Sainte Ampoule

Sainte Ampoule
La Sainte Ampoule dans son reliquaire originel

La Sainte Ampoule était une fiole contenant une huile sacrée qui aurait servi lors du baptême de Clovis. Son nom viendrait du latin ampulla (petit flacon, fiole) ou du saxon ampel (coupe, fiole).

Une portion de ce baume était mélangée à du saint chrême pour servir à l'onction des rois de France lors de la cérémonie du sacre. Elle était conservée à l'abbaye Saint-Remi de Reims.

Elle a été brisée solennellement pendant la Révolution française le 7 octobre 1793 à Reims (actuelle place Royale), par le conventionnel Philippe Rühl sur le socle de la statue de Louis XV préalablement déboulonnée, cassée et destinée à être livrée à une fonderie de canons.

Toutefois, la veille, le curé constitutionnel Jules-Armand Seraine et un officier municipal, Philippe Hourelle avaient retiré ce qu'ils pouvaient du contenu de la sainte Ampoule et le cachèrent, puis en donnèrent une partie respectivement à Messieurs Bouré curé de Berry-au-Bac et Lecomte juge au tribunal de Reims. De plus, lors de la destruction du reliquaire, un dénommé Louis Champagne Prévoteau recueillit deux fragments de verre de l'ampoule sur lesquels subsistaient des restes du baume[1]. Le 22 mai 1825, l'archevêque de Reims procéda au transvasement de tous ces fragments, à l'exception de ceux de Philippe Hourelle perdus par ses héritiers, dans du saint chrême[2] puis dans un nouveau reliquaire prêt à temps pour le sacre de Charles X quatre jours plus tard, maintenant conservé au Palais du Tau[3],[4].

En 1906, lors de son expulsion de l'archevêché suite à la loi de séparation des Églises et de l'État, Mgr Louis-Joseph Luçon, archevêque de Reims, transféra le chrême dans une ampoule de verre qu'il emporta avec lui[5]. Le baume du sacre est toujours conservé à l'archevêché de Reims[6].

Sommaire

La sainte Ampoule et le sacre des rois de France

Baptême de Clovis

Selon Hincmar, archevêque de Reims (vers 802-882), un ange, sous la forme d'une colombe, aurait apporté cette fiole à Remi de Reims, futur saint Rémi, pour oindre le front de Clovis lors de son baptême. Grégoire de Tours ne parle pas de ce miracle qui appartenait toutefois à la tradition orale de l'Église de Reims. Par là même, Hincmar accrédite l'idée que « Dieu, donc, et Dieu seul fait le roi, avec l'aide visible de l'office sacerdotal. »[7] On peut ajouter que parmi les 4000 citations vérifiées par Devisse, Hincmar n'a pas une seule fois été infidèle au texte d'origine : « Nous sommes en mesure de dire, aujourd'hui, que nous n'avons jamais trouvé de falsification délibérée du texte, par modification, altération ou captation du sens » [8]. L'on trouve mention du « saint chrême envoyé du Ciel » dans la liturgie rémoise remontant au VIIIe siècle au plus tard, ainsi que dans les œuvres de Godescal d'Orbais [9].

Le premier roi à avoir été sacré à Reims fut Louis le Pieux en 816, le dernier Charles X. À partir du sacre d'Henri Ier en 1027 jusqu'au sacre de Charles X en 1825, on compte trente rois de France qui ont reçu la sainte onction à Reims, avec trois notables exceptions : Louis VI le Gros à Orléans, Henri IV à Chartres et Louis XVIII qui n'a pas été sacré.

L’ancien reliquaire, contenant la sainte Ampoule, ne sortait de l'abbaye Saint-Rémi de Reims que les jours du sacre. Louis XI voulut l’avoir près de lui à son lit de mort et fut obéi. C’est la seule fois que l’Ampoule quitta l'abbaye pour un but autre que celui que l’usage lui donnait.

Les clefs du tombeau de saint Rémi, qui la renfermait, étaient placées dans la chambre de l'abbé : c’était lui qui ouvrait et fermait la porte.

Les évêques de Laon, ducs et pairs du royaume, avaient le privilège de porter la sainte ampoule au cours de la cérémonie du sacre des rois de France.

Chevaliers de la sainte Ampoule

La basilique Saint Rémi, point de départ de la sainte Ampoule.
La Cathédrale Notre-Dame de Reims, le lieu du sacre.

Il s’était formé un ordre de chevaliers, et plus tard, de « barons de la sainte Ampoule ». Lors du sacre de Louis XIII, les barons portaient le dais qui protégeait le prieur de l'abbaye Saint Remi, porteur de l'Ampoule[10]. Selon Favin, ces chevaliers n'étaient qu'au nombre de quatre, et devaient, pour être reçus, posséder les abbayes de Terrier, de Belestre, de Sonastre et de Louverey, qui relevaient de l'abbaye de Reims. Lors du sacre d'un roi de France, c'était le rôle des chevaliers, ou des barons, de la sainte Ampoule que de porter dans la cathédrale le dais d'argent au dessus du prieur de l'abbaye de Reims, porteur de la sainte Ampoule[10].

Les habitants du Chêne-Populeux (aujourd'hui Le Chesne) avaient le privilège d’accompagner la sainte ampoule aux cérémonies du sacre, soit parce que leurs pères avaient été les vassaux [réf. nécessaire] de saint Remi, soit parce qu’ils avaient défendu la fiole contre les Anglais.

Otages de la sainte Ampoule

On appelait alors « otages de la sainte Ampoule » les quatre seigneurs chargés d'escorter l'Ampoule de la basilique Saint-Remi de Reims jusqu'à la cathédrale de Reims. Ces « otages » (du vieux français hostage, « le logement », dérivé lui-même du latin hospes, l'hôte) demeuraient avec la sainte Ampoule qu'ils accompagnaient, et qu'ils avaient pour mission de défendre jusqu'à la mort.

Le rituel prévoyait que les quatre « otages », chacun précédé de son écuyer, entraient à cheval dans la cathédrale, et chevauchaient ainsi aux quatre coins du dais d'argent porté au dessus de l'abbé de la basilique Saint-Rémi par les chevaliers de la sainte Ampoule. Tous se rendaient alors, avec toute la majesté nécessaire, du grand portail jusqu'à l'autel ; là, l'abbé remettait la sainte Ampoule à l'archevêque. Les otages de l'Ampoule prenaient place dans les quatre premières stalles, du côté de l'Évangile, pour assister au sacre[11].

Charles-Daniel de Talleyrand-Périgord (le père de Talleyrand) fut otage de la sainte Ampoule le 11 juin 1775, lors du sacre de Louis XVI, en même temps que Jean-Louis-Roger de Rochechouart.

Notes et références

  1. [1] La Sainte Ampoule et le Sacre des Rois de France, extraits du Procès-verbal du 25 janvier 1819 constatant la conservation de plusieurs parcelles de la Sainte-Ampoule et du Baume que renfermait ce précieux reliquaire.
  2. Le Moniteur des 23,24 et 26 mai 1825, cité sur La Sainte Ampoule et le Sacre des Rois de France (2de partie) : de la révolution à nos jours.
  3. [2] Reliquaire de Charles X pour la Sainte Ampoule
  4. [3] Ampoule et aiguille du reliquaire de Charles X
  5. [4] Contenu de la Sainte Ampoule à l'archevéché de Reims
  6. La Sainte Ampoule et le Sacre des Rois de France (2de partie) : de la révolution à nos jours.
  7. Jean Devisse, Hincmar, archevêque de Reims, 1976.
  8. Jean Devisse, Hincmar, archevêque de Reims, 1976, t. II, p. 1097-1098
  9. F. Baix, « Les sources liturgiques de la Vita Remigii de Hincmar », Miscellanea historica in honorem A. de Meyer, Louvain, 1946, pp. 211-227
  10. a et b Alexandre Le Noble, Histoire du Sacre et du Couronnement des Rois et Reines de France, 1825, p. 643-644
  11. La Liturgie du sacre, par André Lavédan, 1926, sur catholicapedia.net (consulté le 22 octobre 2010), p. 3

Bibliographie

  • Ordre pour Oindre et Couronner Le Roi de France, Lyon 1575, éd. mod. par Jean Goy, Reims 1987.
  • Ordre pour oindre et couronner le roi de France, L'Atelier graphique, 1995 ;
  • Jean Goy, A Reims, le Sacre des Rois de France, Reims 1980.
  • Jean Goy, La Sainte Ampoule au Sacre des Rois de France, Reims 1994.
  • Marc Bloch, Les rois thaumaturges, Gallimard, coll. « Bibliothèque des histoires », 1983 (réédition) (ISBN 2070227049) ;
  • Richard A. Jackson, Vivat Rex ! Histoire des sacres et couronnements en France, Presses universitaires de Strabsourg, 1995 (réédition) ;
  • Jacques Le Goff (s. dir.), Le sacre royal à l'époque de saint Louis, Gallimard, coll. « Le temps des images », 2001 (ISBN 2070755991) ;
  • Michel Le Moël, Le sacre des rois de France, Sides, coll. « Histoire et arts », 2000 (ISBN 2868611125) ;

Voir aussi

Articles connexes

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