Tenture de l'Apocalypse

Tenture de l'Apocalypse
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La tenture de l'Apocalypse (ou les tapisseries de l'Apocalypse, ou encore l'Apocalypse d'Angers) est une représentation de l'Apocalypse de Jean réalisée à la fin du XIVe siècle. L'ensemble, initialement composé de sept pièces, dont six sont conservées, est exposé à Angers, dans le musée de la Tapisserie de l'Apocalypse situé dans une très longue galerie du château d'Angers.

Les six tapisseries qui composent la tenture de l'Apocalypse

Sommaire

Présentation

Le sujet de la tenture de l'Apocalypse s'inspire de manuscrits à miniatures[1] illustrant le texte de l'Apocalypse de Jean, d'après des cartons de Hennequin de Bruges, peintre attitré du roi de France Charles V. C'est le plus important ensemble de tapisseries médiévales existant au monde.

Cette monumentale tenture à usage princier, utilisée pour des occasions solennelles, fut commandée entre 1373 et 1377 au marchand lissier Nicolas Bataille pour le duc Louis Ier d'Anjou. Elle fut vraisemblablement fabriquée à Paris, par Robert Poisson, dans les ateliers de Nicolas Bataille d'après les cartons de Hennequin de Bruges (connu également sous le nom de Jean de Bruges). On date son achèvement aux alentours de 1382. Elle fut donnée par le roi René à la cathédrale d'Angers au XVe siècle.

Pour la chaîne et la trame, c'est la laine qui fut employée. Laine aux couleurs vives, teinte à l'aide de colorants végétaux, comme la gaude pour la gamme des jaunes, la garance pour les rouges et le pastel pour les bleus. Cette tapisserie est réversible : le revers est identique à l'avers, ce qui témoigne de la virtuosité des tisseurs.

L'œuvre marque un tournant dans l'art de la tapisserie, puisqu'[réf. nécessaire]après cette Apocalypse une importante production de tentures historiées, religieuses ou profanes, est attestée en Europe.

À la fin du XVIIIe siècle et au début XIXe siècle, la tenture subit d'importants dommages ; elle est en effet utilisée pour servir de couvertures, de protection pour les arbres en hiver... L'œuvre actuellement visible est amputée : sur les 140 mètres de sa longueur d'origine, seuls une centaine sont aujourd'hui visibles. Donnée par le roi René (dernier duc d'Anjou) au chapitre de la cathédrale Saint-Maurice, elle faisait partie du trésor de celle-ci. Lorsqu'elle n'était pas présentée dans la nef, elle était conservée dans des coffres, roulée sur elle même. C'est donc la dernière partie de la tapisserie qui a le plus souffert : Les ensembles 5 et 6. Heureusement elle sera mise à l'abri puis restaurée, notamment grâce à l'aide du chanoine Joubert vers 1843 et 1870.

De 1954 à 1956, on construit pour l'accueillir une galerie au château d'Angers. Cette galerie a été modifiée en 1998, car elle présentait de larges baies vitrées qui laissaient pénétrer la lumière du soleil et celle de la lune, ce qui dégrada énormément les couleurs. Aujourd'hui la tenture est conservée dans un lieu sombre, à une température constante, pour mieux la protéger.

Les thèmes de la tapisserie

Sur les sept pièces d'origine, six nous sont parvenues. Cet ensemble, présenté au château d'Angers dans un espace muséographique prévu à cet effet, mesure 103 mètres de long sur environ 4,5 mètres de haut. Les 6 pièces comportent, pour les deux qui sont complètes, 14 tableaux où alternent des fonds rouges et des fonds bleus et répartis sur deux niveaux. En tête de chaque pièce, un personnage sous un baldaquin introduit le spectateur à la lecture allégorique des visions que Jean aurait reçues à la fin du Ier siècle. En plus d'une illustration du texte de saint Jean, la tapisserie contient des informations (parfois des clins d'œil) sur la vie politique et sociale du XIVe siècle.

En italique les pièces disparues ou dont on ne conserve qu'un fragment.

Première pièce

Cette partie est incomplète.

  • Un grand Personnage sous un baldaquin.

En haut :

  • Saint Jean à Patmos.
  • Les sept Églises. Elles sont représentées matériellement par 7 églises et spirituellement par 7 anges. A gauche du tableau, saint Jean porte la main gauche à sa bouche : il annonce la Révélation contenue dans le livre qu'il porte dans sa main droite.
  • Le Christ au glaive. Lors de cette théophanie, un être semblable à un "fils d'homme", révèle à saint-Jean, prosterné à ses pieds, le mystère des 7 candélabres qui symbolisent les 7 églises d'Asie illuminées par les 7 dons du Saint-Esprit ; et celui des 7 étoiles rouges qu'il tient dans la paume de sa main droite représentant les anges des 7 églises. Dans sa bouche, tenue à l'horizontale, une épée à double fil (le glaive de la Parole) symbolise quant à elle la puissance du Verbe divin.
  • Dieu en majesté. C'est la seconde Vision de Dieu en Majesté. Elle met en scène les quatre « vivants » ou les quatre animaux du tétramorphe qui entourent le trône de Dieu et que voit saint Jean au début de l’Apocalypse, vision qui fait écho à celle d'Ezéchiel dans l'Ancien Testament. La divinité qui se tient dans une mandorle cantonnée du lion, du taureau, de l'homme et de l'aigle est entourée des 24 vieillards, six à chaque angle du tableau.
  • Les Vieillards se prosternent (ou l'Adoration des vingt-quatre Vieillards). Au centre du tableau, le Seigneur, dans la mandorle et assis sur un arc-en-ciel, est auréolé du nimbe crucifère. Il tient en main le livre ouvert. La tapisserie ne suit pas en cela le texte de l'Apocalypse : " Je vis ensuite dans la main droite de celui qui était assis sur le trône, un livre écrit dedans et dehors" (V,1). De part et d'autre, les vingt-quatre Vieillards viennent se prosterner et déposent à ses pieds leurs couronnes d'or. Pour les théologiens du Moyen Âge, ces 24 vieillards correspondaient soit aux 24 livres de l'Ancien testament, soit aux 12 prophètes et aux 12 apôtres (l'Ancienne et la Nouvelle Loi.)
  • Les larmes de saint Jean. Jean est représenté au centre de la tapisserie, et non en marge comme à l'habitude. À sa droite l'ange déployant une banderole, à sa gauche le vieillard qui, faisant le geste d'entraîner Jean, tient dans sa main gauche un gant, sans doute celui qu'il a ôté pour le toucher. (Ce genre de détail anecdotique étant à rechercher dans les miniatures à l'origine de la tenture et non dans l'inspiration personnelle de ses auteurs) Ce tableau illustre le verset 2 :

« Et je vis un ange fort, qui criait à haute voix : "Qui est digne d'ouvrir le livre et d'en lever les sceaux ?" Et nul ne pouvait, ni dans le ciel, ni sur la terre, ni sous la terre ; ouvrir le livre ni le regarder. Je fondais en larmes de ce que personne ne s'était trouvé digne d'ouvrir le livre ni de le regarder. Mais l'un des vieillards me dit : "Ne pleure point ; voici le lion de la tribu de Juda, le rejeton de David, qui a obtenu par sa victoire le pouvoir d'ouvrir le livre et d'en lever les sept sceaux. »

  • L'Agneau égorgé.

« Je regardais : et je vis au milieu du trône et des quatre animaux, et au milieu des vieillards, un Agneau debout comme égorgé, ayant sept cornes et sept yeux, qui sont les sept Esprits de Dieu envoyés par toute la terre. »

On remarque en bas :

  • L'Agneau ouvre le livre.
  • Premier sceau : le vainqueur au cheval blanc.
  • Deuxième sceau : le cheval roux et la guerre.
  • Troisième sceau : le cheval noir et la famine.
  • Quatrième sceau : le cheval livide et la mort.
  • Cinquième sceau : les âmes des martyres.
  • Sixième sceau : le tremblement de terre.

Deuxième pièce

Quatrième trompette : l'Aigle de malheur.

Incomplète

  • Personnage disparu.

En haut

  • Les quatre vents, dont il ne reste qu'un fragment.
  • La foule des élus.
  • Septième sceau : les sept trompettes.
  • L'Ange à l'encensoir.
  • L'Ange vide son encensoir.
  • Première trompette : la grêle et le feu ; dont il ne reste qu'un fragment
  • Deuxième trompette : le naufrage.

En bas

  • Troisième trompette : l'Absinthe.
  • Quatrième trompette : l'Aigle de malheur.

Verset 8,13 "Alors je regardai, et j'entendis la voix d'un aigle qui volait au milieu de l'air et disait à haute voix : « Malheur, malheur, malheur aux habitants de la terre, à cause des autres voix des autres anges qui doivent donner de la trompette. » Le triple malheur qu'apporte l'aigle est rendu, sur la tenture, par la ville détruite et les mots de malheur (en latin "Ve, Ve, Ve") tissés sur le phylactère que l'oiseau, de très grande taille, tient dans ses pattes et son bec. (C'est le seul phylactère de la tenture qui porte une inscription.)

  • Cinquième trompette : les sauterelles.
  • Sixième trompette : les Anges de l'Euphrate.
  • Les myriades de cavaliers.
  • L'Ange au Livre.
  • Saint Jean mange le Livre.

Troisième pièce

La Bête de la mer

(1 grand personnage et 14 tableaux)

  • Un grand Personnage sous un baldaquin.

En haut :

  • La mesure du Temple.
  • les deux Témoins.
  • La mort des deux Témoins.
  • Joie des hommes devant les Témoins morts.
  • Les Témoins ressuscitent.
  • Septième trompette : l'annonce de la victoire.
  • La Femme revêtue du soleil.

En bas :

  • Saint Michel combat le Dragon.
  • La Femme reçoit des ailes.
  • Le Dragon poursuit la Femme.
  • Le Dragon combat le serviteur de Dieu.
  • La Bête de la mer.

« (13:1) Alors je vis surgir de la mer une Bête ayant sept têtes et dix cornes, sur ses cornes dix diadèmes, et sur ses têtes des titres blasphématoires. (2) La Bête que je vis ressemblait à une panthère, avec les pattes comme celles d’un ours et la gueule comme une gueule de lion ; et le Dragon lui transmit sa puissance et son trône et un pouvoir immense. »

Jean de Bruges a représenté le sceptre royal portant une fleur de lys pour signifier clairement la transmission du pouvoir.
  • L'adoration du Dragon.
  • L'adoration de la Bête.

Quatrième pièce

(1 grand personnage et 14 tableaux.)

  • Un grand Personnage sous un baldaquin.

En haut :

  • Nouvelle adoration de la Bête
  • La Bête de la terre fait tomber le feu du ciel.
  • L'adoration de l'image de la Bête.
  • Le chiffre de la Bête.
  • L'agneau sur la montagne de Sion.
  • Le chant du cantique nouveau.
  • Un ange annonce une bonne nouvelle.

En bas :

  • Un deuxième ange annonce la chute de Babylone.
  • Un troisième ange et l'Agneau.
  • Le sommeil des Justes.
  • La maison des Élus.
  • La cuve déborde.
  • La vendange des réprouvés.
  • Les sept dernières plaies et les harpes de Dieu.

Cinquième pièce

La chute de Babylone

Incomplète

  • Grand Personnage

En haut :

  • Les anges reçoivent leurs coupes.
  • La première coupe versée est sur la terre.
  • La deuxième coupe sur les eaux.
  • La quatrième coupe versée sur le soleil (un fragment).
  • Les cinquième et sixième coupes versées sur le trône et sur l'Euphrate.
  • Les grenouillles.
  • La septième coupe est versée dans l'air.

En bas :

  • La grande Prostituée sur les eaux.
  • La Prostituée sur la Bête.
  • La chute de Babylone envahie par les démons.
  • L'Ange jette une meule dans la mer.
  • La Prostituée condamnée.
  • Les noces de l'Agneau.
  • Saint Jean et l'Ange (important fragment).

Sixième pièce

La nouvelle Jérusalem

Incomplète

  • Personnage disparu.

En haut

  • Le verbe de Dieu et la Cuve de l'ardente colère de Dieu.
  • Les oiseaux dévorent les impies.
  • le Verbe de Dieu charge les Bêtes.
  • Les Bêtes sont jetées dans l'Étang de feu.
  • Le Dragon est enchaîné pour mille ans.(fragment)
  • Les Juges.
  • Satan assiège la Ville.

En bas:

  • Le Diable est jeté dans l'Étang de feu.
  • Le Jugement dernier.
  • La Jérusalem nouvelle.
  • La mesure de la Jérusalem nouvelle.
  • Le fleuve coulant du trône de Dieu.
  • Saint Jean devant l'Ange. (fragment)
  • Saint jean devant le Christ. (fragment)

Notes et références

  1. Dont une Apocalypse du XIIe siècle, exécutée au monastère de Bethléem près de Cambrai.

Sources

  • « La Tenture de l'Apocalypse d'Angers » dans Cahier de l'inventaire 4, 1987, Inventaire Général, SPADEM, 2e édition. (ouvrage publié avec le concours du Centre national des lettres)
  • Inventaire général, 1996, Association pour le développement de l'inventaire général. (Avec des clichés de l'envers de la tapisserie, clichés inversés permettant de voir les couleurs de la tapisserie identiques, ou presque, à celles d'origine.)
  • Guy Massin-Le Goff (dir.) et Étienne Vacquet (dir.), Regards sur la tapisserie, Actes Sud, 2002. (Association des conservateurs des antiquités et objets d'art de France)
  • « L'Apocalypse d'Angers » dans Dossier de l'art, no 31, août 1996.
  • Louis Réau, Iconographie de l'art chrétien, Presses universitaires de France, 1955

Voir aussi

Bibliographie

  • Paule Amblard, L'Apocalypse de saint Jean, éditions Diane de Selliers, 2010, 405 p.

Articles connexes

Religion :

Art :

Histoire :

Liens externes


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