Prologue de l'évangile selon jean

Prologue de l'évangile selon jean

Prologue de l'évangile selon Jean

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Exégèse et critique

Les dix-huit premiers versets de l'Évangile selon Jean, un texte écrit en grec comme tous les évangiles, constituent une sorte de poème appelé Prologue. Sa traduction, son attribution, son interprétation, voire, animent toujours des débats scientifiques comme doctrinaux.

Sommaire

Le texte

Traduction Segond (1910)

Traduction du Prologue de l'évangile selon Jean par Louis Segond[1] :

  1. Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu.
  2. Elle était au commencement avec Dieu.
  3. Toutes choses ont été faites par elle, et rien de ce qui a été fait n’a été fait sans elle.
  4. En elle était la vie, et la vie était la lumière des hommes.
  5. La lumière luit dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont point reçue.
  6. Il y eut un homme envoyé de Dieu : son nom était Jean.
  7. Il vint pour servir de témoin, pour rendre témoignage à la lumière, afin que tous crussent par lui.
  8. Il n’était pas la lumière, mais il parut pour rendre témoignage à la lumière.
  9. Cette lumière était la véritable lumière, qui, en venant dans le monde, éclaire tout homme.
  10. Elle était dans le monde, et le monde a été fait par elle, et le monde ne l’a point connue.
  11. Elle est venue chez les siens, et les siens ne l’ont point reçue.
  12. Mais à tous ceux qui l’ont reçue, à ceux qui croient en son nom, elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu
  13. lesquels sont nés non du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu.
  14. Et la parole a été faite chair, et elle a habité parmi nous, pleine de grâce et de vérité ; et nous avons contemplé sa gloire, une gloire comme la gloire du Fils unique venu du Père.
  15. – Jean lui a rendu témoignage, et s’est écrié : C’est celui dont j’ai dit : Celui qui vient après moi m’a précédé, car il était avant moi.
  16. – Et nous avons tous reçu de sa plénitude, et grâce pour grâce ;
  17. car la loi a été donnée par Moïse, la grâce et la vérité sont venues par Jésus-Christ.
  18. Personne n’a jamais vu Dieu ; le Fils unique, qui est dans le sein du Père, est celui qui l’a fait connaître.

Traduction Crampon (1923)

Traduction du Prologue de l'évangile selon Jean par Augustin Crampon[2] :

  1. Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu.
  2. Il était au commencement en Dieu.
  3. Tout par lui a été fait, et sans lui n’a été fait rien de ce qui existe.
  4. En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes,
  5. Et la lumière luit dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont point reçue.
  6. Il y eut un homme, envoyé de Dieu ; son nom était Jean.
  7. Celui-ci vint en témoignage, pour rendre témoignage à la lumière, afin que tous crussent par lui :
  8. non que celui-ci fût la lumière, mais il avait à rendre témoignage à la lumière.
  9. La lumière, la vraie, celle qui éclaire tout homme, venait dans le monde.
  10. Il (le Verbe) était dans le monde, et le monde par lui a été fait, et le monde ne l’a pas connu.
  11. Il vint chez lui, et les siens ne l’ont pas reçu.
  12. Mais quant à tous ceux qui l’ont reçu, Il leur a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, à ceux qui croient en son nom,
  13. Qui non du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu sont nés.
  14. Et le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous, (et nous avons vu sa gloire, gloire comme celle qu’un fils unique tient de son Père) tout plein de grâce et de vérité.
  15. Jean lui rend témoignage, et s’écrie en ces termes : « Voici celui dont je disais : Celui qui vient après moi, est passé devant moi, parce qu’il était avant moi. »
  16. et c’est de sa plénitude, que nous avons tous reçu, et grâce sur grâce ;
  17. parce que la loi a été donnée par Moïse, la grâce et la vérité sont venues par Jésus-Christ.
  18. Dieu, personne ne le vit jamais : le Fils unique, qui est dans le sein du Père c’est lui qui l’a fait connaître.

Composition

Bernard Pautrat[3] souligne dans la préface, l'actualisation pécharique [4] évidente de l'Ancien Testament, Genèse 1.1 (dans les versets du prologue 1:5, puis 8:9) et celle, invisible dans les traductions en français "et il a habité parmi nous", de la citation textuelle de la Septante : « il a planté sa tente au milieu de nous » à propos du passage où David dans 2 samuel 6 1:23 ramène l'Arche à Jérusalem .

Dans le premier passage midrashique, le verbe se substitue à l'Esprit et est assimilé à la Lumière du verset 3 de Genèse 1. On constate là une compréhension différente de l'Esprit tant dans la Septante que dans la Bible hébraïque où celle-ci (Rouac'h est un mot féminin) représente la puissance divine, tandis que dans la Septante, il représente la Raison, acception reçue dans le moyen aristotélisme, par exemple chez Plotin.[5] Cette mutation en parole de Sagesse [6] quasi hypostasiée est soulignée par Daniel Boyarin dans un article du Harvard Theological review en 2001[7] La partie sur la lumière, le monde, les ténèbres et Dieu témoigne de la cosmologie gnostique laquelle n'oppose pas la matière mauvaise à l'esprit bon, comme le répète trop souvent le sens commun. La « matière », dans les textes gnostiques, désigne tout ce qui entrave et limite l'existence.

Des aspects transversaux permettent de dépasser les antagonismes : Sagesse et/ou Logos en sont les meilleurs exemples. La métaphysique valentinienne des émanations est une représentation bien plus sophistiquée marquant la superposition de quantité d'entités intermédiaires entre le divin et l'humanité dans laquelle à la triangulation "matière-âme-esprit" [8] correspond, en un sens, la représentation "diable-démiurge-Père". Ainsi compris, le monde n'est ni mauvais, ni bon. Il est un mélange des deux.[9].

Les versets 10-13 décrivent la résurrection spirituelle déjà présente [10]

Pour la suite du texte, Jean-Robert Armogathe o.p.[11] suggère une possible inspiration du texte dit de la "vocation d'Isaïe" dans l'expression « Dieu, nul ne l'a jamais vu ». Dans le recueil de Pouderon et Norelli[12], Marie-Anne Vannier [13] considère le retour final du Fils à la droite du Père (Jn 1,18) comme une correction doctrinale tardive, ultérieure à la composition première du texte, qui dénie toute la direction vers laquelle tend l'évangile selon Jean. Il témoigne du débat alexandrin sur la trinité entre homo-ousiens, homéens voire anoméens.

Utilisation doctrinale

Dans le christianisme ancien

  • Augustin d'Hippone se situe dans le débat évoqué ci-dessus. Dans les Homélies sur l'Évangile de Jean va s'attacher à démontrer l'hérésie des théories ariennes ; selon sa lecture, entachée par le fait qu'il était piètre hellénisant, selon Lucien Jerphagnon [14], Dieu-Trinité qui crée le monde : car « le Verbe était Dieu ». Pour celui-ci, Le terme verbe, traduit mieux le grec λόγος (logos) que le terme raison (ratio), car le verbe signifie le rapport entre Dieu et les créatures (Livre des 83 questions).
  • Basile de Césarée s'implique dans le même débat. Dans son Homélie sur Le Verbe s'est fait chair", le Verbe dont il est question ici, n'est pas humain (puisque l'homme est la dernière des créature), mais est le Fils unique. Il se situe dans la perspective christologique Logos-sarkos au contraire des ariens qui se se situent dans la perspective logos-anthropos. [15]
  • Pour Jean Chrysostome, cette idée de Verbe permet de détruire l'idée d'un rapport charnel entre Dieu et le Fils unique, engendré de manière incorruptible.[réf. nécessaire]

Dans le catholicisme médiéval

Thomas d'Aquin s'est, lui aussi, longuement penché sur ce passage de l'évangile de Jean, en particulier Catena in Ioannem.

Dans les christianismes orientaux

Dans le protestantisme

Utilisation liturgique du texte

La messe tridentine se conclut par la lecture du « dernier évangile », qui n'est autre que ce prologue johannique. Au moment où le prêtre prononce « Et Verbum caro factum est », le prêtre et les fidèles font une génuflexion. Cette lecture a été supprimée dans la réforme liturgique du rite romain par Paul VI en 1970.

Notes et références

  1. Texte de la traduction Segond sur Wikisource.
  2. Texte de la traduction Crampon sur Wikisource.
  3. Évangile de Saint-Jean, Payot, Rivages Poche, 2000
  4. Voir – voir le concept de midrashim pesharim dans Midrash
  5. Jerphagnon, op.cit
  6. cf. plus bas le passage sur l'influence gnostique
  7. The gospel of the Memra: jewish binitarianism and the prologue to John. Harvard Theological Review, 2001, n°94
  8. Plotin, Ennéades
  9. Pierre-Yves Ruff, chercheur à l'IHP-Paris, dans la liste de discussion Théolib, en date du 9 janvier 2008.
  10. Fougeras op.cit
  11. Prédication de Carême 1999
  12. Histoire de la littérature grecque chrétienne, tome 1,CERF, 2007
  13. L'évolution dogmatique, dans Pouderon et Norelli, op.cit.
  14. Michel Cazenave, émission de France-Culture “Les Vivants et les Dieux”
  15. Karl-Heinz Olhig, Christologietextes en mains, tome 1 des origines à l'antiquité tardive, CERF, 1996

Sources

Bibliographie

Patristiques

  • Thomas d'Aquin, Commentaire sur l'Évangile de saint Jean, I, Le Prologue – La vie apostolique du Christ,Préface par M.-D. Philippe, o.p. – Traduction et notes sous sa direction
  • Thomas d'Aquin ,Catena in Ioannem (Chaîne d'or sur l'Évangile selon Saint Jean)
  • Maître Eckhart, Le Commentaire de l'Évangile selon Jean : Le Prologue, chap. 1, 1-18

Études contemporaines

  • Marguerat et alii, introduction au Nouveau Testament, Labor et Fides
  • Pouderon, Noelli et alii, Histoire de la littérature grecque chrétienne
  • Bernard Pautrat, l'évangile de Jean
  • Isaac Asimov Guide to the Bible: A Historical Look at the Old and New Testaments, Dubleday, 1969-69 recension
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