Soliton

Soliton

Un soliton est une onde solitaire qui se propage sans se déformer dans un milieu non-linéaire et dispersif. On en trouve dans de nombreux phénomènes physiques de même qu'ils sont la solution de nombreuses équations aux dérivées partielles non-linéaires.

Sommaire

Historique

Les solitons hydrodynamiques

Soliton hydrodynamique.

Le phénomène associé a été décrit pour la première fois par l'Écossais John Scott Russell qui l'a observé initialement en se promenant le long d'un canal : il a suivi pendant plusieurs kilomètres une vague remontant le courant qui ne semblait pas vouloir faiblir[1]. Il a été modélisé par Joseph Boussinesq[2] en 1872. Ainsi sur l'eau, il est apparenté au mascaret. Il apparaît par exemple dans la Seine ou sur la Dordogne, en Gironde, à certains endroits et à certains moments.

Ce mode de propagation d'une vague sur de longues distances explique aussi la propagation des tsunami (ou raz-de-marée). Ceux-ci se déplacent pratiquement sans effet notoire en eaux profondes. Le transport par soliton explique que les tsunamis, insensibles pour les navires en mer, puissent naître d'un séisme sur une côte de l'océan Pacifique et avoir des effets sur la côte opposée.

Les solitons optiques

Évolution spatio-temporelle d'un soliton optique fondamental qui se propage sans se déformer.

L'utilisation de solitons a été proposée pour améliorer la performance des transmissions dans les réseaux optiques de télécommunications en 1973 par Akira Hasegawa du laboratoire Bell d'AT&T[3]. En 1988, Linn Mollenauer et son équipe transmettent des solitons sur plus de 4 000 km en utilisant la diffusion Raman, du nom d'un physicien indien qui a décrit une façon d'amplifier les signaux dans une fibre optique. En 1991, toujours aux Bell Labs, une équipe transmet des solitons sur plus de 14 000 km en utilisant des amplificateurs à erbium.

En 1998, Thierry Georges et son équipe du centre de recherche et développement de France Télécom combinent des solitons de longueurs d'ondes différentes (multiplexage en longueur d'onde) pour réaliser une transmission à un débit supérieur à 1 terabit par seconde (1 000 000 000 000 bits par seconde). En 2001, les solitons trouvent une application pratique avec le premier équipement de télécommunications transportant du trafic réel sur un réseau commercial.

Les solitons dans d'autres domaines physiques

En 2004, N. Sugimoto de l'université d'Ōsaka a trouvé le moyen d'introduire de la dispersion lors de la propagation d'ondes acoustiques et, par là même, de créer les premiers solitons acoustiques. Une utilisation potentielle de ce phénomène est la réduction des ondes de choc à l'entrée de trains dans les tunnels.

En 2006, Michael Manley observe, grâce à des expériences de diffusion par des rayons X et des neutrons, des solitons au sein de cristaux d'uranium portés à une température élevée.

Théorie

La théorie des solitons s'est surtout développée grâce à l'optique rendue non-linéaire au moyen de l'effet Kerr ou de photo-réfraction, l'expérience et la théorie s'épaulant : Soit une onde lumineuse plane dont l'intensité décroît en fonction de la distance à un point central. Vers le centre, l'accroissement de l'indice de réfraction, qui résulte de l'accroissement de l'intensité, réduit la vitesse de propagation et l'onde devient convergente ; mais cette convergence est limitée du fait de la défaillance de l'optique géométrique. L'expérience ainsi que la résolution des équations de Maxwell montrent que l'essentiel de l'énergie lumineuse se propage en un filament entouré d'une onde évanescente. L'énergie étant concentrée dans deux directions perpendiculaires au filament et se propageant dans une troisième, on nomme ce filament « soliton 2+1 ». La présence d'un filament voisin modifie différemment le champ électromagnétique suivant qu'on se trouve du côté voisin ou du côté opposé au filament voisin, de sorte que la variation résultant du champ, donc de l'indice de réfraction, courbe le filament. Le filament peut être courbé de façon a former un tore, par exemple en postulant que la perméabilité magnétique du milieu croît aussi avec le champ. Le tore ainsi obtenu est un soliton tridimensionnel (3+0) qui peut représenter une particule. Ces particules possèdent toutes les propriétés des particules matérielles : leurs interactions par leurs champs évanescents permettent, en particulier, des interférences.

En théorie (quantique) des champs, les solitons topologiques sont des solutions classiques non triviales topologiquement. Ils portent différents noms suivant qu'ils minimisent l'action (→ instanton) ou l'énergie et en fonction des topologies respectives de l'espace et du groupe de jauge (monopôle, vortex, skyrmion, toron, ...).

Modélisation

Vague en faible profondeur : l'équation de Korteweg-de Vries

En mathématiques, l'équation de Korteweg et de Vries[4] (KdV en abrégé) est un modèle mathématique pour les vagues en faible profondeur. C'est un exemple très connu d'équation aux dérivées partielles non-linéaire dont on connait exactement les solutions. Ces solutions comprennent, mais ne se limitent pas à des solitons. Ces solutions peuvent se calculer par la transformation de diffusion inverse (même principe que la résolution de l'équation de la chaleur).

On considère un fluide incompressible et non visqueux lors d'un écoulement irrotationel[5]. On note h la profondeur, η la hauteur de la surface et c_{0} = \sqrt{gh} la vitesse des ondes linéaires.

À partir des équations d'Euler on obtient l'équation :

 \frac{1}{c_{0}} \frac{\partial \eta}{\partial t} + \frac{\partial \eta}{\partial x} + \frac{3}{2h} \eta \frac{\partial \eta}{\partial x} + \frac{h^{2}}{6} \frac{\partial^{3} \eta}{{\partial X^{3}}} = 0

On se place dans un repère mobile en posant X = xc0t et T = t pour éliminer le second terme de l'équation :

 \frac{1}{c_0} \frac{\partial \eta}{\partial T} + \frac{3}{2h} \eta \frac {\partial \eta}{\partial X} + \frac{h^2}{6} \frac {\partial^3 \eta} {\partial X^3} = 0

On obtient alors l'équation de Korteweg-de Vries en posant des variables adimensionnées (ϕ = η / h, ξ = X / X0 et τ = T / T0) :

 \frac{ \partial \phi}{\partial \tau} + 6 \phi \frac{\partial \phi}{\partial \xi} + \frac{\partial^3 \phi}{\partial \xi^3} = 0

On cherche alors les solutions localisées spatialement se propageant à vitesse v constante. On pose donc z = ξ − vτ pour obtenir :

 -v \frac{\partial \phi}{\partial z} + 6 \phi \frac{\partial \phi}{\partial z} + \frac{\partial^3 \phi}{\partial z^3} = 0

En intégrant par rapport à z on obtient (en prenant la constante d'intégration nulle car on cherche des solutions localisées spatialement) :

 \frac{\partial^2 \phi}{\partial z^2} + 3 \phi^2 - v \phi = 0

D'où en intégrant encore par rapport à z (et en considérant encore la constante d'intégration nulle) :

 \frac12 {\frac{\partial \phi}{\partial z}}^2 + \phi^3 - \frac12 v\phi^2 = 0

Finalement en effectuant le changement de variable  \phi = \frac12 v sech^2(u) (où sech(x) = \frac1{ch(x)} ) pour intégrer  dz  \frac{d\phi}{\sqrt{v\phi^2-2\phi^3}} , on obtient :

 \phi(z) = \frac{v}{2} sech^2 \sqrt{\frac{v}{4}}z

En revenant aux notations précédentes on obtient :

 \eta = \eta_0 sech^2[\frac{1}{2h}\sqrt{\frac{3\eta_0}{h}} ( x - c_0[1+ \frac{\eta_0}{2h}]t)]

La vitesse est linéaire par rapport à l'amplitude :

 c=c_0 (1 + \frac{\eta_0}{2h})

L'équation de sine-Gordon

Application aux solitons, permettant de décrire à partir de la mécanique lagrangienne une chaine de pendule infini par exemple.

L'équation de Schrödinger non linéaire NLSE

Références

  1. J. Scott Russell. Report on waves, Fourteenth meeting of the British Association for the Advancement of Science, 1844.
  2. Joseph Boussinesq, « Théorie de l'intumescence liquide, appelée onde solitaire ou de translation, se propageant dans un canal rectangulaire », dans Comptes rendus de l'Académie des sciences, vol. 72, 1871, p. 755–759 [texte intégral] 
  3. (en) Hasegawa et Tappert, « Transmission of stationary nonlinear optical pulses in dispersive dielectric fibers. I. Anomalous dispersion », dans Appl. Phys. Lett., vol. 23, 1973, p. 142-144 
  4. Voir par exemple Michel Remoissenet, « Waves Called Solitons : Concepts and Experiments », Sringer 1996
  5. source : La Physique des Solitons, Michel Peyrard, Thierry Dauxois, 2004, EDP Sciences, Savoirs Actuels

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