Rite

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Un rite détaille le contenu, la périodicité et l'ordre prescrit des cérémonies qui se pratiquent dans une religion ou dans une société. Rituel est d'abord un adjectif et, quand il s'agit d'un nom, il s'applique à la codification par écrit d'un rite. Les deux mots rite et rituels sont issus du latin ritus pour le premier et de rituales libri (livre traitant des rites) pour le second.

Les mots rites et rituels sont souvent employés à tort l'un pour l'autre.

Sommaire

Nature du rite

Le rite est un cérémonial. Désignant un ensemble d'usages réglés par la coutume ou par la loi, le mot cérémonial s'applique aussi bien au domaine religieux qu'aux manifestations civiles ou politiques. Une cérémonie rituelle est toujours religieuse.

La liturgie est la désignation de l'ensemble des rites qui ont été approuvés par les autorités ecclésiastiques catholiques concernant la messe et les divers offices.

Un rite sert de ciment à une communauté, conformément au double sens étymologique de "relier" et "se recueillir". La participation répétée au culte selon un certain rite marque l'appartenance à la communauté religieuse concernée.

Un schisme peut se produire sur des aspects dogmatiques mais aussi rituels. L'abandon partiel de la messe en latin est ainsi une des raisons pour lesquelles une partie des catholiques dits "intégristes" s'est écartée de l'Église catholique. Le changement d'un rite ancien et parfois millénaire est toujours une opération complexe et troublante pour une religion.

De nombreuses religions se sont divisées sur des questions de rites. Dans la religion musulmane on distingue le rite d'Omar ou le rite d'Ali. Les Églises chrétiennes d'orient se sont divisées depuis longtemps sur des questions de rites. En Orient, aujourd'hui, les rites des Églises chrétiennes orientales co-existent : byzantin, antiochien, chaldéen, copte, arménien, le rite romain... Dans l'Église catholique on trouve des fidèles de plusieurs rites, mais si certains rites sont exclusivement pratiqués dans l'Église catholique (rite maronite), d'autres sont pratiqués surtout hors d'elle (rite copte, rite éthiopien)

L'œcuménisme pose la question de rites communs à plusieurs Églises qui ont divergé au fur et à mesure du temps, ou entre religions différentes. La concélébration - participation de célébrants de différentes confessions à une même cérémonie - est toujours impossible. Les rites réellement fusionnés soulèvent de très difficiles questions théologiques.

Beaucoup des rites religieux antiques comportaient des sacrifices humains (Aztèques entre autres) et d'animaux (Zoroastrisme, entre autres). Grâce à la religion juive, les sacrifices humains ont disparu au profit de sacrifices d'animaux. Grâce au Christ Jésus, qui s'est offert en unique victime, par son sacrifice sur la croix, les sacrifices d'animaux ont été alors interdits par les Chrétiens, puis par les Juifs, à la suite de la destruction, par les Romains, du Temple de Jérusalem en 70 ap. J-C. Actuellement seule la religion musulmane fait perdurer les sacrifices d'animaux (moutons), par exemple le jour de la fête d'Aïd el Kebir.

De nombreux rites ont imposé et imposent toujours aujourd'hui des mutilations : scarification, déformation des lèvres ou des oreilles, circoncision, excision, chasse d'une bête dangereuse, exercice périlleux, ingestion de produits hallucinogènes ou d'alcool, dont font partie les bizutages à l'entrée dans les Grandes Écoles. Ces rites culturels entrent de plus en plus en conflit avec la législation civile.

Le chant et la danse participent aux rites de nombreuses religions. D'une façon générale tout ce qui concourt à une émotion collective est prisé lors des rites. Le choix des lieux et des moments où s'exécutent les rites sont extrêmement importants et concourent à leur succès. La création des objets et des lieux nécessaires à l'exécution d'un rite, église, temple, synagogue, mosquée, est généralement considérée comme une source de l'art. La monnaie a même pris dès son invention une part active à de nombreux rites. En Grèce, par exemple, il y avait un rite de la mise d'une obole sur la langue d'un mort, pour que celui-ci puisse payer le passeur du fleuve Styx.

Peuvent être distingués : les rites intercesseurs (pluie, moisson, maladie, guerre, fertilité etc.), les rites de passage (naissance, entrée consciente dans la religion, entrée dans la communauté des adultes, décès, intronisation, mariage etc.) et les rites de confirmation d'appartenance (processions, célébrations, cérémonies au monument aux morts, inaugurations, fêtes diverses).

L'ancienneté des rites, que l'on retrouve aux premiers âges de l'humanité et dans toutes les sociétés, leur variété, leurs motivations, leurs conséquences sanitaires et sociales, expliquent le grand nombre des approches possibles : théologie, histoire générale et histoire des religions, sociologie, psychologie sociale, anthropologie, économie, droit.

Bien que se situant dans le domaine non religieux, les loges maçonniques se sont attachées à développer des rites à l'instar des religions. Alors que dans les religions, les rites ont toujours un sens réel ou symbolique, les rites maçonniques sont essentiellement symboliques. Cette symbolique relève soit de l'alchimie, de la chevalerie ou des métiers de la construction, soit encore de légendes ou de mythes, le plus souvent trouvés dans un récit gnostique parfois très vieux. Ils sont généralement couverts par un secret très relatif. Les rites maçonniques, écossais, français, égyptiens etc..., sont nombreux et l'occasion de nombreuses divergences entre Maçons.

Le langage courant a étendu le terme de rite à la qualification de comportements politiques et sociaux sans dimension religieuse : le rite du week-end ; de la poule-au-pot sous le bon Roi Henri IV en France, de la "garden party du 14 juillet à l'Élysée", des enterrements de vies de jeune-homme ou de jeune-fille avant les mariages, etc.

Les différents types de rites

Chaque religion ou confession a codifié, au fil des siècles, les gestes qui lui sont propres pour la célébration de son culte. Exemple : rite de "l'asperges me" ou celui effectué par le thuriféraire. Par la pratique de ces rites, les fidèles reconnaissent leur adhésion intérieure à ce culte. Les occasions rituelles concernent soit la vie collective globale de la communauté, soit des circonstances familiales, ou la vie spirituelle personnelle.

Rites périodiques :

- Les cérémonies quotidiennes, hebdomadaires, et annuelles (par exemple) Aïd el kébir pour la religion musulmane)

Rites d'intercession ou de demande.

Ils correspondent en général à des intercessions particulières :

- Intercession pour obtenir la pluie : pratiquement présente dans toutes les religions. C'est souvent à cette occasion que les rites les plus violents ont été inventés. On se souvient des sacrifices humains de Carthage pour obtenir la pluie pendant le siège romain. - Intercession pour obtenir la victoire. - Intercession pour obtenir une bonne récolte. - Intercession pour obtenir la sécurité d'un bateau, d'un bâtiment etc.

Beaucoup de rites d'intercession dans la Grèce antique s'appuyaient sur des oracles (Delphes, Delos). Les antiques Romains attendaient la réponse des dieux à certaines questions importantes, au travers de l'examen des restes d'animaux suppliciés, ou en rgardant la direction du vol des oiseaux.

Rites de passage

La ritualité familiale est la plus tenace et la plus résistante aux changements. Le culte des ancêtres en Chine a ainsi traversé plusieurs décennies de régime communiste anti religieux.

Rites individuels

  • La prière. La religion musulmane par exemple, codifie la périodicité, la gestuelle, la direction tournée vers la Mecque.
  • Certains gestes de la vie courantes sont très souvent un peu et parfois beaucoup ritualisés : mis au lit des enfants, prise du petit déjeuner, maquillage, rasage, etc...

Les explications des rites

Les rites ne sont pas forcément religieux puisqu'ils rythment très souvent les actes quotidiens de la vie des humains. En cela les rites séparent les humains du monde animal. Les tout premiers rites : inhumation des corps, feux, élévation de pierres (menhirs ou dolmens) montrent bien qu'à l'aube de l'humanité, le rite est intrinséquement lié à l'humanité et systématiquement à la religion qui est uniquement le fait des humains.

Les travaux d'Émile Durkheim traite les rituels comme des éléments du sacré. Mais l'interprétation du rite par les sciences humaines a tenté de dépasser le cadre de l'explication purement religieuse par des interprétations sociales ou comportementales.

Par exemple  :

  • l'approche que l'on pourrait qualifier d'éthologie humaine, issue notamment des travaux de Konrad Lorenz ; Comme éthologue, Konrad Lorenz a étudié le rite comme la forme qu'une culture donne à l'agressivité individuelle de ses membres pour circonscrire ses effets désordonnés et indésirables et a-contrario valoriser sa contribution à la conservation du groupe. La vision de Konrad Lorenz a maintenant été dépassée par René Girard qui a montré que le phénomène du bouc émissaire et les rites qui y sont associés existent dans toutes les civilisations et donc les religions, à l'exception du Christianisme, qui pour René Girard, a inauguré de manière définitive la sortie de la religion, au sens d'ensemble de pratiques purement rituelles. (Cf. Achever Clausewitz, Ed. Carnets Nord).
  • le courant issu de la psychanalyse qui rattache les rites dits "sociaux" à des systèmes de défense collectifs.
  • Des théories s'articulent autour de la notion de "rite profane" (Claude Rivière, 1995) et de "rite d'interaction" (Erving Goffman, 1974, Dominique Picard, 1995, 2007)


Un rite électoral : le siège d'investiture - représentation satirique sous forme de peinture rococo, de William Hogarth. Angleterre, années 1750

Les rites initiatiques

Les rites de passage également nommés rites initiatiques accompagnent dans beaucoup de sociétés humaines les changements "biologiques" et "sociaux" d'un individu.

Une forme dérivée est le rite d'entrée dans une secte ou une société de pensée profane.

De façon très extensive on peut parler de rite pour les actes exigés d'un nouveau membre d'un gang ou d'une mafia.

Le rôle des célébrants

La conservation, l'enseignement et l'application des rituels est un des rôles majeurs des religions et de leurs célébrants.

La crise des vocations et la diminution du nombre des célébrants dans plusieurs religions d'Europe, posent la question du maintien du nombre des lieux de culte et de la fréquence des célébrations. Beaucoup de lieux de culte en Europe ont vu la fréquence de leurs offices diminuer. A l'inverse sur d'autres continents la fréquence des célébrations est en nette augmentation et nécessite la construction de très nombreux nouveaux lieux de cultes. Au Royaume-Uni de nombreuses églises anglicanes ont été purement et simplement désaffectées et transformées.

Les transferts de populations provoqués par la mondialisation posent également la question de la "nationalisation" de certains cultes et de la langue de certains rites. En France, les conflits entre imams de différentes origines (Arabie saoudite, Turquie, Algérie, Maroc) a conduit à une réflexion sur la formation d'imams officiant en français et non plus en arabe ou en turc.

La question de la licité des rites posée par Cicéron est toujours d'actualité.

La concurrence entre fêtes profanes et fêtes rituelles religieuses

Toutes les religions ont souvent essayé de faire coïncider des fêtes anciennes associées à des cultes antécédents enracinés dans les traditions locales. Un certain nombre de rites, comme par exemple la fête Chrétienne d'Holywins (de l'anglais : la sainteté gagne) qui a été créée pour supplanter le rite païen d'Halloween.

Aujourd'hui des fêtes profanes, à dimensions commerciales, comme Noël, viennent parfois en conflit avec des occasions rituelles traditionnelles. La dimension profane de certaines fêtes religieuses s'effacent en partie devant une démarche purement touristique. Le rite religieux à l'origine est parfois remplacé par un spectacle (cas de Pampelune par exemple), qui lui même devient un rite purement profane.

Voir aussi

Bibliographie

  • William Robertson Smith, « Lectures on the Religion of the Semites », (1889), Kessinger Publishers, 2004 ;
  • Salomon Reinach, « La flagellation rituelle », Cultes, Mythes et Religions, t. I, Éditions Ernest Leroux, Paris, 1905, pp. 173-183 ;
  • Arnold van Gennep, « Les Rites de passage », (1909), Paris, A. et J. Picard, 1981 ;
  • Salomon Reinach, « Le rire rituel », « Cultes, Mythes et Religions », t. IV, Éd. E. Leroux, 1912 ;
  • Jean Cazeneuve, « Les Rites et la condition humaine », Paris, PUF, 1958 ;
  • Mircea Eliade, « Initiation, rites, sociétés secrètes », (1959), Paris, Gallimard, 2001 ;
  • Max Gluckman, « Essays on the Ritual of Social Relations », (1962), Manchester, Manchester University Press, 1975 ;
  • Max Gluckman, « Politics, Law and Rituals in Tribal Society », (1965), Oxford, Blackwell, 1984 ;
  • Erving Goffman, « Les Rites d'interaction », (1967), trad. par Kihm A., Paris, Minuit, 1984 ;
  • Victor Turner, « Le Phénomène rituel. Structure et contre-structure », (1969), trad. par Guillet G., Paris, PUF, 1990 ;
  • Erving Goffman, « Les rites d'interaction », Editions de Minuit, 1974 ;
  • François-André Isambert, « Rite et efficacité symbolique », Paris, Cerf, 1979 ;
  • Claude Rivière, « Les Liturgies politiques », Paris, PUF, 1987 ;
  • Claude Rivière, « Les rites profanes », PUF, 1995 ;
  • Dominique Picard, « Les rituels du savoir-vivre », Le Seuil, 1995 ;
  • Martine Segalen, « Rites et rituels contemporains », (1998), Paris, A. Colin, 2005 ;
  • Arthur Maurice Hocart, « Au commencement était le rite. De l'origine des sociétés humaines », Préface de Lucien Scubla, 2005, La Découverte ;
  • Roberto Tresoldi « Les rites d'initiation », De Vecchi, 2005 ;
  • « Rite, rituel », dans « Vocabulaire de psychosociologie », Erès, 2006 ;
  • Jean Cuisenier, « Penser le rituel », 2006, PUF.

Wikimedia Foundation. 2010.

Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Rite de Wikipédia en français (auteurs)

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