Scission d'entreprises

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Depuis la fin des années 90 on observe une augmentation du nombre de scissions : en 1997 Pepsi-Cola séparait ses activités de restauration rapide de ses activités de vente de boissons sans alcool. En France en 2001 Eridania Beghin Say disparaissait pour laisser place à quatre sociétés distinctes : Beghin-Say (sucre), Cerestar (amidon), Cereol (huile) et Provimi (alimentation animale).

Le Vocabulaire juridique de l’association Henri Capitant définit la scission comme l’« Opération de démembrement par laquelle est fractionné le patrimoine de la société scindée, les diverses fractions formant, par apport, les patrimoines des sociétés nouvelles issues de la scission. ». Dans leur ouvrage Droit des sociétés, Maurice Cozian, Alain Viandier et Florence Deboissy précisent que les différentes parts issues de la scission ne vont pas nécessairement constituer des sociétés nouvelles indépendantes, mais peuvent également être agrégées à une société préexistante. On est alors dans le cadre d’une fusion scission. Du fait de cette limite parfois floue entre les fusions et les scissions, et du nombre plus important des premières, le régime juridique et fiscal des scissions a été calqué sur celui des fusions.

On ne reprendra pas ici l’ensemble des caractéristiques des fusions, au contraire on se concentrera sur les spécificités des scissions. Les scissions, en nombre croissant ces dernières années (I), peuvent s’effectuer selon divers schémas économiques (II). Leur régime juridique et fiscal est proche de celui des fusions (III).

Sommaire

Pourquoi le nombre de scissions a-t-il crû ces dernières années ?

Se concentrer sur son « cœur de métier »

Depuis la fin des années 60, la doctrine financière a remis en cause l’intérêt économique de grands conglomérats, privilégiant le recentrage des différentes sociétés autour de leur « cœur de métier ». On peut notamment penser aux conclusions tirées du Capital Asset Pricing Model, dont le fondateur William Sharpe a reçu le « Prix Nobel » d'économie en 1990. La remise en cause des mérites de la diversification des sociétés est fondée sur deux éléments :

  • L’investisseur ne valorise pas la diminution du risque due à cette diversification, car il peut lui-même réaliser cette opération sans coût en composant son portefeuille de titres de sociétés de divers secteurs économiques.
  • Les conglomérats sont souvent économiquement moins efficaces, du fait des coûts centraux de fonctionnement et à la mauvaise allocation des ressources entre les différentes activités. Des divisions peu rentables sont conservées et financées aux dépens des meilleures divisions, qui sont donc freinées dans leur développement.

De ce fait, les groupes diversifiés sont parfois moins bien valorisés que ne le seraient la somme des diverses branches qui les composent, si elles étaient indépendantes. Dans ce cas, il peut être intéressant de procéder à une scission de l’entreprise.

L’influence de la loi de finance de 1995

Le faible nombre de scissions en France avant 1995 peut aussi s’expliquer par un obstacle fiscal. Avant d’effectuer une scission, il faut réévaluer l’ensemble de l’actif et du passif de la société. Le but étant de réallouer ceux-ci sur la base de leur valeur réelle. On appelle les sociétés recevant ses apports « sociétés bénéficiaires », qu’elles soient ou non créées pour l’occasion. Avant la loi de finance de 1995, les scissions ne bénéficiaient pas automatiquement du régime des fusions. Il fallait demander à chaque fusion un agrément administratif, qui était dans les faits accordé peu souvent. La réévaluation d’actifs tombait alors sous le coup de l’impôt sur les sociétés, dont le taux élevé était dissuasif.

Enfin on peut souligner que la commission européenne est en faveur de la division de grands conglomérats, pour éviter que ceux-ci n’abusent de leur taille importante pour distordre la concurrence. Le commissaire à la concurrence Neelie Kroes s’est ainsi prononcée en faveur des scissions de tous les grands groupes d’énergie en Europe, afin de séparer les activités de production et de distribution.

Les différents schémas de scissions

On peut distinguer deux formes d’opérations de scissions, selon que l’opération une fois décidée s’impose à tous les actionnaires ou reste un choix.

Les « demergers »

On parle de « demerger » quand l’opération s’impose à tous les actionnaires, une fois qu’elle a été décidée par l’assemblée générale extraordinaire. Les différentes activités d’un groupe sont séparées. Le caractère obligatoire de l’opération entraîne qu’après l’opération les actionnaires des différents groupes sont les mêmes que les actionnaires initiaux. La scission peut être réalisée de deux manières différentes :

  • « Spin-off » : les actions des différentes filiales sont reversées sous la forme de dividendes.
  • « Split-up » : la maison mère est dissoute. On remet aux actionnaires des actions des différentes filiales.

Scissions via une offre publique de rachat

On appelle « Split off », une scission effectuée via une offre publique de rachat d’actions lors de laquelle les actionnaires sont payés en parts de filiales et pas en cash. On propose aux actionnaires qui le souhaitent d’échanger des actions de la maison mère contre des actions d’une de ses filiales. Les actions de la maison mère qui sont apportées par cette opération sont ensuite détruites. Si l’opération emporte un grand succès, on se retrouve ans le même cas que pour un « demerger ». Dans le cas contraire, la société-mère continue d’exister parallèlement à ses filiales désormais indépendantes.

On doit également souligner qu’il existe aussi des scissions partielles, au cours desquelles la maison mère se sépare d’une partie des ses activités sans pour autant disparaître. Cette forme de scission a été reconnue très récemment par l’Union européenne. En février 2005, sur proposition de la commission, le conseil des ministres des finances de l’UE a modifié la directive 99/434/CEE, pour l’étendre « à un nouveau type d’opération, connue sous le nom de "scission partielle" (…), par laquelle une société existante transfère au moins un de ses secteurs d’activité à une société sœur existante ou nouvellement créée. » .

Régime fiscal et juridique

Comme il a été souligné dans l’introduction, la scission est traitée légalement par référence à la fusion. L’article L.236-16 du Code de commerce énumère les règles de la fusion applicables à la scission. Quelques dispositions spécifiques viennent compléter cet article (articles L.236-17 à 236-21)

Le vote de la scission

Les actionnaires de la société scindée doivent voter la scission en assemblée générale extraordinaire, sur la base d’un projet de scissions et d’un rapport de d’un commissaire à la scission. Le schéma selon lequel s’effectuera la scission (voir partie 2) est défini par le projet de scission. C’est également l’assemblée de la société scindée qui adopte les statuts des sociétés bénéficiaires, si elles sont créées à l’occasion de la scission. Cela découle du fait que les actionnaires de la société scindée sont appelés à devenir actionnaires des nouvelles sociétés (Art L.236-16 et L.236-17). Dans le cas, plutôt rare en pratique, où les sociétés bénéficiaires préexistent à la scission, leur assemblée générale extraordinaire doit également voter le projet de scission.

Les conditions nécessaires à l’obtention du régime de neutralité fiscale des opérations de restructurations

Pour éviter l’imposition des plus-values latentes, la scission doit respecter plusieurs conditions :

  • Les titres des sociétés créées pendant la scission doivent être répartis au prorata des droits du le capital de la société scindée.
  • Les actionnaires qui possèdent plus de 5% des droits de vote de la société scindée doivent s’engager à garder pendant au moins 3 ans leurs titres. De plus les associés soumis à cet engagement doivent constituer au moins 20% du capital de la société initiale.

Cette dernière condition est souvent difficile à remplir, du fait du large émiettement du capital des sociétés cotées. Le ministère des finances a donc décidé le 10 février 2006 d’assouplir cette condition en cas de scissions partielles, à partir du 1er janvier 2007.

Le sort des créanciers

Les sociétés bénéficiaires sont débitrices solidaires des créanciers de la société scindée, sans qu’il y ait de novation. Le projet de fusion peut prévoir une autre répartition des créances. Néanmoins les créanciers peuvent dans ce cas s’opposer à la scission. Ils ont alors 30 jours pour saisir le juge. Celui-ci peut ordonner le remboursement immédiat des créanciers, ordonner la création de garanties supplémentaires… (Art L.236-20 et art L.236-21) Le projet de scission est également soumis aux assemblées d'obligataires de la société scindée, à moins que le remboursement des titres sur simple demande de leur part ne leur soit offert. (Art L.236-18).et sous les effets prévus aux alinéas deuxième et suivants de l'article L. 236-14.

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