Raphus Solitarius

Raphus Solitarius

Ibis de La Réunion

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Ibis de La Réunion
 Threskiornis solitarius
Threskiornis solitarius
Classification classique
Règne Animalia
Embranchement Chordata
Sous-embr. Vertebrata
Classe Aves
Ordre Ciconiiformes
Famille Threskiornithidae
Sous-famille Threskiornithinae
Genre Threskiornis
Nom binominal
Threskiornis solitarius
Sélys Longchamps, 1848
Synonymes

Raphus solitarius

Statut de conservation IUCN :

EX  : Éteint
Schéma montrant le risque d'extinction sur le classement de l'IUCN.

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L'Ibis de La Réunion, Solitaire de La Réunion ou Dronte de La Réunion est une espèce d'oiseau endémique de l'île de La Réunion aujourd'hui disparue. On l’a jadis rapproché du dodo (raphus cucullatus) de l'île Maurice, et baptisé raphus solitarius, mais il est aujourd'hui identifié comme étant en fait un ibis blanc (threskiornis solitarius).

Sommaire

Les témoignages

Il n'existe qu'une dizaine de témoignages très succins décrivant le Solitaire, et s'échelonnant de 1613 à 1708. Aucun dessin contemporain représentant de façon certaine cet oiseau n'a été retrouvé.

La première mention provient du journal de bord du navire anglais Pearl[1], le 27 mars 1613 :

...une grosse espèce de volaille de la grosseur d'un dindon, très grasse, et aux ailes si courtes qu'elle ne peut voler ; elle est blanche et elle n'est pas sauvage, comme du reste tous les oiseaux de cette île, aucun d'eux n'ayant jusqu'ici été tracassé ni effrayé par des coups de fusils. Nos hommes les abattaient avec des bâtons et des pierres. Dix hommes en tuaient assez pour nourrir quarante personnes par jour.

En 1619, le capitaine hollandais Willem Ysbrantsz Bontekoe[2] observe un oiseau semblable près de l'étang de Saint-Paul, en quoi il croit reconnaître un Dodo (Raphus cucullatus) :

Il y avait aussi des Dodos qui ont de petites ailes. Bien loin de pouvoir voler, ils étaient si gras qu’à peine pouvaient-ils marcher, et quand ils essayaient de courir, ils traînaient leur arrière-train par terre.

Le Solitaire est appelé pour la première fois par son nom par l'abbé Carré[3] en 1667 :

J'ai vu dans ce lieu une sorte d'oiseau que je n'ai point vu ailleurs. C’est celui que les habitants ont surnommé l'oiseau solitaire parce que effectivement il aime la solitude et ne se plaît que dans les endroits les plus écartés. On n’en a jamais vu deux ni plusieurs ensemble ; il est toujours seul. Il ne ressemblerait pas mal à un coq d'Inde s'il n'avait pas les jambes plus hautes. La beauté de son plumage fait plaisir à voir. C'est une couleur changeante qui tire sur le jaune. La chair en est exquise ; elle fait les meilleurs mets de ce pays-là, et pourrait faire les délices de nos tables. Nous voulûmes garder deux de ces oiseaux pour les envoyer en France et les faire présenter à sa majesté. Mais aussitôt qu'ils furent dans le vaisseau, ils moururent de mélancolie, sans vouloir boire ni manger.

Le sieur Dubois, qui visite l'île alors qu'on l'appelle encore Bourbon de 1669 à 1672, témoigne dans le compte-rendu de son voyage de la présence de cet oiseau[4] :

Solitaires : ces oiseaux sont nommés ainsi parce qu'ils vont toujours seuls. Ils sont gros comme une grosse oie et ont le plumage blanc, noir à l'extrémité des ailes et de la queue. A la queue, il y a des plumes approchant celles d'autruche. Ils ont le cou long et le bec fait comme celui des bécasses, mais plus gros, les jambes et les pieds comme les poulets d'Inde. Cet oiseau se prend à la course, ne volant que bien peu. C'est un des meilleurs gibiers de l'île.

La disparition

En 1704, les Solitaires sont encore assez nombreux, mais se sont réfugiés dans les hauts de l'île, encore inhabités, comme en témoigne Feuilley[5] :

Les solitaires sont de grosseur d'un moyen coq d'Inde, de couleur gris et blanc. Ils habitent sur le sommet des montagnes. Sa nourriture n'est que de vers et de saleté qu'il prend dessus ou dedans la terre. On ne mange point ces oiseaux, ayant le goût fort mauvais et dur. Il est ainsi nommé à cause de sa retraite sur le sommet des montagnes. Quoiqu'il y en ait grand nombre, l'on en voit peu à cause que ces lieux sont peu fréquentés.

Le Solitaire est mentionné pour la dernière fois en 1708 par Hébert[6].

En 1751, d’Héguerty, qui était commandant de Bourbon entre 1739 et 1743, fait une description du gibier de l'île mais ne parle pas du Solitaire[7].

En 1778, Morel, qui travaillait dans les hôpitaux de l'île Maurice, apprend l'existence du Solitaire et du Dodo en lisant Buffon[8]. Il affirme que personne sur les îles n'a jamais entendu parler de ces oiseaux.

En 1802, le naturaliste Bory de Saint-Vincent explora l'île de la Réunion pendant cinq mois et rechercha le Solitaire, sans succès[9]. L'oiseau avait disparu et les habitants de l'île, même les plus vieux, n'en avaient pas conservé le souvenir.

Identification du Solitaire

Les témoignages décrivant le Solitaire de la Réunion sont imprécis et parfois contradictoires, aussi l'identité de cet oiseau a fait l'objet de nombreuses controverses. Le témoignage de Bontekoe, ainsi une vague ressemblance entre les descriptions du Solitaire et celles du Dodo de l'île Maurice ou du Solitaire de Rodrigues, ont fait supposer, depuis Buffon[10], que le Solitaire de la Réunion leur était apparenté.

Le Solitaire avait été plusieurs fois décrit comme étant de couleur blanche. Aussi, la découverte en Europe, à partir de 1856, de peintures du 17ème siècle représentant des Dodos blancs sembla conforter cette hypothèse[11].

Dodo blanc par Pieter Withoos, c.1684

Toutefois, aucun reste de Dodo n'a jamais été découvert sur l'île de la Réunion, et l'origine des oiseaux figurant sur les peintures de Dodos blancs n'y est pas spécifiée.

Entre 1974 et 1994, des fouilles réalisées à Saint-Paul et à l'Hermitage, dans l'Ouest de l'île de la Réunion, permirent la découverte d'un ibis endémique, jusqu'alors inconnu. La morphologie de cet oiseau, déduite de l'étude des ossements, laisse apparaître des analogies avec certaines des descriptions du Solitaire, en particulier celle de Dubois. Aussi dès 1987, l'hypothèse que cet ibis ait pu être le Solitaire de la Réunion fut avancée[12].

En 1995, l'Ibis de la Réunion fut rebaptisé Threskiornis solitarius[13].

En septembre 2006, à l'occasion des journées européennes du patrimoine, le Muséum d’histoire naturelle de La Réunion et l'ILOI - Institut de l'image de l'océan Indien ont rendues publiques leurs recherches sur l'ibis de Bourbon. Une simulation 3D animée de l'oiseau a été réalisée montrant ses caractéristiques physiques et ses comportements déduits de son anatomie [1].

Description

L'Ibis-Solitaire mesurait environ 70 cm. Il était morphologiquement très proche de l'Ibis Sacré (Threskiornis aethiopicus), à l'exception du bec, plus court et plus droit, et du poids : Le diamètre de la patte était plus épais que celui de l'Ibis Sacré, et le poids du Solitaire a été estimé entre 2.9 et 3.5 kg[14]. Les ailes n'étaient pas atrophiées, mais la configuration des ossements montre que l'oiseau volait peu ou mal.

Notes et références

  1. Purchas (1625), His Pilgrimes, vol.I p.331-332.
  2. Bontekoe, Willem Ysbrantz (1619), Memorable description of the East Indian Voyage, AES New Delhi, 1992
  3. Lougnon Albert (1970), Sous le signe de la Tortue, réédition Azalées Editions, Saint-Denis 1992.
  4. Sieur Dubois (1674), Les voyages faits par le sieur D.B. aux isles Dauphine ou Madagascar et Bourbon ou Mascarenne, ès années 1669, 70, 71 et 72. Dans laquelle il est curieusement traité du Cap Vert, de la ville de Surate, les isles de Sainte-Hélène, ou de l'Ascention. Ensemble les mœurs, religions, forces, gouvernemens et coutumes des habitans desdites isles, avec l'histoire naturelle du pais. Paris.
  5. Feuilley (1er juin 1704 - 22 janvier 1705), « Mission à l’île Bourbon du sieur Feuilley en 1704 », in Rec. Trim. de documents et travaux inédits pour servir à l’histoire des Mascareignes Françaises, 8e année, 1939, no4, p.127-128.
  6. Hébert, G. (1708, du 26 avril au 18 mai), « Rapport de G. Hébert sur l’île de Bourbon avec les apostilles de la Compagnie des Indes », in Rec. Trim. de documents et travaux inédit pour servir à l’histoire des Mascareignes Françaises, 1940, no5.
  7. D’Héguerty, P.A. (1754), « Discours prononcé devant le Roi de Pologne Stanislas le 26 mars 1751 sur l’île Bourbon », in Mémoires de la Société Royale des Sciences et Belles Lettres de Nancy, 1:p.73-91.
  8. Morel (1778), « Sur les oiseaux monstrueux nommés Dronte, Dodo, Cygne capuchoné, Solitaire et oiseau de Nazare, et sur la petite isle de Sable, à 50 lieues environ de Madagascar » in Obs.Phys.Hist.Nat.& Arts 12, p.154.
  9. Bory de Saint-Vincent, J.B.G.M. (1804), Voyage dans les Quatre Principales Iles des Mers d’Afrique, Paris.
  10. Buffon (1772), Histoire Naturelle des Oiseaux, t.II, Paris 1772, p.76.
  11. Oudemans, A.,C. (1917), Dodo-Studiën naar aanleiding van de vondst van een gevelsteen met Dodo-beeld van 1561 te Vere, Verhandl. Kon. Akad. Wet. Amsterdam, 2e Sect. XIX No4, 1917 p.1-140; 15 pls.
  12. Hume, Julian & Cheke, Anthony (2004), « The white dodo of Réunion Island: unravelling a scientific and historical myth » in Archives of natural history V.31 part 1 p.57-79.
  13. Mourer-Chauviré,Cécile, Bour,Roger & Ribes,Sonia (1995), « Position systématique du Solitaire de la Réunion: nouvelle interprétation basée sur les restes fossiles et les écrits des anciens voyageurs »,in C.R. Acad. Sci. Paris, t.320, série IIa, p.1125-1131.
  14. Mourer-Chauviré, Cécile & al. (2000), « Le Solitaire de la Réunion », in Bull.SEOR n°5-6 p.14-18

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