Rassemblement national lorrain

Rassemblement national lorrain

Le Rassemblement national lorrain (RNL) est un groupement politique autonome régional lorrain rassemblant les opposants au Front populaire de juin 1936 à 1939.

Il est l'œuvre des militants « nationaux » de Nancy et de sa région. Il ne cherche pas à rassembler en son sein tous les groupements nationaux constitués. Il n'est ni un parti politique - il ne présente pas de candidats aux élections -, ni une confédération régionale des différentes formations politiques opposées au communisme et au Front populaire. Il est avant tout un organisme de propagande, comparable en partie au Centre de propagande des républicains nationaux d'Henry de Kérillis.

Sommaire

Formation

Il est fondé à Nancy le 4 juillet 1936, dans le contexte de panique sociale de l'été 1936. Ses fondateurs sont des notables nancéiens, souvent membres des Ligues dissoutes et/ou de la Fédération républicaine de Louis Marin, qui appartiennent au monde militaire[1], au monde universitaire[2] ou encore à la bourgeoisie juridique[3].

Dirigeants et animateurs

Ses animateurs sont notamment :

  • le commandant Chabeaux[4], qui préside le comité directeur.
  • le futur député de Nancy Pierre André, délégué à la propagande,
  • l'avocat François Xardel[5], secrétaire général.
  • l'avocat Adrien Sadoul[6].
  • Émile Meyer, collaborateur du Télégramme des Vosges jusqu'en 1927, sous-directeur puis directeur depuis 1934 du quotidien nancéien contrôlé par Louis Marin L'Éclair de l'Est, militant catholique membre des Fraternités à Nancy, animateur de la Fédération républicaine en Lorraine depuis 1927 et proche sinon membre des Jeunesses patriotes avant 1936.

Figurent encore, notamment, au comité directeur le professeur de médecine Maurice Perrin[7] , le futur sénateur Joseph de Pommery[8], le docteur Helluy, ancien président des étudiants d'Action française et l'avoué Maurice Ehlinger, président de la fédération de Meurthe-et-Moselle de la Fédération républicaine.

Les rejoignent par la suite deux transfuges du Parti social français, Émile Jaillon[9] et surtout l'industriel Raoul Nanty, qui a été délégué régional des Croix-de-feu jusqu'en 1936, ainsi que Charles Berlet, de l'Action française, qui est associé au comité.

Participent également au comité deux autres chefs locaux de partis d'extrême droite, Jean Michaut[10] pour le PNRS et Bertrand de Maud'huy, ancien des Volontaires nationaux et délégué régional du PPF[11].

On compte donc beaucoup d'anciens ligueurs parmi l'état-major du RNL, mais aussi parmi les militants, les animateurs de réunions et les délégués locaux[12]. Sont ainsi membres du RNL d'anciens responsables des Jeunesses patriotes, comme Jean L'Hotte, l'ancien délégué régional de 1927 à 1936[13], François Godinot[14] ou Charles Liebenguth[15].

De même, ses adhérents sont souvent membres de partis politiques de droite, la Fédération républicaine, le Parti républicain national et social, avatar des Jeunesses patriotes, et le PSF surtout[16], du moins jusqu'en 1937-1938, lorsque le PSF conseille à ses adhérents de ne pas renouveler leur adhésion au RNL, dans le contexte du conflit entre le parti du colonel de La Rocque et les organisations plus à droite suite notamment à l'échec du Front de la liberté.

La Fédération républicaine apparaît d'ailleurs comme englobée dans le RNL : ses cadres départementaux sont en même temps dirigeants de ce rassemblement et liés au quotidien nancéien de Louis Marin, l’Éclair de l'Est, tels Émile Meyer, son directeur, Maurice Perrin, président du conseil d'administration de la Presse de l'Est, qui édite le quotidien, ou encore Aimé Junique, ancien du Sillon, ancien des JP, secrétaire de rédaction et trésorier du RNL.

Objectifs et thèmes

Le RNL œuvre en faveur de l'union des nationaux contre le communisme et le Front populaire. Il accueille favorablement le Front de la liberté de Doriot en 1937. Son deuxième congrès le 3 octobre 1937 se fait d'ailleurs sous l'égide du Front de la liberté. Louis Marin, Jacques Doriot, Pierre Taittinger et Philippe Henriot se retrouvent ensemble à la tribune à cette occasion.

Le RNL collabore activement avec les députés de la Fédération républicaine, Louis Marin, Marcel Boucher et François Valentin surtout. Ce dernier s'engage activement dans le rassemblement. Le député de Château-Salins François Beaudoin est également proche du RNL. Le RNL est aussi en contact avec le Front lorrain, son équivalent en Moselle, ainsi qu'avec tous les partis "nationaux", malgré des dissensions de plus en plus fortes à partir de 1937 avec le Parti social français. Les principaux animateurs du groupement sont présents aux réunions royalistes, à celles du PNRS et du P.P.F. jusqu'en 1939.

Le RNL publie un périodique, la Lorraine nationale et sociale, dont le premier numéro paraît le 11 octobre 1936, recrute des adhérents, organise des réunions de propagande[17], et distribue des milliers de tracts et d'affiches. Il se dote d'un groupements de jeunes, les Cadets de Lorraine.

Les thèmes de prédilection du RNL sont la dénonciation du Front populaire, du socialisme et du communisme[18]. Le RNL utilise également des slogans antimaçonniques, comme par exemple ce slogan d'une affiche de 1938 : « Le mot d'ordres des Loges est : Blum et Herriot au pouvoir ! ». On relève également un argumentaire antisémite, surtout à partir de 1938[19].

Diffusion et évolution

Le RNL est surtout actif en Meurthe-et-MoselleNancy, dans le Toulois et dans le sud du département) et, dans une moindre mesure, dans les Vosges. L'activité du groupement ne cesse pas jusqu'en 1939, mais son action et son influence ont décliné avec l'échec et l'implosion du Front populaire.

Sources

  • Jean-François Colas, Les droites nationales en Lorraine dans les années 1930 : acteurs, organisations, réseaux, Thèse de doctorat, Université de Paris X-Nanterre, 2002, 3 volumes.
  • François Roth, La vie politique en Lorraine au XXe siècle, Metz-Nancy, Ed. Serpenoise-P.U.N., 1985.

Notes et références

  1. Le commandant Chabeaux, le général Henri Colin, ancien commandant de l'École spéciale militaire de Saint-Cyr, proche des Croix-de-feu depuis 1931, le colonel Javelier
  2. François Gény, doyen honoraire de la Faculté de droit de Nancy, membre du comité diocésain de l'Action catholique en 1932 en tant que président de la maison des apprentis, les professeurs de médecine Maurice Perrin et Gaston Michel
  3. Bonfils-Lapouzade, premier président honoraire, catholique membre des Fraternités, Me Jacques Gutton, ancien bâtonnier, président de la première circonscription de Nancy du PSF puis dirigeant du service juridique de la fédération PSF de Meurthe-et-Moselle, Lamarque d'Arrouzat, conseiller honoraire à la Cour d'appel, catholique membre des Fraternités à Nancy, proche des Jeunesses patriotes, Thiébaut, avoué à la Cour, l'avocat François Xardel
  4. Médecin commandant de réserve, président de l'association des officiers de réserve de la région de Nancy, président de l'Union des sociétés militaires et d'anciens combattants jusqu'à sa démission en 1937, président de l'amicale régimentaire le Clocheton, membre des Croix de feu jusqu'en 1935-36, membre du bureau de la section ancéienne de cette association en 1932.
  5. Fils de Pierre Xardel (ancien bâtonnier et conseiller municipal de Nancy, président des Étudiants d'Action française avant et après la Grande Guerre), ancien membre des Jeunesses patriotes, membre du comité consultatif de la fédération PSF de Meurthe-et-Moselle en 1936.
  6. Membre du Faisceau en 1926, président du groupement de l'Union des républicains du canton de Raon-l'Etape depuis 1932, conseiller municipal de cette localité vosgienne de 1935 à 1937, membre des Jeunesses patriotes et des Croix-de-feu.
  7. Oncle de François Valentin, conseiller municial URD de Nancy, président du conseil d'administration de la Presse de l'Est, qui édite l’Éclair de l'Est, proche des Jeunesses patriotes.
  8. Secrétaire général des Jeunesses patriotes de Lorraine de 1927 à leur dissolution, membre du PNRS
  9. Membre du Faisceau, chef de la section nancéienne de la Solidarité française et délégué régional de cette ligue au début de l'année 1934 puis membre des Croix de feu puis du PSF (membre du comité consultatif de la fédération de Meurthe-et-Moselle). Collaborateur pendant l'Occupation : secrétaire fédéral du PPF de Meurthe-et-Moselle et chef du service « action », jugé trois fois à la Libération, condamné à mort mais sa peine est commuée en 20 ans de travaux forcés.
  10. Militant des Jeunesses patriotes, du Parti national populaire puis du PNRS qui lui succède, gendre du directeur des cristalleries de Baccarat, petit-fils d'Adrien Michaut, conseiller général et maire de Baccarat et petit-neveu du sénateur (1920-1933) Henri Michaut.
  11. Fils du général Louis Ernest de Maud'huy, gouverneur militaire de Metz en 1918 et député de l'Union républicaine lorraine en 1919, Bertrand de Maud'huy, docteur en droit et en économie, est passé par les cabinets de Louis Loucheur et de Briand avant d'entrer à la banque Worms. Il a participé à l'essor des Volontaires nationaux de La Rocque avant de quitter les Croix-de-feu en octobre 1935. En 1945, il est élu conseiller général de Metz, comme indépendant. Il adhère au MRP.
  12. Tels Guy Adt, délégué de Jeandelaincourt, ancien secrétaire de la sous-section Croix de feu de cette commune; section devenue autonome en 1936, Couraleau, délégué de Lunéville, ancien Croix de feu, Pinat, délégué d'Auboué, ancien responsable local de l'Action française, Jean Biet, militant actif, ancien de l'Action française également, Salvado, délégué de Vittel, ancien JP, Roger-Yves Millet, ancien responsable de la Phalange de Lorraine des JP, René Martin, délégué de Briey, ancien chef de la section de la Solidarité française de cette localité de 1934 à 1936. Dans la plaine des Vosges, le RNL est dirigé par l'avoué Gilbert Getten. En sont membres Daniel Delboy, ancien président de la section de la Solidarité française de Mirecourt, Edouard pernod du Breuil, ancien président de la section de l'Action française de Mirecourt, Pierre Gillet, ancien JP, rédacteur au périodique La Plaine des Vosges.
  13. Fils d'un Messin installé après 1870 à Nancy, neveu d'Alexis L'Hotte, engagé volontaire pendant la guerre de 1914-18, titulaire de la croix de guerre, lieutenant de cavalerie, officier de réserve, représentant de L'Air liquide à Nancy puis pour la Lorraine, membre de l'Union des Chambres syndicales de Meurthe-et-Moselle, catholique membre du G.E.C., fondateur avec Raoul de Warren en 1924 de la Ligue des patriotes lorrains affiliée à la Ligue des patriotes, candidat aux cantonales dans le canton de Nancy-Est en 1931, membre du PNRS. Il reçoit la francisque (il est parrainé par Georges Laederich et Roger de Saivre). Il est candidat sur la liste de Robert Kalis aux municipales de 1959 à Nancy et est élu conseiller municipal de Nancy sur la liste du maire sortant Pierre Weber en 1965.
  14. Assureur-conseil à Nancy, commandant adjoint de la Phalange de Lorraine des JP, membre du PNRS et délégué adjoint à la propagande du RNL.
  15. Né à Mulhouse le 10 novembre 1885, il s'installe à Épinal, après un séjour aux États-Unis de 1908 à 1911, comme représentant de machines textiles. Engagé volontaire en 1914 au titre de la Légion étrangère, officier interprète, capitaine de réserve membre de la société des officiers de réserve de Remiremont. Militant des JP dès 1927, il est responsable départemental de la ligue de la fin des années 1920 à 1936. Membre du PNRS et du RNL. Délégué de Remiremont de ce groupement.
  16. Tels Pierre d'Herbécourt dans la Meuse (archiviste départemental né en 1904), ancien Volontaire national, président de la section PSF de Verdun, délégué à la propagande du PSF dans ce département ou bien le commandant Gaston Vicq dans les Vosges (ancien intendant militaire dees troupes coloniales, né en 1888, rentier, maire d'une petite commune, membre de l'association des officiers de réserve de Mirecourt et de l'antenne locale de l'amicale régimentaire Le Clocheton, présidée à Nancy par le commandant Chabeaux), ancien Croix-de-feu, président de la section PSF de Dompaire
  17. Celle organisée au vélodrome du Montet à Nancy le 25 octobre 1936 réunit plus de 30 000 personnes, l'auditoire le plus important de l'entre-deux-guerres, à l'exception des réunions catholiques.
  18. Le RNL entend « museler le marxisme » en octobre 1938 : « On rejette le communisme mais on oublie de préciser que le socialisme s'alimente aux mêmes sources et a le même programme. (...) Léon Blum est aussi dangereux pour le pays que le pâtissier-espion Jacques Duclos », La Lorraine nationale et sociale, 6 novembre 1938.
  19. Le rappel de la judéité de Léon Blum ne vient sous la plume des rédacteurs de La Lorraine nationale et sociale qu'en 1937, à l'occasion du conflit scolaire et religieux en Alsace-Moselle. En 1938, ils estiment que Jacques Doriot lors d'une réunion à Metz en juin, a « traité le problème juif » avec « beaucoup de modération et de calme » dans la mesure où il prétend seulement « empêcher des étrangers naturalisés d'hier de faire la loi aux Français ». Ils sont indifférents au sort des juifs allemands et italiens : « Hitler et Mussolini mettent les juifs à la porte et les persécutent. C'est leur affaire, cela ne nous regarde pas. Mais nous ne devons pas recevoir chez nous ceux qui sont jugés indésirables en Allemagne et en Italie, s'ils profitent de notre hospitalité pour se venger » (La Lorraine nationale et sociale, 26 novembre 1938). Un portrait de Georges Mandel, décrit comme « le plus grand pourrisseur », qui a sa place « au pays des pourrimentaires », n'omet pas « son long nez crochu ». Un portrait de Léon Blum lui prête les caractéristiques des « gens de sa race » : il est vu comme « apatride, amoral, précieux, femmelette, arrogant ». À la fin de l'année 1938, la vieille expression de « judéo-maçonnique » apparaît dans les colonnes du périodique qui, en 1939, loue le pamphlet de Louis-Ferdinand Céline, Bagatelles pour un massacre : « Si outré que soit son style », le livre « mérite mieux que le demi-silence dont une presse asservie entoure ce livre » (La Lorraine nationale et sociale, 9 avril 1939). En septembre 1938, une bagarre à Nancy entre un commerçant juif d'origine polonaise et un « national » faisant son service militaire provoque un incident : le commerçant est frappé et la vitrine de son magasin vole en éclats. Le jeune « national » est défendu par Me Adrien Sadoul lors de son procès et le périodique du RNL juge que le geste a été « un peu vif » mais s'en félicite, comme il se félicite que le commerçant ait été expulsé (La Lorraine nationale et sociale, 26 février 1939), in Jean-François Colas, op. cit., p. 564-566

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