Rêves lucides

Rêves lucides

Rêve lucide

Un rêve lucide est un rêve qui se distingue par le fait que le rêveur a conscience d'être en train de rêver. L’utilisation de l’adjectif « lucide » en tant que synonyme de « conscient » a été introduite en 1867 par l'écrivain, sinologue et onirologue français Léon d'Hervey de Saint-Denys, dans son ouvrage Les rêves et les moyens de les diriger.

La plupart des rêves lucides ont lieu durant la phase de sommeil paradoxal. Ils peuvent survenir fortuitement ou résulter d'un apprentissage. Se savoir rêver offre au rêveur la possibilité d'exercer un contrôle délibéré non seulement sur ses actions mais sur le contenu du rêve et sur son déroulement.

La faculté de reconnaître l'état de rêve durant son sommeil est mentionnée dans les textes bouddhistes au VIIIe siècle après J.-C. En Occident, le rêve lucide a été étudié en laboratoire du sommeil dès la fin des années 1970.

Couverture du premier livre sur le rêve lucide, Les rêves et les moyens de les diriger, de Léon d'Hervey de Saint-Denys.

Sommaire

Définition

La définition minimale formulée en 1968 par Celia Green : « un rêve lucide est un rêve dans lequel le sujet est conscient de rêver »[1] est admise par tous les chercheurs contemporains. Tous ne la considèrent cependant pas comme suffisante. Ainsi le psychologue allemand Paul Tholey distinguait entre rêve normal et rêve lucide en fonction de sept critères : le rêveur sait qu'il rêve ; il dispose de son libre arbitre ; d'une faculté normale de raisonnement ; d'une perception à travers les cinq sens comparable à la normale ; de ses souvenirs de l'état de veille ; il se souvient parfaitement de son rêve au réveil ; il est capable d'interpréter le rêve à l'intérieur même du rêve. Il est essentiel pour Tholey de satisfaire aux quatre premiers[2]. D'autres auteurs insistent sur la sensation d'être présent ici et maintenant dans le rêve ou de pouvoir le contrôler.

On admet fréquemment que l'expérience de la lucidité dans le rêve doit être appréhendée en tant que continuum et que le degré de lucidité varie depuis la prise de conscience minimale définie par Celia Green jusqu'à l'idéal décrit par Paul Tholey[3],[4],[5].

Définition des phénomènes associés au rêve lucide

Le fait d'envisager la lucidité onirique comme un continuum a conduit les chercheurs à lui associer divers phénomènes et états de conscience oniriques proches du rêve lucide soit par leur similitude, soit par leur apparition dans le temps[5].

Rêves prélucides

Ce terme a été introduit par Celia Green pour décrire certains rêves durant lesquels le sujet émet un doute sur la réalité de son environnement sans pour autant pleinement réaliser qu'il rêve.

Rêves de faux-éveil

Dans un rêve de faux-éveil, le rêveur croit s'être réveillé pour de bon alors que seulement un changement de décor onirique a eu lieu. Les rêves de faux-éveil ne sont pas lucides mais sont fréquemment rapportés dans la proximité de la lucidité onirique.

Paralysie du sommeil

Les termes « paralysie du sommeil » décrivent à la fois l'atonie musculaire caractéristique du sommeil paradoxal et une parasomnie qui se produit au moment de l’endormissement ou du réveil. Dans le trouble du sommeil, le sujet se sent paralysé, incapable de bouger ou de parler. La paralysie peut également s’accompagner d’hallucinations visuelles, auditives ou tactiles. Certaines méthodes d'induction de rêve lucide visent à obtenir cet état afin d'entrer consciemment dans un rêve.

Expériences hors du corps

Certains rêves lucides se caractérisent par l'impression de se séparer de son corps physique et d'observer l'environnement depuis une position distincte de ce dernier. Comparables aux « expériences hors du corps » décrites par la parapsychologie, de semblables expériences ont été rapportées par de nombreux chercheurs comme Green, McCreery, Tholey, Tart, LaBerge ou Bouchet. Plusieurs méthodes d'induction de la lucidité onirique sont orientées vers la production d'une telle sensation. La notion de « voyage astral », empruntée à la terminologie de la Société théosophique, est parfois utilisée pour décrire un tel phénomène[6].

Description

Du point de vue phénoménologique

Une autre façon de circonscrire le rêve lucide est de l'envisager sous l'angle phénoménologique, c'est-à-dire d'étudier le phénomène tel qu'il apparaît dans les descriptions rencontrées dans la littérature, scientifique ou non, et les rapports personnels des rêveurs. On peut scinder cette description en trois points : les modalités d'apparition de la lucidité, les actions des rêveurs une fois devenus lucides et la manière dont la lucidité onirique disparaît.

L'apparition de la lucidité

On classifie depuis Celia Green les rêves lucides en deux grands types selon le mode d'apparition de la lucidité : au cours du rêve même ou au moment de l'endormissement. On appelle DILD (dream-initiated lucid dreams) ceux où le sujet prend conscience de son état à l'intérieur d'un rêve en cours ; WILD (wake-initiated lucid dreams) ceux où il pénètre consciemment dans un rêve depuis l'état de veille[7]. Plus de 80 % des rêves lucides sont des DILD[8].

Au cours du rêve

Lorsque la lucidité apparaît au cours d'un rêve, le rêveur a soudain l'impression de s'éveiller et il peut continuer de rêver tout en sachant qu'il rêve. Celia Green distingue quatre facteurs qui induisent cette reconnaissance de l'état de rêve : les tensions d'une situation cauchemardesque, les interrogations suscitées par un élément incongru ou irrationnel dans le contenu du rêve, le rappel d'une technique habituelle d'observation introspective ou encore la reconnaissance spontanée, sans raison apparente, du fait que l'expérience diffère de celles de l'état éveillé. Concernant le premier facteur, Bouchet remarque que, si les émotions violentes sont considérées comme une cause fréquente d'apparition de la lucidité, celle-ci peut tout aussi bien être provoquée par une émotion forte à connotation agréable. Il arrive enfin plus rarement que la lucidité onirique se manifeste de manière graduelle.

Au moment de l'endormissement

Lorsque, suite à un endormissement conscient, la lucidité onirique constitue le prolongement de l'état de conscience éveillée, le sujet dispose de deux indicateurs pour savoir qu'il est passé de l'éveil au rêve : le sentiment de faire partie intégrante du rêve et la perte (ou la modification) des sensations corporelles. Afin de s'endormir consciemment, le sujet doit traverser l'état hypnagogique[9] au cours duquel se manifestent soit de l'imagerie hypnagogique, soit des hallucinations auditives, soit encore des hallucinations d'ordre kinesthésique et cénesthésique (sensation de flottement, de tournoiement, de chute, impressions de vibrations, d'engourdissement ou de paralysie, impression de sortir de son corps).

Dans certains cas, la conscience de l'endormissement présente des fluctuations, parfois même des absences durant lesquelles le sujet ne garde aucun souvenir. On considère malgré cela qu'il s'agit d'un endormissement conscient car la perte temporaire de conscience se situe avant l'émergence du rêve.

L'expérience du rêve lucide

Le fait de se savoir rêver offre au rêveur la possibilité d'élargir son éventail d'options et d'aborder le contexte onirique avec une plus grande liberté d'action. Il peut non seulement exercer un contrôle sur lui-même et ses actes, mais aussi intervenir délibérément sur l'environnement, les personnages et le cours du rêve. Certaines actions se présentent avec une grande régularité, comme le rêve de vol ou de lévitation. D'autres expériences plus inhabituelles ont été signalées dans la littérature, comme les sorties hors du corps, les transformations en animaux et créatures fantastiques, le dédoublement de la vision, la vision panoramique à 360°, le ralentissement du temps et des expériences à caractère cosmique comme l'évolution dans un espace à quatre dimensions[10]. Le rêveur peut aussi agir sur la durée du rêve en prenant la décision de le prolonger, et parfois même l'interrompre en se réveillant puis le reprendre en se rendormant quelques secondes après.

Bien que les seules limites théoriques soient celles de l'imagination, les croyances culturelles ou personnelles sur le rêve, les attentes conscientes ou préconscientes du rêveur, ses supputations sur le fait que telle chose soit possible ou non, en particulier l'influence exercée par d'autres récits, déterminent jusqu'à un point remarquable la forme que les rêves prennent ainsi que la capacité dont dispose le rêveur à les modifier[11].

De même, l'expérience du sujet, son degré de lucidité, c'est-à-dire le point jusqu'auquel il est parvenu à conserver sa capacité de raisonnement, de jugement et de recul sur l'aspect illusoire de la situation et sur les émotions qu'elle engendre, influent sur le contenu et la tonalité de l'expérience. Quant à la perception, elle peut aller d'un état brouillé jusqu'à une impression de grande vivacité et de parfait réalisme. Ainsi différents critères de l'expérience, qui concernent aussi bien la conscience de soi que l'environnement onirique, sont susceptibles d'importantes variations d'un rêveur à l'autre, d'un rêve lucide sur l'autre, voire à l'intérieur du même rêve.

La perte de la lucidité

La façon dont la lucidité onirique prend fin peut être définie comme la perte de la conscience de rêver. Soit elle est liée à la disparition du rêve et le rêveur se réveille, parfois volontairement, parfois à cause d'émotions trop intenses ; soit le rêveur relâche sa vigilance et se laisse distraire : la lucidité se dissipe alors et il retombe dans un rêve ordinaire et incontrôlé[12]. Dans certains cas, la lucidité se perd dans un rêve ordinaire à cause de la transition d'une scène onirique à une autre, par exemple sous la forme d'un rêve de faux-éveil[13].

Du point de vue de l'observation statistique

Une grande partie de la population a fait au moins une fois dans sa vie l'expérience spontanée de la lucidité onirique, ne serait-ce que fugitivement, par exemple dans un cauchemar lorsque la prise de conscience du fait de rêver précède de peu l'éveil.

Plusieurs études ont été menées pour déterminer la fréquence du rêve lucide dans la population. Selon les études, le pourcentage de personnes déclarant avoir eu connu au moins un rêve lucide varie entre 26 % et 82 %. Cet éventail peut s'expliquer par le choix de la catégorie de personnes interrogées (pris au hasard, étudiants en psychologie, intéressés par le sujet), par d'éventuelles différences de la définition du rêve lucide, par la confusion avec les rêves prélucides ou l'absence de vérification du contenu du rêve. Il est plus rare par contre que ce phénomène se produise fréquemment. 21 % à 37 % des sujets témoignent d'une certaine régularité (une fois par mois ou davantage). Le rêve lucide semble se rencontrer plus souvent chez les enfants. Selon Armstrong-Hickey, 63 % des enfants de dix ans assurent faire des rêves lucides chaque mois, ce taux tombant à 36 % pour les enfants de 12 ans[14].

Aucune différence marquante n'a été trouvée entre les sujets plus souvent lucides dans leurs rêves et les autres en termes de sexe, d'éducation[15] ou de facteurs de la personnalité[16].

Plusieurs études ont montré des différences de contenu entre les rêves lucides et les rêves ordinaires. En particulier, les rêves lucides contiennent des émotions plus intenses[17].

La plupart des rêves lucides se produisent durant les phases de sommeil paradoxal et au cours des dernières heures de sommeil. Certains rapports mentionnent des rêves lucides dans les phases non-REM. Les rêves lucides sont aussi plus fréquents durant les siestes l'après-midi. LaBerge a montré qu'une interruption du sommeil dans la nuit, suivie d'une veille d'une durée de quarante-cinq minutes à une heure avant de se rendormir (ce principe a été appelé Wake-Back To Bed, en français « réveil, retour au lit ») augmentait significativement les probabilités d'apparition de la lucidité onirique[18].

Élaboration d'un modèle neurobiologique

Selon le neurologue Allan Hobson, le cortex préfrontal dorsolatéral constitue le fondement de plusieurs fonctions cérébrales comme la mémoire de travail, la pensée volontaire, la conscience de soi et le jugement critique. Cette zone est ostensiblement moins active durant le sommeil paradoxal et ces fonctions sont amoindries, ce qui causerait la perte du jugement critique durant le rêve ordinaire. Durant le rêve lucide, le cortex préfrontal dorsolatéral se réactiverait à un niveau proche de celui de veille, alors que le système limbique, le pont et les aires temporales et postero-latérales du cortex resteraient suffisamment hyperactifs pour maintenir les caractéristiques émotionnelles et perceptuelles du rêve. En 2007, cette hypothèse n'a pas encore été vérifiée expérimentalement[19].

Culture et histoire

Le rêve lucide dans la culture occidentale

De l'Antiquité à l'époque moderne

Durant l'Antiquité grecque, le rêve lucide apparaît comme un phénomène doté d'une certaine assise culturelle, du moins dans l'imaginaire : Homère met en scène des rêveurs qui se savent en train de dormir[20]. Aristote fait la première mention explicite du phénomène du rêve lucide en stipulant qu'un rêveur peut être conscient de rêver[21].

Il faut attendre le Moyen Âge pour obtenir, grâce à une lettre de saint Augustin d'Hippone en 415, le premier récit d'un rêve lucide, un rêve du médecin Gennadius[22]. Au XIIIe siècle, saint Thomas d'Aquin propose une explication au rêve lucide. Il remarque que le phénomène est plus courant vers la fin du sommeil[23].

Du XIVe siècle au XVIe siècle, les témoignages semblent manquer. Toutefois on est en droit de se demander avec Christian Bouchet[24] si certains rêves singuliers des benandanti du Frioul vers la fin du XVIe siècle (et des kresniki en Istrie, Slovénie et Croatie au XVIIe siècle) ne sont pas des rêves lucides. Ces rêves comportent des caractéristiques fréquemment retrouvées à la proximité de la lucidité, comme les faux-éveils, le sentiment de quitter son corps, de se métamorphoser ou de voler dans l'espace[25].

Le troisième des trois fameux songes que fit René Descartes dans la nuit du 10 au 11 novembre 1619 est un rêve lucide[26]. Le philosophe anglais Thomas Reid mentionne dans une lettre datant de 1779 le fait d'avoir induit volontairement un rêve lucide à l'âge de quatorze ans[27].

L'époque contemporaine

Au XIXe siècle siècle, l'écrivain romantique Jean Paul[28] et le philosophe Friedrich Nietzsche[29]signalèrent dans leurs écrits qu'ils se savaient parfois rêver. Toutefois, les allusions au rêve lucide restent jusqu'alors succinctes. La première recherche sérieuse sur les rêves lucides est publiée de manière anonyme en 1867 par le sinologue Léon d'Hervey de Saint-Denys. Dans Les Rêves et les moyens de les diriger, ouvrage qui résume plus de vingt années de ses recherches sur les rêves, il est la première personne à soutenir qu'il est possible d'apprendre à rêver consciemment.

Frederik van Eeden et Léon d'Hervey de Saint-Denys, deux pionniers du rêve lucide.

Un chapitre du livre s'intitule « Les rêves lucides ». Hervey de Saint-Denys n'utilise pas l'expression dans l'acception actuelle. Ce chapitre regroupe en effet indifféremment des rêves où apparaît la conscience de rêver, des rêves vifs et des rêves programmés. C'est en 1913 que le psychiatre et poète néerlandais Frederik van Eeden introduit l'expression « rêve lucide » dans le sens que nous connaissons. Son article A Study of Dreams, publié dans les Proceedings of the Society for Psychical Research, récapitule les constatations issues de rêves consignés durant de nombreuses années, parmi lesquels trois-cent cinquante deux rêves lucides.

Ces publications attirent l'attention des chercheurs. Sigmund Freud admet l'existence du rêve lucide et mentionne brièvement le travail d'Hervey de Saint-Denys dans la seconde édition de l'Interprétation des Rêves. Néanmoins le concept de « rêve conscient » demeure un paradoxe aux yeux de la majeure partie de la communauté scientifique. De la même façon qu'Alfred Maury rejeta au siècle précédent les observations du marquis d'Hervey en affirmant que « ces rêves ne sont pas des rêves », l'influent Havelock Ellis exclut la possibilité d'être conscient dans le sommeil. Pour le philosophe Norman Malcolm, « le fait d'avoir une expérience consciente, de quelque nature qu'elle soit, n'est pas ce qu'on appelle dormir »[30].

Ainsi, malgré de nombreuses publications comme celles de Mary Arnold-Forster[31] en 1921, du philosophe russe Ouspensky[32] en 1931, de Celia Green en 1968, de Charles Tart en 1969 qui réédite l'article de van Eeden dans Altered States of Consciousness, de Patricia Garfield en 1974, l'attitude de la communauté scientifique vis-à-vis du rêve lucide reste sceptique. En 1973, Schwartz et Lefebvre suggèrent que ce phénomène survient non durant le sommeil, mais lors de micro-éveils[33],[34].

La preuve scientifique

En 1953, Aserinsky et Kleitman avaient découvert que les rêves tendaient à se produire durant des phases marquées par des mouvements oculaires rapides. En 1959, Michel Jouvet remarquait que, lors de ces périodes, les ondes enregistrées sur un électro-encéphalogramme étaient comparables à celles de l'état éveillé. Il proposa l'expression « sommeil paradoxal » pour désigner ces phases particulières.

Au cours du sommeil paradoxal, on observe une atonie musculaire. Seuls les yeux, les extrémités des membres et les muscles responsables de la respiration et de la circulation sanguine ne sont pas paralysés.

Sommeil paradoxal. L'EEG est entouré d'un rectangle rouge, les mouvements oculaires signalés par une ligne rouge.

Démontrer l'existence du rêve lucide ne pouvait s'effectuer qu'à travers l'enregistrement de signaux envoyés volontairement par un sujet depuis l'état de rêve. Or William Dement et H. P. Roffwarg avaient montré que les directions des mouvements oculaires enregistrées durant le sommeil paradoxal coïncidaient parfois avec les orientations du regard en rêve, telles que rapportées dans le récit des sujets. Cette constatation fournissait la clef de la communication depuis l'état de rêve lucide : on pouvait convenir d'une séquence spécifique de mouvements oculaires que le sujet enverrait durant un rêve lucide et qui serait enregistrée sur un polysomnographe.

C'est sur ces bases que la première preuve de l'existence du rêve lucide fut produite le 12 avril 1975[35] par Keith Hearne à l'Université de Hull en Grande-Bretagne. Son sujet Alan Worsley signala sa prise de conscience dans le rêve par un code oculaire prévu à l'avance. Ces signaux furent enregistrés pendant une phase de sommeil paradoxal. Il était ainsi montré que l'on pouvait être conscient au beau milieu du sommeil[36].

Les résultats de Hearne ne furent pas largement diffusés. Le premier article dans la presse scientifique fut publié quelques années plus tard par Stephen LaBerge, de l'Université de Stanford, qui avait développé de manière indépendante une démonstration similaire pour sa thèse de doctorat[37].

Dans les autres cultures

Hors du monde occidental, on trouve peu de références évidentes au rêve lucide. L'absence dans d'autres cultures du concept de rêve lucide, l'existence d'une compréhension différente du rêve, dans laquelle le facteur significatif porte souvent sur le contenu plus que sur le critère de conscience, la possibilité de plaquer des concepts occidentaux sur des phénomènes qui ne sont pas exactement similaires, sont quelques unes des difficultés rencontrées par la recherche anthropologique[38].

Le seul cas sur lequel n'existe aucun doute est le yoga du rêve développé par le bouddhisme tibétain, un ensemble de pratiques méditatives en état de rêve lucide. Son principe est de reconnaître, durant le rêve, que l'on est en train de rêver afin de percevoir la dimension illusoire et modifiable à volonté des productions oniriques. Ce yoga trouve ses origines au Nord de l'Inde dans les Six yogas de Nāropa, rédigés au XIe siècle, et au Tibet dans divers aspects des pratiques d'origine chamaniste de la religion Bön. Les enseignements principaux des yogas du rêve tibétain reposent sur la Tradition orale de Zang Zhung, une instruction couchée par écrit au VIIIe siècle (mais considérablement plus ancienne selon la tradition Bön) et sur le Tantra Mère[39].

Dans les années 70, la republication des écrits de Kilton Stewart sur les Senoi[40], une ethnie de Malaisie, a propagé l'opinion selon laquelle le contrôle du rêve (et de là le rêve lucide) jouait un rôle prépondérant dans leur vie sociale et qu'il était enseigné dès le plus jeune âge. S'il est vrai que les Senoi accordent au rêve une grande importance, plusieurs études menées ces dernières décennies ont démenti le fait qu'ils pratiquaient une quelconque forme de contrôle ou de lucidité oniriques[41].

Apprentissage

Le détail des méthodes trouve sa place dans le Wikilivre consacré au rêve lucide.

Le rêve lucide est susceptible d'apprentissage. Tous les auteurs insistent sur le fait que la motivation est une condition préalable nécessaire. Il existe de nombreuses méthodes d'induction de rêve lucide. Elles peuvent se classer en trois grandes catégories :

Endormissement conscient

Par ces méthodes, le sujet pénètre délibérément dans un rêve depuis l'état de veille en évitant de perdre conscience durant le processus d'endormissement. Cette idée de base est sujette à de nombreuses variations. Il est possible de se concentrer sur l'imagerie hypnagogique, sur une visualisation volontaire, sur une tâche mentale ou encore de prêter attention à la respiration, aux battements cardiaques ou autres sensations physiques. Les méthodes d'endormissement conscient sont plus faciles d'accès aux personnes qui s'endorment rapidement.

Prise de conscience dans le rêve

Ces méthodes requièrent d'avoir d’abord développé la faculté de bien se rappeler ses rêves. Elles visent à rendre le sujet conscient qu'il rêve à l'intérieur du rêve en cours. Divers principes sont applicables, fondés sur la reconnaissance de thèmes oniriques récurrents, l'interrogation suscitée par des situations incongrues, l'intention de trouver un objet dans le rêve, ou simplement l'intention de prendre conscience de son état de rêveur.

Certaines de ces méthodes privilégient l'autosuggestion, une des plus connues étant la méthode MILD (Mnemonic Induction of Lucid Dreams, soit « induction mnémonique de rêves lucides ») développée par Stephen LaBerge. La méthode MILD fait appel à la mémoire prospective. Elle associe un réveil matinal suivi d'une veille d'environ quarante-cinq minutes et, avant de se rendormir, une visualisation et une autosuggestion ayant pour but de se souvenir de prendre conscience dans le prochain rêve. Dans le même état d'esprit, la suggestion post-hypnotique a aussi été utilisée.

D'autres méthodes s'appuient sur l'examen de l'état de conscience. C'est le cas de la méthode « réflexive-critique » décrite par Paul Tholey. Elle vise à exercer durant la journée une faculté critique touchant la conscience de soi et l'environnement, faculté généralement assoupie durant le rêve ordinaire. Pour ce faire, le sujet met en doute la réalité de son environnement et effectue des « tests de réalité ». On trouve dans les textes bouddhistes des idées similaires, à savoir cultiver un état d'esprit particulier durant l'état de veille ou accroître l'attention prêtée à soi et à son environnement (méditation vipassana) dans le but de le porter dans le rêve et induire la lucidité onirique.

Utilisation de stimuli externes

Ces méthodes reposent sur le principe que des stimuli externes (lumières, paroles, sons, vibrations, etc.) peuvent être émis durant la phase de sommeil paradoxal afin de permettre au sujet de se rendre compte qu'il rêve. Hearne utilisa la détection du changement de rythme respiratoire afin de déclencher un choc électrique léger au poignet. LaBerge développa les lunettes Novadreamer, appareillage détectant le mouvement oculaire rapide et envoyant des signaux lumineux. L'utilisation de ces appareils seuls est peu efficace et doit s'associer à une préparation mentale, autrement les stimuli s'incorporent dans l'imagerie d'un rêve ordinaire[42].

Recherche et applications

Des années 80 à nos jours, plusieurs recherches ont été menées sur le rêve lucide, notamment par l'Université de Stanford et le Lucidity Institute fondé par Stephen LaBerge.

Psychophysiologie du sommeil paradoxal

Les expériences conduites ont porté sur les moyens d'induire et de prolonger la lucidité onirique ; sur les différences de contenu entre le rêve ordinaire et le rêve lucide ; sur l'estimation du temps en rêve lucide, comparable à celle de veille ; sur les correspondances physiologiques entre activités rêvées et réelles, par exemple sur la faculté du rêveur de modifier son rythme respiratoire ou sur la manière dont son activité sexuelle rêvée se reflète à travers des mesures physiologiques ; sur les moyens de communiquer depuis l'intérieur du rêve par l'intermédiaire de signaux oculaires, protocole utilisé régulièrement dans les expérimentations sur le rêve lucide ; sur le rapport entre l'activité cérébrale et l'activité rêvée (la latéralisation des fonctions cérébrales se retrouve durant les rêves lucides, l'hémisphère droit étant plus impliqué dans le fait de chanter, le gauche dans le fait de compter ; les mouvements rêvés génèrent des sorties motrices équivalentes aux schémas d'activité neuronale qui seraient produits si les mouvement correspondants était effectivement exécutés).

Tous ces résultats supportent la conclusion que les tâches cognitives et mouvements rêvés durant le sommeil paradoxal provoquent sur le cerveau (et à un degré moindre sur le reste du corps) des effets similaires à ceux de l'état de veille. Les zones cérébrales activées pendant un rêve sont analogues à celles sollicitées durant l’éveil[43],[44],[5].

Apprentissage moteur en rêve lucide

Ces résultats offrent une base théorique permettant d'expliquer l'effet d'un apprentissage moteur grâce à un entraînement en rêve lucide. Les études de Tholey[45] ont ainsi montré qu'un sportif exercé pouvait reproduire sans difficulté en rêve lucide des mouvements complexes comme ceux du saut à ski ou de la gymnastique et que l'apprentissage en rêve lucide pouvait conduire à une amélioration de la pratique sportive[46].

Applications cliniques

Plusieurs pistes sur les applications psychologiques et thérapeutiques du rêve lucide ont été suggérées[47], comme le traitement des phobies ou du trouble de stress post-traumatique.

Dans un cadre inspiré de la psychanalyse jungienne et de la gestalt-thérapie, le point le plus fréquemment investigué fut l'intégration des divers éléments de la psyché, supposés être représentés par les personnages rencontrés en rêve, à travers un comportement adéquat visant à gérer les situations désagréables.

Un premier modèle d'interaction avec les personnages fut proposé par Patricia Garfield. Dans cette méthode, dont elle attribua l'origine au peuple Senoi, les personnages hostiles doivent être systématiquement affrontés et éliminés[48]. Tholey, qui compara l'efficacité de différentes attitudes, conclut qu'une démarche fondée sur le dialogue et la conciliation était plus susceptible d'amener une expérience positive, de permettre au rêveur de reconnaître la signification du rêve et de découvrir l'origine de ses conflits psychologiques. Tholey rapporte avoir amélioré dans un contexte thérapeutique la condition de patients souffrant d'anxiété, de manque de confiance en soi ou de difficultés d'adaptation sociale par ce qu'il décrit comme un « programme d'auto-guérison »[49].

Ces affirmations sont fondées sur des études de cas et n'ont pas fait l'objet d'études contrôlées.

Traitement des cauchemars et de la paralysie du sommeil

En ce qui concerne le traitement des cauchemars, le rêve lucide semble avoir prouvé son efficacité. En plus des nombreux cas rapportés dans la littérature, une étude pilote a été conduite en 2006. Des séances d'une heure, durant lesquelles sont exposés les principes et techniques du rêve lucide ainsi que des exercices à faire durant la lucidité, ont permis de rendre les cauchemars moins angoissants et de réduire leur fréquence[50].

Il est aussi possible d'entrer consciemment dans un rêve lors des crises de paralysie du sommeil, ce qui contribue à les rendre moins stressantes[18].

Autres applications

La liste détaillée des intérêts et applications trouve sa place dans le Wikilivre sur le rêve lucide.

En plus de ces applications, le rêve lucide est pratiqué pour l'exploration ludique des possibilités offertes par l'univers onirique, pour la satisfaction des désirs, pour le développement personnel ou pour une recherche d'ordre spirituel. Il peut être aussi utilisé dans un but artistique et créatif, afin de résoudre des problèmes ou comme « simulateur » pour des actions de la vie quotidienne[18]. Plusieurs chercheurs ont en outre insisté sur son intérêt pratique dans le domaine de la philosophie et des sciences de la conscience[51].

Le rêve lucide dans l'art et la culture

Peu connu du grand public, le thème de la lucidité onirique est rarement utilisé.

Dans la littérature

Il n'apparaît dans la littérature qu’à partir des XIXe et XXe siècles où sa présence demeure limitée[52]. Traité sur le mode burlesque dans la nouvelle Le pied de momie (1840) de Théophile Gautier, il est le sujet du roman fantastique Peter Ibbetson (1891) de l'écrivain anglais George du Maurier.

A la fin du XXe siècle, on trouve le concept de rêve lucide, dénommé « rêver », dans les ouvrages de Carlos Castaneda depuis Le Voyage à Ixtlan (1972) jusqu'à L'Art de Rêver (1993).

Dans la cinématographie

De même, peu d'œuvres cinématographiques traitent à proprement parler du rêve lucide. Mise à part l'adaptation en 1935 du roman de George du Maurier par Henry Hathaway, un des rares exemples explicites est le quatrième volet du film d'horreur Les Griffes de la nuit, Le cauchemar de Freddy (1988). Plusieurs des situations oniriques du film d'animation Waking Life (2001) de Richard Linklater sont caractéristiques du rêve lucide et ont été décrites dans les textes de Stephen LaBerge. La Science des rêves de Michel Gondry a permis en 2006 au grand public d'avoir un aperçu de la lucidité onirique.

Voir aussi

Sur les autres projets Wikimedia :

Bibliographie

  • Léon d'Hervey de Saint-Denys, Les Rêves et les moyens de les diriger, Éditions Oniros, 1995 (première édition 1867) 
  • Stephen LaBerge, Le Rêve lucide, Éditions Oniros, 1991 (ISBN 978-2-90931-806-0) 
  • Stephen LaBerge, S'éveiller en rêvant - Introduction au rêve lucide, Éditions Almora, traduit de l'américain par Alexandre Quaranta, mars 2008 (ISBN 978-2-35118-024-0) 
  • (en) Stephen LaBerge, Howard Rheingold, Exploring the World of Lucid Dreaming, Ballantine Books, 1991 (ISBN 978-2-35118-024-0) 
  • Patricia Garfield, La Créativité Onirique, du rêve ordinaire au rêve lucide, Éditions de La Table Ronde, 1983 
  • Tenzin Wangyal Rinpoché, Yogas tibétains du rêve et du sommeil, Éditions Claire Lumière, 2001 
  • Charles McPhee, L'aventure du rêve lucide : comment traverser vos nuits en pleine conscience, Éditions JC Lattès, 1997 (ISBN 2-7096-1799-4) 
  • Lalie Walker, Vivre le rêve, accéder au rêve lucide, Éditions de la Martinière, 2007 (ISBN 978-2-84675-229-9) 
  • Alexandre Quaranta, Rêver pour S'éveiller - Manuel pour l'exploration paradoxale du rêve lucide, éditeur Alexandre Quaranta, 2007 (ISBN 978-2-84675-229-9) 
  • Sandrine Colas, La pratique du rêve lucide, Anagramme éditions, 2001 (ISBN 978-2-35035-061-5) 
  • Magali Chétrit, Le rêveur lucide, Economica, 2007 (ISBN 978-2-7178-5464-0) 
  • Carlos Castaneda, L'Art de rêver. Les Quatre Portes de la perception de l'univers, Éditions du Rocher, 1994 (ISBN 2-266-06632-3) 


Liens externes

Ouvrages

Articles

Méthodes

Articles connexes

Notes et références

  1. Celia Green, Lucid Dreams, Institute of Psychophysical Research, Oxford, 1982 (première édition en 1968), p. 15. cité par Christian Bouchet, Le rêve lucide, chapitre 3, section 1, (lien). Celia Green est un auteur et philosophe britannique qui s'est énormément intéressé au rêve lucide, en publiant trois ouvrages à ce sujet : Lucid Dreams (1968), Out-of-the-body Experiences (1968) et, en collaboration avec Charles McCreery, Lucid Dreaming: The Paradox of Consciousness During Sleep (1994).
  2. Paul Tholey, Kaleb Utecht: Schöpferisch träumen. 3. Aufl. Klotz, Eschborn 1997, ISBN 3-88074-275-8 , S. 61-62
  3. (en) George Gillespie, Can we distinguish between lucid dreams and dreaming-awareness dreams? Lucidity Letter Back Issues, Vol. 3, N° 2 & 3, août 1984, page 95. (lien)
  4. Christian Bouchet, Le rêve lucide, chapitre 3, section 1(lien).
  5. a , b  et c (en) Lucid Dreaming, Dream and Nightmare Laboratory, Hôpital du Sacré-Coeur de Montréal (lien).
  6. OBE, Out of Body Experiences, Expériences de Sortie hors du Corps, dossier de l'Observatoire Zététique. (lien)
  7. Les acronymes DILD et WILD ont été introduits par Stephen LaBerge.
  8. LaBerge, Nagel, Taylor, Dement, & Zarcone, 1981. Cité dans Stephen LaBerge, Donald J. DeGracia, Varieties of Lucid Dreaming Experience, dans R.G. Kunzendorf & B. Wallace (éditeurs.), Individual Differences in Conscious Experience (p. 269-307). Amsterdam, 2000, John Benjamins. (lien)
  9. L'état hypnagogique est l’état de demi-sommeil précédant l’endormissement (Dictionnaire médical, de Jacques Quevauvilliers, Alexandre Somogyi, Abe Fingerhut, éditeur Elsevier Masson, 2007). Il correspond au stade 1 du sommeil. « Les yeux sont fermés et la détente commence. Le dormeur ressent une impression de flotter : on appelle cela l'état hypnagogique. [...] L'électroencéphalogramme montre des ondes appelées alpha. Ces ondes sont peu à peu remplacées par des ondes appelées thêta. Si une stimulation survenait à cet instant, l'éveil serait immédiat. » (article État hypnagogique de l’encyclopédie en ligne Vulgaris Médical (lien)) ; état psychique caractérisé par une activité intense de type hallucinatoire (article Hypnagogique du Dictionnaire de l'Académie, 9ème édition).
  10. Paul Tholey, Overview of the German Research in the Field of Lucid Dreaming, dans Lucidity Letter, 7(1), 1988, p. 29. cité par Bouchet, op. cit., ch. 3.
  11. Stephen Laberge, Exploring the World of Lucid Dreaming, ch.5, page 87.
  12. Patricia Garfield, op. cit., p.138.
  13. La plupart des informations des chapitres sur l'apparition, l'expérience et la perte de la lucidité sont extraites de Christian Bouchet, Le rêve lucide, chapitre 3.
  14. Schredl, M. & Erlacher, D. (2004). Lucid dreaming frequency and personality, 2004, dans Personal and individual differences, vol. 37 (7), pp. 1463-1473 (lien) ; Susan Blackmore, Lucid Dreaming: Awake in your Sleep, publié dans le Skeptical Inquirer 1991, 15, 362-370 (lien)
  15. cf. Blackmore, op. cit. ou encore Erlacher, op. cit. ; en ce qui concerne l'âge dans les études de Gackenbach, Bouchet fait justement remarquer que la différence d'âge a seulement été estimée à l'intérieur d'une population d'étudiants. Bouchet, op.cit, ch. 8 section 1
  16. cf. Erlacher, op. cit.
  17. Mylène Duval, Antonio Zadra, Analyse quantitative du contenu des rêves lucides, Université de Montréal, Laboratoire des Rêves, dans 26e congrès annuel de la Société Québéquoise pour la Recherche en Psychologie (lien)
  18. a , b  et c Stephen LaBerge, Exploring the World of Lucid Dreaming.
  19. J. Allan Hobson, Reflections on Thomas Metzinger’s « Being No One », Psyche 11 (5), Juin 2005. (lien)
  20. « Le rêveur ne se croit pas ailleurs que dans son lit, et il sait très bien qu'il est endormi, puisque le personnage onirique se donne la peine de le lui faire remarquer : - Tu es endormi, fils d'Atrée, dit le mauvais rêve au chant II de l'Iliade ; - Tu es endormi Achille, dit le fantôme de Patrocle. » Eric Robertson Dodds, Les Grecs et l'Irrationnel, Aubier Montaigne, Paris, 1965, cité par C. Bouchet, op. cit. ch.2, section 1.
  21. « Dans le sommeil, si l'on a conscience que l'on dort et si l'on se rend compte de l'état qui révèle la sensation du sommeil, il y a l'apparence, mais il y a quelque chose en soi qui dit que c'est l'apparence de Coriscus et non Coriscus lui-même (car souvent, quand on dort, il y a quelque chose dans l'âme qui dit que ce qui apparaît est un rêve). » Aristote, Des Rêves, 460 a, dans Petits Traités d'Histoire naturelle, Les Belles Lettres, Paris, 1965, pp. 77-87.
  22. « La nuit suivante ce même jeune homme lui apparut encore, et lui demanda s'il le reconnaissait. Gennadius l'ayant assuré qu'il le reconnaissait fort bien, le jeune homme lui demanda où il l'avait vu, à quoi Gennadius [...] n'eut pas de peine à répondre. Mais ce que vous me marquez-là, lui dit le jeune homme, l'avez-vous vu en songe ou éveillé ? En songe, répond Gennadius. Il est vrai, reprit le jeune homme, c'est en songe que vous l'avez vu ; et ce qui se passe encore présentement, ce n'est qu'en songe que vous le voyez ; je le crois, répond Gennadius. Et où est présentement votre corps, reprit le jeune homme qui l'instruisait ? Dans mon lit, répond Gennadius. » Saint Augustin, Lettre CLIX, dans Les Lettres de Saint Augustin, t.IV, P.G. Le Mercier, 1737, p. 394.
  23. Il écrit qu'on « juge parfois en dormant que ce qu'on voit est un rêve, comme si l'on discernait entre les réalités et leurs images. […] Quand le mouvement des vapeurs est plus lent, il y a bien des images, mais déformées et sans ordre […]. Et si le mouvement est encore plus calme, on a des images ordonnées : cela se produit surtout vers la fin du sommeil […]. Si le mouvement est faible, non seulement l'imagination se trouve libre, mais même le sens commun est partiellement délié : à ce point qu'on juge parfois en dormant que ce qu'on voit est un rêve. » Saint Thomas d'Aquin, Somme théologique, Editions du Cerf, 1954, t.X : La pensée humaine, pp. 63 à 65.
  24. cf. Bouchet, op. cit., ch. 2, section 1. lien
  25. Les benandanti croyaient que l'on pouvait voyager la nuit « en esprit », celui-ci pouvant « sortir du corps et y revenir à son gré » (Ginzburg, Les batailles nocturnes, p.259). Pour Christian Bouchet, les procès de Moducco et Gasparutto (ibid., p.235-249) impliquent « la conscience d'être dans un état différent de celui de l'état de veille ». Les kresniki « vont en esprit la nuit aux carrefours des routes et dans les maisons » (Ginzburg, Le sabbat des sorcières, p.158). Ginzburg, qui suit Mircea Eliade et ne connaît manifestement pas le rêve lucide, appelle de manière générique ces phénomènes des « extases » et les rapproche du « vol magique » du chaman. Or ce dernier est fréquemment interprété comme une « expérience hors du corps ».
  26. « Ce qu’il y a de singulier à remarquer, c’est que doutant si ce qu’il venait de voir était songe ou vision, non seulement il décida en dormant que c’était un songe, mais il en fit encore l’interprétation avant que le sommeil le quittât. » Adrien Baillet, la Vie de M. Descartes, biographie, 1691. lien
  27. Dans une lettre de Reid au Révérend William Grégory datant de janvier 1779. Thomas Reid, The works of Thomas Reid, D. D., Longman, Green, Longman, Roberts and Green, 1863, vol.I, pp. 33-34., cité par C. Bouchet, op. cit., ch.2, section 1.
  28. Jean Paul, Choix de rêves, Fourcade, Paris, 1931, pp. 38-39., cité par C. Bouchet, op. cit., ch.2, section 2. lien
  29. « Plus d'un sans doute, comme moi, se souvient d'avoir parfois réussi à se dire, pour se donner courage au milieu des périls et des terreurs du rêve : C'est un rêve ! Continuons de rêver ! » Nietzsche, Naissance de la Tragédie, Folio, Paris, 1991, p. 29.
  30. Norman Malcolm, Dreaming, Routledge & Kegan Paul, 1959.
  31. Mary Arnold-Forster, Studies in Dreams, The Macmillan company, New York, 1921.
  32. Piotr Demianovich Ouspensky, Un nouveau modèle de l'univers, Stock, 1996 (première édition 1931, New York, Alfred A. Knopf).
  33. Schwartz B.A. & Lefebvre A., Contacts veille/P.M.O. II. Les P.M.O. morcellés, Revue d'Electroencéphalographie et de Neurophysiologie Clinique, 1973, 3, 165-176.
  34. Et encore en 2007, Magali Chetrit continuait d'affirmer, sur les bases de la psychanalyse et ce malgré l'acceptation actuelle du rêve lucide par la communauté scientifique, qu'être conscient dans le rêve est une impossibilité. Magali Chetrit, Le rêveur lucide.
  35. Charles McPhee, L'aventure du rêve lucide, page 100.
  36. Keith Hearne, (1978a). Lucid dreams: An electrophysiological and psychological study. Ph.D. thesis, University of Liverpool.
  37. Stephen LaBerge, Lucid Dreaming: Psychophysiological Studies of Consciousness during REM Sleep, dans Bootzen, R. R., Kihlstrom, J.F. & Schacter, D.L., Sleep and Cognition. Washington, D.C.: American Psychological Association, 1990 (pp. 109-126). lien
  38. Deborah Jay Hillman and Patric Giesler, Anthropological Perspectives on Lucid Dreaming, Lucidity Letter, 1986, 5 (1), pp. 6-25. (lien)
  39. Tenzin Wangyal Rinpoché, Yogas tibétains du rêve et du sommeil, Editions Claire Lumière, 2001.
  40. Kilton R. Stewart, Dream Theory in Malaya, Complex, 6, 1951. (lien)
  41. G. William Domhoff, Senoi Dream Theory: Myth, Scientific Method, and the Dreamwork Movement, 2003. Non publié. (lien)
  42. Le chapitre Apprentissage de cet article s'appuie sur Stephen LaBerge, Exploring the World of Lucid Dreaming, ch. 3 pour les méthodes DILD, ch. 4 pour les méthodes WILD ; et Susan Blackmore, Lucid Dreaming: Awake in Your Sleep? publié dans le Skeptical Inquirer 1991, 15, 362-370, (lien)
  43. Stephen LaBerge, Lucidity Research, Past And Future, dans NightLight 5(3), 1993. (lien)
  44. Lynne Levitan, A Thousand and One Nights of Exploring Lucid Dreaming, dans Nightlight 4(2),1992, (lien)
  45. Paul Tholey, Applications of Lucid Dreaming in Sports (lien)
  46. Daniel Erlacher, Lucid dreaming and sport science - A research startegy. Dans J. Mester, G. King, H. Strüder, E. Tsolakidis & A. Osterburg, European College of Sport Science: Book of Abstracts. 6th annual congress of the ECSS (S. 742). Köln: Sport und Buch Strauss, 2001. (lien)
  47. Kelzer, 1989; LaBerge, 1985; Malamud, 1988; Tholey, 1988
  48. Patricia Garfield, op. cit.
  49. Paul Tholey, A model for lucidity training as a means of self-healing and psychological growth, dans Conscious mind, sleeping brain: New perspectives on lucid dreaming, de Jayne Gackenbach et Stephen LaBerge (éditeurs). New York, Plenum Press, 1988.
  50. Victor Spoormaker, Jan van den Bout, 2006. Lucid Dreaming Treatment for Nightmares: A Pilot Study. Psychotherapy and Psychosomatics. 75(6), pp. 389-394. (lien)
  51. Entre autres Susan Blackmore, Stephen LaBerge, Allan Hobson ou Christian Bouchet.
  52. Antonio Zadra et Elizabeth Décary, Analyse quantitative du contenu des récits de rêves littéraires du Moyen Age au XXe siècle, publié dans Le récit de rêve. Collectif sous la direction de Christian Vandendorpe. Québec. Éditions Nota Bene. 2005.
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