Seznec

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Affaire Seznec

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L'affaire Seznec défraie la chronique judiciaire française depuis 1923.

Sommaire

L'affaire

Joseph Marie Guillaume Seznec, né en 1878, à Plomodiern, dans le Finistère, maître de scierie à Morlaix, a été reconnu coupable de faux en écriture privée et du meurtre du marchand de bois Pierre Quéméneur, conseiller général du Finistère, ce dernier ayant étrangement disparu dans la nuit du 25 mai au 26 mai 1923, durant un voyage d'affaires effectué de Bretagne à Paris avec Seznec, voyage lié (selon Seznec) à la vente à l'Union soviétique des stocks de voitures rétrocédés à la France par l'armée américaine après le premier conflit mondial. Cependant, même si plusieurs hypothèses plausibles peuvent être avancées quant à cette disparition, et bien que le corps n'ait jamais été retrouvé, seule celle du meurtre fut retenue. Étant la dernière personne à avoir vu Quéméneur vivant, Seznec devint le principal suspect : il fut arrêté, inculpé et incarcéré.

Son procès, au cours duquel près de 120 témoins furent entendus, dura huit jours et prit fin le 4 novembre 1924. Seznec fut alors reconnu coupable, mais la préméditation étant écartée, fut condamné aux travaux forcés à perpétuité (l'avocat général avait demandé la peine de mort). Il fut ensuite conduit au camp de la Transportation de Saint-Laurent-du-Maroni en 1927, puis transféré au bagne des Îles du Salut en Guyane Française en 1928.

Bénéficiant d'une remise de peine en mai 1947[1], il rentra en métropole l'année suivante. En 1953, à Paris, il fut renversé par une camionnette qui prit la fuite. Retrouvé, son chauffeur prétendit qu'il n'avait rien vu. Seznec mourut le 13 février 1954 des suites de ses blessures.

Chronologie et résultats de l'instruction

La chronologie des événements

Le 25 mai 1923, après avoir passé la nuit à l'Hôtel de Paris à Rennes, Guillaume Seznec, et Pierre Quéméneur, prennent la route de Paris à bord d'une voiture de marque Cadillac. Selon Seznec, Quéméneur doit rencontrer le lendemain à huit heures un certain Chardy ou Sherdly. Quéméneur avait indiqué à sa famille qu'il serait de retour le 28 mai. Au bout de quelques jours, la famille Quéméneur s'inquiète et va trouver Seznec pour lui demander des nouvelles. Il leur répond que, à la suite d'une panne de voiture, il a laissé Quéméneur à la gare de Dreux, où celui-ci a pris le train pour Paris. Il suggère qu'il est peut-être allé en Amérique.

Le 13 juin, un télégramme signé Quéméneur est envoyé du Havre, principal port de départ vers l'Amérique avec le texte suivant : « Ne rentrerai Landerneau que dans quelques jours tout va pour le mieux - Quéméneur ». Le 20 juin, un employé de la gare du Havre découvre une valise avec des papiers au nom de Quéméneur et en informe sa famille.

Le 22 juin, une instruction pour disparition suspecte est ouverte à Brest. Dans le cadre de cette instruction, la valise est saisie. Elle contient notamment une promesse de vente dactylographiée (ce qui à l'époque est rare) portant sur un manoir situé à Plourivo, appartenant à Quéméneur, au bénéfice de Seznec et pour une somme de 35 000 francs de l'époque, soit 35 000 euros, sans rapport avec le prix d'un tel bien.

Le 26 juin, Seznec est entendu par les gendarmes. Il explique que cette promesse de vente a été rédigée par Quéméneur et lui a été consentie contre la remise de 4 040 dollars-or qu'il venait de changer à Brest, les 35 000 francs ne représentant que le solde du prix de vente. Cette remise a eu lieu sans témoin. Selon Seznec, Quéméneur aurait eu besoin de liquidités pour traiter l'affaire des Cadillac qui l'appelait à Paris; Seznec n'en sait pas plus, car, dit-il, dans l'affaire, son rôle s'est limité à recevoir pour Quéméneur des courriers adressés sur des enveloppes à en-tête de la chambre de commerce américaine de Paris.

Il raconte le détail du voyage vers Paris, et comment, la voiture étant en panne, il a du laisser Quéméneur à Dreux et est rentré à Morlaix.

Le résultat de l'instruction

Huit témoins ont vu Seznec et Quéméneur ensemble à Houdan, à 60 km de Paris ; ils ont repris la route ensemble. Quéméneur n'a donc pas quitté Seznec à Dreux.

Un témoin a vu Seznec seul au volant de sa voiture, au petit matin du jour suivant, à La Queue-lez-Yvelines, à 15 km d'Houdan sur la route de Paris. Ce témoin l'a aidé avec sa voiture en panne. Seznec a reconnu ce fait.

L'épouse de Seznec confirme que son mari a quitté son domicile le 12 juin en voiture. Il laisse sa voiture dans une ferme à Plouaret, arrêt sur la ligne ferroviaire Paris-Brest.

Selon plusieurs témoins, Seznec était au Havre le 13 juin, jour de l'envoi du télégramme signé Quéméneur depuis cette ville. Il y a acheté la machine à écrire qui a servi à taper la promesse de vente. Cinq témoins ont confirmé ces faits. Il utilisait un nom d'emprunt lors de ce séjour. La boutique était proche du bureau de poste d'où le télégramme a été expédié.

Seznec a été vu le même jour à la gare de Paris-Montparnasse à Paris, à 21 heures, où il prenait le train pour Plouaret : deux témoins l'ont aidé à déposer un colis pesant, qui pourrait être la machine à écrire.

Le 14 juin au petit matin, il a récupéré sa voiture à Plouaret, soit dans l'heure qui a suivi l'arrivée du train où il a été vu la veille.

La police découvre le 6 juillet la machine à écrire ayant servi à rédiger les promesses de vente au cours d'une perquisition dans la scierie de Seznec.

Des experts examinent la machine. Ils concluent qu'elle a bien servi à rédiger les promesses de vente (dont l'une en possession de Seznec a été remise par ce dernier aux policiers parisiens) et que les mentions manuscrites prétendues écrites par Quéméneur sont en fait de la main de Seznec.

Dans la valise récupérée au Havre, il y avait également un carnet de dépenses, mentionnant notamment des billets de train Dreux-Paris et Paris-Le Havre, mais avec des prix erronés. Par ailleurs, l'enquête va montrer que ce n'est pas à Dreux que Quéméneur est censé avoir pris le train, mais à Houdan, ce que Seznec sera obligé de reconnaître.

Tentative de révision du procès

Durant tout son procès et pendant les années qui lui restent à vivre, Seznec ne cessa de clamer son innocence. Ses descendants, et notamment son petit-fils Denis Le Her-Seznec, ont régulièrement sollicité la justice pour rouvrir le dossier, afin de le blanchir des accusations portées contre lui et obtenir sa réhabilitation. Quatorze demandes ont été examinées par la justice et ont été rejetées.

La commission de révision des condamnations pénales a accepté, le 11 avril 2005, de rouvrir le dossier de la condamnation pour meurtre de Guillaume Seznec[2]. Cette décision pouvait ouvrir la voie à une éventuelle annulation de la condamnation prononcée en 1924 à son encontre. La Chambre criminelle de la Cour de cassation, statuant comme cour de révision, a examiné ce dossier le 5 octobre 2006.

Lors de cette audience, le bénéfice du doute au profit de Guillaume Seznec a été demandé en évoquant plus particulièrement la possibilité d'une machination policière de l'inspecteur stagiaire Pierre Bonny (futur adjoint vingt ans plus tard de Henri Lafont, le chef de la Gestapo française) dont le supérieur hiérarchique, le commissaire Vidal, fut chargé de l'enquête. De son côté le conseiller rapporteur Jean-Louis Castagnède a soutenu l'opinion inverse, arguant d'une part que cette manipulation lui semblait improbable du fait du faible nombre d'actes établis par Bonny (5 sur 500) et, d'autre part, que les expertises sollicitées par la cour de cassation avaient établi que Guillaume Seznec était bien l'auteur de la fausse promesse de vente de la propriété de Quéméneur sise à Plourivo.

Le 14 décembre 2006, l'annulation de la condamnation de Seznec a été rejetée par la Cour de révision qui a estimé qu'il n'y avait aucun élément nouveau susceptible de faire naître le doute sur la culpabilité de Guillaume Seznec[3], constatant que l'existence d'une machination policière telle qu'alléguée est matériellement impossible et que la participation de l'inspecteur Bonny à une machination policière n'a pas été prouvée[4]. Cette affaire semble close, une nouvelle demande de révision étant improbable. La famille Seznec avait dans un premier temps manifesté l'intention de saisir la Cour européenne des droits de l'homme, mais sur les conseils de ses avocats, elle y a renoncé[5].

De nombreux ouvrages ont été publiés depuis des dizaines d'années sur cette affaire et Yves Boisset en tira un film L'Affaire Seznec en 1992, avec Christophe Malavoy dans le rôle principal.

Annexes

Sources et bibliographie

  • Guy Penaud, L'énigme Seznec, Éditions de La Lauze, Périgueux, 2006 ;
  • Victor Hervé, Justice pour Seznec, Éditions Hervé, 1933 ;
  • Claude Bal, Seznec était innocent, Éditions de Paris, 1955 ;
  • Yves Frédéric Jaffré, L'affaire Seznec, SEGEP, 1956 ;
  • Jean Rieux - Lice Nedelec, Seznec...innocent ou prestidigitateur criminel ?, Jugant, Lorient, 1976 ;
  • Marcel Julian; L'affaire Seznec, Les grandes enquêtes d'Europe, 1979 ;
  • Denis Seznec, Nous les Seznec, Éditions Robert Laffont, Paris, 1992 ;
  • Denis Langlois, L'Affaire Seznec, Plon, 1988 (Prix des droits de l'homme 1989), dernière réédition 2005 ;
  • Michel Keriel, Seznec. L'impossible réhabilitation, Éditions MEB, 1998 ; réédition LE MANUSCRIT, 2006 ;
  • Aurélien Le Blé (Préface de Denis Seznec), Moi, Pierre Quemeneur, Éditions Alain Bargain, Quimper ;
  • Daniel Le Petitcorps, Seznec En quête de vérité, Éditions Le Télégramme, 2003, (ISBN 2-84833-058-9) ;
  • Bernez Rouz, L'affaire Quéméneur Seznec - Enquête sur un mystère, Éditions Apogée, Rennes, 2005 ;
  • Pascal Bresson (préface de Denis Seznec), Guillaume Seznec, une vie retrouvée, Éditions Ouest-France,
  • Nathalie Le Gendre, 49 302, Mango (Autres Mondes), 2006 ;

Notes et Références

  1. D'après les conclusions de l'avocat général devant la Cour de révision, il a accepté d'être gracié par un décret de de Gaulle du 2 février 1946 ayant pris effet par la signature du décret de remise de peine définitive par Vincent Auriol en mai 1947
  2. Commission de révision des condamnations pénales, 11 avril 2005, n°01-REV-065
  3. Arrêt n° 5813, affaire Guillaume Seznec 05-82.943, du 14 décembre 2006 de la chambre criminelle de la Cour de cassation rejetant la demande de révision du procès
  4. Bonny est, depuis, connu pour avoir été employé à des manipulations qui l'ont conduit à la révocation de la police, à la peine capitale ensuite, ce qui a fait naître des doutes sur sa intégrité professionnelle
  5. « Affaire Seznec. Pas de recours devant la cour européenne », Le Télégramme, 14 juin 2007


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