Platon

Platon
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Platon ( Πλάτων )
Philosophe occidental
Antiquité
détail de L'École d'Athènes, par Raphaël

Naissance vers 427 av. J.-C. (Athènes)
Décès vers 346 av. J.-C. (Athènes)
École/tradition Fondateur de l'Académie
Principaux intérêts Métaphysique, cosmologie, éthique, politique, esthétique, rhétorique, sophistique, langage
Idées remarquables Dialectique, Maïeutique, Allégorie de la caverne, Théorie des Formes, Participation, Réminiscence, Imitation, Philosophe roi
Œuvres principales Le Banquet, La République, Phédon, Théétète, Le Sophiste
Influencé par Pythagore, Parménide, Héraclite, Socrate, Mystères égyptiens
A influencé La majeure partie de la philosophie occidentale ; une partie de la philosophie islamique
Adjectifs dérivés platonicien, platonicienne; platonique

Platon (en grec ancien Πλάτων / Plátôn, né à Athènes en 428-427 av. J.-C., mort en 348-347 av. J.-C.[1]) est un philosophe grec, contemporain de la démocratie athénienne et des sophistes, qu'il critiqua vigoureusement. Il reprit le travail philosophique de certains de ses prédécesseurs, notamment Socrate, Parménide, Héraclite et Pythagore, afin d'élaborer sa propre pensée qui explore la plupart des champs importants, notamment la métaphysique, l'éthique, l'esthétique et la politique.

Son œuvre, composée presque exclusivement de dialogues, est d'une grande richesse de style et de contenu, et produit, sur de nombreux sujets, les premières formulations classiques des problèmes majeurs de l'histoire de la philosophie occidentale[2]. Chaque dialogue de Platon interroge un sujet donné, par exemple le beau ou le courage. La pensée de Platon n'est pas monolithique : une partie de ses dialogues aboutissent à des apories philosophiques, et ses dialogues qui apportent une solution aux problèmes posés ne constituent pas une réponse unique et définitive.

Platon est l'inventeur de la théorie des Formes, qu'on appelle plus communément théorie des Idées : celle-ci interprète le monde sensible comme un ensemble de réalités participant de leurs modèles immuables. La Forme suprême est, selon le contexte, tantôt le Bien, tantôt le Beau. La philosophie politique de Platon considère que la Cité juste doit être construite selon le modèle du Bien en soi.

Sommaire

Biographie

Platon, copie du portrait exécuté par Silanion pour l'Académie vers 370 av. J.-C., Centrale Montemartini.

À part quelques données certifiées, dont la chronologie est d'ailleurs incertaine, la vie de Platon est mal connue[3]. Comme pour beaucoup d'autres philosophes de l'Antiquité, il est souvent difficile de distinguer l'histoire et la construction littéraire.

Jeunesse

Platon est né à Athènes dans le dème de Collytos, en 428427 av. J.-C., pendant l'archontat d'Aminias (Diogène Laërce le fait toutefois naître à Égine), deux ans après la mort de Périclès (en -429), lors de la guerre du Péloponnèse (de 431 à 404)[p. 1]. La date exacte demeure cependant incertaine : une tradition[4] la fixe à la troisième année de la 88e olympiade, au 7 du mois thargélion, qui correspondrait au 21 mai de l'an -429. Mais les sources à ce sujet relèvent essentiellement de calculs fondés sur des croyances religieuses et des considérations mystiques sur les nombres. C'est pourquoi on situe la naissance de Platon trois ou quatre ans suivant le début de la guerre du Péloponnèse, vers l'époque de la mort de Périclès[5].

Il est en tout cas certain que Platon venait d'une famille aristocratique[6]. Sa généalogie est toutefois incertaine du côté de son père : Ariston prétendait en effet descendre de Codros, dernier roi légendaire d'Athènes, et plus sûre du côté de sa mère, Périctionè, qui descendait d'un certain Dropidès[p. 2], proche de Solon[p. 3]. Elle était également la cousine germaine de Critias et la sœur de Charmide, deux des Trente Tyrans d'Athènes en -404.

Platon avait trois frères : Adimante et Glaucon, interlocuteurs de Socrate dans La République et sans doute plus âgés que lui, Antiphon, ainsi qu'une sœur, Pôtonê, mère de Speusippe, qui succéda à Platon à la tête de l'Académie[6]. La mère de Platon, devenue veuve quelque temps après sa naissance, se remaria avec son oncle maternel, Pyrilampe. Elle en eut un fils, Antiphon, qui est le narrateur du Parménide.

Selon les usages des grandes familles de son pays, Platon aurait dû recevoir le nom de son grand-père, Aristoclès, et il est possible que ce soit son véritable nom, « Platon » (Πλάτων) n'étant qu'un surnom. La raison en est inconnue et les explications que l'on en a données sont toutes plus ou moins fantaisistes. Par exemple, selon Diogène Laërce, il eut pour pédotribe[7] le lutteur argien Ariston d'Argos, et l'on dit qu'il a remporté deux prix aux Jeux olympiques et aux Jeux isthmiques[p. 4],[p. 5], qui, l'éduquant aux sports, le surnomma Platon en raison de sa constitution robuste, platos (πλάτος) signifiant en effet « largeur » car il était d'ailleurs de stature « large » (πλατύς)[p. 6]. D'autres hypothèses font allusion à sa volubilité, ou à la largeur de son front, ou encore à l'étendue de son caractère et de son esprit[p. 7].

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Il ne fait aucun doute que Platon reçoit l'éducation traditionnelle correspondant à son statut social. Le détail du cursus avancé par Diogène Laerce relève toutefois d'une « illustration narrative des principales influences théoriques qui se seraient exercées sur Platon »[p. 8] ». Ceci revient à dire que la biographie du jeune Platon est une invention conçue pour s'accorder a posteriori avec ses œuvres. En voici quelques éléments, tirés essentiellement des ouvrages de Laërce. Il s'initia à la peinture, écrivit des poèmes, des dithyrambes, des vers lyriques et des tragédies. La musique, la flûte et la cithare, lui furent enseignées par Dracon, élève de Damon, et par Métellos d'Agrigente. Tous ses dialogues, et particulièrement le Timée, attestent qu'il avait poussé fort loin l'étude de cet art, qui, dans l'Antiquité, était étroitement lié aux mathématiques. Ce fut Denys le grammairien, mentionné dans les Amants, qui l'initia à cet ensemble de connaissances libérales que les Anciens appelaient la « grammaire »[p. 9], et, longtemps avant son voyage en Égypte, il a écouté le mathématicien Théodore de Cyrène[p. 10], venu en visite avant la mort de Socrate. L'importance des mathématiques a sans doute été grande à ses yeux, et Platon fut l'un des plus grands promoteurs de cette science[8]. On ignore l'identité de son éraste, mais appartenant à l'élite de la société grecque, il est presque sûr qu'il connut une relation de pédérastie, relation qu'il condamne dans Le Banquet. Par la suite, il prit bon nombre de ses disciples en tant qu'éromènes

Platon était en relation étroite avec le parti oligarchique que par ailleurs il honnissait, et semble n'avoir pas été insensible à la célébrité de sa famille, qu'il mentionne dans le Charmide[p. 11] et dans le Timée[p. 12]. Il était le petit-neveu de Critias et le neveu de Charmide, tous deux du Conseil des Trente Tyrans, un régime de terreur imposé par Sparte pendant neuf mois, à partir de -403, à la fin de la guerre du Péloponnèse[9]. On a voulu ainsi, par la parenté et le socratisme, expliquer le caractère des idées politiques de Platon. L'éducation qui, à Sparte, négligeait l'âme et ne s'occupait que du corps, la politique ambitieuse et avide de domination, la passion guerrière, l'immoralité des femmes, furent sévèrement jugées par Platon[p. 13]. Tout au long de son œuvre, il a dénoncé les excès de l'oligarchie, où les riches dominent les pauvres, et ceux de la démocratie, où les pauvres tentent de dominer les riches. C'est pourquoi Platon proposa dans La République un régime original : la timocratie. Il s'agissait d'un régime où la population était divisée en classes sociales strictement délimitées, ayant chacune des prérogatives propres[p. 14].

Platon appartenait donc à une riche famille de propriétaires terriens, et il en profita largement. Il voyagea, acheta la bibliothèque de Philolaos, organisa une chorégie, fête très coûteuse[p. 15],[10].

Vers -410, il fut élève de Cratyle, un disciple d'Héraclite, et d'Hermogène, un disciple de Parménide.

Buste de Platon. Copie romaine d'un original grec du dernier quart du IVe siècle av. J.-C.

Il abandonna de bonne heure la vie politique, carrière par excellence de l'homme libre à Athènes, et qu'il considérait comme le plus grand honneur, comme le plus grand devoir d'un bon citoyen, ainsi que comme le couronnement de la vie philosophique[p. 16]. Si l'on en croit la VIIe lettre, dont l'authenticité est généralement acceptée, il aurait essayé de la politique, et même pris quelque part au gouvernement des Trente Tyrans, despotique et sanguinaire au point de perpétrer environ 1 500 exécutions sommaires. Il y aurait vite renoncé, dégoûté par les excès et les fureurs des partis[p. 17].

« Du temps de ma jeunesse, je ressentais en effet la même chose que beaucoup dans cette situation : je m'imaginais qu'aussitôt devenu maître de moi-même, j'irais tout droit m'occuper des affaires communes de la cité. Et voilà comment le hasard fit que je trouvai les choses de la cité. Le régime d'alors était en effet l'objet de virulentes critiques de la part du plus grand nombre, et une révolution éclata. (…) Et moi, voyant donc cela, et les hommes qui s'occupaient de politique, plus j'examinais en profondeur les lois et les coutumes en même temps que j'avançais en âge, plus il me parut qu'il était difficile d'administrer droitement les affaires de la cité. Il n'était en effet pas possible de le faire sans amis et associés dignes de confiance, et il n'était pas aisé d'en trouver parmi ceux qu'on avait sous la main, car notre cité n'était plus administrée selon les coutumes et les habitudes de nos pères. »

En -403, la démocratie fut rétablie à Athènes par Thrasybule et Anytos (un accusateur de Socrate quatre années plus tard).

Platon devint le disciple de Socrate durant neuf ans, de -408 à -399, jusqu'à la condamnation de Socrate, qui avait résisté, entre autres, aux Trente Tyrans, refusant « d'obéir aux gens de l'entourage de Critias qui lui ordonnaient de leur amener Léon de Salamine, un riche démocrate, pour qu'il fût mis à mort »[p. 18],[p. 19]. À la suite de cette rencontre, Platon abandonna l'idée de concourir pour la tragédie grecque et brûla toutes ses œuvres. Il transmit l'enseignement de son maître tout en se l'appropriant et en le transformant peu à peu. Il commença ses dialogues durant le vivant de Socrate : Hippias mineur, Ion, etc. « Socrate, qui venait d'entendre Platon donner lecture du Lysis, s'écria : « Par Héraclès, que de faussetés dit sur moi ce jeune homme ! » »[p. 20].

Malade, il n'assista pas à la mort de Socrate[p. 21] en -399. Inquiet sur le sort des disciples de Socrate, il se réfugia chez Euclide de Mégare[p. 22], qui en faisait lui aussi partie. « Par la suite, il alla en Égypte chez les prêtres du haut clergé »[p. 23] ; ce n'est pas certain, car sa connaissance de l'Égypte paraît indirecte et stéréotypée[p. 24],[11] ; c'était peut-être en -392, peut-être avec Eudoxe de Cnide. Platon a participé, comme cavalier, à la guerre de Corinthe, qui vit la victoire de Sparte sur Athènes(-394). À Cyrène, il rencontre les philosophes Aristippe de Cyrène et Annicéris de Cyrène, défenseurs d'une philosophie de la jouissance, ainsi que le mathématicien Théodore, qui figure dans le Théétète (143-144). En Italie du Sud, dans la Grande-Grèce, à Tarente, il rencontra le grand pythagoricien Philolaos de Crotone, et ses auditeurs, Timée et Archytas de Tarente ; à cette occasion, qui date de -388 à -387, il entra en contact avec le pythagorisme, et approfondit l'opposition âme – corps, les nombres, et l'idéal oligarchique du philosophe-roi[p. 25],[Note 1].

Il fit un premier voyage politique en Sicile en -387, et Denys Ier l'Ancien, qui s'intéressait à la philosophie, le reçut à la cour de Syracuse. Il gagna à la philosophie Dion de Syracuse, beau-frère de Denys, mais, en raison de son penchant à faire la leçon, ou à cause de son influence, il ne tarda pas à déplaire au « tyran », maître souverain. Embarqué de force sur un bateau spartiate, il fut probablement capturé et vendu comme esclave sur l'île d'Égine[12], alors en guerre contre Athènes. Il fut néanmoins affranchi par Annicéris de Cyrène, philosophe cyrénaïque, qui l'aurait reconnu, acheté « pour vingt mines d'argent », puis libéré[13].

Maturité

Article détaillé : Académie de Platon.
Une mosaïque trouvée à Pompéi représentant l'Académie de Platon.

Après l'échec politique à Syracuse, Platon fonda, en -387, à Athènes, près de Colone et du gymnase d'Acadèmos, une école, nommée « l'Académie », selon le modèle des pythagoriciens. Il y enseigna pendant quarante ans. Sur le fronton de l'Académie était gravée, selon la légende, la devise « Que nul n'entre ici s'il n'est géomètre »[14]. On y poursuivait des recherches scientifiques ; l'enseignement des sciences exactes y préparait à l'étude de la philosophie, considérée en elle-même, et dans ses applications à la politique. Des philosophes illustres en sont issus :

L'école a subsisté pendant neuf siècles, jusqu'au règne de l'empereur byzantin Justinien, qui y mit un terme en 529[16].

Vers -380, Platon aurait initié le mathématicien Léodamas de Thasos à l'usage de l'analyse en géométrie[p. 26],[17],[p. 27].

Vers -370, Platon traversa, selon Léon Robin[18] ou Pierre-Maxime Schuhl, une longue crise intellectuelle, durant laquelle il s'interrogeait sur sa théorie des Idées (interrogation qui traverse les dialogues du Parménide et du Sophiste)[19]. Il prit conscience de la difficulté d'association (μέθεξις / méthexis), non symétrique des Idées avec les choses sensibles, ainsi que de l'association (σύμμιξις / súmmixis) des Idées entre elles, de même que la communion (κοινωνία / koinômía) entre les Idées et le Bien[p. 28]. En même temps, il semblait, sous l'influence d'Eudoxe de Cnide : admettre un ordre dans le sensible, et s'orienter vers un certain dualisme de type oriental : « Cet univers, tantôt la Divinité guide l'ensemble de sa marche, tantôt elle l'abandonne à lui-même »[p. 29].

Au début de -367, il fit un deuxième voyage politique en Sicile[20], et, à la mort de Denys Ier l'Ancien, en -367, Dion de Syracuse demanda à Platon, d'éduquer son beau-frère Denys II le Jeune, fils de Denys l'Ancien, à la philosophie. Il avait fait ce retour en Sicile, pensant créer une cité qui serait gouvernée selon ses principes philosophiques : il a terminé La République en -372[21], persuadé que si les philosophes ne deviennent pas rois ou si « les rois ne deviennent pas philosophes (…) il n'y aura pas de trêve aux maux dont souffrent les États »[p. 30]. Mais Denys II le Jeune bannit Dion, soupçonné de comploter, et Platon fut détenu un an dans la citadelle d'Ortygie[p. 31].

En -366, Aristote entra à l'Académie, à l'âge de dix-sept ans, pour vingt années d'études. Le troisième et dernier voyage politique de Platon en Sicile eut lieu en -360. En -361, Denys II le Jeune promit d'accorder sa grâce à Dion à condition que Platon revienne une troisième fois en Sicile. Platon, âgé de soixante-huit ans, confia l'Académie à Héraclide du Pont, et accepta, ainsi que Speusippe et Xénocrate[p. 32]. Mais ses relations avec Denys II se dégradèrent, et le pythagoricien Archytas de Tarente dut envoyer un vaisseau de guerre pour libérer Platon. Ce fut l'occasion d'un second contact approfondi avec le pythagorisme : il acheta, dit-on, « à Philolaos de Crotone trois livres concernant la doctrine de Pythagore pour cent mines d'argent[p. 33] » (à cette époque, ou, à la mort de Philolaos, vers -380) ; le Timée (35-44, 54-55), qui date de -358, est très pythagorisant, et l'on trouve dans le Philèbe (16c), qui date de -347, l'opposition Limité – Illimité caractéristique de Philolaos. À Olympie, lors des Jeux Olympiques de -360, il retrouva Dion de Syracuse, et lui conseilla de renoncer à une expédition contre Denys le Jeune[p. 34]. Quatre ans plus tard, Dion renversa Denys II le Jeune, mais fut assassiné par un ami, le rhéteur d'origine athénienne Callippe de Syracuse.

Vieillesse

Dans ses dialogues de vieillesse, surtout dans le Timée, sa philosophie changea quelque peu. Il semble aussi que, peut-être vers -350, Platon ait donné un enseignement oral d'orientation dualiste et pythagorisante, centré sur les Nombres idéaux.

Platon, âgé de 80-81 ans, mourut à Athènes en -347 ou -346, « au cours d'un repas de noce[p. 35] ». Il rédigeait alors Les Lois, dont on a pu penser que le livre XII était inachevé, mais ce jugement est sujet à discussion. La tradition voudrait le faire mourir à 81 ans, d'après le symbolisme des nombres, car 81 est le carré de 9[p. 36]. Il avait un fils, Adamante. « Il fut inhumé à l'Académie. » Pendant ce temps, la guerre de Philippe II de Macédoine pour conquérir Athènes faisait rage.

Aristote, déjà auteur de remarquables dialogues (perdus) et de son œuvre logique, fut dépité de voir Speusippe, neveu de Platon, nommé scolarque, recteur de l'Académie, plutôt que lui. Il partit en Asie chez Hermias d'Atarnée, un « tyran », et ancien condisciple à l'Académie.

Prédécesseurs et contemporains

Socrate et les sophistes sont vraisemblablement les figures qui ressortent le plus nettement des dialogues de Platon, le premier comme interlocuteur principal, les seconds comme adversaires. Ils ne sont pas cependant les seuls penseurs ou écrivains que l'on voit dans les dialogues, qui reflètent à maints égards la culture de son temps. Pourtant, il n'est pas toujours possible de déterminer précisément dans quelle mesure tel ou tel aspect de cette culture alimente la pensée de Platon, ni d'y repérer avec certitude telle ou telle allusion. Les références faites par Platon sont en effet souvent allusives, bien que l'on trouve également de nombreuses citations, par exemple d'Homère, et il ne fait jamais, au contraire de son élève Aristote, d'exposé doxographique sur une question donnée[22]. On ne proposera ici qu'un aperçu des principaux auteurs, contemporains ou prédécesseurs, afin de donner une idée générale du contexte culturel de l'œuvre de Platon. Outre Socrate et les sophistes, il convient d'évoquer les philosophes dits présocratiques, également appelés « préplatoniciens », ainsi que les historiens grecs et des aèdes comme Homère.

Les préplatoniciens

Les sources sur les philosophes précédant Platon sont trop partielles pour qu'il soit possible de repérer à coup sûr les allusions et apprécier de manière précise les jugements qu'il pouvait porter sur leur pensée. On ne peut que constater l'utilisation qu'il fait de certains noms en leur liant telle ou telle thèse[23].

Platon considère Parménide, dans Le Sophiste, comme le père de la philosophie, qu'il faut « tuer » pour rendre compte du discours faux. Puisqu'en effet, selon Parménide, seul l'être est, il est impossible de tenir des discours sur ce qui n'est pas. Or le discours faux, celui des sophistes, existe ; par conséquent, il faut emprunter la voie interdite par Parménide, voie selon laquelle le non-être est, d'une certaine façon.

Les Écoles pythagoriciennes

Selon Aristote[p. 37], la doctrine de Platon s'accorde sur plusieurs points avec celle de Pythagore. Bien que ce jugement ait eu une grande postérité, il est en réalité difficile, sinon impossible, de le préciser, car l'enseignement pythagoricien était réservé à des initiés et il n'y a que deux références explicites dans les dialogues platoniciens, références qui n'apprennent pas grand-chose sur ce que Platon pourrait avoir emprunté au pythagorisme[24]. Si l'on soutient l'idée que Platon a donné un enseignement oral (voir les sections Le dialogue chez Platon et L'enseignement oral de Platon), distinct de ce que l'on trouve dans ses dialogues, alors la nature de cet enseignement, qui porterait sur les notions de dyade et de nombres idéaux, peut apparaître comme un indice probant de l'influence pythagoricienne. Toutefois, il est possible qu'il y ait là un amalgame avec certains des successeurs de Platon à l'Académie, tels que Speusippe et Xénocrate, qui furent considérés dès l'Antiquité comme des pythagoriciens[25].

Hérodote et Thucydide

Platon partage avec les deux historiens grecs Hérodote et Thucydide la qualité de prosateur que leur a décernée Polybe, et il y a, entre ces trois auteurs, des points de ressemblance et des différences qui sont susceptibles d'éclairer quelque peu l'originalité du projet philosophique platonicien au sein de la culture grecque. À l'instar d'Hérodote et de Thucydide, Platon s'intéresse en premier lieu aux affaires humaines et à la politique, tant d'un point de vue philosophique que d'un point de vue qui peut passer aujourd'hui pour sociologique, ce qui est illustré par exemple par sa description de la genèse des sociétés dans La République[p. 38]. Il ne fait cependant pas à proprement parler œuvre d'historien, comme en témoignent les libertés chronologiques et historiques de ses dialogues.

Mais la principale différence est d'ordre philosophique : contrairement à ces deux historiens, Platon cherche en effet ce qui est toujours, alors que Thucydide et Hérodote écrivent sur des réalités dont ils savent qu'elles ne sont pas fixes et qu'elles sont vouées à la destruction. Ainsi, bien que Platon partage avec eux le souci d'éclairer le devenir, ce souci ne conduit pas aux mêmes méthodes d'investigations du monde sensible, ni aux mêmes causes explicatives. Bien que les enquêtes historique et philosophique soient rétrospectivement distinguées, c'est bien dans les deux cas le même amour du savoir qui pousse ces trois prosateurs dans leur enquête sur le devenir. Mais la pensée de Platon ne saurait permettre d'attribuer le titre de philosophes aux deux historiens, car on ne saurait posséder un savoir stable en s'attachant à ce qui est instable par nature, ce qui les disqualifie également pour ce qui concerne la compétence politique, qui est, aux yeux de Platon, la compétence philosophique par excellence[26].

La relation entre Socrate et Platon

Socrate fut le maître qui marqua le plus profondément Platon, celui-ci le mettant en scène dans presque tous ses dialogues.
Article détaillé : Socrate.

Ce que Platon pensait de Socrate

La nature exacte des relations entre Socrate et Platon nous est entièrement inconnue. Rien ne permet ainsi de répondre à des questions comme celle de savoir à quel âge Platon rencontra Socrate, et combien de temps il le fréquenta. Nous ignorons également quelle place Platon occupait parmi les disciples de Socrate. Ces incertitudes sont d'autant plus remarquables que tous les dialogues de Platon, sauf Les Lois, mettent en scène Socrate, quoiqu'en ne lui donnant pas toujours le premier rôle. Quand, dans le Phédon[p. 39], Platon fait la liste des proches de Socrate ayant assisté à sa mort, il souligne sa propre absence par cette remarque : « Platon, je crois, était malade. »; cela est assez énigmatique car la formulation est hypothétique dans la bouche du mieux informé[27].

Malgré l'omniprésence de Socrate dans son œuvre, nous ne sommes pas non plus renseignés sur les sentiments de Platon à l'égard de son maître. Les dialogues comportent certes plusieurs louanges envers Socrate, mais prononcées par des personnages dont nous ne savons pas avec certitude si l'on doit les considérer comme des porte-paroles de Platon, bien que cela soit probable. Le seul passage où Platon parle de Socrate en son nom propre, est la Lettre VII, dont on admet généralement l'authenticité[p. 40] :

« Entre autres choses, Socrate, mon ami, qui était plus âgé que moi, et dont, je pense, je ne rougirais pas de dire qu'il était l'homme le plus juste de cette époque, ils [les Trente] l'envoyèrent avec d'autres chercher un citoyen, pour l'amener de force, en vue de le mettre à mort, dans le but évident de le rendre complice de leurs agissements, de gré ou de force ; mais lui, refusa d'obéir et préféra courir le risque de tout endurer, plutôt que d'être associé à leurs œuvres impies »

La mise en scène de Socrate par Platon est en revanche des plus explicites. Socrate apparaît, par exemple, comme l'ami véritable dans le Lysis, comme un homme courageux dans le Lachès, comme un sage dans le Charmide.

Une autre caractéristique, plusieurs fois remarquée par ses interlocuteurs et mise en scène par Platon, est l'ἄτοπία / atopia de Socrate, autrement dit son caractère déroutant[28] dont fait partie cette manœuvre ironique qui consiste à feindre l'ignorance, et à prétendre reconnaître le savoir de son interlocuteur. Ces mises en scène ne manquent pas d'apparaître cocasses (cf. par exemple, "Euthyphron") ; elles ne sauraient manquer de rappeler au lecteur contemporain un inspecteur Colombo enquêtant sur des notions philosophiques et se fichant éperdument de l'interlocuteur ; qui pourrait d'ailleurs affirmer que les metteurs en scène hollywoodiens ne se seraient inspirés (dans le cas de Colombo ?) de la fraîcheur et de l'esprit de jeunesse qui doivent caractériser, faussement teintée de solennel, l'œuvre de Platon et par elle le legs de la civilisation hellène. Cf. Timée (trad. V. Cousin) :

« Un des prêtres les plus âgés lui dit : O Solon, Solon, vous autres Grecs vous serez toujours enfants ; il n’y a pas de vieillards parmi vous. — Et pourquoi cela ? répondit Solon. — Vous êtes tous, dit le prêtre, jeunes d’intelligence ; vous ne possédez aucune vieille tradition ni aucune science vénérable par son antiquité »

L'influence de Socrate sur Platon

D'après Diogène Laërce[29], Platon aurait pris à Socrate sa pensée politique ; d'après Aristote, il lui aurait emprunté sa théorie du concept. Il pourrait donc paraître naturel de penser que Platon ait trouvé en Socrate les germes de nombre de ses théories, que ce soit en éthique, en philosophie politique, voire, en ce qui concerne la théorie des Idées. Mais dans quelle mesure la rencontre et la relation entre Socrate et Platon furent-elles essentielles pour l'évolution de sa pensée, c'est ce qui ne peut être déterminé exactement, et cette difficulté tient tant à la pauvreté des données biographiques, qu'au choix de Platon de faire de Socrate un personnage dans presque toutes ses œuvres.

Ce choix pourrait à première vue conduire à penser que l'on a là un indice tangible et fiable de la relation entre Socrate et Platon, et donc de l'influence du premier sur le second. Mais, les dialogues ne donnent en réalité que peu d'informations. On peut expliquer le choix du personnage de Socrate dans le cadre du genre du dialogue socratique : il s'agit en effet de défendre la mémoire de Socrate, comme l'illustrent le Phédon, le Banquet ou encore l'Apologie de Socrate. Mais dès lors que Socrate est un personnage de Platon, se pose le problème de la distinction entre un Socrate historique et un Socrate « platonicien ». Sur ce point, les lecteurs de Platon ont soutenu des interprétations très diverses, qui sont intrinsèquement liées à la question de l'influence de Socrate sur Platon. Ces interprétations vont, de la thèse selon laquelle tous les dialogues de Platon, sans exception, mettent en scène le véritable Socrate, jusqu'à la thèse selon laquelle, dès les dialogues socratiques, le personnage de Socrate n'est pas une copie du Socrate historique, mais un porte-parole de Platon. Or une avenue souvent envisagée est celle d'un Socrate de plus en plus porte-parole, et donc, de moins en moins historique, dans les œuvres tardives de Platon.

Les dialogues de Platon

Article principal : Dialogues de Platon.

Platon aurait écrit 35 dialogues. Les spécialistes de stylistique, de statistique lexicale[30] et d'histoire des idées ont classé les 35 dialogues attribués à Platon en grands « groupes », sans toujours s'entendre sur la stricte succession de chacun ou sur la périodisation par groupes[31]. Ce classement en groupes par le moyen de la stylométrie, se résume fondamentalement au trois groupes suivants[32] :

  1. dialogues de jeunesse : tous les dialogues qui ne sont pas dans les deux suivants ;
  2. dialogues de maturité : Phèdre, Parménide, République, Théétète ;
  3. dialogues de vieillesse : Lois, Philèbe, Sophiste, Politique, Timée, Critias.

Un tel groupement ne peut être cependant considéré de manière absolue : il existe en effet quelques variantes dont la succession proposée par L. Brisson.

La philosophie de Platon

Les influences

Platon fut un « disciple »[Note 2] de Socrate. Sa pensée s'inspire de celle de ce dernier mais aussi de celle d'Héraclite[p. 41] et de celle de Pythagore (fondateur du pythagorisme[p. 42]). Il est généralement considéré comme l'un des premiers et des plus grands philosophes occidentaux, sinon comme l'inventeur de la philosophie[33], au point que Whitehead ait pu dire : « la philosophie occidentale n'est qu'une suite de notes de bas de page aux dialogues de Platon »[34].

Le platonisme

Du fait d'une histoire deux fois millénaire, l'œuvre de Platon est passée par des processus de réfutations, de reprises, et de développements en des sens très variés, qui ont largement influé sur sa réception à travers les âges. Ce que l'on appelle la philosophie de Platon se présente moins sous la forme d'un système, que d'un ensemble de thèmes qui apparaissent dispersés dans des dialogues dont les qualités littéraires font parfois oublier qu'ils possèdent aussi des qualités philosophiques[35]. C'est le cas par exemple, jusqu'aux dernières décennies du XXe siècle, des dialogues dits socratiques qui, au moins en France, ont longtemps été étudiés dans le cadre des lettres classiques[36], les autres dialogues étant en revanche considérés comme relevant de la philosophie[37].

Certains de ces thèmes sont devenus célèbres en dehors-même du cercle des philosophes, non sans déformations : c'est le cas de l'amour platonique. D'autres thèmes font partie d'une « vulgate », d'un imaginaire philosophique du platonisme, qui est parfois loin de rendre compte de la complexité de l'œuvre ; parmi ces thèmes, les plus connus et étudiés sont la séparation de la réalité en deux mondes :

Cette grande richesse de l'œuvre de Platon, ainsi que la variété des interprétations, rendent difficile, sinon impossible, toute exposition générale, et les monographies sont de fait assez rares[38] Néanmoins, dans un article, Cherniss[39] a proposé de voir dans la théorie des Idées une hypothèse économique permettant de résoudre les questions ontologiques, éthiques, épistémologiques, qui se sont posées à Platon. Cette théorie a donc pour fonction, dans cette lecture, d'unifier les problèmes et les solutions formulés par Platon.

Contexte philosophique

La pensée de Platon s'inscrit dans un contexte philosophique où l'on trouve les présocratiques, les sophistes, et un savoir traditionnel transmis par les poètes, savoir qui constitue l'essentiel de l'éducation grecque. Platon construit sa philosophie par opposition à chacun de ces prétendants aux savoirs, cherchant à résoudre les difficultés philosophiques qu'ils soulèvent, mais il s'en approprie également certaines parties, en les formulant dans un cadre nouveau, défini par la théorie des Idées.

Les présocratiques ont proposé des théories de la nature, expliquant l'origine, la constitution, l'organisation et le devenir du monde, en excluant les explications recourant au divin. Mais ces théories sont pour Platon insuffisantes, car, en faisant du monde un ensemble de choses sensibles constituées d'éléments, elles n'en expliquent pas la raison d'être, ni ne parviennent à surmonter certaines contradictions ontologiques et épistémologiques. Platon adopte plusieurs attitudes à cet égard, selon la nature de l'explication. Ainsi, dans le Phédon, Socrate critique-t-il la thèse d'Anaxagore de l'organisation du monde, du fait de l'insuffisance de son explication des causes de cette organisation. En revanche, Platon adhère à la thèse héraclitéenne du devenir, mais en montre les limites : d'une part, cette thèse produit des discours contradictoires sur les choses, d'autre part elle ne rend pas compte de la régularité observable au sein même du changement. D'une manière générale, les philosophes de la nature ont confronté la pensée grecque à cette difficulté de savoir comment il pouvait être possible de penser les réalités, alors que celles-ci n'ont aucune stabilité. C'est dans ce contexte que Platon tente d'apporter une solution originale, qui a pour but d'expliquer l'intelligibilité du sensible, et de garantir à l'homme un authentique pouvoir de connaître.

Mais la pensée grecque se trouve également confrontée à des difficultés du côté des conduites humaines, c'est-à-dire en morale et en politique. Certains sophistes ont en effet affirmé le conventionnalisme de la loi, qui, dès lors, dépend de la volonté humaine, et se trouve donc être variable, relative, sans véritable fondement autre que le droit du plus fort[Note 4]. C'est alors la justice qui devient un effet de point de vue, et la vie en commun se transforme en un conflit permanent, qu'aucune valeur ne peut stabiliser, unifier, tout en assurant la paix et le bonheur des citoyens. Là encore, Platon va tenter de trouver une solution originale dans le but de mettre un terme au relativisme moral, de fonder la politique et d'établir les conditions de la cité juste.

Ainsi, tant dans le domaine de la connaissance que dans ceux de la morale et la politique, les problèmes rencontrés touchent aux changements et à l'instabilité des réalités. La résolution de ces difficultés pourra donc prendre aux yeux de Platon la forme d'une hypothèse ontologique unique, appelée « théorie des Idées » (ou des « Formes intelligibles »).

Théorie de la connaissance

Pour certains philosophes grecs, le monde est un flux perpétuel. Le cas vraisemblablement le plus connu est celui d'Héraclite, pour qui l'être même est devenir. Même s'il divise le monde en être et non-être, Parménide tient également pour vrai que le sensible est un changement continuel, bien qu'il ne lui accorde, au contraire d'Héraclite, aucun être. Or, Platon renvoie dos-à-dos ces deux théories contradictoires, en estimant qu'elles ne peuvent ni l'une ni l'autre établir des conditions satisfaisantes pour la connaissance.

Monde sensible et opinion

Références principales : Théétète ; Timée

La connaissance est pour Platon une activité de l'âme au contact de différents objets[40]. Parmi ces objets se trouve l'ensemble des choses sensibles dont la totalité constitue le monde. Le vivant, que Platon définit comme un corps animé, c'est-à-dire doté d'une âme, est affecté par ces objets sensibles, ainsi que par les processus internes à l'organisme. Platon nomme les impressions (pathêmata) ces mouvements provoqués dans le corps par les objets extérieurs au sujet qui perçoit. Toutes les impressions ne sont pas perçues par l'âme, seules le sont les sensations (aisthêsis) qui consistent en jugements de l'âme sur les objets qui l'entourent.

Dans le Théétète, Socrate et Théétète recherchent une définition de la science et examinent en premier lieu la question de savoir si la connaissance trouve sa source dans ce contact de l'âme au sensible. Les deux premières définitions considérées sont en effet que la science est la sensation et que la science est l'opinion. La première définition se heurte à l'objection suivante : le monde sensible est devenir, c'est-à-dire un ensemble d'objets qui naissent et qui se corrompent, s'accroissent et décroissent. Monde sensible et devenir sont synonymes. Mais si toute réalité est un devenir, elle se transforme sans cesse, et il est impossible d'y trouver la stabilité nécessaire à une connaissance vraie et certaine ; en effet, dans le sensible, un objet a tantôt telle qualité, tantôt telle autre, ou bien les deux en même temps, si bien que l'on en arrive à trouver des qualités contradictoires dans la même réalité. La conception héraclitéenne du monde sensible anéantit donc la connaissance, en soutenant que la nature du réel est d'être contradictoire. Mais cette conception fait également dépendre la connaissance, à la manière de Protagoras[41], des états empiriques de l'individu, selon la célèbre formule : « l'homme est la mesure de toute chose. » Ce relativisme, en posant que c'est de l'être-même des choses, et non seulement de leur connaissance, que chaque individu est le critère, fait de la connaissance un simple point de vue, et abolit toute possibilité de vérité.

Les impressions sensibles ne donnent donc pas le vrai, et Socrate peut ainsi réfuter la thèse selon laquelle la science est sensation. Il est alors aussi impossible que l'âme parvienne à des jugements vrais à partir des impressions : ces jugements, qui sont des opinions, ne peuvent en effet se justifier par aucun critère, si ce n'est par une autre impression. La réfutation de l'idée d'une connaissance à partir du monde sensible en tant que devenir permet à Platon d'opposer au mobilisme héraclitéen et au relativisme sophistique l'idée d'une science qui ne porte pas sur les impressions des sens ni sur les opinions que l'âme peut former sur elles, mais sur une réalité qui sera seulement perçue par une puissance intellectuelle, et qui recevra, pour cette raison, le nom de réalité intelligible[p. 43]. Cette réalité, et la puissance de l'âme qui la connaît, doivent être postulées afin de maintenir la possibilité d'une connaissance vraie. Ce faisant, Platon suppose deux choses : que la fondation du savoir présuppose l'équivalence entre être et vérité ; que l'âme doit être une réalité parente des réalités intelligibles, afin de pouvoir les contempler. Sans cette hypothèse d'une appréhension par l'intellect de l'âme, de réalités non sensibles, toute pensée et tout discours seraient impossibles.

Il y a, sur la sensation, de nombreuses opinions, qui peuvent se réduire à deux générales : les uns la font produire par le semblable, les autres par le contraire. Parménide, Empédocle et Platon sont au nombre des premiers; Anaxagore soutient la seconde thèse[42].

Hypothèse des Idées (les Formes intelligibles)

Articles détaillés : Théorie des Idées et Phédon (Platon).

Si connaître, c'est connaître quelque chose qui est, seul ce qui est absolument, peut être véritablement connaissable[p. 44]. L'objet de la connaissance réelle ne peut donc être le monde sensible, et doit présenter des propriétés différentes du devenir. Ce raisonnement a une double conséquence : d'un point de vue épistémologique, c'est par une réalité seule, véritable, que l'on connaît et que l'on peut répondre aux questions de Socrate, en donnant des définitions : Qu'est-ce que le Beau ? Qu'est-ce que le Courage ?, etc. Alors que la plupart des interlocuteurs de Socrate se tournent vers les choses sensibles, pour, comme réponse, lui présenter une multiplicité d'exemples, Socrate réplique qu'aucune de ces choses n'a de propriété par elle-même, mais qu'il faut, pour connaître ces propriétés, rassembler le multiple dans l'unité d'une réalité non sensible, de laquelle chaque chose sensible reçoit ses qualités. D'un point de vue ontologique, ces réalités doivent avoir, d'une part, une existence objective, distincte du monde sensible, et, d'autre part, doivent être la cause des qualités dans les choses. Lorsque Socrate demande ce qu'est le beau, sa question est précisée également de manière à demander par quoi les choses belles sont dites belles, et elles sont belles dans la mesure où l'on trouve en elles la présence d'une réalité non sensible, qui seule est définissable et connaissable.

Platon nomme Forme, Idée (traduction de είδη et de ιδέαι, également traduits par « idée ») l'hypothèse de ces réalités intelligibles. Ces Formes sont les véritables objets de la définition et de la connaissance. De l'échec de l'idée d'une connaissance sensible et des exigences de la connaissance, Platon peut déduire leurs propriétés : les Formes sont des réalités immatérielles et immuables, demeurant éternellement identiques à elles-mêmes, universelles et intelligibles, seules réellement étant, et indépendantes de la pensée. Ainsi, contrairement aux choses sensibles, dont la réalité est changeante, les Formes sont l'unique et vraie réalité. Cette réalité est désignée par Platon en ajoutant des adjectifs : réalité vraie, par exemple, ou par des comparatifs : « ce qu'il y a de plus réel », afin de la distinguer de la réalité sensible, qui n'est cependant réelle qu'en tant qu'elle possède un certain rapport à la réalité authentique. Ainsi Socrate dit-il : « Car je ne vois rien de plus clair que ceci, c’est que le beau, le bien et toutes les autres choses de même nature dont tu parlais tout à l’heure existent d’une existence aussi réelle que possible »[p. 45]. Si les choses sensibles ont quelque réalité, elles doivent la recevoir de ces Formes, Idées : « Mais si l’on vient me dire que ce qui fait qu’une chose est belle, c’est ou sa brillante couleur, ou sa forme, ou quelque autre chose de ce genre, je laisse là toutes ces raisons, qui ne font toutes que me troubler, et je m’en tiens simplement, bonnement et peut-être naïvement à ceci, que rien ne la rend belle que la présence ou la communication de cette beauté en soi ou toute autre voie ou moyen par lequel cette beauté s’y ajoute [...]. »[p. 45].

Les Formes sont également immuables, stables et éternelles pour la même raison. Elles sont aussi universelles, parce que si le sensible reçoit ses qualités d'elles, alors ces qualités introduisent de la ressemblance entre les choses sensibles, c'est-à-dire que ces qualités sont présentes dans plusieurs choses déterminée par une même Forme qui s'apparente alors à une classe. Enfin, les Formes sont indépendantes de la pensée : objets du savoir, elles doivent en effet exister hors de nous, sans quoi elles seraient subjectives, autrement dit relatives à un sujet, et changeantes selon les affections sensibles de celui-ci, ce qui les rendrait particulières et dépendantes de nos opinions. Cette théorie des Idées, ou théorie des formes intelligibles, qui constitue l'essentiel du platonisme, peut donc être résumée à deux notions, celle de Forme, qui désigne l'être intelligible, et celle de participation, qui désigne le rapport de l'être intelligible au devenir sensible, rapport par lequel ce dernier est déterminé et est connaissable. Du vivant de Platon, cette théorie s'est heurtée à des objections, que l'on retrouve formulées par Aristote dans La Métaphysique. Platon a lui-même formulé un ensemble d'objections, dans le Parménide, sans toutefois remettre en cause l'existence même de ces Formes, car elles sont à ses yeux des conditions nécessaires du discours et de la conduite humaine. Ces objections portent essentiellement sur l'impossibilité pour une Forme de se trouver en plusieurs réalités sensibles sans perdre son unité ou son identité, et sur la difficulté de doter les Formes d'une puissance causale qui, d'une part, contredit leur immuabilité, et, d'autre part, les fait entrer au contact du sensible, en leur faisant perdre de ce fait leur statut ontologiquement supérieur. Platon tentera de répondre à ces objections en reformulant le rapport des Formes aux réalités sensibles, par l'introduction de l'activité d'un démiurge, qui est décrite dans le Timée, c'est-à-dire par une récit mythique de la mise en ordre de l'univers en un tout ordonné.

Degrés de connaissance

Article détaillé : Analogie de la ligne.
L'ensemble de ces divisions peut être visualisé sur une ligne.

L'opposition entre le sensible et l'intelligible est une séparation ontologique ; à cette stricte séparation correspond une hiérarchie épistémologique, toute aussi stricte : l'opinion porte sur le monde sensible, et la science est la connaissance des réalités intelligibles. Cette division de la connaissance est exprimée par Platon au moyen de l'analogie de la ligne :

« Prends donc une ligne coupée en deux segments inégaux, l'un représentant le genre visible, l'autre le genre intelligible, et coupe de nouveau chaque segment suivant la même proportion ; tu auras alors, en classant les divisions obtenues d'après leur degré relatif de clarté ou d'obscurité, dans le monde visible, un premier segment, celui des images – j'appelle images d'abord les ombres, ensuite les reflets que l'on voit dans les eaux, ou à la surface des corps opaques, polis et brillants, et toutes les représentations semblables ; [...] Pose maintenant que le second segment correspond aux objets que ces images représentent, j'entends les animaux qui nous entourent, les plantes, et tous les ouvrages de l'art. [...] Examine à présent comment il faut diviser le monde intelligible. [...] De telle sorte que pour atteindre l'une de ses parties l'âme soit obligée de se servir, comme d'autant d'images, des originaux du monde visible, procédant, à partir d'hypothèses, non pas vers un principe, mais vers une conclusion ; tandis que pour atteindre l'autre – qui aboutit à un principe anhypothétique – elle devra, partant d'une hypothèse, et sans le secours des images utilisées dans le premier cas, conduire sa recherche à l'aide des seules idées prises en elles-mêmes. » La République, livre VI

Cette représentation de la connaissance par une ligne a une portée à la fois ontologique et épistémologique : l'âme, au contact d'une réalité, se trouve affectée selon la nature de cette réalité. Il y aura donc autant de manières d'être affecté qu'il existe de modes d'être, et ces manières d'être affecté définissent des manières de parler d'un objet ou de le penser. Les modes de connaissance et les réalités qui leur correspondent sont décrits dans ce texte, et ils sont les suivants : la conjecture porte sur les images et les illusions ; la croyance porte sur les êtres vivants et les objets fabriqués ; la pensée porte sur les notions et les nombres ; l'intellect porte sur les Formes. On peut ajouter à cela l'ignorance, bien que cela ne soit pas un mode de connaissance : l'ignorance correspond au non-être.

Les choses sensibles sont l'objet de la conjecture (eikasia) et de la conviction (pistis), et Platon désigne ces deux modes de connaissance comme opinion (doxa). L'opinion est ainsi un jugement qui porte sur des sensations. L'objet de l'opinion est instable, et celle-ci ne peut, pour cette raison, trouver en elle-même le critère de sa vérité et de sa fausseté. Les réalités intelligibles sont elles l'objet de la pensée et de l'intellect, et Platon les désigne par le nom de science. La pensée correspond aux raisonnements discursifs, se fondant sur des hypothèses, et elle comprend toutes les sciences particulières, comme les mathématiques. L'intellect est au contraire une intuition de ce qui est, de manière inconditionnelle, et cette intuition est donc la science par excellence, que Platon nomme dialectique, c'est-à-dire la science des Formes et de leurs rapports. À cette Forme la plus haute de la connaissance, à proprement parler la seule connaissance vraie, correspond l'activité par excellence de l'âme, qui est l'activité de l'intellect.

L'analogie de la ligne répond ainsi aux questions de savoir ce qui est connu, et quels types de connaissance correspondent aux différentes sortes de réalités connues. Mais, il faut encore savoir quelles méthodes y correspondent et quelles sont les facultés de l'âme qui permettent la connaissance. Les dialogues présentent plusieurs moyens par lesquels il est possible d'acquérir un savoir, ou du moins d'avancer dans l'initiation philosophique ; ce sont, en premier lieu, le ressouvenir, la réfutation, et la dialectique, cette dernière n'étant rien d'autre que la philosophie elle-même. Platon utilise par ailleurs plusieurs procédés d'exposition de sa pensée, qui sont la dialectique, le mythe et le paradigme.

L'amour de la connaissance

Éros (bobine attique à figures rouges v. 470–450 av. J.-C, musée du Louvre). L'œuvre de Platon accorde une place fondamentale au désir (« eros » en grec).
Article détaillé : Le Banquet (Platon).

D'une manière qui est entièrement inconnue à l'esprit de la philosophie contemporaine, la philosophie de Platon ne peut être approchée sans comprendre le rôle fondamental d'un désir violent et multiforme qui s'empare tant de l'âme que du corps : l'amour (en grec ἔρως, érôs). L'amour est une forme de possession et de délire divins[p. 46] qui se manifeste par un attachement à une personne, à un objet ou même à une idée, accompagné de la pensée que la satisfaction de ce désir peut être une source de modification et d'élévation de l'existence. Cet amour se manifeste de nombreuses manières, qui vont de l'accouplement ou de la débauche, à l'amour de l'élève pour le maître, ou encore à l'excitation frénétique de l'âme poursuivant une idée, telle que le Bien[p. 47]. Il n'y a pas, pour Platon, plusieurs natures du désir érotique qui se manifesteraient dans plusieurs formes d'amour, qui n'auraient qu'un nom en commun. Platon distingue et hiérarchise l'amour selon les différentes finalités que l'on peut observer, mais cette variété des fins du désir n'est qu'une variété dans un même genre. Ainsi, si Platon condamne l'amour charnel ou bestial, qui a pris en Grèce une forme pédophile, et s'il place au plus haut cette forme de délire de l'âme qui possède le philosophe en quête du savoir, la véritable différence entre ces deux orientations se trouve, non dans la nature du désir-même, mais dans la capacité de contempler le Beau. C'est pourquoi, cette différence dans la finalité de l'amour se manifeste au contact de ce dernier :

« [...] la beauté seule jouit du privilège d’être l’objet le plus visible et le plus attrayant. L’homme pourtant dont l’initiation n’est point récente ou qui s’est laissé corrompre, ne s’élève pas promptement de la beauté d’ici-bas vers la beauté parfaite, quand il contemple sur terre l’image qui en porte le nom. Aussi, loin de se sentir frappé de respect à sa vue, il cède alors au plaisir, à la façon des bêtes, cherche à saillir cette image, à lui semer des enfants, et, dans la frénésie de ses fréquentations, il ne craint ni ne rougit de poursuivre une volupté contre nature. [251] Mais l’homme, qui a été récemment initié, ou qui a beaucoup contemplé dans le ciel, lorsqu’il aperçoit en un visage une belle image de la beauté divine, ou quelque idée dans un corps de cette même beauté, il frissonne d’abord, il sent survenir en lui quelques-uns de ses troubles passés ; puis, considérant l’objet qui émeut ses regards, il le vénère comme un dieu. »[p. 48]

Cette poursuite de la Beauté[43], dans laquelle l'âme s'engage en tendant tout son désir vers un « là-bas », pose alors plusieurs questions que Platon aborde au fil des dialogues : la question du statut du monde sensible comme reflet de modèles intelligibles, la question de l'accès intellectuel à ces modèles, et la question de leur nature. Mais, outre ces questions d'ordre épistémologique, il faut garder à l'esprit que c'est le destin de l'âme qui se joue ici, et qui est le premier et même le seul souci du philosophe ; aussi sa nature, comme ses vertus, doivent-elles également faire l'objet d'une recherche. Mais, cette recherche touche tant à l'éthique (excellence de l'âme), qu'à la politique (éducation de l'âme), et à la cosmologie (place et structure de l'âme dans le tout ordonné), domaines qui ont besoin d'une explication et d'un fondement, que les contemporains qualifieraient d'ontologiques.

La réminiscence

Article détaillé : Réminiscence.

Platon a montré que la connaissance sensible est moins vrai : l'âme ne peut en effet parvenir à l'être par le moyen des sensations. Il faut donc, aux yeux de Platon, qu'une certaine puissance de l'âme soit au contact des réalités vraies pour produire une science authentique, ce qui implique également que l'âme participe d'une certaine manière à l'intelligible. Ce rapport de l'âme à l'intelligible est décrit à travers le ressouvenir, et les mythes que Platon lui rattache. La réminiscence (en grec ἀνάμνησις, anamnésis ; également traduit par ressouvenir) est le ressouvenir par l'âme, à l'occasion d'une perception sensible, de connaissances qu'elle a acquises en dehors de son séjour dans un corps, et qu'elle a perdues lors de sa réincorporation. L'acquisition de la connaissance doit alors débuter par une re-connaissance, avant de se poursuivre par l'épreuve de la réfutation. Cette thèse suppose l'immortalité de l'âme, et l'existence de réalités intelligibles, puisque c'est en séjournant dans un monde intelligible, supérieur au monde empirique, que l'âme a contemplé les réalités divines. L'un des exemples les plus célèbres de cette idée se rencontre dans le Ménon[p. 49].

La dialectique

Article détaillé : Dialectique.

Platon utilise la dialectique selon plusieurs méthodes de conduite du raisonnement[44]:

  • méthode des conséquences, qui consiste à examiner et à éprouver toutes les conséquences d'une hypothèse [45];
  • méthode de division, qui consiste à diviser l'objet que l'on cherche à définir, en procédant à l'analyse des espèces et des différences qu'il contient[46].

Utilisation du mythe

Platon utilise le mythe à plusieurs reprises. Cette utilisation, dans le cas de la description du monde, s'explique par la difficulté suivante : si, pour connaître une chose, il faut connaître sa causalité, comment connaître l'acte créateur de la cause ? L'acte de connaissance doit en effet être le reflet d'un acte créateur qui est inconcevable : comment, dans ce cas, parler de l'origine du monde ? L'acte créateur n'est-il pas au-delà de tout discours rationnel ? Pourtant, l'acte créateur fonde la possibilité de la rationalité. C'est ainsi que Platon se demande comment parler de l'origine du monde sensible, puisque la connaissance dialectique, qui articule les Formes intelligibles, est ici inopérante. On ne peut parler du monde que par un discours qui lui ressemble : un mythe vraisemblable, apparenté au sensible. Le mythe vraisemblable décrit une situation en transposant dans l'espace et le temps les relations que la pensée conçoit, sans pouvoir les exposer dialectiquement ; le mythe doit donc être interprété, il ne doit pas être confondu avec la réalité. Il faut traduire en rapport d'idées ce que le mythe a assemblé en fait. Le récit de l'organisation du cosmos par le démiurge en donne un exemple.

L'organisation du cosmos par le démiurge

Référence principale : Timée

La théorie des Idées soulève des difficultés qui se résument principalement à la question du rapport de participation entre le monde sensible et les réalités intelligibles. Dans le Timée, que l'on considère comme l'un de ses derniers dialogues, Platon s'efforce de proposer une élucidation de cette question, en présentant le récit mythologique de l'organisation du cosmos par un démiurge. Tous les interprètes ne s'accordent pas sur la question de savoir si cette solution doit être considérée comme tardive, et résultant de remises en cause lisibles dans le Parménide, ou si elle n'est en réalité qu'une exposition explicite de thèses déjà présentes dans des dialogues ultérieurs, comme le Banquet.

Ce récit, qui décrit la fabrication du monde, des dieux, et de tous les êtres vivants, met en présence plusieurs réalités (Timée, 29-50) : 1) le démiurge ; 2) les Idées, qui sont des modèles ; 3) l'Âme du monde, première réalisation du démiurge, et conforme aux Idées ; 4) le Corps du monde, deuxième réalisation du démiurge, et conforme à l'Âme du monde ; 5) la khôra, ou matériau, qui est une réalité radicalement indéterminée. Le démiurge informe le matériau, en prenant les Formes pour modèles. Ce récit est un mythe, c'est-à-dire que le démiurge comme la khôra ne sont pas supposés représenter des entités réelles.

Le démiurge est un dieu hors du monde, ce qui est une nouveauté pour la pensée grecque, qui fabrique le monde sensible, l'âme du monde et les dieux à la manière d'un artisan : le regard fixé sur les Formes, qui jouent le rôle de causes finales, il introduit de la régularité dans un matériau préexistant. Il met les éléments constitutifs du monde en ordre, par une unité proportionnelle. Il organise les éléments avec le même rapport entre eux : c'est l'unité proportionnelle du monde visible et corporel. La création se fait donc, suivant une mesure ; le temps est fabriqué suivant le nombre. Le monde sensible est un dieu vivant engendré : pour accroître cette ressemblance, le démiurge fabrique une image mobile de l'éternité, résultat d'une activité productrice, qui règle les mouvements des astres, pour leur donner un mouvement circulaire uniforme : les astres deviennent les instruments de mesure du temps par leur révolution apparente. Le temps imite l'éternité dans la mesure où il se meut, en cercle, suivant le nombre, l'éternité étant éternellement identique à elle-même. La partie éternelle de l'âme est directement produite par le démiurge, avec les ingrédients mêmes de l'âme du monde.

Le démiurge ne produit pas les corps directement, mais délègue à des dieux subalternes qui les fabriquent, tels des potiers. En revanche, l'âme du monde est produite directement, de toute pièce, par le démiurge.

Le monde est un être vivant, un corps et une âme, engendré à la suite d'une décision réfléchie d'un dieu, selon des procédés artisanaux. Le monde sensible est un cosmos (ordre, arrangement) qui se constitue à partir d'éléments qui lui préexistent. C'est un assemblage de Formes intelligibles et de matière chaotique. Ce n'est donc pas une création ex nihilo.

L'âme du monde est un être vivant qui possède âme, mouvement, animation ; son mouvement est mouvement de connaissance, cause de régularité des cycles célestes. L'âme est automotrice, se meut elle-même, et est donc principe du mouvement de chaque être. Elle est donc, aussi, immortelle et impérissable. L'âme du monde est principe et cause première de l'univers : en tant que principe premier, elle doit être inengendrée ; or, dans le mythe, le démiurge la fabrique.

L'organisation politique de l'excellence

L'ontologie de la théorie des Idées rend possible une connaissance certaine, et à cette ontologie Platon va "faire correspondre" (prosphérein) une théorie de la connaissance : l'âme est donc en mesure de découvrir les Formes qui lui permettront d'exercer correctement ses « facultés », dont la plus haute, parce qu'elle est celle qui met en contact avec les réalités les plus vraies, l'intellect. Cet exercice excellent des facultés de l'âme détermine ce qui constitue ses vertus et son bien.

C'est sur cette question du bien et des facultés de l'âme que va reposer la philosophie politique de Platon, question qui touche tant aux conduites humaines individuelles qu'à l'éducation : il n'y a pas, en effet, pour Platon, de vertu que l'on pourrait acquérir de manière individuelle, et la philosophie elle-même est une activité de la pensée qui suppose toujours une éducation et des conditions politiques qu'il reste à définir. La philosophie politique est donc, pour Platon, inséparable de la philosophie morale (comme c'est le cas pour toute la philosophie grecque ancienne) : la politique, que Platon est le premier philosophe à identifier comme telle, a pour but de prendre soin de l'âme des citoyens, par le moyen de l'éducation. Pour ces raisons, la politique est la science du bien en général, et elle est donc supérieure à toutes les autres sciences et techniques, c'est pourquoi Platon la désigne comme technique royale.

La politique et l'éthique ont pour point de départ et pour finalité l'âme ; il faut donc au préalable exposer la psychologie platonicienne, dont on verra également quels rapports essentiels elle entretient avec la cosmologie.

L'âme

Le mot « âme », en grec ψυχή, est de loin celui qui revient le plus fréquemment dans les dialogues de Platon, en particulier dans Phèdre, La République et Phédon. Dans les rares dialogues où il n'est pas employé, on trouve toujours un ou plusieurs discours y faisant allusion. Malgré l'omniprésence de ce terme, Platon n'en a jamais donné de définition complète. En revanche, il en donne des descriptions nombreuses et variées, qui privilégient chacune telle ou telle qualité ou propriété. Ainsi, à défaut de pouvoir fournir une définition précise de l'âme chez Platon, il est possible d'établir une classification de ces descriptions. Néanmoins, certaines propriétés semblent plus essentielles que d'autres : c'est le cas de la conception de l'âme comme principe du mouvement, et de la pensée[p. 50],[p. 51].

Pour Platon, l'âme est un être apparenté aux Idées, au divin, qui a un mouvement propre. Elle est immortelle et se compose de trois puissances :

  • l' épithumia (ἐπιθυμία), l'« appétit », élément concupiscible, désirant, le siège du désir (faim, sexualité), des passions.
  • le thumos (θυμός), la « colère », élément irascible, agressif ; ce pourrait être traduit par « cœur » ; il est cette partie de l'âme susceptible d'emportement, de colère, de courage.
  • le logistikon (λογιστικόν), le « raisonnable », ou esprit, élément rationnel, immortel, divin ; c'est un « démon » (daimon).

Platon expose cette constitution « tripartite » de l'âme dans le Phèdre et dans La République. Le noûs, ou la raison, en tant qu'il a seul rapport à l'intelligible, est le plus noble des trois. Le second, caractéristique de la volonté d'enrichissement personnel, de bonne réputation, et des tentatives de prouesses qui en découlent, n'est utile que s'il se met au service de l'élément raisonnable, afin de maîtriser le troisième, qui mène irrémédiablement au vice. En d'autres termes, la vie bonne suppose que s'établisse, entre ces trois parties de l'âme, une hiérarchie : le noûs gouverne le thumos, qui gouverne l’épithumia. Chacune de ces parties possède ainsi une vertu, qui lui est propre : la sagesse pour l'esprit, le courage pour l'élément agressif, et la tempérance, pour l'élément désirant ; l'harmonie de ces trois parties est la vertu de justice. La pensée de Platon a également évolué[p. 52]. Ce tripartisme remonte à Pythagore selon Diogène Laërce[p. 53]. Platon croyait l'âme immortelle, et chercha, sans prétendre pouvoir y parvenir, à le prouver dans le Phédon, qui raconte le dernier jour de Socrate. Cette immortalité se lie à la thèse de la migration des âmes et de leur purification après la mort, qu'il décrit dans trois mythes, à la fin du Gorgias, de La République et du Phédon. Platon admet cinq formes d'âmes : celles des dieux, des démons, des héros, des habitants de l'Enfer, des humains[p. 54].

La meilleure manière de gouverner la vie commune

Références principales : La République, Le Politique, Les Lois

Platon explique la nature et la portée de sa pensée politique au livre I des Lois[p. 55], à l'aide d'un mythe, le mythe dit de la marionnette. Ce mythe représente l'homme comme une marionnette fabriquée par les dieux ; mais, à la différence des marionnettes habituelles, les fils qui servent à la manipuler, sont, dans le cas des vivants, à l'intérieur du corps, parce qu'ils symbolisent les affects : plaisir, douleur, crainte, et raisonnement, qui tirent les hommes en des sens contraires ; parmi ces affects, celui du raisonnement est le plus faible. Ce mythe reprend les différents mythes représentant l'âme comme une réalité composée de parties, qui ne sont pas spontanément en harmonie. Cette représentation de l'homme comme une marionnette, c'est-à-dire comme une réalité vivante, qui n'est pas, par nature, guidée par la raison, justifie pour Platon le rôle de la politique : l'âme, a en effet besoin d'être éduquée, pour être en mesure de réaliser son bien, et cette éducation passe par les lois conçues comme un discours rationnel, que la cité adresse aux citoyens.

Cette représentation anthropologique explique donc que la recherche de la meilleure constitution soit le principal souci de Platon : le but d'une cité bien constituée est de faire mener à ses citoyens une vie conforme au bien, vie qui est une vie heureuse, et qui ne peut se réaliser qu'en fonction de l'état de l'âme, et dans le cadre d'une vie commune. L'âme est ainsi toujours la finalité des spéculations, tant politiques que métaphysiques, de Platon.

Le point commun des différentes réflexions politiques que l'on trouve dans les dialogues est la question de savoir comment unifier la multiplicité des éléments, des fonctions et des forces composant une cité, autrement dit la question de savoir ce que doit être une vie commune. La politique est alors conçue comme une technique qui, dans un territoire donné, et face à des éléments hétérogènes, doit prendre soin de réaliser l'unité de la cité, en la dotant d'un régime politique (politeia, également traduit par constitution). Ce soin de l'unité, c'est la philosophie, et le philosophe est celui qui, de droit, doit gouverner la cité[47].

La recherche de ce régime constitue l'essentiel de La République et des Lois, mais les dialogues socratiques témoignent déjà de l'orientation politique de Platon, puisqu'il s'y livre à des critiques virulentes des rhéteurs. Cette recherche écarte d'emblée toutes les formes de cités existantes, tant démocratiques qu'aristocratiques : les dissensions qui marquent en effet les cités réelles, dissensions entre des partis, entre des classes, sont aux yeux de Platon un symptôme de corruption, et l'on ne saurait donc tenir pour politiques des régimes qui ne peuvent parvenir à faire vivre ensemble des citoyens.

Dans La République, Socrate est engagé dans la recherche d'une définition de la justice. Cherchant cette définition au niveau de la cité, il étudie la répartition des fonctions en son sein, pour montrer que le meilleur régime ne dépend pas tant de tel groupe de la cité, que de l'exercice approprié de chaque fonction dans la cité, considérée comme un tout. La cité juste est ainsi composée de trois groupes, les gouvernants, les gardiens et les producteurs. À chaque groupe correspond particulièrement une vertu, mais tous les groupes ne possèdent pas seulement une seule et unique vertu : si les gouvernants possèdent la vertu de sagesse, ils sont aussi tempérants et courageux ; les gardiens sont courageux, mais également tempérants, et puisque les gouvernants sont choisis dans ce groupe, les gardiens reçoivent aussi une éducation à la sagesse ; enfin, les producteurs, c'est-à-dire le plus grand nombre, possèdent la vertu de tempérance.

Dans Les Lois, Platon fait discuter plusieurs vieillards sur la valeur de la constitution de plusieurs cités. Cherchant les meilleurs moyens d'inculquer les vertus, Platon parle notamment des vertus éducatives de l'ivresse (Livre I).

Classification des régimes politiques

Dans La République (545c–576b), Platon décrit la manière dont on passe d'un régime politique à un autre. Cet enchaînement n'a pas, pour Platon, une valeur historique : comme dans le Timée, il s'agit de présenter une succession essentiellement logique. Platon en distingue donc cinq :

  1. l'aristocratie, le gouvernement des meilleurs, est le seul régime parfait selon lui. Il correspond à l'idéal du « philosophe-roi », qui réunit pouvoir et sagesse entre ses mains. Ce régime est suivi de quatre régimes imparfaits :
  2. la timocratie, régime fondé sur l'honneur ;
  3. l'oligarchie, régime fondé sur les richesses ;
  4. la démocratie, régime fondé sur l'égalité ;
  5. la tyrannie, régime fondé sur le désir ; ce dernier régime marque la fin de la politique, puisqu'il abolit les lois.

Le déséquilibre dans les cités, par lequel on passe d'un régime à un autre, correspond au déséquilibre qui s'inscrit dans la hiérarchie entre les parties de l'âme. De même qu'une vie juste suppose que le noûs gouverne le thumos, et que celui-ci contrôle l’épithumia, la cité juste implique le gouvernement des philosophes, dont le noûs, la raison, est la vertu essentielle. Au contraire, le régime timocratique correspond au gouvernement du thumos, le courage et l'ardeur guerrière, vertus essentielles des soldats, ou gardiens de la cité, et le régime tyrannique à celui de l’épithumia : la tyrannie est donc un régime où seules dominent les passions du tyran.

Le mythe de l'Atlantide

Dans deux dialogues Platon, le Timée et le Critias, évoque le mythe d'une île en avance technologiquement et socialement nommée Atlantide, et qui aurait existé 9,500 ans avant J-C. Socrate explique que ce mythe lui a été raconté par Solon, l'ayant lui-même appris en Egypte. Platon utilise là un mythe permettant de soutenir sa conception d'une société juste et très hiérarchisée, en effet les atlantes auraient été divisés en trois castes, à l'image de la République platonicienne.

Le philosophe roi

Article détaillé : Philosophe roi.

Le philosophe, représenté par le personnage de Socrate[48], est une des figures centrales des dialogues de Platon[49],[50]. C'est la nature et la place de ce type d'homme qui est souvent l'objet de ses réflexions. Le philosophe, selon Platon, doit devenir un législateur et un réformateur politique, afin d'obtenir l'instauration de la justice dans la Cité. Toutefois, selon certains dialogues comme la République, il faut le forcer à le devenir, car il est fort probable qu'il ne consente pas à « retourner dans la caverne». Mais, si ceci est réalisé à tour de rôle par tous les philosophes, et pour le bien de tous, il est fort probable qu'ils acceptent. Il est par ailleurs intéressant de remarquer que Platon n'ait écrit aucun dialogue portant le nom de Le philosophe, alors qu'il a légué un Sophiste et un Politique. En fait, si la question du philosophe revient souvent, son portrait est à constituer à partir de plusieurs dialogues, et souvent en creux, par contraste avec une figure opposée au philosophe, à savoir principalement le sophiste.

L'enseignement oral de Platon

Platon aurait dispensé « un enseignement oral et ésotérique à l'Académie » mais ses motivations demeurent inconnues. Aristote[p. 56] parle des « enseignements non écrits » (άγραφα δόγματα) de Platon, et il mentionne une certaine leçon, intitulée Sur le Bien (Περì τάγαθου), que prononça Platon, qui, à la surprise des auditeurs, Aristote, Speusippe, Xénocrate, Héraclide du Pont, portait « sur les Mathématiques, c'est-à-dire sur les Nombres, sur la Géométrie, sur l'Astronomie, et sur le fait que le Bien c'est l'Un »[p. 57]. Par ailleurs, Platon lui-même condamne l'écrit[51], et il fait allusion à des connaissances secrètes[p. 58], et à une connaissance plus fondamentale[52]. Cet enseignement oral peut être contemporain de la fondation de l'Académie selon H. J. Krämer, alors qu'il est plus tardif (vers -350) pour K. Gaiser[53].

Marie-Dominique Richard résumait ainsi le contenu de cet enseignement oral[54] : « Le platonisme non écrit est une doctrine émanatiste, engendrant, par l'action réciproque des deux principes, l'Un-Limite et la Dyade indéfinie du Grand et du Petit, les Nombres idéaux d'abord, puis les Idées, et, à partir des Idées, par un processus mathématique de détermination, le sensible lui-même. » Dans ses enseignements non écrits Platon pose deux principes en dualité, c'est-à-dire opposés comme Bien et Mal, et ne dérivant pas l'un de l'autre : l'Un et la Dyade indéfinie du Grand (Excès) et du Petit (Défaut). Entre ces deux principes, se placent donc des êtres intermédiaires ou metaksu. Platon, ici, identifie les Idées et les Nombres idéaux. Les objets mathématiques ne sont pas à la frontière de l'intelligible et du sensible, mais ils couvrent ces deux lieux. Platon établit cette hiérarchie :

  1. l'Un, le premier principe, Monade, identique au Bien ;
  2. les Idées supérieures ou Nombres idéaux, les Nombres de la Décade : 1, 2, 3, et 4, qui correspondent respectivement aux dimensions du Tout (nombre, ligne, surface, volume) ;
  3. les Idées particulières, faites de forme, la Monade, et de matière, la Dyade;
  4. l'Âme du monde, les êtres mathématiques, le système des âmes singulières ; à ce niveau agit le démiurge, qui compose les quatre Éléments avec des triangles (Timée, 55)
  5. le sensible, le monde des corps visibles, le Tout, vivant et ordonné, représenté par un dodécaèdre ;
  6. enfin, en bas, le second principe, la Dyade, le Grand-et-Petit, matière informe, cause matérielle de tous les êtres.

C'est le futur schéma de Plotin, avec ses trois hypostases ou principes divins (Un, Intellect, Idées supérieures et Idées particulières, Âme). Les Nombres idéaux sont antérieurs aux Idées, et, semble-t-il, les Idées, qui procèdent donc des Nombres de la Décade, sont des Nombres. Cette théorie a été étudiée par Léon Robin (La théorie platonicienne des Idées et des Nombres d'après Aristote, 1908), et les témoignages ont été regroupés, édités et traduits par Marie-Dominique Richard[55],[56]. Aristote soutient que la théorie de l'Un et de la Dyade préfigure sa propre distinction de la cause formelle et de la cause matérielle[57] ; les néoplatoniciens pythagorisants, comme Syrianos, Nicomaque de Gérase, Jamblique, ont assimilé le Un à la Monade, ils identifient l'opposition Limite – Illimité du Philèbe (16c) avec la Monade – Dyade des pythagoriciens[58]. Certains spécialistes, dont Harold Cherniss[59], nient cet enseignement oral. D’après Théophraste, Platon[60] tendait à identifier l’Idée du Bien avec le Dieu suprême. Le bien est la valeur normative de la morale, avec comme opposé le mal.

Le platonisme après Platon

Statue présumée de Platon à Delphes.

Platon marqua de façon durable la philosophie de l’Antiquité, par l’influence qu’il exerça, sur Plotin notamment, ou parce qu’on le considérait comme le philosophe par rapport auquel on devait se situer. Il fut aussi une source d’inspiration ainsi que la cible de biens des critiques. Aristote, Epicure ou les Stoïciens, par exemple, développèrent cependant une critique plus ou moins systématique de l’éthique, de la théorie de la connaissance, ou de la philosophie politique de Platon. Quant à Plotin ou aux Pères de l’Église, ils n’ont pas manqué de voir en Platon un philosophe, quasi divin (Plotin), ou, en tout cas, une source d’inspiration importante.

La signification des œuvres de Platon a fait l'objet de nombreuses controverses depuis l'Antiquité. Certains ont fait de Platon un dogmatique ; d'autres un sceptique. Platon fut tantôt récupéré par des courants mystiques : élévation de l'âme vers le bien, au-delà de l'être, tantôt par des philosophies purement rationalistes. La diversité de ses dialogues, leurs formes variées, les nombreuses apories qui y sont soulevées, les questionnements qu'ils suscitent, expliquent ces importantes divergences d'interprétation. Dans l'Antiquité, l'ensemble des dialogues fut organisé d'après un ordre progressif de lecture, alors que les modernes, qui prétendent à un savoir plus critique, se sont surtout efforcés d'établir l'ordre réel de leur composition, ainsi que leur authenticité. Ces essais d'organisation du corpus dépendent en fait toujours de l'idée que l'on se fait du platonisme, ce qui a conduit des critiques à exclure plus ou moins arbitrairement certains dialogues, et tous les dialogues à être remis en question.

Traditions platoniciennes

Articles détaillés : Académie de Platon et néoplatonisme.

Le mouvement platonicien se multiplie en divers courants, écoles, ou périodes : Académie de Platon, moyen-platonisme, néoplatonisme, etc. On appelle platonisme mathématique ou réalisme mathématique une théorie philosophique sur les mathématiques, qui croit que les entités mathématiques, nombres, figures géométriques, ne sont pas abstraites par l'esprit humain, mais indépendantes de lui, avec une existence propre. Déjà, pour Platon, les « Nombres, Lignes, Surfaces et Solides » ont une existence en soi, ce sont des substances éternelles, séparées des êtres connus par les sens. Le platonisme mathématique traite de « deux types de questions : la première est ontologique, et concerne le mode d'existence des objets mathématiques, et la seconde est épistémologique, portant sur la question de savoir comment nous identifions les objets mathématiques » explique Jacques Bouveresse. Des conceptions modernes se rapprochent de celle de Platon : avec Charles Hermite[61], Albert Lautman[62] ou Alain Connes[63].

Les commentateurs de Platon

Il semble que Crantor ait composé, vers 350 av. J.-C., un commentaire du Timée. Dès le IIe ou Ier siècle av. J.‑C., Platon fut commenté systématiquement. On sait que Crassus avait lu à Athènes, en 110 av. J.-C., le Gorgias, sous la direction du philosophe académicien Charmadas. Le commentaire philosophique prit de l'importance à partir du IIIe s. apr. J.-C. Les cours de Plotin consistaient avant tout en l'explication des textes de Platon et d'Aristote, étudiés avec l'aide des textes des commentateurs antérieurs : Sévère, Cronius, Numénios d'Apamée, Gaius, Atticus pour Platon[64]. Les néoplatoniciens ont donné de nombreux et amples commentaires des dialogues, dont Porphyre, Jamblique, Proclos. Parmi les monuments, il faut citer, traduits en français, Proclos (Commentaires sur le 'Timée, Commentaires sur la République), Damascios (Commentaires sur le 'Parménide' de Platon). L. G. Westernink a publié les commentaires grecs du Phédon, par Olympiodore le Jeune et Damascios[65].

Les traductions médiévales de Platon

Timée, traduit en latin par Calcidius (IVè s.). Manuscrit du Xème s.

Seule une infime partie des textes de Platon furent traduits en latin et accessibles au Moyen Âge. Ils sont accessibles grâce à l'édition du Corpus Platonicum Medii Aevi (sous la direction de W. David Ross, 1938), divisé en deux sections l'une consacrée aux traductions latines, l'autre aux traductions en langue arabe.

Le Plato latinus (édité par R. Klibanski dès 1950 en 3 volumes), regroupe lui :

  • Le Timée par Calcidius au IVè s. (jusqu'à 53c) dans le cadre d'un commentaire.
  • Le Ménon par Henri Aristippe au milieu du XIIe s. (Plato latinus, t. 1)
  • Le Phédon par Henri Aristippe (Plato latinus, t. 2)
  • Le Parménide avec le commentaire de Guillaume de Moerbeke (après 1260) (Plato latinus, t. 3.)

Le Plato Arabus (avec al-Farabi), regroupe :

  • une Synopsis du Timaeus attribuée à Galen,
  • le De Platonis Philosophia d'Al-Farabi
  • le traité d'Al-Farabi sur les Lois de Platon.

Dans le cadre de ce projet, quelques autres études concernant l'histoire du platonisme ont été élaborées et publiées.

Platon dans la philosophie analytique

Les thèses platoniciennes, leur problématisation et leurs enjeux philosophiques soulevés par Platon lui-même[Note 5], ont eu une immense postérité et sont encore discutées et défendues de nos jours au sein du courant de la philosophie analytique[2], comme le platonisme mathématique. Si Karl Popper a critiqué le « communisme de Platon »[66], certains aspects du platonisme furent réactualisés par Frege[67] et Russell[68], et Gilbert Ryle a souligné l'importance de dialogues comme le Théétète pour les études philosophiques contemporaines[69].

Œuvres

Article détaillé : Dialogues de Platon.
Catégorie principale : Œuvre de Platon

L'ensemble des œuvres de Platon se compose de plus d'une trentaine de dialogues, de lettres, d'un livre de définitions et de six dialogues apocryphes. La liste suivante suit l'ordre chronologique proposé par Luc Brisson. Les sous-titres, donnés entre parenthèses, ne sont pas de Platon.

  • Œuvres apocryphes : le Pseudo-Platon
    • Axiochos
    • Démodocos
    • Eryxias
    • De la Justice
    • De la vertu
    • Sisyphe
    • Parmi les lettres attribuées à Platon, les n° II, VI, IX, XII et XIII viendraient, selon Luc Brisson et son classement (Flammarion, 2008) d'un milieu pythagoricien fin du IIe ou début du Ier siècle av. J.‑C..

Éditions

  • Consulter la liste des éditions des œuvres de cet auteur liste des éditions.
  • Platonis opera. Recognovit brevique adnotatione critica instruxit Burnet, 5 vol. Oxford, 1900-1910
  • Platon, Œuvres complètes, Belles Lettres, 14 vol.

Traductions

En français, les traductions de qualité sont peu nombreuses. Celles d'Émile Chambry sont considérées comme imprécises, et celles de Léon Robin sont en revanche considérées comme les plus rigoureuses ; d'après Luc Brisson, en effet, « quand on a le texte grec devant les yeux, on s’aperçoit qu’il ne manque rien à ces traductions, et qu’elles ont un souci de rendre compte de tous les mots. »[36] Cette exactitude tend toutefois à rendre le texte français difficile à lire.

  • Platon, Œuvres complètes, traduction Léon Robin, 1940/1943
  • Platon, Œuvres complètes, Flammarion, 2008 (reprend les traductions publiées en poche chez le même éditeur, ainsi que les dialogues douteux)

Bibliographie

Sources sur la biographie de Platon

  • Platon, lettre VII (354 av. J.-C.), in Lettres, Garnier-Flammarion, 1994, p. 133-232.
  • Luc Brisson, « La lettre VII de Platon, une autobiographie », in L'Invention de l'autobiographie, Presses de l'École Normale Supérieure, 1993, p. 36-46.
  • Apulée, Sur Platon et sa doctrine (vers 150), in Opuscules philosophiques et fragments, texte établi et traduit par J. Beaujeu, Les Belles Lettres, 1973.
  • Diogène Laërce, Vies, doctrines et sentences des philosophes illustres [détail des éditions] [lire en ligne] (vers 200), Livre III, introduction, traduction et notes de Luc Brisson, La Pochotèque, Paris, 1999, pp. 369-465.
  • Anonyme, Prolégomènes à la philosophie de Platon (déb. VIe s.), trad. J. Trouillard, Les Belles Lettres, 1990, 146 p. Manuel néoplatonicien inspiré de Proclos.
  • Olympiodore le Jeune, Vie de Platon (en grec) in Commentaire sur le Premier Alcibiade de Platon (après 527) : Commentary on the 'First Alcibiades' of Plato ; critical text and indices, édi. par L. G. Westerink, Amsterdam, North-Holland Publ. Co., 1956.

Études

Ouvrages généraux

  • Pierre Aubenque, édité par, Études sur le Sophiste de Platon, Naples, Bibliopolis, 1991.
  • Luc Brisson :
    • Le Même et l'Autre dans la structure ontologique du Timée de Platon
    • Platon, les mots et les mythes, Série histoire classique, Paris, La Découverte, 1994.
  • Luc Brisson et Jean-François Pradeau, Le Vocabulaire de Platon, Paris, Ellipses, 1998.
  • Luc Brisson et Francesco Fronterotta, sous la direction de, Lire Platon, Paris, PUF, collection Quadrige, 2006.
  • Jean Brun, Platon et l’Académie, PUF, coll. « « Que sais-je ? » », 1984 (réimpr. épuisé) 
  • Monique Canto-Sperber, Les Paradoxes de la connaissance. Essai sur le Ménon de Platon, Paris, Odile Jacob,1991.
  • François Châtelet, Platon, Gallimard, coll. « Folio », 1965 (réimpr. 1990), 254 p. (ISBN 2-07-032506-7) 
  • Auguste Diès, Autour de Platon, 2 t.,Paris, Beauchesne, 1927.
  • M. Dixsaut, Métamorphoses de la dialectique dans les dialogues de Platon, Paris, Vrin, 2001.
  • A.-J. Festugières, Contemplation et vie contemplative chez Platon, Paris, Vrin, 1936.
  • V. Goldschmidt, Les Dialogues de Platon, Paris, PUF, 1935.
  • C. Joubaud, Le Corps dans la philosophie platonicienne, Paris, Vrin, 1991.
  • Alexandre Koyré, Introduction à la lecture de Platon (1945), Paris, Gallimard, 1991.
  • Y. Lafrance, La Théorie platonicienne de la doxa, Paris, Les Belles Lettres, 1981.
  • J. Moreau, L'Âme du monde de Platon aux stoïciens, Hildesheim, Olms, 1939.
  • Jean-François Pradeau (dir.), Platon : les Formes intelligibles, Paris, PUF, 2001.
  • Jean-François Pradeau, Platon et l'imitation, Paris, Aubier Montaigne, 2009.
  • Richard H. Kraut (éd.), The Cambridge Companion to Plato, New York Cambridge (Univ. Press), 1992.
  • M. D. Richard, L'Enseignement oral de Platon, Paris, Le Cerf, 1986.
  • Léon Robin :
    • « Études sur la signification et la place de la physique dans la philosophie de Platon », Revue philosophique, LXXXVI, septembre-octobre 1918.
    • Platon, Paris, PUF, 1935 (rééd. 1997).
  • Pierre-Maxime Schuhl, L'Œuvre de Platon, Paris, Vrin, 1954.
  • J. Souilhé, Études sur le terme dunamis dans les dialogues de Platon, Paris, Alcan, 1919.
  • Bernard Williams, Platon. L’invention de la philosophie, traduit de l'anglais par Ghislain Chaufour, Paris, Le Seuil (coll. « Points Essais », série « Les grands philosophes », n°421), 2000.

Sur Socrate et Platon

  • (en) T. Brickhouse et N. D. Smith, Plato's Socrates, Oxford, 1994
  • (en) L.D. Dorion, Socrate (chapitres 2 et 4), PUF, Paris, 2004
  • (en) C. Rowe, « Killing Socrates: Plato's later thoughts on democracy », Journal of Hellenic Studies, 121, 2001

Éthique et politique

  • Hannah Arendt, « Qu'est-ce que l'autorité ? », in La Crise de la culture, Paris, Gallimard, 1972.
  • Allan Bloom, La Cité et son ombre : essai sur la République de Platon, 1968, 1991 (rééd.), 2006 (trad. fr), éd. du Félin.
  • J.-M. Bertrand, De l’écriture à l’oralité, Lectures des Lois de Platon, Paris, Publications de la Sorbonne, 1999.
  • Victor Brochard, La Morale de Platon (1905), Parsi, Alcan, 1905.
  • J. Brunschwig, « Platon. La République » dans F. Châtelet, O. Duhamel et E. Pisier, Dictionnaire des œuvres politiques, Paris, PUF, édition augmentée, 2001.
  • Monique Canto-Sperber, « Les paradoxes de la vertu : remarques sur la philosophie morale de Platon », in Problèmes de la morale antique (recueil), 1993, pp. 59-74
  • Cornelius Castoriadis, Sur le Politique de Platon, Paris, Le Seuil, 1999.
  • M. Dixsaut (éd.), avec la collaboration de F. Teisserenc, Études sur la République, 2 vols., Paris, Vrin, 2006.
  • Michel-Pierre, Edmond, Le philosophe-roi : Platon et la politique, Critique de la politique, Paris, Payot, 1991.
  • A. Macé, Platon, Philosophie de l'agir et du pâtir, Academia Verlag, 2006.
  • A. Neschke, Platonisme politique et théorie du droit naturel, Peeters, Louvain et Paris, 1995 et 2003.
  • M. Pierart, Platon et la cité grecque. Théorie et réalité dans la constitution des Lois, Bruxelles, Palais des Académies, 1974
  • Karl Popper, La Société ouverte et ses ennemis (1946), t. 1 : L'Ascendant de Platon, trad. J. Bernard et P. Monod, Paris, Le Seuil, 1979.
  • Jean-François Pradeau, Platon et la Cité, Paris, PUF, 1997.
  • Jacques Rancière, Le Philosophe et ses pauvres, 1983.

Livres-audio

Notes et références

Notes

  1. Semble-t-il, car la Lettre VII (338cd) laisse entendre que Platon ne rencontra Archytas qu'au cours du deuxième voyage en Sicile.
  2. Parler de « disciple » pourrait être exagéré, si l'on en croit Platon quand il fait dire à Socrate, dans l'Apologie de Socrate (33 a) : « Pour ma part, je n'ai jamais été le maître de personne. » (traduction L. Brisson, GF, p. 113). Toutefois ce refus de reconnaître des disciples tient à la nature particulière de son activité philosophique, qui ne consiste pas à enseigner un savoir, mais à pratiquer la maïeutique. Dès lors, Platon pourrait être considéré comme un élève de Socrate, si l'on garde à l'esprit cette pratique socratique de la discussion.
  3. L'interprétation « dualiste » de Platon est illustrée par des philosophes qui, comme Nietzsche, voient en Platon un contempteur du devenir. Il n'y a toutefois qu'une et une seule réalité chez Platon, qui est la réalité dite intelligible, le monde sensible étant toujours perçu et pensé par l'intermédiaire de cette réalité qui le constitue comme monde sensible.
  4. Platon aborde cette question dans le premier livre de la République et dans le Gorgias.
  5. Platon propose ainsi une réfutation de la possibilité de la connaissance des Idées dans le Parménide. Dans Le Sophiste, il montre que l'absence de modèle intelligible menace de transformer le monde sensible dans sa totalité en simulacre.

Œuvres philosophiques citées

Les passages cités en grec ancien sont tirés de l'édition John Burnet.
  1. D'après Diogène Laërce : « Platon naquit la quatre-vingt-huitième olympiade, le sept mai, jour anniversaire de la naissance d’Apollon à Delphes. […] Platon [naquit] sous l’archontat d’Aminias, vers le temps de la mort de Périclès. Il était du dème de Collytos. »
  2. Timée, 20 e.
  3. Diogène Laërce, III, 1, p. 391.
  4. Olympiodore le Jeune, Commentaire sur le Premier Alcibiade de Platon (VIe s.)
  5. Diogène Laërce, III, 4, p. 395.
  6. Platon était beau et fort, si l'on en croit Épictète (Entretiens, I, 8, 13) et un beau buste que Visconti (Iconoq. grecq., I, 169, pl. XVIII) considère comme authentique : il avait les épaules hautes, et ce fut pendant quelque temps la mode, parmi les disciples de son école, d'imiter cette attitude, comme on imita plus tard le bégaiement d'Aristote et la tête penchée d'Alexandre le Grand.
  7. Diogène Laërce, III, 4 ; Sénèque le Jeune, Lettre 58 ; Apulée, Platon et sa doctrine, I, 1, trad., Les Belles Lettres, 1973 ; Sextus Empiricus, Contre les mathématiciens, I, 258 ; Tzétzès, Chiliades, VI, 419; XI, 853.
  8. Diogène Laërce, 1999, p. 373.
  9. Diogène Laërce, III, 4.
  10. Diogène Laërce, III, 6 ; Théétète, 143 e ; Xénophon, Mémorables, IV, 2, 10.
  11. Charmide, 155 a.
  12. Timée, 20 d.
  13. La République, VIII, 547, e et 548 ; Les Lois, II, 673, c. ; I, 637, c. ; VI, 781 a ; VII, 806, c.
  14. La République, VI, 494 a ; Lettre VII, 340 c.
  15. Diogène Laërce, III, 3, p. 394 (chorégie) ; III, 41, p. 421 (propriétés) ; VI, 25, p. 708 (voyages) ; VIII, 85, p. 1013 (bibliothèque).
  16. La République, VI, 496 a ; VII, 519.
  17. Lettres, lettre VII, 324.
  18. Apologie de Socrate, 32 c-d.
  19. Diogène Laërce, II, 24, p. 232.
  20. Diogène Laërce, III, 35, p. 416.
  21. Phédon, 59 b.
  22. Diogène Laërce, III, 6, p. 396.
  23. Diogène Laërce, III, 6, p. 396
  24. La République, IV, 436 a ; V, 470 c ; Timée, 21-24 ; Critias, 108 d, 110 b, 113 a ; Les Lois, V, 747 c.
  25. Phédon, 108-110, Timée, 58 d. Le « quelqu'un » dont il parle est Archytas, selon E. Frank, Plato und die sogenannten Pythagoreer, p. 186.
  26. Diogène Laërce, III, 24, p. 408 ; Proclos, Commentaires sur le 1er livre des Éléments d'Euclide, 211 ; Diogène Laërce, III, 24. Fr. Lasserre, De Léodamos de Thasos à Philippe d'Oponte, Naples, 1987.
  27. Aristote, Éthique à Nicomaque, I, 2, 1095a32. La réduction des théorèmes particuliers à des axiomes simples et évidents ou à des principes admis ?)
  28. Parménide, 127-136 ; Le Sophiste, 249-253. Solution mythique : Timée, 29-47.
  29. Le Politique, 269 c. Voir Théétète, 176 a.
  30. La République, V, 473 d.
  31. Lettre VII, 329 c-330 a.
  32. Plutarque, Vies parallèles, Dion, 22.
  33. Diogène Laërce, III, 9, p. 398.
  34. Lettre VII, 350.
  35. Diogène Laërce, III, 2, p. 392.
  36. Censorinus, Du jour natal ; Sénèque, Lettres à Lucilius, 53, 31.
  37. Aristote, Métaphysique, I, 6, 987.
  38. Voir La République, Livre II.
  39. Phédon, 59b.
  40. Lettre VII, 324d-325a.
  41. Aristote, Métaphysique (987 a32) : « Platon, dès sa jeunesse, s'était familiarisé dans le commerce de Cratyle, son premier maître, avec cette opinion d'Héraclite que tous les objets sensibles sont dans un écoulement perpétuel, et qu'il n'y a pas de science possible de ces objets. »
  42. Diogène Laërce, III (Platon) : « Il fit une synthèse des théories de Pythagore, d’Héraclite et de Socrate, prenant à Héraclite sa théorie de la sensation, à Pythagore sa théorie de l’intelligence, à Socrate sa politique. » (traduction R. Grenaille). Il faut cependant garder à l'esprit que l'étendue et la nature exacte de ces influences sont mal connues. Voir Brisson, 2006, p. 14.
  43. La République, 509d-511e.
  44. La République, 476 d – 480 a.
  45. a et b Phédon, trad. É. Chambry, p. ?.
  46. Phèdre, 245.
  47. Phèdre, 230e–257b.
  48. Phèdre, 250-251.
  49. Ménon 85c-86c.
  50. « Toute âme est immortelle. Tout ce qui se meut soi-même est immortel »Phèdre, 245c.
  51. « Ce qui porte le nom d'âme, quelle est la définition ? (...) le mouvement qui est capable de se mouvoir lui-même » in Lois, X, 895e-896a.
  52. Dans le Phédon (vers 385 av. J.-C.), il admet une âme (65a, 77a, 80a, 105c) ; dans La République (vers 370 av. J.-C.), il admet trois parties de l'âme (IV, 436-441) ; dans le Phèdre il fait une présentation imagée de l'âme sous la forme d'un attelage, avec un cheval noir, qui représente la partie désirante, un cheval blanc qui représente la partie irascible, et le cocher qui représente l'esprit (246a, 253c) ; Platon, dans le Timée, à la fin de sa vie, admet trois âmes (69c, 89e).
  53. Diogène Laërce, VIII, 30.
  54. La République, III, 392a.
  55. Lois, 644d–645c.
  56. Aristote, Physique, IV, 2, 209b15.
  57. Aristoxène, Éléments d'harmonie, II, 10.
  58. Lettre VII, 341 cd ; Phèdre, 274-278.

Sources modernes

  1. Debra Nails, The People of Plato: A Prosopography of Plato and Other Socratics, Hackett Publishing, 2002 (ISBN 0-87220-564-9), p. 246.
  2. a et b The Cambridge Companion to Plato, p. 1 : « Plato (427-347 B.C.) stands at the head of our philosophical tradition, being the first Western thinker to produce a body of writing that touches upon the wide range of topics that are still discussed by philosophers today under such headings as metaphysics, epistemology, ethics, political theory, language, art, love, mathematics, science, and religion. ».
  3. Sur la vie de Platon, tous les documents ont été rassemblés par A. Swift Riginos, Platonica. The Anecdotes concerning the Life and Writings of Plato, Leyde, Éditions Brill, 1976. Diogène Laërce, Vies et doctrines des philosophes illustres (vers 200), III, 1-47, trad., Le livre de poche, 1999, p. 391-427. Olympiodore le Jeune, Commentary on the First Alcibiades of Plato. critical text and indices (après 527), éd. L. G. Westerink, Amsterdam, North-Holland Publ. Co., 1956, xvi-191 p., réimpr. 1983. Voir Platon, Lettres, Garnier-Flammarion, traduction, introduction, notices et notes de Luc Brisson, 1994, 314 p. : chronologie p. 293-296.
  4. Citée par Robin, 1935, p. 1.
  5. Robin, 1935, p. 1 et suivantes.
  6. a et b Robin, 1935, p. 2.
  7. maître de gymnastique
  8. Cicéron, De l'orateur, 1, 50.
  9. Critias et Charmide étaient aussi tous deux disciples de Socrate
  10. Pierre Riffard, Les philosophes : vie intime, PUF, 2004, p. 205.
  11. Luc Brisson, « L'Égypte de Platon », Les Études philosophiques, 1987, p. 153-168 ; « les quatre topoi (lieux communs) qui figurent déjà dans le Busiris d'Isocrate : le pays irrigué par le Nil, la division du corps social en groupes fonctionnels, l'organisation artistique et intellectuelle et la piété. » B. Mathieu, « Le voyage de Platon en Égypte », Annales du Service des antiquités d'Égypte (ASAE), 71 (1987), p. 153-167.
  12. A. Swift-Riginos, Platonica, Leyde, Brill, 1976, p. 86-92.
  13. A. Swift Riginos, Platonica, p. 86-89.
  14. Jean Philopon (VIe siècle), Commentaire sur le 'De anima' d'Aristote, trad., Louvain, 1966. Tzétzès (XIIe s.), Chiliades, VIII, 973. H. D. Saffrey, « Une inscription légendaire », Revue des études grecques, Paris, t. LXXXI, 1968, p. 67-87.
  15. Tous deux citoyens d'Énos, ville grecque située sur la côte de Thrace (en Turquie actuelle, à l'embouchure de l'Hèbre) assassinèrent Cotys en 359 av. J.-C. Voir Aristote, Politique [lire en ligne] (V, 8), et Diogène Laërce (III, 46).
  16. Pierre-Maxime Schuhl, « Platon », Le Nouveau dictionnaire des auteurs, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 1994, t. III, p. 2529.
  17. Qu'entendre ici par analyse ? La remontée aux principes ? La déduction à partir des principes ?
  18. Léon Robin, La Théorie platonicienne des Idées et des Nombres, 1908.
  19. Pierre-Maxime Schuhl, L'Œuvre de Platon, Vrin, 1961 (3e éd.).
  20. Pendant son voyage en Sicile, Platon laiss son école à son élève Eudoxe
  21. Edmund Zeller, Histoire de la philosophie grecque, trad. É. Boutroux, 1877.
  22. Brisson, 2006, p. 13.
  23. Brisson, 2006, p. 14.
  24. Brisson, 2006, p. 15.
  25. Franco Ferrari, « Platon et la théorie des principes », in Brisson, 2006, p. 140 et 141.
  26. Brisson, 2006, p. 3 à 11.
  27. Voir, Lire Platon de Luc Brisson, p 24.
  28. Brisson, 2006, p. 26.
  29. Les Vies, Livre III.
  30. Dès Dittenberger, pour les critères stylistiques, dans la revue Hermès, 1881, p. 321-345. Leonard Brandwood, Word-Index to Plato, Leeds (G.-B.), Maney Publishing, 1976, 1036 p.
  31. R. Simeterre, La chronologie des oeuvres de Platon, Revue des études grecques, 1945, p. 146-162.
  32. C. Gill, « Le dialogue platonicien », in Brisson, 2006, p. 61.
  33. Brisson, 2006, Avant-propos.
  34. A. N. Whitehead, Process and Reality, 1929, p. 63.
  35. Léon Robin (1935, p. v) affirme que si Platon est un grand artiste, il ne faut pas oublier qu'il a également enseigné une doctrine, ce qui suppose un réel effort de systématisation, voire une dogmatique, dont les dialogues seraient le reflet littéraire.
  36. a et b Entretien avec Luc Brisson (5) : Traduire Platon.
  37. Luc Brisson, « Introduction » à l'Apologie de Socrate, GF, 1997, p. 80, 81.
  38. L'une des plus connues étant celle de Léon Robin. Cf. Robin, 1935.
  39. « L'économie philosophique de la théorie des idées », in Pradeau, 2001.
  40. Cf. Dictionnaire Platon, Luc Brisson et L.F. Pradeau.
  41. Protagoras proposait d'enseigner quoi que ce soit, après avoir demandé à l'intéressé une évaluation du prix de l'enseignement de la science souhaitée
  42. (Vors. 146, 1-4), "SUR LES SENSATIONS, 1."
  43. Comme Socrate, Aristote et Théophraste, Platon avait sa définition de la beauté : Le privilège de la Nature Diogène Laërce (V, 220)
  44. Voir pages 5 et suivantes « Money of the Mind: Dialectic and Monetary form in Kant and Hegel », Marc Shell, in Intimate conflict: contradiction in literary and philosophical discourse : a collection of essays by diverse hands, SUNY Press, 1992
  45. Voir pages 99 et suivantes in Plato on Knowledge and Reality, Nicholas P. White, Hackett Publishing, 1987
  46. Voir page 25 in Boethius's in Ciceronis Topica: An Annotated Translation of a Medieval Dialectical Text, Anicius Manlius Severinus Boethius, (traduction et contribution: Eleonore Stump), Cornell University Press, 2004
  47. Pradeau, 1997, Introduction.
  48. Monique Dixsaut, Le Naturel philosophe. Essai sur les dialogues de Platon, Vrin, 2001, p. 182
  49. R. B. Rutherford, The art of Plato: ten essays in Platonic interpretation, Harvard University Press, 1995, p. 7-8
  50. Robert L Arrington, A Companion to the Philosophers, Wiley-Blackwell, 2001, 434-35
  51. Phèdre, 276e ; République, 376d, 501e.
  52. République, 504c ; Timée, 48c.
  53. (en) K. Gaiser, « Plato's enigmatic lecture 'On the Good », in Phronesis. A Journal for ancient Philosophy, 25, 1980, Assen, p. 20.
  54. Marie-Dominique Richard, L'Enseignement oral de Platon, Cerf, 1986, p. 238. Repris dans : Olivier Souan et Catherine Golliau, Existait-il une doctrine orale ?, in Le Point hors-série : Platon, 2009, p. 69-70.
  55. Marie-Dominique Richard, L'Enseignement oral de Platon, Cerf, 1986, p. 247-381.
  56. (en) Sur l'enseignement oral voir : David Ross, Plato's Theory of Ideas, Oxford University Press, 1951, p. 142-224.
  57. Aristote, Physique, I, 189 b, 191 b.
  58. Le pythagoricien Philolaos de Crotone, avant Platon, opposait les choses limitées (perainonta) aux choses illimitées (apeira) (fragment 1 A) explique Sheppard, « Monad and Dyad as Cosmic Principles in Syrianus », in (en) H. Blumenthal et A. Lloyd, Structure of Being in Late Neoplatonism, Liverpool, 1982, p. 1-14.
  59. (en) Harold Cherniss, Aristotle's Criticism of Plato and the Academy, I, Baltimore 1944, rééd. New York, 1962.
  60. Le Théétète, aux Ed. La Bibliothèque électronique du Québec, Collection Philosophie, Volume 9 (p. 39 de l'édition traduite et commentée par Émile Chambry
  61. « Les nombres entiers me semblent exister en dehors de nous et en s'imposant avec la même nécessité, la même fatalité que le sodium, le potassium, etc. » in Correspondance avec Stieljes, janvier 1889, Paris, Gauthiers-Villars, 1905, t. I, p. 332.
  62. Albert Lautman, Essai sur les notions de structure et d’existence en mathématique, 1937.
  63. Jean-Pierre Changeux et Alain Connes, Matière à penser, Odile Jacob, 2000, (ISBN 978-2-7381-0815-9).
  64. Pierre Hadot, Études de philosophie ancienne, Les Belles Lettres, 1998, p. 30.
  65. (en) L. G. Westerink, The Greek Commentaries on Plato's Phaedo, Amsterdam, North-Holland Publ. Co., 1976-1977, 2 t.
  66. La Société ouverte et ses ennemis, tome 1 : L'ascendant de Platon (The Open Society and Its Enemies, 1945).
  67. Notamment l'idée que la pensée (sous sa forme logique) est indépendante des représentations psychologiques subjectives. Cf. G. Frege, Écrits logiques et philosophiques, « Recherches logiques », 1. La Pensée, éd. Points-Seuil, 1971.
  68. « Comme chez Frege, l'affirmation russellienne de l'autonomie du contenu propositionnel simplement considéré par rapport à tout acte réel de jugement n'est à vrai dire qu'une facette d'un objectivisme logique plus large qui confine au réalisme platonicien. » B. Leclercq, Introduction à la philosophie analytique, p. 53.
  69. Myles Burnyeat, Introduction au Théétète de Platon, Collège International de Philosophie, PUF, Paris, 1998, p. 9.

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