Spartacus

Spartacus
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La chute de Spartacus

Spartacus était un esclave et un gladiateur thrace. Il dirigea la Troisième Guerre servile en Italie du Sud entre -73 et -71.

Les détails de cette révolte d'esclaves sont bien connus, par un chapitre de l'historien romain Florus dans son Abrégé d'Histoire romaine, repris dans les Guerres civiles de l'historien grec Appien. Un autre historien romain, Eutrope, en a fait un bref résumé au IVe siècle dans son Abrégé d'histoire romaine.

Son histoire est devenue célèbre pour le grand public grâce au film scénarisé par Dalton Trumbo commencé par Anthony Mann et terminé par Stanley Kubrick réalisé en 1960.

Sommaire

Vie avant la révolte

Article détaillé : Troisième Guerre servile.

Né peut-être vers -100, Spartacus était un Thrace de naissance libre, originaire de la tribu des Maides, installée dans le sud-ouest du pays, près du fleuve Strymon, selon Plutarque.

S'il n'a pas été rebaptisé par un maître, Spartacus peut correspondre à un patronyme thrace — « Spartokos » ou « Spardokos » — et au nom d'une ville de Thrace, Spartakos. La plupart des sources antiques en font un berger, mais certaines affirment qu'il appartenait à une famille princière[1].

Appien indique sans grande précision que Spartacus a servi dans une légion, qu'il a été fait prisonnier de guerre et vendu. On peut supposer qu'il a été enrôlé de force comme auxiliaire, et qu'il était un déserteur, repris et vendu comme gladiateur. Conduit à Rome pour y être vendu, il fut acheté par un laniste (marchand de gladiateurs), Caius Cornelius Lentulus Vatia, qui l'emmena dans son école à Capoue[1]. D'après Plutarque, sa femme, qui était « originaire de la même tribu que lui » et « devineresse sujette aux transports dionysiaques », l'accompagna à Rome quand il fut vendu, puis durant la révolte[2]. Prêtresse de Dionysos, elle peut avoir joué un rôle important dans le déclenchement de la révolte[1].

La rébellion des esclaves

À l'été -73, 200 gladiateurs de l'école de Lentulus Battiatus complotèrent pour retrouver la liberté, mais furent dénoncés. Prenant les devants, entre 70[3] et 78 gladiateurs[4] réussirent à s'évader. Après s'être emparés de chariots transportant un stock d'armes destinées à une autre école de Capoue, ils ne se dispersèrent pas, mais traversèrent la Campanie en direction de la baie de Naples, où ils furent rejoints par de nombreux travailleurs agricoles — esclaves fugitifs et hommes libres — des latifundia et se réfugièrent sur les pentes du Vésuve. Trois hommes furent élus chefs, Spartacus, Crixus et Œnomaüs[5]. Spartacus, un parmularius (ou thrace) ou un mirmillon selon Florus[6], et ses compagnons parvinrent à vaincre les quelques gardes régionales envoyées par la ville de Capoue et complétèrent ainsi leur réserve d'armes. Pour subvenir à ses besoins, la petite armée commença à organiser des razzias sur les exploitations agricoles de la Campanie. Spartacus ne cessait alors d'attirer non seulement des esclaves, mais aussi des petits paysans et des bergers, organisant ainsi une armée.

L'armée servile battit alors 3 000 Romains commandés par le préteur Gaius Claudius Glaber, grâce à une ruse de Spartacus. En effet, ce dernier fuit le volcan où il était assiégé par un versant raide, et avec l'aide d'échelles faites avec des sarments de vignes. Dès lors, Spartacus rassembla de plus en plus de combattants. Rome ne le considérait pas comme une menace et le sous-estimait beaucoup. Les autorités romaines n'envoyèrent d'abord que deux nouvelles légions, dirigées par deux autres préteurs pour stopper la rébellion. Les autres légions étaient accaparées par la révolte de Sertorius, en Hispanie, et par le conflit avec Mithridate VI, en Orient.

À ce moment, l'armée des esclaves se sépara. 30 000 hommes suivirent le gladiateur Crixus en Apulie et le gros des troupes montait vers le nord par les Apennins. Tandis que Crixus était tué et ses troupes massacrées, lors d'un premier engagement près du Mont Gargano, Spartacus vainquait dans le Picenum les légions engagées contre lui et dirigées par le consul Lucius Gellius Publicola, soit 16 000 Romains mis en déroute. Pour venger la mort de Crixus, Spartacus organisait des jeux funèbres durant lesquels 300 soldats romains faits prisonniers furent contraints de s'entretuer dans un combat de gladiateurs.

Spartacus se dirigea ensuite en direction de Modène dans la plaine du Pô, vainquit l'armée du proconsul de Gaule cisalpine devant la ville puis fit demi-tour vers le sud de l'Italie. Il vainquit à nouveau les armées consulaires et s'installa à Thurii. De là, il commerçait avec les peuples de la Méditerranée, faisait des réserves d'armes, de bronze et de vivres. Il partit ensuit pour le Rhegium. Son objectif était de passer en Sicile pour ranimer la Deuxième Guerre servile qui avait ravagé cette île en -100. Mais les pirates ciliciens, avec qui Spartacus avait passé un accord, le trahirent et Spartacus se trouva coincé à la pointe de l'Italie.

Pendant ce temps, le Sénat romain conférait à Crassus, riche et ambitieux, le commandement d'une armée de quatre légions. Crassus engagea les opérations, et finança une armée supplémentaire composée de six nouvelles légions de vétérans sur ses deniers personnels. Il ne cherchait pas à engager le combat avec l'armée de Spartacus, dont il se contentait de contrecarrer les raids lancés dans un but de ravitaillement.

Un de ses légats, désobéissant à ses ordres, attaqua une partie des troupes de Spartacus avec deux légions (8 000 hommes), et subit un désastre. Pour faire un exemple et impressionner les esprits, Crassus n'hésita pas à remettre en usage un châtiment qui n'était plus pratiqué : celui de la décimation. Un dixième des soldats du premier rang, principalement responsables de la déroute, furent ainsi fouettés puis mis à mort.

Crassus entreprit de bloquer Spartacus dans le Rhegium par une ligne de retranchements de 55 km de long. Spartacus réussit à forcer le blocus par une nuit de neige avec peu de visibilité. Mais il fut poursuivi par l’armée de Crassus et subit quelques petites défaites. Installé dans le Bruttium, il vainquit trois légions romaines. Ses hommes, échauffés par ces dernières victoires, voulaient battre définitivement l'armée de Crassus. L'affrontement eut lieu en Lucanie, et Crassus battit définitivement les révoltés. Avant la bataille, selon Plutarque, comme on lui amenait son cheval, Spartacus égorgea l'animal, disant : « Vainqueur, j'aurai beaucoup de beaux chevaux, ceux des ennemis ; vaincu, je n'en aurai pas besoin ». Puis il tenta de se porter contre Crassus, mais ne put l'atteindre et tua deux centurions qui l'attaquaient. Alors que ses compagnons prenaient la fuite, encerclé par de nombreux adversaires, Spartacus mourut les armes à la main en -71[7]. Son corps ne fut jamais formellement identifié.

La répression fut sanglante : 6 000 esclaves furent crucifiés sur la Via Appia, entre Rome et Capoue. De plus, Pompée, entre-temps rappelé d'Espagne par le Sénat, massacra 5 000 esclaves en fuite dans le nord de l'Italie. À la fin, Pompée recevrait les honneurs tandis que Crassus serait laissé dans l'ombre. Néanmoins, l'année suivante, ces deux hommes furent promus consuls, bien qu'ils n'eussent pas respecté le cursus honorum.

Outre les qualités d'organisateur et de meneur que Appien prête à Spartacus, plusieurs raisons matérielles peuvent expliquer le succès initial et la durée de sa révolte :

  • L'insuffisance des premières forces romaines engagées contre lui, qui ne tinrent pas le choc contre ses troupes : au plus fort de ses batailles, l'armée de Spartacus compterait près de 120 000 combattants.
  • La situation politique (Rome intervenant sur d'autres fronts) qui freinait une mobilisation plus efficace.
  • La situation sociale en Italie du Sud, région de grands latifundia (exploitations agricoles) exploitant durement des masses d'esclaves, qui purent se joindre à la révolte.
  • En revanche, Appien note l'isolement de Spartacus, aucune cité ne le soutenant, par crainte que la rébellion ne s'étendît à leurs esclaves.

Retentissement

Spartacus, statue de Denis Foyatier, 1830

Politique

Spartacus et son mouvement sont considérés par certains modernes comme le plus ancien événement de l'histoire du mouvement social, quoique ce ne soit pas le cas selon nos connaissances historiques (la révolte des esclaves de Sicile est antérieure, et la première grève d'ouvriers actuellement connue se situe en Égypte pharaonique). C'est en revanche celui qui a eu le plus d'écho.

Le symbole reste fort et le mouvement de la gauche communiste allemande, ainsi que l'insurrection lancée par lui, prendront le nom de « spartakiste ».

Karl Marx et Che Guevara étaient des admirateurs du personnage de Spartacus[8].

Cinéma et télévision

Après un film muet des années 1910 du cinéma italien tombé dans l'oubli, plusieurs œuvres ont contribué à une large notoriété :

Littérature

  • 1939 : The Gladiators, Arthur Koestler. Traduction française, Spartacus, 1945 chez Aimery Somogy. Réédité depuis chez Calman-Levy
  • 1951 : roman de Howard Fast sur lequel est basé le film de Stanley Kubrick.
  • 1988 : Spartacus et la révolte des gladiateurs, Joël Schmidt, Mercure de France
  • 2003 : Spartacus est le nom du jeune « esclave révolté » du recueil de comic-strips intitulé La Petite Alice d'Anne-Marie Simond, Éditions du Héron.
  • 2004 : Spartacus, le gladiateur et la liberté, Gérard Pacaud, Éditions du Félin
  • 2005 : Les Romains, tome 1 Spartacus, révolte des esclaves, roman de Max Gallo, éd. Fayard.

Théâtre et ballet

Jeu

  • 2011 : Spartacus Imperator jeu de plateau réaliste simulant la révolte de Spartacus (et les deux autres révoltes serviles)

Notes et références

  1. a, b et c Catherine Salles, 73 av. J.-C., Spartacus et la révolte des gladiateurs, p. 8-9.
  2. Plutarque, « Vie de Crassus », VIII, Vies parallèles, Gallimard, coll. Quarto, 2001, p. 1014.
  3. Appien, Guerres civiles, I, 116.
  4. Plutarque, « Vie de Crassus », VIII, p. 1014.
  5. Catherine Salles, op. cit., p. 13-16.
  6. Catherine Salles, , op. cit., p. 10.
  7. Plutarque, Vie de Crassus, XI, p. 1018-1019.
  8. Karl Marx raconte à son ami Engels, dans une lettre du 27 février 1861:
    « [...] Pour me détendre, j'ai lu les Guerres civiles à Rome d'Appien. [...] On y voit que Spartacus est le plus splendide des hommes de l'histoire antique. Un grand général (pas comme Garibaldi), un noble personnage, vraiment représentatif du prolétariat de l'Antiquité. » (in « Letter from Marx to Engels In Manchester », 27 février 1861).
  9. Arthur Koestler sur L'Encyclopédie de L'Agora
  10. Spartacus (2004) sur IMDb

Bibliographie

Auteurs antiques
Auteurs modernes
  • Jean-Paul Brisson, Spartacus, Club Français du Livre, 1959
  • Maurice Dommanget, Spartacus, Spartacus, 1948
  • Max Gallo, Spartacus, la révolte des esclaves, Éditions Fayard, 2005
  • Jean Guiloineau, Spartacus, la révolte des esclaves, éd. Hors Commerce, Paris, 2005, roman historique
  • Benoît Malon, Spartacus ou la guerre des esclaves, 1873, inspiré par le parallèle entre la révolte des esclaves et la Commune de Paris. (rééd. par Jacques André éditeur 2008)
  • Claude Marle, Spartacus, Bayard, 2009
  • Marcel Ollivier, Spartacus: la liberté ou la mort!, Les Amis de Spartacus, 2001
  • Gérard Pacaud, Spartacus: le gladiateur et la liberté, Félin, 2004
  • Catherine Salles, 73 av. J.-C., Spartacus et la révolte des gladiateurs, Éditions Complexe, 2005
  • Plamen Pavlov, Stanimir Dimitrov,Spartak - sinyt na drenva Trakija/Spartacus - the Son of ancient Thrace. Sofia, 2009

Wikimedia Foundation. 2010.

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