Traité de waitangi

Traité de waitangi

Traité de Waitangi

L'une des copies originales du traité

Le Traité de Waitangi (ou Te Tiriti o Waitangi en māori) fut signé le 6 février 1840 à Waitangi, dans la Baie des îles, en Nouvelle-Zélande, entre les représentants de la couronne britannique et les chefs de la Confédération des Tribus unies de Nouvelle-Zélande ainsi que d'autres chefs tribaux māori.

Le Traité, comme les néo-zélandais l'appellent simplement, fit formellement de la Nouvelle-Zélande une colonie britannique, et plus généralement peut-être considéré comme l'acte de fondation de la Nouvelle-Zélande en tant que nation. Ce traité, et l'interprétation qui peut être faite des mots forgés dans sa version en māori, occupe encore une place importante dans la politique néo-zélandaise moderne et reste l'objet de vives controverses.

Sommaire

Signature du Traité

Une vue d'artiste de la signature du traité de Waitangi

Le Traité fut d'abord proposé par le capitaine William Hobson à son retour de sa première expédition dans la région. Il reçut dès lors mandat du gouvernement britannique pour mettre son plan à exécution et reçu le titre de Lieutenant-Gouverneur. Revenu en Nouvelle-Zélande, il rédigea avec l'aide de James Busby, représentant britannique sur l'île, un traité qui fut traduit par le missionnaire Henry Williams (qui assura également la traduction orale du texte lors de la signature). Busby avait également participé à la rédaction de la déclaration d'indépendance de la Nouvelle-Zélande, signée par plusieurs chefs māori, en 1835.

Hobson était à la tête des plénipotentiaires britanniques. De la quarantaine de chefs māori présents, le rangatira (chef de haut rang) Hone Heke de l'iwi Ngā Puhi fut le premier à apposer son paraphe. Pour renforcer la légitimité du traité, huit copies furent rédigées et envoyées dans tout le pays pour collecter des signatures supplémentaires, à savoir :

  • la copie dite Manukau-Kawhia ;
  • la copie Waikato-Manukau ;
  • la copie Tauranga ;
  • la copie de la Baie d'Abondance (Bay of Plenty) ;
  • la copie d'Herald-Bunbury ;
  • la copie d'Henry Williams ;
  • la copie de la Côte Est ;
  • la copie originale.

Entre février et septembre 1840, plus de 50 réunions de discussion furent organisées, et près de 500 signatures supplémentaires furent collectées. Un nombre équivalent de chefs de tribus refusèrent de signer. La Nouvelle-Zélande fut officiellement déclarée une colonie distincte de la Nouvelle-Galles du Sud le 16 novembre 1840.

Le Traité échappa de peu à la destruction lorsque les bureaux gouvernementaux d'Auckland furent ravagés par le feu en 1841. Les différentes copies furent par la suite reliées et déposées dans un coffre dans les locaux du Secrétariat colonial à Auckland puis à Wellington, lors du changement de capitale.

Une liste de signataires fut produite en 1865, et le texte original en anglais fut publié en 1877, avec quelques lithographies des documents originaux qui furent remis sous clef sitôt après. Ce ne fut qu'en 1908 que le Dr. Hocken s'aperçut que ces documents avaient été endommagés par des rongeurs : la restauration dura jusqu'en 1913. La première véritable exposition publique du Traité eut lieu en 1940, lorsqu'il fut rapatrié et exposé au Musée du Traité de Waitangi pour la célébration de son centenaire.

Le Traité fut par la suite confié à la Bibliothèque Turnbull (en 1956), où il fut exposé dès 1961. De nouveaux travaux de restauration furent entrepris en 1966 et entre 1977 et 1980, jusqu'à son dépôt à la Banque nationale. Depuis 1990, le Traité est accessible au public dans la Salle de la Constitution des Archives Nationales néo-zélandaises, à Wellington.

L'anniversaire de la signature du Traité est désormais commémoré sous la forme d'un jour férié du nom de Waitangi Day, le 6 février. Le premier Waitangi Day eut lieu en 1934 mais ne fut officiellement férié qu'à partir de 1970. Cette commémoration a souvent été l'occasion pour les Māori de manifester contre le gouvernement et fait l'objet d'une controverse récurrente.

Signification et interprétation

Le Traité en lui-même est passablement court : il ne regroupe que trois articles.

  • L'article premier reconnaît la souveraineté de la Reine d'Angleterre sur la Nouvelle-Zélande ;
  • l'article deux garantit aux chefs signataires le maintien de leurs prérogatives et possessions immobilières. Il précise également que les Māori ne peuvent vendre leurs terres qu'à la Couronne ;
  • l'article trois garantit l'égalité des droits entre Māori et sujets britanniques.

Des différences significatives existent cependant entre les versions anglaise et māori du texte, ce qui est la source de difficultés récurrentes dans son interprétation et limite grandement sa portée : la critique principale repose sur la nuance entre les mots māori kawanatanga (soit gouvernorat, au sens littéral), qui décrit les pouvoirs cédés à la Reine à l'article premier, et rangatiratanga (soit commandement) qui est le pouvoir conservé par les chefs tribaux. La nuance entre les deux concepts pouvait paraître obscure à de nombreux Māori de l'époque, et certains se demandent si ces derniers avaient réellement conscience de ce sur quoi ils s'engageaient. Le concept de propriété foncière dans le monde māori étant sensiblement différent de celui en vigueur dans le monde anglo-saxon, cela devint effectivement source de problème : les chefs māori se voyaient comme des kaitiaki, ou gardiens de la terre, et confiaient dans la pratique l'usage d'une terre pour un temps et dans un but donnés. Il est possible que certains des signataires pensaient vendre l'usage de la terre plutôt que la terre elle-même.

Conséquences du Traité

À court terme, le Traité eut l'avantage d'empêcher l'acquisition de terres māori par quiconque autre que la Couronne. Cette provision avait pour but d'empêcher les marchés de dupes qui s'étaient déjà réalisés entre colons peu scrupuleux et indigènes dans d'autres parties de l'Empire, où les autochtones se voyaient expulsés de leurs terres ancestrales pour le prix de quelques pacotilles. En substance, le Traité avait donc pour but d'établir un système de registre foncier, avec la Couronne comme gardien et interlocuteur pour prévenir les éventuels abus. En prévision de la signature de ce Traité, la Compagnie de Nouvelle-Zélande effectua d'ailleurs plusieurs achats de terre précipités et installa plusieurs colonies, partant du principe que l'occupation aurait dès lors valeur de possession.

Les résultats de cette politique furent dans les premiers temps particulièrement positifs : les Māori voulaient vendre, et les colons voulaient acheter et la Couronne s'assurait dès lors que les transactions correspondaient à un prix correct pour l'époque. Cependant, les Māori devinrent avec le temps de moins en moins enclins à céder de nouvelles parcelles de leur territoire, alors que la Couronne subissait une pression de plus en plus forte de la part de colons acheteurs. Nombre de fonctionnaires furent alors impliqués dans des transactions douteuses, qui causèrent nombre de révoltes, elles-mêmes réprimées dans le sang et par la confiscation de nouveaux territoires. L'escalade aboutit aux guerres māori, à l'issue desquelles la plus grande partie de Waikato et Taranaki fut confisquée.

Le rôle de supervision fut par la suite confié aux tribunaux fonciers indigènes, renommés par la suite tribunaux fonciers māori (Māori Land Court). Les communautés māori commencèrent cependant rapidement dans les années 60 et 70 à se plaindre des abus et des violations continues du Traité et des législations subséquentes par le gouvernement, ainsi que de décisions jugées inéquitables (ou à tout le moins excessivement défavorables) rendues par le Tribunal foncier māori et qui expropriait les Māori de leurs terres. Le Tribunal de Waitangi fut établi par agrément royal du 10 octobre 1975. Le Treaty of Waitangi Act qui lui donnait naissance avait pour but de réaffirmer les principes énoncés dans le Traité et de créer une juridiction capable de juger des violations avérées de celui-ci. Le mandat du Tribunal, limité à l'origine aux conflits récents, fut à partir de 1985 étendu pour couvrir tous les conflits fonciers depuis 1840, y compris durant les guerres māori.

Le Traité aujourd'hui

Sa brièveté et son champ limité ne sauraient conférer au Traité valeur de constitution. Il fait cependant partie du mythe fondateur de la nation néo-zélandaise, et la vie politique nationale fait encore fréquemment référence aux principes ou à l'esprit du Traité, bien que l'interprétation de ce concept varie avec les interlocuteurs. Si pour certains il consacre l'union de deux peuples en un seul (Hobson est cité comme ayant déclaré « Nous sommes désormais un peuple » le jour de la signature) il est, pour d'autres, le symbole d'un partenariat entre la Couronne et les Māori. Il n'en reste pas moins qu'au vu de la pratique des puissances coloniales (y compris la Grande-Bretagne) en vigueur dans le monde à l'époque de sa signature, ce texte reste un modèle de progressisme dans son approche des relations entre colons et peuples indigènes.

Le Traité n'est pas, toutefois, simplement un document historique sans valeur ni signification juridique à l'heure actuelle. La loi de 1975 (Treaty of Waitangi Act) reconnaît au Traité un statut officiel au sein de la législation néo-zélandaise, confirme sa validité juridique contemporaine, et établit le Tribunal de Waitangi. Ceci permet aux Māori de porter à l'attention du tribunal toute violation du Traité commise par les autorités pakeha depuis 1840, et d'obtenir réparation.

Le 25 juin 2008, un accord, communément appelé Treelords a été signé au Parlement de Wellington rendant à sept tribus maories 176 000 hectares de forêts dans le centre de l'île du Nord. Le montant de l'opération s'élève à 319 millions de dollars néo-zélandais (environ 200 millions d'euros)[1],[2].

Références

  1. Des Maoris indemnisés par la Nouvelle-Zélande, Le Monde, 26 juin 2008.
  2. Une carte expliquant l'accord : The Treelords deal in 168 words, New Zealand Herald, 26 juin 2008.

Liens externes

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