Saturn V

Saturn V
Saturn V
La première Saturn V avant le lancement d’Apollo 4.
Données générales
Mission Vol habité en LEO et vaisseau lunaire
Date des lancements 1967 à 1973
Nb. de lancements 13 (dont 1 pour Skylab)
Pays d’origine Drapeau des États-Unis États-Unis
Caractéristiques techniques
Dimensions
Hauteur 110,6 m
Diamètre 10,1 m
Masse au décollage 3 038 t
Nombre d'étages 3 (2 pour Skylab)
Puissance et capacité d’emport
Charge utile en LEO 118 t
Charge utile pour la lune 47 t
Poussée au décollage environ 34 MN

Saturn V est la fusée spatiale qui a été utilisée par la NASA pour les programmes Apollo et Skylab entre 1967 et 1973, en pleine course à l’espace entre Américains et Soviétiques.

Il s’agissait d’un lanceur à plusieurs étages, à ergols liquides, dernier né de la famille de lanceurs Saturn conçue sous la direction de Wernher von Braun au Centre de vol spatial Marshall (MSFC) à Huntsville en Alabama, en collaboration avec les sociétés Boeing, North American Aviation, Douglas Aircraft Company ou IBM comme principaux entrepreneurs.

Saturn V reste, encore en 2011, le lanceur spatial le plus imposant qui ait été utilisé en opération, que ce soit du point de vue de la hauteur, de la masse au décollage ou de la masse de la charge utile injectée en orbite. Seule la fusée russe Energia, qui ne vola que pour deux missions de test, la dépassa légèrement au niveau de la poussée au décollage.

Saturn V, qui a été conçue pour lancer le vaisseau spatial habité Apollo permettant les premiers pas de l’homme sur la Lune, a continué son service en envoyant en orbite la station spatiale Skylab.

En tout, la NASA lança treize fusées Saturn V, sans avoir à déplorer la moindre perte de charge utile.

Les trois étages qui composaient Saturn V ont été développés par de nombreuses entreprises sous-traitantes sous pilotage de la NASA. Ces sociétés, suite à de multiples fusions et rachats, font aujourd’hui toutes parties du groupe Boeing.

Sommaire

Contexte historique

Au début des années 1960, l’Union soviétique était très en avance sur les États-Unis dans la course à l’espace. En effet, en 1957, les soviétiques lançaient Spoutnik 1, le premier satellite artificiel, et le 12 avril 1961, le Russe Youri Gagarine devenait le premier homme envoyé en orbite autour de la Terre.

Le 25 mai 1961, le président John Fitzgerald Kennedy annonça que les États-Unis se donnaient comme objectif d’envoyer un homme sur la Lune avant la fin de la décennie (« We choose to go to the Moon »). À cette époque, la seule expérience qu’avaient les États-Unis des vols habités se résumait aux 15 minutes de vol suborbital d’Alan Shepard, lors de la mission Mercury-Redstone 3 à bord de la capsule Freedom 7. Aucune fusée d’un seul étage au monde n’aurait pu envoyer une capsule habitée sur la Lune. La fusée Saturn I était en développement, mais n’avait encore jamais décollé, et avec sa petite taille, il aurait fallu plusieurs lancements pour placer en orbite tous les composants d’un module lunaire.

Au début du projet, la NASA étudia trois concepts différents pour la réalisation de la mission lunaire : le concept dit du « rendez-vous en orbite terrestre » (EOR), celui de l’« ascension directe » (ou mode direct), et celui du « rendez-vous en orbite lunaire » (LOR - Lunar orbit rendez-vous). Bien qu’au début la NASA ait écarté l’idée du LOR, considérant qu’un rendez-vous orbital était déjà bien assez compliqué à réaliser en orbite terrestre, c’est finalement ce plan qui fut retenu aux motifs de sa simplicité globale et de la vitesse avec laquelle il pouvait être exécuté, dans l’optique d’atteindre l’objectif fixé par Kennedy[1],[2].

Un des avantages notables du « concept LOR » était que, contrairement au concept de l’ascension directe, il ne nécessitait pas l’emploi d’une fusée de taille démesurée, comme l’était le lanceur Nova qui était envisagé à l’époque[1],[2].

La réalisation de la mission lunaire LOR nécessitait tout de même le développement d’un lanceur beaucoup plus puissant que ceux disponibles au début des années 1960, comme par exemple le lanceur Saturn I qui était étudié par les équipes de Wernher von Braun.

Le développement de Saturn 5

Saturn V est le dernier né de la famille des lanceurs Saturn, développée au début des années 1960 au Centre de vol spatial Marshall (MSFC).

C-1 à C-4

La fusée C-1, ou Saturn I, était issue de travaux démarrés par les équipes de Wernher von Braun dès avril 1957 pour développer des lanceurs en vue de diverses applications, militaires ou civiles. Ces programmes avaient pour nom « Super Jupiter », puis « Juno » avant d’être rebaptisés « Saturn » par Von Braun en février 1959.

Ensuite vint le projet C-2, qui fut rapidement abandonné au profit de la C-3, qui devait utiliser deux moteurs F-1 pour le premier étage, quatre moteurs J-2 pour le second, et un étage final S-IV utilisant dix moteurs RL-10. Avant que ne soit fait le choix définitif de la stratégie à employer pour exécuter la mission lunaire, la NASA prévit d’utiliser la C-3 comme composante du concept de mission « rendez-vous en orbite terrestre », avec au moins quatre ou cinq lancements pour réaliser une seule mission.

Mais le MSFC prévoyait déjà une fusée encore plus grande, la C-4, qui devait utiliser quatre moteurs F-1 pour le premier étage, un second étage type C-3 élargi et le S-IVB, un étage avec un unique moteur J-2, comme troisième étage. Avec la C-4, seuls deux lancements étaient nécessaires pour réaliser la mission « rendez-vous en orbite terrestre ».

C-5

La fusée Saturn V est sortie du VAB en route vers le pas de tir.

Le 10 janvier 1962, la NASA annonça un programme de construction de la fusée C-5. Celle-ci était prévue avec cinq moteurs F-1 pour le premier étage, cinq moteurs J-2 pour le second et un troisième étage S-IVB. À l’origine, les quatre premiers vols devaient être des essais, les trois premiers pour tester successivement le bon fonctionnement des trois étages, puis le dernier en tant que mission non habitée en orbite lunaire. Un vol habité devait suivre en 1969.

Au milieu de l’année 1962, la NASA décida d’utiliser un plan d’essai « tout en un », avec les trois étages testés en même temps lors du tout premier vol, ce qui devait raccourcir drastiquement le planning d’essai et de développement, et réduire le nombre de fusées nécessaires pour le programme complet de vingt-cinq à quinze. Mais tout dépendait du bon fonctionnement de chacun des trois étages dès le premier lancement.

En 1963, la C-5 fut renommée Saturn V, et la société Rocketdyne produisit les premiers moteurs.

En 1966, le moteur F-1 passa l’inspection de la NASA et obtint le 6 septembre une qualification complète pour des missions habitées.

Le premier lancement de Saturn V eut lieu le 9 novembre 1967 avec à son bord le vaisseau spatial inhabité Apollo 4.

Le premier lancement habité eut lieu en décembre 1968, pour la mission Apollo 8 circumlunaire.

Technologie

Diagramme de Saturn V.

Saturn V est, sans aucun doute, une des machines les plus impressionnantes de l’histoire de l’humanité.

Haute de 110,6 mètres et large de 10 mètres, avec une masse totale supérieure à 3 000 tonnes et une capacité de mise en orbite en LEO (Low Earth Orbit) de 118 tonnes, Saturn V surpassait toutes les autres fusées ayant précédemment volé. À titre de comparaison, Saturn V a à peu près la même hauteur que la grande Arche de la Défense à Paris.

Saturn V fut principalement conçu par le Centre de vol spatial Marshall à Huntsville, en Alabama, sans oublier que de nombreux composants majeurs, comme la propulsion, ont été conçus par des sous-traitants.

Les moteurs utilisés par ce lanceur étaient les nouveaux et puissants moteurs F-1 et moteurs J-2. Lorsqu’ils étaient testés, ces moteurs créaient des vibrations dans le sol qui pouvaient être ressenties à 80 kilomètres à la ronde. L’ensemble des stations sismographiques des États-Unis étaient capables de percevoir les vibrations lors du décollage d’une Saturn V.

Les concepteurs décidèrent très tôt d’utiliser pour Saturn V le maximum des technologies déjà éprouvées pour le programme Saturn 1. Ainsi, le troisième étage S-IVB de Saturn V était basé sur le second étage S-IV de Saturn 1. De la même façon, les instruments de bord qui contrôlaient Saturn V partageaient certaines caractéristiques avec ceux de Saturn 1.

Les différents étages

Excepté sur un seul de ses vols, la fusée Saturn V a toujours été constituée de trois étages (le S-IC, le S-II et le S-IVB) et d’une case à équipements. Les trois étages utilisaient de l’oxygène liquide (LOX) comme oxydant. Le premier étage utilisait du kérosène (RP-1) comme réducteur tandis que les second et troisième étages utilisaient de l’hydrogène liquide (LH2). Les trois étages étaient également équipés de petits moteurs à poudre dits de « ouillage ». Ces moteurs, qui peuvent donner une petite accélération supplémentaire au lanceur pendant quelques secondes, ont pour fonction d’aider à la séparation des étages pendant le lancement, et d’assurer que les ergols liquides sont bien plaqués au fond des réservoirs pour le bon fonctionnement des pompes aspirantes.

Saturn V
Premier étage - S-IC
Hauteur 42 mètres
Diamètre 10 mètres
Masse au décollage[3] 2 286 t
Moteurs F-1
Poussée 33,4 MN
Durée de fonctionnement 150 s
Ergols RP-1 et LOX
Deuxième étage - S-II
Hauteur 24,8 mètres
Diamètre 10 mètres
Masse avec ergols[4]. 464 t
Moteurs J-2
Poussée 5 MN
Durée de fonctionnement 360 s
Ergols LH2 et LOX
Troisième étage - S-IVB
Hauteur 17,9 mètres
Diamètre 6,6 mètres
Masse avec ergols[5]. 114 t
Moteur J-2
Poussée 1 MN
Durée de fonctionnement 165 + 335 s
(2 allumages)
Ergols LH2 et LOX

Étage S-IC

Article principal : S-IC.

L’étage S-IC était construit par la société Boeing au centre d’assemblage Michoud, à la Nouvelle-Orléans, où sont aujourd’hui construits les réservoirs extérieurs de la navette spatiale américaine. Comme pour la plupart des étages d’une fusée spatiale, la presque totalité de la masse de 2 000 tonnes au décollage du S-IC provenait du carburant, en l’occurrence du RP-1 et de l’oxygène liquide.

Le premier étage d’Apollo 8 de Saturn V soulevé dans le Bâtiment d’Assemblage Vertical (VAB) le 1er février 1968.

Cet étage faisait 42 mètres de haut et 10 mètres de diamètre, et fournissait une poussée de 3 500 tonnes propulsant la fusée pendant les 61 premiers kilomètres d’ascension[6].

Les cinq moteurs F-1 étaient disposés en croix. Le moteur central était fixe, tandis que les quatre extérieurs, assistés de vérins hydrauliques, pouvaient pivoter pour orienter la fusée.

Étage S-II

Article principal : S-II.

Le S-II était construit par North American Aviation à Seal Beach en Californie. Utilisant de l’oxygène et de l’hydrogène liquides, ses cinq moteurs J-2 présentaient une disposition similaire au S-IC. Le deuxième étage accélérait Saturn V à travers les hautes couches de l’atmosphère grâce à une poussée de 5 MN. Complètement chargé, 97 % de la masse de l’étage provenait des ergols[4].

Au lieu d’avoir une structure inter-réservoirs entre les deux réservoirs d’ergols, comme sur le S-IC, le S-II avait une structure à fond commun, le fond du réservoir LH2 étant le sommet du réservoir LOX. Ce fond était constitué de deux feuilles d’aluminium séparées par une structure en nid d’abeilles en phénol. Elle devait assurer une isolation thermique entre les deux réservoirs, ces derniers ayant une différence de température de 70 °C. L’utilisation de réservoirs à fond commun permit de réduire la masse de l’étage de 3,6 tonnes.

Étage S-IVB

Article principal : S-IVB.

L’étage S-IVB était fabriqué par la compagnie Douglas Aircraft à Huntington Beach en Californie. Il avait un moteur J-2 et utilisait les mêmes ergols que le S-II. Le S-IVB avait également une structure à fond commun pour séparer les deux réservoirs. Cet étage était utilisé deux fois au cours d’une mission lunaire, une première fois pour la mise en orbite après l’extinction du deuxième étage, et une deuxième fois pour la manœuvre de l’injection « translunaire » (« Translunar injection » - TLI).

Deux systèmes de propulsion auxiliaires à carburant liquide, montés sur la jupe arrière de l’étage, étaient utilisés pour le contrôle d’altitude pendant la phase de passage en orbite « parking » et pendant les phases translunaires de la mission. Les deux systèmes auxiliaires étaient également utilisés comme moteur de ouillage pour aider à correctement positionner les ergols dans les réservoirs avant l’allumage du moteur pour l’injection translunaire[5].

Le S-IVB était le seul étage de la fusée Saturn V suffisamment petit pour pouvoir être transporté par avion, en l’occurrence le super Guppy.

Mis à part l’adaptateur inter-étages, cet étage est presque identique au second étage de la fusée Saturn IB.

Case à équipement

La case à équipements pour la Saturn V d’Apollo 4.

La case à équipement, fabriquée par la société IBM, était positionnée en haut du troisième étage. Elle était réalisée au Space System Center à Huntsville. L’ordinateur de bord contrôlait les opérations de la fusée des quelques instants avant le décollage et jusqu’à l’extinction du S-IVB. Il comprenait des systèmes de guidage et de télémétrie. En mesurant l’accélération et l’altitude du lanceur, il pouvait calculer la position et la vitesse de la fusée et corriger les déviations.

Sécurité

Dans le cas d’un échec nécessitant la destruction de la fusée, le chef de la sécurité aurait envoyé un signal pour faire détoner les charges explosives placées à l’extérieur de la fusée. Cela aurait créé des incisions dans les réservoirs d’ergols pour permettre au carburant de se disperser rapidement, et de minimiser les mélanges. Après le lancement de la tour de sauvetage, les charges étaient désamorcées.

Comparaisons avec d’autres fusées

La fusée soviétique N1

L’équivalent soviétique de Saturn V fut la fusée N1. Saturn V était légèrement plus haute, plus lourde, et bien que moins puissante (34 MN contre 46 MN pour la N1) elle avait une plus grande capacité d’emport que la fusée soviétique grâce à l’utilisation d’hydrogène, plus efficace que le kérosène, dans ses étages supérieurs. La N1 dépassait aussi la fusée américaine pour le diamètre du premier étage.

Quatre tirs d’essai de la N1 furent réalisés. Tous se terminèrent en échec catastrophique dès la première phase du lancement et conduisirent à l’abandon du programme par les Soviétiques.

Le premier étage de la Saturn V utilisait cinq moteurs très puissants tandis que la N1 était équipée d’un assemblage complexe de 30 moteurs plus petits, architecture imposée par le fait que Sergueï Korolev (son concepteur) ne disposait pas à cette époque de moteurs de forte puissance et qu’il se refusait à utiliser ceux que lui proposait son adversaire Valentin Glouchko, plus puissants mais utilisant des ergols hypergoliques toxiques.

Les systèmes informatiques embarqués de la fusée soviétique semblaient également moins performants. Au cours des vols Apollo 6 et Apollo 13, Saturn V fut capable de corriger sa trajectoire de vol malgré des incidents de perte de fonctionnement moteur. Au contraire, même si la N1 disposait également d’un système informatique conçu pour corriger les défauts de fonctionnement des moteurs, ce dernier manquait de fiabilité et ne parvint jamais à sauver un lancement de l’échec, étant même à une occasion à l’origine de l’échec en éteignant de manière impromptue tous les moteurs du premier étage, détruisant le lanceur et le pas de tir par la même occasion.

Les moteurs F-1 du premier étage S-IC dominent leur créateur, Wernher von Braun.
Courbe d’évolution de la poussée du premier étage de Saturn V pendant le lancement d’Apollo 15.

Fondamentalement, la principale cause de l’échec du programme N1 semble être le manque d’essais sur le bon fonctionnement simultané des 30 moteurs de l’étage 1, insuffisance de précautions à son tour causée par des financements trop faibles.

La fusée russe Energia

La fusée Saturn V avait une poussée maximale d’au moins 34 MN et une capacité d’emport de 118 tonnes sur orbite LEO. La mission SA-510 (Apollo 15) avait au décollage une poussée de 34,8 MN. La mission SA-513 (Skylab) avait une poussée au décollage légèrement supérieure (35,1 MN). Aucun autre lanceur spatial en opération n’a surpassé Saturn V en hauteur, en poids, ou en charge utile. Hormis la fusée N1 dont les quatre lancements furent des échecs, il n’y a que pour la poussée au décollage que Saturn V a été égalée par une autre fusée (la fusée Energia russe qui avait une poussée de 35,1 MN), si on compte les deux vols d’essais d’Energia comme opérationnels.

Les versions améliorées de Energia ou Saturn V

Parmi les projets de fusées qui, si elles avaient vu le jour, auraient dépassé en performance Saturn V, on peut citer les versions évoluées d’Energia qui auraient délivré environ 46 MN et auraient pu envoyer 175 tonnes en orbite LEO dans la configuration « vulkan ».

Les versions améliorées de Saturn V, utilisant notamment les moteurs F-1A, auraient eu 18 % de poussée supplémentaire et une charge utile de 137 t en LEO. La NASA envisageait aussi de nouveaux membres encore plus performants à la famille Saturn, y compris le lanceur Nova, mais ils ne furent jamais produits.

La navette spatiale américaine

La navette spatiale américaine génère une poussée maximale de 3 500 tonnes au décollage[7] et peut théoriquement injecter 29 tonnes de charge utile[8] (en excluant la navette elle-même) en orbite basse, soit environ le quart de Saturn V. Si on inclut la navette dans la charge utile, on monte à 112 tonnes. Une comparaison équivalente serait la masse orbitale totale du troisième étage S-IVB de Saturn V, qui était de 140 976 kg pour la mission Apollo 15.

La fusée européenne Ariane 5

Autre comparaison, Ariane 5 ECA peut envoyer environ 10 tonnes en orbite GTO, et 20 tonnes en LEO.

Les fusées américaines Delta 4 et Atlas V

La fusée américaine Delta 4 Heavy envoie 13,1 tonnes en orbite de transfert géosynchrone.

Enfin, la fusée Atlas V peut envoyer 25 t en orbite LEO ou 13,6 t en orbite GTO.

Limites aux comparaisons, théoriques

Cependant, il faut toujours être prudent dans les comparaisons de performance en termes de poussées. Ces dernières sont en effet théoriques, calculées à partir des caractéristiques du moteur mais jamais réellement mesurées en opération.

De plus, elles ne sont absolument pas constantes au cours du lancement et dépendent fortement de l’altitude.

Enfin, les différentes données disponibles font état de poussées maximales ou, dans certains cas, moyennes, parfois pour une pression atmosphérique du niveau de la mer ou parfois dans des conditions de vide.

Logistique industrielle et assemblage

La Saturn V d’Apollo 10 en cours de transfert.

Après qu’un étage ait été fini, il était transporté par bateau jusqu’au centre spatial Kennedy. Les deux premiers étages étaient si grands qu’ils ne pouvaient être transportés que par barge. Le S-IC construit à la Nouvelle-Orléans descendit le fleuve Mississippi jusqu’au golfe du Mexique. Après avoir fait le tour de la Floride, il était alors transporté par l’Intracoastal Waterway jusqu’au bâtiment d’assemblage vertical (aujourd’hui dit le bâtiment d’assemblage véhicule ou VAB, Vehicle Assembly Building). L’étage S-II, construit en Californie, voyageait par le canal de Panama. Le 3e étage et la case à équipements étaient transportés par les Aero Spacelines Pregnant Guppy et les super Guppys.

À l’arrivée au bâtiment d’assemblage vertical, chaque étage était contrôlé en position horizontale avant d’être basculé à la verticale. La NASA construisit aussi de larges structures cylindriques qui pouvaient être mises à la place des étages si l’un d’entre eux était retardé. Ces structures avaient la même hauteur et la même masse et contenaient les mêmes connexions électriques que les vrais étages.

La fusée assemblée était montée sur sa plateforme de lancement dans le bâtiment d’assemblage vertical, puis la structure complète était déplacée vers le pas de tir à 5 km de là par un engin spécialement conçu pour cela, le transporteur « crawler ». Le crawler est un engin gigantesque de 2 700 t monté sur quatre bogies à deux chenilles chacun, qui a été fabriquée par Marion Power Shovel dans l’Ohio. Il est aujourd’hui toujours utilisé par le programme de la navette spatiale américaine[9].

Séquences de lancement pour les missions lunaires

La fusée Saturn V transporta les astronautes du programme Apollo jusqu’à la Lune. Tous les lancements eurent lieu depuis le complexe de lancement 39 au centre Spatial John F. Kennedy. Après que la fusée avait traversé les rampes de lancement, le contrôle de mission était transféré au centre de contrôle Johnson à Houston au Texas.

Une mission type utilisait la fusée pour un total d’environ vingt minutes. Bien qu’Apollo 6 et Apollo 13 connurent des pannes moteurs, les ordinateurs de bord furent capables de compenser en laissant fonctionner les moteurs restants plus longtemps, et aucun des lancements Apollo ne se termina par une perte de la charge utile.

Séquence du S-IC

Un nuage de condensation se forme derrière Saturn V pendant la traversée des couches basses et denses de l’atmosphère, mission Apollo 11.

Le premier étage fonctionnait pendant 2 minutes et 30 secondes, hissant la fusée à une altitude de 61 km avec une vitesse de 8 600 km/h après avoir brûlé 2 000 t d’ergols.

À 8,9 s avant le lancement, la séquence d’allumage du 1er étage démarrait. Le moteur central s’allumait en premier, suivi par les deux paires de moteurs symétriques avec un décalage de 300 ms pour réduire les efforts mécaniques sur la fusée. Une fois que l’atteinte de la poussée maximale était confirmée par les ordinateurs de bord, la fusée était « relâchée en douceur » en deux étapes : les bras qui maintenaient la fusée se déverrouillaient pour la libérer puis, alors que le lanceur commençait à accélérer verticalement, des fixations métalliques accrochées à travers des fentes dans la fusée se déformaient progressivement jusqu’à relâcher complètement le lanceur[10]. Cette dernière opération durait une demi-seconde. À partir de ce moment, aucun retour en arrière n’était possible ; si un moteur avait un fonctionnement défectueux, la fusée ne pouvait plus être récupérée sur le pas de tir.

Il fallait environ 12 secondes à la fusée pour s’éloigner de la tour de lancement. Une fois qu’elle l’avait dépassée, elle réalisait un mouvement de pivotement pour s’éloigner convenablement de la zone de tir, pour prévenir les cas de vents contraires ou de panne moteur.

À une altitude de 130 mètres, la fusée commençait à prendre du roulis et à basculer pour avoir le bon azimut. Du lancement jusqu’à la seconde 38 après l’allumage du second étage, Saturn V utilisait un programme préenregistré pour la consigne de l’angle d’assiette. La consigne tenait compte des vents dominants généralement mesurés pendant le mois correspondant au lancement.

Par précaution, les quatre moteurs périphériques étaient inclinés vers l’extérieur, de façon à ce que si un moteur vînt à s’arrêter, la poussée des moteurs restants fût dirigée vers le centre de gravité de la fusée. Saturn V accélérait rapidement, atteignant la vitesse de 500 m/s à 2 km d’altitude. La priorité de la phase préliminaire du vol était de prendre de l’altitude, le critère de vitesse venant plus tard.

Après environ 80 secondes, la fusée atteignait le point de pression dynamique maximale, connue sous le nom de Max Q. La pression dynamique sur une fusée est proportionnelle à la densité de l’air autour de la fusée et au carré de la vitesse. Bien que la vitesse de la fusée augmente avec l’altitude, la densité de l’air, elle, décroît.

À 135,5 secondes, le moteur central s’éteignait pour réduire les contraintes structurelles sur la fusée dues à l’accélération. Cette opération était imposée par le fait que la fusée s’allégeait au fur et à mesure de la consommation des ergols. Il n’y avait pas de moyens plus simples d’arriver à ce résultat, étant donné que la poussée du moteur F-1 n’était pas contrôlable. 600 millisecondes après l’extinction du moteur, le premier étage se séparait avec l’aide de huit petits moteurs à poudre. Juste avant que ne soit largué le premier étage, l’équipage subissait sa plus forte accélération, 4 g (soit 39 m/s²). Ceci se passait à une altitude d’environ 62 km.

Après séparation, le premier étage continuait sa trajectoire jusqu’à une altitude de 110 km. En effet, les moteurs périphériques continuaient à fonctionner jusqu’à ce que les capteurs dans les systèmes d’aspirations ne mesurent l’épuisement d’un des deux ergols. Puis le premier étage retombait dans l’océan Atlantique à environ 560 km du pas de tir.

Séquence du S-II

Après la séquence de fonctionnement du S-IC, l’étage S-II prenait le relais et, en 6 minutes, propulsait la fusée à une altitude de 185 km et à une vitesse de 24 600 km/h, valeur proche de la vitesse orbitale.

Le second étage suivait une procédure d’allumage en deux temps, qui a varié pendant les différents lancements de Saturn V. Pour les deux premières missions inhabitées de la fusée, le premier temps consistait en l’allumage pendant 4 secondes de huit moteurs d’appoint à poudre, de façon à réaccélérer le lanceur. Puis les cinq moteurs J-2 rentraient en fonctionnement. Pour les sept premières missions Apollo habitées, seuls quatre moteurs d’appoint étaient utilisés. Pour les quatre derniers lancements de Saturn, les quatre moteurs inutilisés furent même retirés.

Séparation d’un inter-étage. Image extraite du film de la NASA de la mission Apollo 6.

Le deuxième temps de la procédure consistait en la séparation de la jupe inter-étage, environ 30 secondes après le largage du premier étage. Cette manœuvre de séparation demandait une grande précision, car il ne fallait pas que l’inter-étage touche les moteurs, sachant qu’il passait à seulement un mètre d’eux. Au même moment que l’inter-étage se séparait, le système de sauvetage était largué. Ce système était prévu en cas de défaillance de la fusée pendant la phase de lancement.

Environ 38 secondes après l’allumage du second étage, le système de guidage de Saturn V passait d’une consigne préenregistrée pour l’assiette de vol à un système de guidage en boucle, contrôlé par les instruments de la case à équipement, tels qu’accéléromètres et instrument de mesure de l’altitude. Si les ordinateurs de bord emmenaient la fusée hors des limites des trajectoires acceptables, l’équipage pouvait soit annuler la mission soit prendre le contrôle du lanceur en utilisant un des manches rotatifs de pilotage situés dans la capsule.

Environ 90 secondes avant la séparation du deuxième étage, le moteur central s’éteignait pour réduire les oscillations longitudinales connues sous le nom de « effet pogo ». Un système d’élimination de l’effet pogo fut mis en place à partir d’Apollo 14, mais le moteur central était toujours éteint en avance. À peu près au même moment, le débit de LOX diminuait, modifiant le ratio de mélange des deux ergols, et assurant qu’il restait aussi peu d’ergols que possible dans les réservoirs à la fin de la séquence de vol du second étage. Cette opération était réalisée pour une certaine valeur de ΔV.

Il y avait cinq capteurs au fond de chaque réservoir du S-II. Une fois que deux d’entre eux étaient découverts, les systèmes de contrôle de Saturn V initiaient la séquence de changement d’étage. Une seconde après l’extinction du deuxième étage, ce dernier se séparait et un dixième de seconde plus tard le troisième étage s’allumait. Des rétrofusées à poudre montées sur l’inter-étage au sommet du deuxième étage se mettaient en marche pour aider le second étage vide à s’éloigner du reste du lanceur. L’étage S-II retombait environ à 4 200 km du site de lancement.

Séquence du S-IVB

L’étage S-IVB d’Apollo 7 en vol orbital autour de la Terre. Apollo 7 utilisa un lanceur Saturn IB, et non Saturn V, sachant que l’étage S-IVB était quasiment identique sur ces deux lanceurs.

Le troisième étage fonctionnait pendant les 2,5 minutes suivantes.

Contrairement à la précédente séparation d’étages, il n’y avait pas d’opération spécifique de séparation pour l’inter-étage. L’inter-étage entre les second et troisième étages restait attaché au second étage (bien qu’il fût construit comme une composante du troisième étage).

10 minutes et 30 secondes après le décollage, Saturn V était à 164 km d’altitude et à 1 700 km de distance au sol du site de lancement. Quelques instants plus tard, après des manœuvres de mise en orbite, le lanceur était sur une orbite terrestre de 180 km sur 165 km. C’était assez bas pour une orbite terrestre et la trajectoire ne serait pas restée stable à cause des frottements avec les hautes couches de l’atmosphère. Pour les deux missions de mise en orbite terrestre, Apollo 9 et Skylab, l’orbite d’injection était plus élevée.

Une fois sur cette orbite dite « parking », le S-IVB et le vaisseau spatial, restés attachés, réalisaient deux tours et demi autour de la Terre pendant que les astronautes examinaient le vaisseau et le reste de la fusée pour s’assurer que tout était en parfait état de marche et préparer le vaisseau pour la manœuvre d’injection « translunaire » (TLI).

La manœuvre TLI intervenait environ 2 heures et demie après le lancement, quand le troisième étage se rallumait pour propulser le vaisseau spatial vers la Lune. Le deuxième fonctionnement du S-IVB durait 6 minutes amenant le vaisseau à une vitesse supérieure à 10 km/s, suffisante pour s’échapper de l’attraction de la Terre.

Quelques heures après la manœuvre TLI, le module de commande et de service Apollo (CSM) se séparait du troisième étage, pivotait de 180 degrés, puis s’arrimait au module lunaire (LEM) qui était situé sous le CSM pendant la phase de lancement. Pour finir, le CSM et le LEM se détachaient du troisième étage.

S’il était resté sur la même trajectoire que le vaisseau Apollo, le troisième étage aurait pu présenter un danger pour la suite de la mission. Pour éviter cela, les ergols restants dans les réservoirs étaient évacués du moteur, ce qui changeait sa trajectoire. À partir d’Apollo 13, les contrôleurs dirigeaient le troisième étage vers la Lune. Des sismographes déposés sur la Lune par de précédentes missions détectaient les impacts, et les données enregistrées ont contribué à étudier la composition intérieure de la Lune. Avant Apollo 13 (sauf Apollo 9 et Apollo 12), les troisièmes étages étaient placés sur une trajectoire passant à proximité de la Lune qui les renvoyaient vers une orbite solaire. Apollo 9 quant à lui fut dirigé directement vers une orbite solaire.

L’étage S-IVB d’Apollo 12 connut un destin tout différent. Le 3 septembre 2002, Bill Yeung découvrit un astéroïde suspect à qui il donna le nom provisoire de J002E3. Il se révéla être en orbite autour de la Terre, et il fut rapidement découvert par analyse spectrale qu’il était couvert d’une peinture blanche de dioxyde de titane, la même que celle utilisée pour Saturn V. Les contrôleurs de mission avaient prévus d’envoyer le S-IVB d’Apollo 12 en orbite solaire mais l’allumage moteur après la séparation du vaisseau Apollo dura trop longtemps et le troisième étage passa trop près de la Lune et finit sur une orbite à peine stable autour de la Terre et de la Lune. On pense qu’en 1971, suite à une série de perturbations gravitationnelles, le S-IVB se plaça sur une orbite solaire puis revint sur une orbite terrestre 31 ans plus tard. En juin 2003, ce troisième étage quitta l’orbite terrestre.

Mission Skylab

Le dernier lancement de Saturn V emporte la station spatiale Skylab en orbite LEO en lieu et place du troisième étage.

En 1968, le programme d’application Apollo fut créé afin d’étudier les missions scientifiques qui pouvaient être réalisés avec le surplus d’équipements du programme Apollo. La plus grande partie des réflexions tournait autour de l’idée d’une station spatiale, qui donna finalement naissance au programme Skylab. Le lancement de Skylab, faisant appel à Saturn INT-21, un lanceur à deux étages dérivés de Saturn V, fut le seul lancement de Saturn V non directement lié au programme Apollo de premier homme sur la Lune.

À l’origine, il était prévu de suivre le concept dit de l’atelier « humide », avec un étage de fusée utilisé pour le lancement en orbite, puis, une fois vide, reconverti en station spatiale par des aménagements réalisés en orbite. Mais ce concept fut abandonné au profit du concept de l’atelier « sec » ; un étage S-IVB du lanceur Saturn 1B transformé au sol en la station spatiale Skylab puis lancé par une Saturn V. Un système de rechange (parfois nommé Skylab B), qui fut construit à partir d’un troisième étage de Saturn V, est aujourd’hui exposé au National Air and Space Museum.

Trois équipages ont occupé Skylab du 25 mai 1973 jusqu’au 8 février 1974. Skylab resta en orbite jusqu’en mai 1979.

On espérait à l’origine que Skylab resterait suffisamment longtemps en orbite pour être visité par la navette spatiale américaine pendant ses tout premiers vols. La navette aurait pu remonter l’orbite de Skylab, et lui permettre d’être utilisée comme une base pour de futures stations spatiales. Cependant, la navette ne vola pas avant 1981 et, rétrospectivement, on a pris conscience que Skylab n’aurait de toute façon pas été d’une grande utilité, n’étant pas conçue pour être réapprovisionnée ou ravitaillée.

Les développements proposés pour l’« après Apollo »

La deuxième campagne de production de Saturn V, qui a été annulée, aurait très certainement utilisé des moteurs F-1A sur le premier étage, fournissant un surplus de poussée substantiel. D’autres changements probables auraient été la suppression des ailettes (qui s’avérèrent apporter peu de bénéfice eu égard à leur poids) ; un premier étage S-IC étiré pour supporter les moteurs F-1A plus puissants ; et des moteurs J-2 améliorés pour les étages supérieurs.

Les moteurs de la fusée exposée couchée au Kennedy Space Center de Floride

Un certain nombre d’alternatives de lanceurs Saturn basées sur Saturn V furent proposées, allant de la Saturn INT-20 avec un étage S-IVB et un inter-étage monté directement sur l’étage S-IC, à la Saturn V-23 (L) qui aurait non seulement eu cinq moteurs F-1 sur le premier étage, mais également quatre boosters ajoutés avec chacun deux moteurs F-1, portant le nombre total de moteurs F-1 en fonctionnement au lancement à treize.

La navette spatiale américaine fut initialement conçue comme un système de transport à utiliser de concert avec Saturn V, au point que fut imaginée une « Navette Saturn » qui, utilisant les orbiteurs et réservoirs extérieurs actuels, mais avec ces réservoirs montés sur une version modifié du S-IC et volant sur son dos, aurait été utilisée pour propulser la navette durant les deux premières minutes de vol, après lesquelles le S-IC aurait été largué et serait retourné vers le Centre spatial Kennedy pour réapprovisionnement, et les moteurs principaux de la navette spatiale se seraient mis en marche pour placer l’orbiteur en orbite. La navette devait s’occuper de la logistique de la station spatiale, tandis que Saturn V devait s’occuper du lancement des différents composants. L’absence de la deuxième série de production de Saturn V ruina ce plan et laissa les États-Unis sans lanceur super-lourd. Certains au sein de la communauté spatiale américaine ont fortement regretté cette situation, sachant que la poursuite de la production aurait permis la réalisation de la Station spatiale internationale, en configuration Skylab ou Mir avec les ports d’ancrages russes et américains, avec une poignée seulement de lancements. Certains considèrent également que le concept de « navette Saturn » aurait permis d’éviter les conditions qui ont amené au désastre de Challenger en 1986.

Saturn V aurait été le lanceur des sondes spatiales Voyager Mars vers Mars qui ont été annulées, et aurait dû être le lanceur utilisé pour le programme RIFT de test d’étage à propulsion nucléaire et pour le programme NERVA.

Les successeurs à Saturn V

Aux États-Unis, les propositions pour une fusée plus grande que Saturn V étudiées de la fin des années 1950 jusqu’au début des années 1980 ont toutes porté le nom général de Nova. On compte ainsi plus de trente propositions différentes de grande fusée avec ce nom.

Wernher von Braun et d’autres avaient aussi des plans pour une fusée qui aurait eu huit moteur F-1 sur son premier étage lui permettant d’envoyer un vaisseau spatial habité directement vers la Lune. D’autres variantes pour Saturn V suggéraient d’utiliser un Centaur comme étage supérieur ou d’ajouter des boosters d’appoint. Ces améliorations auraient augmenté sa capacité à envoyer de grands vaisseaux inhabités explorer les autres planètes ou des vaisseaux habités vers Mars.

En 2007, la NASA prévoyais de construire le lanceur super-lourd Ares V, un dérivé de la navette spatiale. Ares V aurait eu à peu près la même hauteur et la même masse que Saturn V. Ce nouveau lanceur aurait été baptisé en l’honneur de Saturn V. Il était destiné à être un véhicule inhabité, à forte capacité de lancement, prévu pour les futures missions habitées vers la Lune et vers Mars. Le président américain Barack Obama a annoncé le 1er février 2010 son intention d'abandonner le programme Constellation. Cette décision a été approuvée par le Congrès américain entrainant l'arrêt du développement des lanceurs Ares.

Contrairement à Saturn V qui possède trois étages, Ares V aurait eu deux étages, avec un étage principal de 10 mètres de diamètre (le même que sur les étages S-IC et S-II) propulsé par de l’hydrogène et de l’oxygène liquide et assisté pendant ses deux premières minutes de vol par une paire de boosters à poudre dérivés de ceux de la navette spatiale américaine, avec cinq segments de poudre au lieu de quatre actuellement. L’étage principal aurait été équipé de cinq moteurs-fusées RS-68 avec la même disposition que celle utilisée sur les étages S-IC et S-II. À l’origine Ares V aurait dû utiliser cinq moteurs SSME (moteurs principaux de la navette spatiale américaine), mais le basculement vers les RS-68 a été motivé par un aspect coût, et par le fait que ces moteurs ont fonctionné avec succès sur le système de lancement inhabité Delta IV EELV. De plus, les RS-68 sont plus puissants et plus faciles à fabriquer que les SSME.

Les moteurs RS-68, construits par la division Rocketdyne de Pratt & Whitney (auparavant propriété de Boeing et de Rockwell international) sont plus efficaces que les moteurs F-1 de Saturn V. Par contre, les moteurs J-2 utilisés sur le S-II et le S-IVB vont être modifiés et devenir les moteurs améliorés J-2X pour être montés sur l’« étage de départ de la Terre » (Earth Departure Stage - EDS), le deuxième étage d’Ares V dérivé du S-IVB, et sur le second étage de la fusée en proposition Ares 1. L’étage EDS et le deuxième étage d’Ares 1 devraient utiliser un seul moteur J-2X, bien qu’initialement l’EDS ait été prévu avec deux moteurs jusqu’au changement de conception remplaçant les cinq SSME par cinq RS-68.

Coût

De 1964 à 1973, un total de 6,5 milliards de dollars a été dépensé pour Saturn V. C’est en 1966 que l’effort financier annuel a été le plus important avec une somme de 1,2 milliard de dollars[11]. En tenant compte de l’inflation, cela équivaut à une somme entre 32 et 45 milliards de dollars de 2009[12].

Une des principales raisons à l’arrêt du programme Apollo a été son coût. En 1966, la NASA reçut son budget le plus important, 4,5 milliards de dollars, à peu près 0,5 % du PIB des États-Unis à l’époque. La même année, le Département de la Défense des États-Unis recevait 63,5 milliards de dollars.

Les différents lancements

Numéro de série Mission Date de lancement Commentaires
SA-501
Apollo 4 9 novembre 1967 Premier vol d’essai
SA-502
Apollo 6 4 avril 1968 Deuxième vol d’essai
SA-503
Apollo 8 21 décembre 1968 Premier vol habité de Saturn V et orbite lunaire
SA-504
Apollo 9 3 mars 1969 Test du LEM en orbite terrestre
SA-505
Apollo 10 18 mai 1969 Test du LEM en orbite lunaire
SA-506
Apollo 11 16 juillet 1969 Premier pas de l’homme sur la Lune
SA-507
Apollo 12 14 novembre 1969 Se pose près de Surveyor 3
SA-508
Apollo 13 11 avril 1970 Mission en échec, équipage récupéré sain et sauf
SA-509
Apollo 14 31 janvier 1971 Se pose près de Fra Mauro
SA-510
Apollo 15 26 juillet 1971 Premier rover lunaire
SA-511
Apollo 16 16 avril 1972 Se pose près de Descartes
SA-512
Apollo 17 6 décembre 1972 Unique lancement nocturne ; dernière mission lunaire Apollo
SA-513
Skylab 1 14 mai 1973 Version à deux étages avec Skylab (Saturn INT-21)
SA-514
Inutilisé Développée mais jamais utilisée pour Apollo18/19
SA-515
Inutilisé Développée comme système de rechange pour le lancement de Skylab
Les Saturn V furent lancées de jour ou de nuit, par plus ou moins beau temps, comme on peut le voir sur ce montage photo.

Aujourd'hui

Une Saturn V exposée au centre américain de l’espace et des fusées à Huntsville en Alabama.

En 2011, trois Saturn V sont exposées aux États-Unis, toutes à l’horizontale :

  • Au centre spatial Johnson, on peut voir une Saturn V composée du premier étage du SA-514, du second étage du SA-515 et du troisième étage du SA-513
  • Au centre spatial Kennedy, elle est composée du S-IC-T (étage de test) et du second et troisième étage du SA-514
  • Au centre américain de l’espace et des fusées, elle est composée du S-IC-D, S-II-F/D et du S-IVB-D (tous des étages de test non prévus pour un vol réel)

Sur ces trois Saturn V, seule celle du centre spatial Johnson est composée entièrement d’étages prévus pour un lancement réel. Le centre américain de l’espace et des fusées à Huntsville dispose également en exposition d’une réplique à l’échelle de Saturn V érigée à la verticale. Le premier étage du SA-515 se trouve au centre d’assemblage Michoud en Louisiane. Le troisième étage du SA-515 quant à lui fut converti pour servir de rechange pour Skylab. Ce dernier est aujourd’hui visible au musée national américain de l’air et de l’espace.

Une rumeur répandue depuis 1996, prétend que la NASA a perdu ou détruit les plans de Saturn V. En fait, les plans existent toujours au Centre de vol spatial Marshall, conservés sur microfilms.

Notes et références

  1. a et b La genèse du RDV en orbite lunaire, Version site web du 6 janvier 2007.
  2. a et b Comment aller sur la Lune Version site web du 6 janvier 2007.
  3. Descriptif étage S-I Version site web du 13 janvier 2007.
  4. a et b Descriptif étage S-II Version site web du 7 janvier 2007.
  5. a et b Version site web du 13 janvier 2007.
  6. (en)Launch Vehicle Key Facts, extrait de Apollo By The Numbers: A Statistical Reference by Richard W. Orloff (NASA).
  7. Space Shuttle Basics : Launch, NASA]. Consulté le 29 janvier 2011
  8. Space Shuttle Basics, NASA]. Consulté le 29 janvier 2011
  9. Transporteur crawler, version site web du 17 janvier 2007.
  10. Forum de www.unmannedspaceflight.com/, version site web du 17 janvier 2007.
  11. history.nasa.gov.
  12. (en)The Inflation Calculator.


Bibliographie

Voir aussi

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Articles connexes

Liens externes

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