Völsa thatt

Völsa thatt

Völsa þáttr

Le Völsa þáttr (« Dit de Völsi ») est un þáttr conservé dans le Flateyjarbók, où il fait partie de l’Ólafs saga hins helga hin mesta. Il a sans doute été composé au XIVe siècle[1]. L'un des þættir évoquant la conversion de la Scandinavie au christianisme, le Völsa þáttr rapporte la persistance d'un culte phallique dans une région reculée de la Norvège et l'intervention du roi Óláfr Haraldsson, le futur saint Óláfr, pour y mettre un terme.

Sommaire

Récit

Un couple de fermiers vivait en Norvège, avec leur fils, leur fille et deux esclaves. Leur cheval mourut, et ils le préparèrent pour le manger, selon la coutume païenne. L'esclave coupa le pénis (vingull) pour le jeter, mais le fils du fermier s'en empara et le montra aux femmes de la maison en tenant des propos obscènes. La fille lui demanda de s'en débarrasser, mais sa mère le prit et le déposa dans un linge, avec des herbes pour le conserver.

Elle sortait Völsi chaque soir et lui adressait une prière, le considérant comme son dieu (guð sinn). Le pénis grossit au point de pouvoir se tenir tout seul à ses côtés. Tous les soirs, il passait de main en main et chacun devait à à son tour réciter une strophe incantatoire.

Le roi Óláfr en entendit parler et se rendit à la ferme, accompagné de Finnr Árnason et de Þormóðr Kolbrúnarskáld. Ils étaient déguisés et prétendirent se nommer Grímr. Au moment du repas, la fermière apporta Völsi et récita une strophe s'achevant par : « Que mörnir accepte ce sacrifice » (Þiggi mörnir þetta blæti). Chaque membre de la maisonnée en fit autant, certains avec réticence, d'autres avec obscénité. Leurs hôtes les imitèrent, mais le roi termina sa strophe en jetant le phallus au chien, qui s'en empara, au grand désespoir de la maîtresse de maison.

Óláfr quitta ensuite son déguisement, et convertit tout le foyer.

Interprétations

Un culte de la fertilité

Rödsten, pierres dressées en forme phallique, Grebo, Östergötland, Suède.

De nombreux chercheurs estiment que le Völsa þáttr témoigne d'un ancien culte de la fertilité, et se sont notamment interrogés sur la signification de Mörnir.

Folke Ström, constatant que le mot Mörn (féminin singulier) était utilisé en poésie scaldique comme synonyme de géante[2], et notamment de Skaði[3], épouse du dieu de la fertilité Njörðr, en a déduit que les Mörnir (féminin pluriel) seraient en conséquence des déesses de la fertilité, comparables aux dises[4].

E.O.G. Turville-Petre, qui juge cette interprétation peu recevable sur un plan philologique, retient quant à lui que Mörnir est aussi attesté comme le nom d'une épée[5] dérivé, selon lui, du verbe merja (« écraser »). Il rapproche ce nom de beytill, autre terme employé dans le þáttr pour désigner le pénis et qui pourrait provenir de bauta (« battre »), pour conclure que vingull, beytill, Völsi et Mörnir, désignent tous le phallus, qui est le symbole de Freyr, dieu représenté dans le temple d'Uppsla cum ingenti priapo (« avec un énorme phallus ») selon le témoignage d'Adam de Brême dans la Gesta Hammaburgensis Ecclesiae Pontificum [6].

Selon Régis Boyer, un culte phallique aurait existé en Scandinavie. Outre la représentation de Freyr chez Adam de Brême, en attesteraient les pierres nommées Rödsten, à Grebo, dans l'Östergötland ou un passage de la Morkinskinna (19) dans lequel le roi Magnús le Bon accuse le père du roi Haraldr l'Impitoyable d'avoir érigé un enclos autour d'un phallus de cheval. Le Völsa þáttr témoignerait en conséquence de « pratiques rituelles fort anciennes »[7]. Boyer souligne aussi le caractère sacré du cheval, que de nombreuses sources confirment, et son association avec Freyr, illustrée par exemple par la Hrafnkels saga Freysgoða[8].

Une invention tardive

Selon Klaud Düwel, le récit, comme les noms Völsi et Mörnir, n'auraient pas de caractère historique et seraient une invention tardive, datant du XIIIe ou XIVe siècle[9].

Notes

  1. Faulkes, Anthony, introduction de : Stories from the sagas of kings. London : Viking Society for Northern Research, University College London, 2007. P. XV. ISBN 978-0-903521-72-7.
  2. Il apparaît notamment dans une þula des géantes et dans la Þórsdrápa d'Eilífr Goðrúnarson (8), où les géants sont qualifiés d'« enfants de Mörn » (börn Mörnar).
  3. Dans la Haustlöng de Þjóðólfr ór Hvini (12), Þjazi est nommé « père de Mörn » (faðir Mörnar).
  4. Ström, Folke. Diser, nornor, valkyrjor : fruktbarhetskult och sakralt kungadöme i norden. Stockholm : Almqvist & Wiksell, 1954. P. 22 sqq. Cité dans E.O.G. Turville-Petre, Myth and religion of the North : the religion of ancient Scandinavia, Westport, Conn. : Greenwood Press, 1975, originally published : New York : Holt, Rinehart and Winston, 1964, p. 257, ISBN 0-8371-7420-1.
  5. Dans l’Ólafs saga Tryggvasonar de Snorri Sturluson (33).
  6. Turville-Petre, op. cit., p. 257-258.
  7. Boyer, Régis. Yggdrasill : la religion des anciens Scandinaves. Paris : Payot, 1991. (Bibliothèque historique). P. 74-75. ISBN 2-228-88469-3.
  8. Idem, p. 172-173.
  9. Düwel, Klaus. Das Opferfest von Lade : quellenkritische Untersuchungen zur germanischen Religionsgeschichte. Wien : Halosar, 1985. ISBN 3-900269-27-0. Cité par Rudolf Simek, Lexikon der germanischen Mythologie, Stuttgart : Kröner, 2006, ISBN 3-520-36803-X.

Édition et traduction

  • (vn) Völsa þáttr. In : Stories from the sagas of kings. With intr., notes and glossary by Anthony Faulkes. New ed., with intr., notes and glossary corr. and reformated and minor additions. London : Viking Society for Northern Research, University College London, 2007. ISBN 978-0-903521-72-7.
  • (fr) Le Dit de Völsi. In : L'Edda poétique. Textes présentés et trad. par Régis Boyer. Paris : Fayard, 2002. (L'Espace intérieur). ISBN 2-213-02725-0.

Lien externe

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