Toussaint-Guillaume Picquet de la Motte

Toussaint-Guillaume Picquet de la Motte
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Toussaint-Guillaume Picquet Comte de la Motte
Toussaint-Guillaume Picquet de la MotteGravure de Augustin de Saint-Aubin d'après Cochin
Toussaint-Guillaume Picquet de la Motte
Gravure de Augustin de Saint-Aubin d'après Cochin

Surnom La Motte-Picquet
Naissance 1er novembre 1720
à Rennes
Décès 10 juin 1791 (à 70 ans)
à Brest
Origine Français, Breton
Allégeance Royaume de France Royaume de France
Arme Marine royale
Grade Lieutenant Général
Années de service 1735 - 1787
Conflits Guerre de Succession d'Autriche
Guerre de Sept Ans
Guerre d'indépendance américaine
Commandement La Renommée
Le Solitaire
Le Robuste
Le Saint Esprit
L'Annibal
Faits d'armes Bataille d'Ouessant
Bataille de la Grenade
Siège de Savannah
Combat de la Martinique
Distinctions Grand'croix de l'ordre de Saint-Louis
Hommages Une avenue parisienne
Une station de métro
Quatre bâtiments de la Marine nationale française
Famille Blason Famille Picquet.svg Picquet de La Motte

Toussaint-Guillaume Picquet, comte de la Motte[Note 1],[Note 2], dit La Motte Picquet, né le 1er novembre 1720 à Rennes (Ille-et-Vilaine) et mort le 10 juin 1791 à Brest, est un marin français du XVIIIe siècle. Au cours d'une carrière de plus de cinquante ans, sous les règnes de Louis XV et Louis XVI, et pendant la Guerre de Sept Ans et la Guerre d'indépendance des États-Unis, il se distingua lors des 28 campagnes auxquelles il prit part. Respecté et craint par ses adversaires, il n'hésitait pas à engager le combat, même lorsque ses forces étaient bien inférieures. Commandeur (1780), puis grand'croix de l'ordre de Saint-Louis (1784), il décède au début de la Révolution française.

Sommaire

Biographie

Origines et famille

La Motte-Picquet est né dans une famille de petite noblesse bretonne.

Son gran-père, Jean Picquet, seigneur de la Motte, était greffier civil en chef au Parlement de Bretagne en 1684, secrétaire du roi en sa chancellerie de Bretagne en 1698, et sa grand-mère Marie-Josèphe Le Clavier. Il meurt en 1711.

Son père Guy Picquet, seigneur de la Motte, conseiller au Parlement de Bretagne depuis 1701 épouse Julie-Rose Robert de la Bellangeraye, et posséderait la châtellenie de Launay-du-Han[1] sur l'actuelle commune de Montreuil-le-Gast. Guy Picquet obtient du roi en 1726 la confirmation de l'érection de Launay en châtellenie et le changement du nom de Launay-du-Han en Launay-Picquet. Il meurt le 15 octobre 1753, à l’âge de 75 ans.

Jeunesse et débuts dans la marine royale

Entré aux gardes-marines de Brest le 11 juillet 1735[2], à l'âge de 15 ans, il embarque en 1737 à bord de La Vénus envoyée se battre contre les Salétins, des corsaires barbaresques[3]. Nommé sous-brigadier des gardes de la marine le 1er janvier 1743 et aide d'artillerie, le 10 décembre suivant, après deux croisières dans la Manche et sur les côtes d'Irlande[4] à bord du Mercure, sous les ordres de Dubois de La Motte, dans l'escadre du Comte de Roquefeuil[2].

Il avait déjà fait neuf campagnes au Maroc, en mer Baltique et aux Antilles[2], lorsqu'en janvier 1745, il embarque sur la frégate La Renommée, commandée par le capitaine de vaisseau Guy François de Kersaint[3]. Le 6 février, La Renommée part de Brest pour aller livrer des dépêches à Louisbourg (Terre-Neuve), alors sous blocus anglais[2]. Profitant de la brume et des glaces qui empêchaient les anglais d'effectuer leur descente, la frégate parvient à mouiller en baie des Castors non loin de Louisbourg, mais elle ne peut éviter l'affrontement contre deux frégates de 44 canons, et six navires corsaires anglais.

L'année suivante, alors que cette frégate revenait, pour la troisième fois, du Canada en Europe, après avoir livré deux combats aux Anglais, elle tombe, pendant la nuit du 16 juin 1746, sur l'escadre de l'amiral Anson, qui venait d'échouer dans sa tentative sur Lorient[3]. L'amiral anglais détache contre elle une frégate de 36 canons, qui est démâtée et obligée de se retirer. Une deuxième frégate subi le même sort. Celle-ci est remplacée par un vaisseau de 70 canons, qui lâche plusieurs bordées contre La Renommée.

Kersaint, blessé grièvement, fait appeler les officiers, et croyant avoir assez fait pour l'honneur du pavillon, il leur propose de se rendre. « Est-ce pour cela que vous m'avez fait venir ? demande La Motte-Picquet; en ce cas je retourne à mon poste[5]. » Kersaint étant hors d'état de diriger le combat, La Motte-Picquet prend le commandement, et réussit à faire rentrer la frégate à Port-Louis. Blessé lui-même, il a, au cours du combat, la joue arrachée par un coup de canon, qui coupa son chapeau au ras de la tête[5].

Il embarque ensuite comme second, sous les ordres du commandant Mézédern, sur le Cumberland, un frégate de 36 qui quitte Brest le 24 janvier 1748, à la destination des îles de France et de Bourbon. Après un escale à La Corogne, le bâtiment français croise une frégate anglaise de 36 canons, qui la combat pendant tout un jour à portée de pistolet. Vingt-cinq hommes sont tués ou blessés côté français. Le feu ayant pris à bord de la frégate anglaise, elle est obligée d'abandonner son adversaire. Après 122 jours de traversée, elle arrive à Bourbon, puis à l'île de France, d'où elle partit pour l'Inde, le 20 octobre 1748[6].

La paix d'Aix-la-Chapelle, qui est conclue en octobre 1748, ne ralentit pas l'ardeur de La Motte-Picquet. Son tempérament ne lui permettait pas de repos, et il ne quittait un bâtiment que pour s'embarquer sur un autre. Promu lieutenant de vaisseau en 1754, il navigue en mer des Antilles, dans l'Atlantique et en mer des Indes.

Guerre de Sept Ans (1756 - 1763)

Article principal : Guerre de Sept Ans.

Pendant la Guerre de Sept Ans, La Motte-Picquet se distingue à nouveau. À la reprise des hostilités, en 1755, La Motte-Picquet est nommé au commandement de la corvette La Sensible, avec laquelle combat pendant une heure contre une frégate anglaise de trente-six canons, qu'il force de l'abandonner. Au mois d'octobre de l'année suivante, il est fait chevalier de Saint-Louis[5].

En 1758, les côtes françaises sont soumises au blocus de la flotte anglaise, qui tente même plusieurs débarquements et prend brièvement Cherbourg. La Motte-Piquet se bat la même année devant le fort de Portzic, et doit se justifier de sa conduite auprès du comte d'Arnouville, Secrétaire d’État de la Marine[Note 3].

En 1760, commandant la prame La Charente de 26 canons de 36 livres, destinée à défendre les côtes et à escorter les convois de Brest à Rochefort, il propose au commandant d'une autre prame d'attaquer de compagnie un vaisseau anglais : ce que l'autre officier, plus ancien que lui, refuse[7]. Promu capitaine de vaisseau en 1762, il se retrouve à bord du Diadème.

La paix de Paris en 1763 ne met pas un terme à sa carrière militaire et il se distingue surtout dans les campagnes menées par les escadres des amiraux d'Orvilliers et Duchaffaut. En septembre 1763, il commande La Malicieuse, un frégate de 32 canons avec laquelle il fait une campagne de six mois au Canada[7]. Il prend part ensuite à plusieurs expéditions contre les corsaires de Salé et se fait remarquer en escadre d'évolution commandée par le comte d'Orvilliers, en 1772, pour ses qualités manœuvrières au commandement du Cerf Volant. En 1776, il reçoit le commandement de la frégate Le Solitaire, dans l'escadre de ce dernier, ayant à son bord le duc de Chartres, Louis Philippe d'Orléans (1747-1793).

Guerre d'indépendance des États-Unis

En 1775, il est appelé par le secrétaire d'État à la Marine, de Sartine pour aider à réorganiser la marine française[6]. La même année, le roi lui accorde une pension de 800 livres.

Lors de la guerre d'indépendance américaine, il sert sous les ordres du vice-amiral d'Estaing.

Il passe, en 1777 au commandement du Robuste, vaisseau de 74 canons, sur lequel il reçoit à Brest l'empereur Joseph du Saint-Empire[Note 4], qui se souvenant de lui avec intérêt, et lui écrira, pendant la guerre d'indépendance des États-Unis, pour le féliciter de ses succès[7]. Dans cette même campagne, un vaisseau anglais vint le héler pendant la nuit, d'une manière qui lui parut inconvenante. La Motte-Picquet, accoutumé à braver des forces supérieures, et peu disposé à supporter les insultes, le joignit au jour, et le força de lui envoyer à bord un officier pour lui faire des excuses.

Promu chef d'escadre le 22 mai 1778, il prend rang le 1er juin. Il est chargé, avec sept vaisseaux et trois frégates, de conduire au delà du Cap Finisterre un convoi américain, il remplit avec succès sa mission, sans avoir été attaqué par les Anglais. La même année, il participe à la bataille d'Ouessant, le 27 juillet, comme commandant du Saint Esprit, dans l'arrière garde de la flotte placée sous les ordres du comte d'Orvilliers. Rentré à Brest, il mène - en compagnie de deux vaisseaux de lignes et de plusieurs bâtiments légers - une croisière d'un mois dans les eaux anglaises, capturant treize navires ennemis[8]. Au mois d'avril 1779, il prend la mer avec L'Annibal, un vaisseau de 74 canons, quatre autres vaisseaux et quelques frégates, et escorte jusqu'à la Martinique un convoi de quatre-vingts navires; aussitôt après il rejoint le vice-amiral d'Estaing, et prend part à la prise de la Grenade, le 4 juillet 1779[6],[8], ainsi qu'à la victoire remportée à la fin de juin sur le vice-amiral Byron. L'Annibal, est est très endommagé. Il conseille en vain à d'Estaing de lancer la poursuite de l'escadre anglaise vaincue.

Combat de la Martinique, 18 décembre 1779

Le combat de la Martinique, le 18 décembre 1779 est un brillant succès de La Motte-Picquet qui repousse une forte escadre anglaise avec seulement trois vaisseaux[Note 5].
Article principal : Combat de la Martinique (1779).

Après s'être concerté avec le général Lincoln, le comte d'Estaing charge La Motte-Picquet d'effectuer, à la fin du mois d'août 1779, avec une escadre de sept vaisseaux, le débarquement des troupes[Note 6] destinées faire le siège de Savannah (Géorgie). Le siège ayant échoué, il fait voile avec trois vaisseaux pour la Martinique. Il y était occupé à réparer ses bâtiments qui avaient beaucoup souffert dans l'expédition de Savannah, lorsque, le 18 décembre 1779, des signaux de la côte lui annoncent qu'un convoi de vingt-six navires français, escorté par une frégate, était poursuivi par une flotte anglaise de treize vaisseaux et une frégate, commandée par l'amiral Hyde Parker, dans le canal de Sainte-Lucie[9]. L'officier que La Motte avait envoyé pour en informer le marquis de Bouillé, gouverneur de la Martinique, n'eut pas le temps de revenir que La Motte-Picquet avait déjà fait hisser les voiles de L'Annibal. Il se porte seul à la rencontre des Anglais, et attaque la tête de l'escadre ennemie. Après avoir fait le plein de munitions, Le Vengeur et Le Réfléchi viennent rejoindre L'Annibal, qui combattait depuis près de deux heures, contre le HMS Conqueror et le HMS Elizabeth. Pendant quatre heures, les trois vaisseaux français soutiennent le feu de dix vaisseaux anglais, dont sept tiraient quelquefois ensemble sur L'Annibal. La nuit venue met un terme aux combats, et l'amiral anglais envoie un signe de ralliement à ses vaisseaux; La Motte-Picquet rentre au Fort-Royal, avec la frégate et la plus grande partie du convoi.

Le combat de la Martinique se termine par une demi-victoire française. Bien inférieur en nombre La Motte-Piquet parvient à sauver le majeur partie du convoi marchand[Note 7] et à rentrer avec l'ensemble de ses vaisseaux dans Fort-Royal. Les Anglais doivent déplorer la perte du capitaine du HMS Conqueror, de cinq officiers et environ deux cents hommes de ce vaisseau sont tués, ainsi que de deux de leurs vaisseaux qui sont démâtés. Impressionné[Note 8], l'amiral Hyde Parker envoie un message de félicitations à La Motte-Picquet pour cette action.

« La conduite de Votre Excellence dans l'affaire du 18 de ce mois justifie pleinement la réputation dont vous jouissez parmi nous, et je vous assure que je n'ai pas été témoin sans envie de l’habileté que vous avez montré à cette occasion. Notre inimitié est passagère, et dépends de nos maîtres [rois], mais votre mérite a gravé sur mon cœur la plus grande admiration à votre égard. Je prendrai toujours le plus grand soin pour que vos parlementaires et vos prisonniers soient bien traités, et je saisirai avec plaisir toutes les occasions qui pourront se présenter pour vous donner des preuves de la considération et de l’estime avec lesquels je suis de Votre Excellence. »[Note 9]

Dans le récit qu'il fait du combat, La Motte-Picquet n'oublie pas de rendre hommage à ses équipages[Note 10], et insiste pour qu'ils aient une part des prises effectuées.

Campagnes aux Antilles (1780)

Au mois de janvier 1780, La Motte-Picquet reprend la mer avec six vaisseaux et six frégates, pour croiser dans les îles anglaises des Antilles. Il rentre au bout d'un mois, ramenant une grande quantité de prises, et après avoir été chassé plusieurs fois par quinze vaisseaux de ligne anglais, sans subir aucune perte[10].

Au mois de mars de la même année, il sort à nouveau de la Martinique avec quatre vaisseaux, pour escorter jusqu'à Saint-Domingue un convoi de quatre-vingts navires marchands[10]. Le 20 mars, soit sept jours après son départ, il rencontre trois vaisseaux anglais aux ordres du commodore Cornwallis dont il ordonne la chasse. Comme l'année précédente, il engage le combat seul avec son vaisseau, combat les Anglais pendant plusieurs heures, avant d'être rejoint par son escadre. Le combat se poursuit toute la nuit mais, atteint par un biscaïen dans la poitrine, il reste quelques heures sans connaissance. Le lendemain, un calme plat empêche les deux escadres de manœuvrer. Le vent étant revenu vers le soir, la chasse est de nouveau ordonnée mais trois autres vaisseaux anglais et plusieurs frégates viennent en renfort. La Motte-Picquet est alors obligé à son tour de s'engager dans une fuite dans laquelle, les trois vaisseaux anglais qui avaient été tellement endommagés, ne peuvent le suivre. Il rentre à bon port, sans avoir été inquiété, où le convoi l'avait précédé.

Retour en Europe

La bataille du cap Spartel, en 1782, est le dernier grand engagement auquel participe La Motte-Picquet.

Après cette expédition, La Motte-Picquet part rejoindre l'armée combinée de Cadix, commandée par le comte de Guichen, et revint presque aussitôt en Europe avec d'Estaing. Il profite de son retour à Brest en 1781 pour faire l'acquisition d'un des plus beaux hôtels particuliers de la ville[Note 11].

Le 25 avril 1781, La Motte-Picquet appareille de Brest à bord de L'Invincible avec six vaisseaux et deux frégates, pour aller croiser sur les côtes d'Angleterre. Le 2 mai, il rencontre un convoi de trente navires marchands, chargé du riche butin fait par les Anglais à Saint-Eustache, et escorté par quatre vaisseaux sous les ordres de l'amiral Rodney et du commodore Hotham, qui se sauvèrent en apercevant l'escadre française. Vingt-six bâtiments son capturés et amenés à Brest. Vendus en masse à des négociants de Bordeaux, il rapportent environ huit millions de livres[Note 12],[11]. Satisfait de ses services, Louis XVI lui accorde une pension de 3 000 livres sur le Trésor royal.

Le 30 mai 1781, il écrit au ministre de la marine.

« Je ne puis vous depeindre l'allégresse que vous avez repandue en ce port en annonçant la vente des prises que j'y ai conduites. Un chacun bénit le nom du Roy et de son ministre, je partage moi môme l'enthousiasme : tout le monde veut venir sur le Terrible; si je sortois en ce moment, je pourrois faire des miracles[12]. »

Depuis cette époque jusqu'à la paix, La Motte-Picquet commande une escadre de douze vaisseaux, dans la flotte combinée, soit en croisière sur les côtes d'Angleterre, soit au siège de Gibraltar. Il est promu au grade de Lieutenant général des armées navales en janvier 1782.

Le 20 octobre 1782, il commande les quinze vaisseaux français de la flotte franco-espagnole - placée sous les ordres du comte de Guichen et de Don Luis de Córdova - qui combat au cap Spartel, au large du Maroc. Commandant L'Invincible, il attaqua le premier la flotte anglaise de l'amiral Howe. Le combat - dont l'issue demeure indécise - dure jusqu'à la nuit, mais les Anglais sont contraints de prendre la fuite. Au mois d'avril 1783, il ramena son escadre à Brest, où il désarma.

La Motte-Picquet avait été décoré du cordon rouge de Commandeur[Note 13] de l'ordre royal et militaire de Saint-Louis, en 1780, à l'occasion de son combat du Fort-Royal, et lieutenant général des armées navales en janvier 1782; il est nommé grand'croix en 1784. Il reçoit, en 1787, une pension de 1 000 livres sur le budget des Invalides.

Décès

Cependant, il ne profite pas longtemps de ces avantages. Après une carrière militaire exceptionnellement longue, de plus de cinquante ans, la fatigue et les violentes attaques de goutte auxquelles il était sujet précipitent sa mort, le 11 juin 1791 à Brest, à l'âge de 70 ans. Il est inhumé dans le cimetière de la ville.

Jugement par ses biographes

Buste de La Motte-Picquet

La plupart de ses biographes s'accordent pour dire que, malgré un physique peu avantageux, La Motte-Picquet possédait des qualités de marin et de commandant hors du commun, faisant de lui l'un des meilleurs officiers de marine français de son temps.

Pour Louis-Mayeul Chaudon (1822):

« Ferme dans le commandement, mais bien moins jaloux de sa gloire que du bien de son pays, la Motte-Picquet s'empressait toujours de céder a celui qui lui faisait voir que l'on pouvait faite mieux que ce qu'il avait ordonné ; et sa vie est pleine de traits qui ne font pas moins d’honneur à son caractère qu'a sa bravoure.
La Motte était très-petit, très maigre et fort laid: en revanche il avait beaucoup d'esprit, et ses yeux étaient pleins de feu. Il avait un grand sang-froid dans l'action, son activité était extraordinaire, et son audace était peu commune[13]. »

Le biographe du XIXe siècle, Amédée Gréhan abonde dans le même sens :

« La Motte était très-petit, très-maigre et assez laid : en revanche il avait beaucoup d'esprit, et ses yeux étaient pleins de feu ; il était en effet d'une vivacité extrême, et qui dégénérait souvent en emportement. Mais des marins qui ont constamment servi à côté de lui pendant la guerre d'Amérique attestent qu'il conservait dans l'action un sang-froid imperturbable. Au reste, sa colère durait peu, surtout quand il avait tort, parce qu'il était naturellement très-bon, juste et d'une loyauté rare.
Cet homme si intrépide ne croyait pas à la lâcheté. Ces qualités peuvent donner la mesure de la confiance et de l'attachement qu'il inspirait à tous ceux qui servaient sous ordres. On peut affirmer que peu de marins français ont autant fait pour l'honneur de leur pavillon et pour l'intérêt du commerce que La Motte, pendant quarante-six ans de service, et dans vingt-huit campagnes, [...]. »[14]

Chaudon n'hésite pas à le comparer avec les plus grands officiers de marine français :

« Il [...] fut le digne émule des braves commandants à qui la France avait confié l'honneur de son pavillon. Il fit la guerre d'Amérique avec d'Estaing, Suffren, Rouillé, Tomay, Guichen et quelques autres dont l'histoire a consacré les noms[13]. »

Pour Antoine-Vincent Arnault, auteur des Éphémérides,

« La marine française n'a pas compté d'officiers plus intrépides ni plus habiles que le comte de Lamotte-Picquet. […] Les deux mondes furent témoins de ses exploits. Dans ses luttes fréquentes et obstinées avec la marine anglaise, il remporta des avantages dont quelquefois ses ennemis même l'envoyèrent féliciter. […] Pendant la guerre d'Amérique, il fut toujours en mer, toujours les armes à la main : la paix seule mit un terme à ses fatigues.
Très-petit, très-maigre et très-laid, il avait en revanche beaucoup d'esprit. Son extrême vivacité dégénérait souvent en accès de colère, qui duraient peu d'ailleurs, dans les circonstances graves, son sang froid ne se démentit jamais. On dit que cet homme si brave ne croyait pas à la lâcheté, genre d'incrédulité qui n'honorait pas moins ses soldats que lui-même. »


L'éloge suivant fut écrit en son honneur[13],[15] :

Marin dès sa première aurore,
Guerrier cher même à ses rivaux,
La France sait ce que tu vaux,
Et l'Angleterre mieux encore.

Honneurs et postérité

La frégate La Motte-Picquet de retour de la mission Héraclès (1er juillet 2002)

La Motte-Picquet a donné son nom à :

Ainsi qu'à quatre navires de la Marine nationale :

En juillet 1931, des marins brestois décident d'apposer une plaque commémorative sur son ancien hôtel particulier. Conçue par André Maurice, architecte de l'École navale, elle est inaugurée par le ministre de la Marine militaire Charles Dumont, le 11 novembre 1932[16].

Notes

  1. Son nom complet est Jean Guillaume Toussaint Picquet, comte de la Motte de la Vinoyère.
  2. L'orthographe des noms propres n'ayant pas encore été fixé au XVIIIe siècle, on trouve son patronyme parfois orthographié La Mothe, et le nom de sa seigneurie Piquet.
  3. Lettre du 9 août 1758, au Ministre de la marine : «... Il serait bien facheux pour moy, après 24 ans de services, dans lesquels je n'ay jamais donné la moindre prise sur ma conduite, qu'une occasion ... qui, j'ose le dire, me fait honneur ... vous laissât quelques mauvaises impressions sur mon compte... »
  4. Pour des raisons de sécurité, ce dernier voyage sous le nom de Comte de Falkenstein (Prosper Levot, p. 128).
  5. Exposée au jardin botanique de Brest en l'An X. Monsieur de Trégomain, lieutenant de vaisseau et petit-neveu de La Motte-Picquet, le demande, le 17 vendémiaire, au premier consul, qui lui fait répondre, le 5 brumaire, par le ministre Forfait, qu'il regrettait de ne pouvoir accéder à cette demande. « Le tableau que vous réclamez, dit le ministre, en restant exposé, dans un établissement public, aux regards de tous les marins, servira à exciter leur émulation et à enflammer leur courage; il ne saurait recevoir une destination plus utile. »
  6. Un contingent fort de 3 500 hommes
  7. Sur les 26 navires marchands, quatre sont brûlés et neuf seront pris par les Anglais.
  8. Hyde Parker dit, avec autant de regret que d'admiration: « Une seule manœuvre pouvait sauver la Motte-Picquet, et la Motte-Picquet était le seul qui pût la trouver. » (Louis-Mayeul Chaudon, p. 22)
  9. Lettre du 28 décembre 1779. Elle est citée partiellement par Guy de Moing, op. cit., p.328. Le texte original peut aussi se lire sur l'article Wikipedia en anglais sur le combat de la Martinique. L’extrait plus long cité ici est donné par Louis Édouard Chevalier, Histoire de la marine française pendant la guerre de l’indépendance américaine, précédée d'une étude sur la marine militaire de la France et sur ses institutions depuis le commencement du XVIIe siècle jusqu'à l'année 1877, Hachette et cie, Paris, 1877, p. 156.
  10. « ce sont des héros sans chemises, bas ni souliers, nus enfin et parés de leur seul courage. » (De La Monneraye, p. 144)
  11. Situé avenue de l'Amiral Réveillère, il est racheté en 1900 par les Caisses d'épargne, son actuel propriétaire.
  12. L'Annual register pour l'année 1782 (p. 105 ), porte à 600 000 ou 700 000 livres sterling la perte supportée par la compagnie d'assurance de Londres.
  13. Les Commandeurs et les Grand'croix de l'ordre royal et militaire de Saint-Louis portaient, en écharpe de l'épaule droite au côté gauche, leur croix suspendue au bas d’un cordon rouge feu de 11 cm de largeur.

Références

  1. Archives d'Ille-et-Vilaine, fonds de Piré
  2. a, b, c et d Prosper Levot, p. 127
  3. a, b et c Hennequin, p. 361
  4. Levot, p. 280
  5. a, b et c Hennequin, p. 362
  6. a, b et c Prosper Levot, p. 128
  7. a, b et c Hennequin, p. 363
  8. a et b Hennequin, p. 364
  9. Prosper Levot, p. 129
  10. a et b Hennequin, p. 366
  11. Hennequin, p. 368
  12. Bulletin de la Société de l'histoire de France, J. Renouard, 1854, p. 24
  13. a, b et c Louis-Mayeul Chaudon, p. 22
  14. Gréhant, p. 93-94
  15. Louis Philipon De La Madelaine, Des homonymes français, 1817, p. 437
  16. topic-topos.com

Bibliographie

Voir aussi

Liens externes


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