Prison de l'entrepôt des cafés

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Prison de l'Entrepôt des cafés

La Prison de l'Entrepôt des cafés était une prison de Nantes sous la Révolution.

Sommaire

"L'antichambre de la mort"

Situé en bordure du port de Nantes, l'Entrepôt des cafés fut la principale "antichambre de la mort". Après la bataille de Savenay (23 décembre 1793 - 3 nivôse an II), plusieurs milliers de brigands y furent entassés. Les noyades, cyniquement appelées Mariages républicains, et les fusillades ajoutées au froid, à la faim et au typhus le vidèrent en quelques semaines.

L'énorme bâtiment s'étend au bout du port, à l'écart du centre-ville et à égale distance des carrières de Gigant (où les pelotons d'exécutions opèrent) et de la Loire. C'est le département qui prend l'initiative d'écarter le choix du couvent des Petits-Capucins, jugé top exigu, et de lui préférer l'Entrepôt.

Le site présente tous les avantages et les bâtiments, formant un quadrilatère autour d'une cour fermée, sont assez vastes pour abriter six mille prisonniers.

Fonctionnement de la prison

Du 1er décembre 1793 à la fin janvier 1794, cette prison tourne à plein. Des milliers de Vendéens y connaissent la faim, la souffrance et la mort. L'absence d'écrou, le flou des responsabilités, la consigne de silence imposée à tous ceux qui ont affaire à l'endroit, tout prédispose au pire dénouement. Les possibilités de sortir vivant de l'Entrepôt semblent avoir été des plus minimes.

Témoignages de rescapés :

  • Parmi les témoignages de quelques rescapés, celui de Julienne Boishéraud. Elle entre à L'Entrepôt le 27 décembre 1793 et sort le 18 janvier 1794, grâce à la complicité du médecin Augustin Darbefeuille. Beaucoup plus tard elle relate ses souvenirs :

" En vain essayerais-je de faire le tableau de ce séjour affreux : je ne connaissais pas d'expression suffisante. Il faut y avoir habité pour s'en faire une juste idée. Je dirai seulement que partout on voyait l'image de la mort : ce n'était que mort et mourants. Ceux-ci n'avaient pas encore expiré que ces monstres venaient les prendre par un membre pour les traîner comme des bêtes hors de la maison. S'ils vivaient encore, ils les roulaient avec le pied et disaient froidement : "ce sera pour demain..."

..."Nous voyions paraître des prisonniers qui disparaissaient à l'instant. Un soir, on en amena trois cents, le lendemain, il n'y en avait plus. Deux, trois fois par jour, l'on fusillait sans interrogatoire et sans jugement."

  • Les rares médecins autorisés à entrer dans l'Entrepôt en gardent un souvenir inaltérable. Thomas, qui le parcourt à l'époque de son plus grand engorgement raconte :

"J'ai vu périr dans l'hospice révolutionnaire 75 détenus en 2 jours; on n'y trouvait que des matelas pourris et sur chacun desquels l'épidémie avait dévoré plus de 50 individus ... A l'Entrepôt, je trouvai une quantité de cadavres épars çà et là ; je vis des enfants palpitants ou noyés dans des bailles pleines d'excréments humains"[1].

Fermeture de l'Entrepôt

Par crainte de voir le typhus déborder sur la ville et parce que les fusillades et noyades commencent à vider la prison, les autorités révolutionnaires décident d'évacuer les survivants. Jean-Baptiste Carrier lui-même s'alarme et réclame un prompt "nettoiement par les brigands eux-mêmes afin de point compromettre la santé des bons citoyens". "Déméphitiser" (désinfecter) l'Entrepôt demande plus de trois semaines. Le 26 janvier 1794, Pariset, qui supervise l'opération, observe des cadavres amoncelés qu'il fait couvrir d'une mauvaise toile ; huit brigands ont aidé à charger le tombereau. Le 30 janvier 1794, nouveau rapport de Pariset : "Je me suis rendu à l'Entrepôt ; le travail allait son train ; je n'ai pas vu plus de cinq à six tombereaux..."

Les risques d'épidémies ont largement contribué à la décision de liquider au plus vite et de toutes les manières les détenus.

Ces risques étaient réels, si l'on se base sur l'analyse du docteur Xavier Bernier, la menace d'une épidémie encore plus grave que celle qui ravagea prisons et hôpitaux ne fait pas de doute. Elle pouvait atteindre toute la ville de Nantes et se répandre bien au-delà.

Un camp de la mort

Selon Jean-Noël Brogoon, pendant six semaines a fonctionné un authentique camp de la mort, comparable en tout point à ceux de l'Allemagne hitlérienne. A une différence près toutefois : les noyades et les fusillades plutôt que les chambres à gaz.

Notes

  1. Alfred Lallié, les Noyades de Nantes, 90.-Campardon, Histoire du Tribunal révolutionnaire de Paris (Procès de Carrier), II, 55. Déposition de l'officier de Santé Thomas.

Voir aussi

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