loutre et le guépard. À la source de la vie j'ai puisé mon génie »

— Ferdinand Cheval, 1911

La façade ouest

Le temple hindou

Beaucoup moins organique, plus rigoureuse et délimitée dans ses formes, la façade ouest est ornée d'architectures miniatures du monde entier placées dans des alcôves : une Mosquée, un Temple Hindou, un chalet suisse, la Maison Carrée d'Alger, un château du Moyen Âge. On accède également par là à une galerie de vingt mètres de long, s'enfonçant dans le Palais et agrémentée de sculptures. Au-dessus se trouve une grande terrasse de 23 mètres de long (quasiment la totalité de la longueur du Palais) à laquelle on accède grâce à des escaliers.

Détail de la façade nord

Les façades nord et sud

Au nord se trouve le côté du Temple de la Nature, des grottes et toutes sortes d'animaux (cerf, pélicans, crocodile...). Le sud, assez dépouillé, est un hommage de Cheval aux temps anciens, à travers un musée antédiluvien ; c'est aussi un accès dégagé de la terrasse, avec escalier et balcon.

Aspect global

Le Palais est aussi bien un hymne à la Nature qu'un mélange très personnel de différents styles architecturaux, avec des inspirations puisées tant dans la Bible[2] que dans la mythologie hindoue et égyptienne. Il ne faut pas oublier que Cheval fut facteur, à une époque où se développaient les voyages et la carte postale (apparue en France en 1873, cinq ans avant le début du Palais Idéal).

Le palais idéal

Les pierres sont assemblées avec de la chaux, du mortier et du ciment.

Ferdinand Cheval acheva la construction du Palais Idéal en 1912.

Le Tombeau du silence et du repos sans fin

Le Tombeau du silence et du repos sans fin

Après l'achèvement du Palais idéal, il manifeste son désir d'être plus tard enseveli dans l'enceinte même de son œuvre, ce que la loi française ne permet pas lorsque le corps n'est pas incinéré. L'usage de la crémation n'étant à l'époque pas du tout entré dans les mœurs en France, Ferdinand Cheval se résout alors à se conformer aux contraintes légales en se faisant inhumer, le moment venu, dans le cimetière communal, mais en choisissant lui-même la forme de son tombeau.

C'est ainsi qu'à partir de 1914, il passe huit années supplémentaires à charrier des pierres jusqu'au cimetière d'Hauterives et à les assembler, pour former le Tombeau du silence et du repos sans fin, achevé en 1922.

Il y est inhumé après son décès, survenu en 1924.

Portée de l'œuvre

Au début des années 30, il reçoit le soutien moral de plusieurs artistes tels que Pablo Picasso et André Breton (et à travers ce dernier l'admiration des surréalistes).

Le Palais idéal du facteur Cheval a été classé au titre des monuments historiques par arrêté du 23 septembre 1969, signé d'Edmond Michelet, ministre des Affaires culturelles. À la même époque, son prédécesseur, André Malraux, qui avait appuyé la procédure de classement avant son départ du gouvernement, avait déclaré qu'il considérait le Palais idéal comme « le seul représentant en architecture de l'art naïf ».

Le Tombeau du silence et du repos sans fin a été inscrit sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, par arrêté du 12 septembre 1975.

Le Palais Idéal est le précurseur d'un phénomène, celui des Environnements d'art, et en reste peut-être le plus génial et spectaculaire exemple. Ce phénomène, faisant l'objet d'ouvrages dès 1962 [3], reconnu aujourd'hui dans le monde entier, est lié à l'intérêt porté aux créations d'Art brut et Outsider. Le Palais Idéal a inspiré des artistes comme Robert Tatin ou Niki de Saint-Phalle (voir le Jardin des Tarots) dans l'élaboration de leurs propres architectures imaginaires.

Notes et références

  1. Et qui n'est pas sans rappeler la manière dont Augustin Lesage aborda sa première toile
  2. Grottes de Saint-Amédée et de la Vierge Marie, un calvaire, les évangélistes...
  3. A travers le livre de Gilles Erhmann Les Inspirés et leurs demeures, préfacé par André Breton

Sources

Bibliographie

  • Le Palais idéal du facteur Cheval à Hauterives, Drôme, autobiographie par Ferdinand Cheval, documents recueillis par André Jean, Grenoble, Impr. générale, 24 p., 1952
  • Alain Borne, Le facteur Cheval, avec des photographies de Fabian Da Costa, Entremont-le-Vieux, Éditions Curandera, coll. l'Embellie, 117 p. + 16 fiches, réédition 1993
  • Peter Weiss, Du Palais idéal à l'enfer ou Du facteur Cheval à Dante, textes choisis et préf. de Günter Schütz, trad. de l'allemand par Éliane Kaufholz-Messmer, Paris, Éditions Kimé, coll. Détours littéraires, 114 p., 2000
  • Michel Friedman, Les secrets du facteur Cheval, avec des photographies de Daniel Czap, contient en outre Histoire du Palais idéal, par Ferdinand Cheval, Paris, J. C. Simoëns, 91 p. + 40 p. de planches, 1977
  • Jean-Pierre Jouve, Claude Prévost, Clovis Prévost, Le Palais idéal du facteur Cheval : quand le songe devient la réalité, avec, en appendice, un choix de textes du facteur Cheval (1905-1911), Paris, Éditions du Moniteur, coll. Les Bâtisseurs inspirés, 303 p., 1981
  • Claude Boncompain, Le facteur Cheval, piéton de Hauterives, avec des photographies de Jean-Louis Perret, Valence, Éditions LeBouquin, 79 p., 1988
  • Lionel Bourg, Tombeau de Joseph-Ferdinand Cheval facteur à Hauterives, Montpellier, Éditions Cadex, 30 p., 1990
  • Marc Fenoli, Le Palais du facteur Cheval, avec des photographies de Laurent Nivon et Marc Fenoli, Grenoble, Glénat, 95 p., 1990
  • Adrian Henri, Le Palais du facteur Cheval, avec des ill. de Simon Henwood, Paris, Centurion jeunesse, 28 p., 1990
  • Conservation régionale des monuments historiques de Rhône-Alpes, Le Palais idéal du facteur Cheval : Drôme, Hauterives, Lyon, DRAC Rhône-Alpes, coll. Patrimoine restauré, 10 p., 1991
  • Pierre Chazaud, Le facteur Cheval : un rêve de pierre, avec une préface de Jean Guibal, Veurey, Éditions Le Dauphiné, coll. les Patrimoines ; Grenoble, Musée dauphinois, 51 p., 1998
  • Jacques Delatour et André Gerin, La dernière demeure du facteur Cheval : son tombeau à Hauterives, brochure de 11 p. éditée par la revue « Études drômoises », Valence, vers 2000
  • Josette Rasle, Eric Le Roy, Christophe BONIN, Avec le Facteur Cheval : Catalogue de l'exposition au musée de la Poste, mars 2007, ENSBA, 23X26, 160 p.
  • Valère-Marie Marchand, Le Sable des chemins, sur les pas du facteur cheval, Paris, Éditions du Sextant, 160 p., 2008.
  • Le Palais idéal du Facteur Cheval, rêves de pierres (bande dessinée), dessins de Schneyder et Grycan, scénario de Philippe Bonnay, couverture de Jacques Terpant et couleurs de Jocelyne Charrance avec la collaboration du Conseil général de la Drôme, Grenoble, Glénat, mai 2006.

Filmographie

  • Le facteur sonne toujours cheval, Chris Marker, 1992, 52 minutes
  • En 2008 sortira un film de fiction, Rien + l'infini de Sibylle Deluxe rendant hommage à l'influence du facteur Cheval sur l'art actuel.

Hommages

  • Avec le Facteur Cheval, Musée de la Poste à Paris en avril 2007, avec des photographies commentées de Gérard Manset
  • un ouvrage en préparation sur le Palais Idéal du facteur Cheval par Hidehiko Nagaishi, photographe d'architecture japonais.
  • "A la poursuite du facteur Cheval" Roman de Gérard Manset paru en 2008

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