Wilhelm Fischer

Wilhelm Fischer

Wilhelm Fischer

Wilhelm Guenrikhowitsch Fischer
Wilhelm Guenrikhowitsch Fischer
Surnom alias William Fisher, alias noms de code "Frank", "Mark", alias Andrew Kayotis, alias Emil Robert Goldfus (Goldfuss, Goldfuß), alias Martin Collins, alias Rudolf Ivanowitsch Abel
Naissance 11 juillet 1903
Newcastle upon Tyne
Décès 15 novembre 1971 68 ans)
URSS
Origine Russie impériale, Grande-Bretagne, Prusse
Allégeance Guépéou-NKVD-MGB- Comité d'information près le Conseil des ministres, puis près le ministère des Affaires étrangères d'URSS -KGB
Arme Service des "illégaux" de l'espionnage extérieur soviétique
Grade Colonel
Service 1927 - 1968
Conflits Front de l'Est (Seconde Guerre mondiale), Guerre froide
Commandement Rézidiente, chef d'une Rézidientoura "illégale" - réseau clandestin d'espions soviétiques aux États-unis
Distinctions Ordre de Lénine
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3 Ordres du Drapeau rouge (militaire)
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Ordre du Drapeau rouge du travail
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Ordre de l'Étoile rouge
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Ordre de la Guerre patriotique
1re classe
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2e classe
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de multiples médailles
l’insigne du membre émérite des organes de sécurité d’État
Autres fonctions enseignant à l'École du Drapeau rouge du KGB (1963-1968)
Famille épouse - Eléna Stépanovna Lébédeva. Fille Evelyn née en 1929.
Image : Timbre soviétique de 1990 à l'effigie de l’espion sous le nom usurpé de Rudolph Abel

Wilhelm Guenrikhowitsch Fischer (en russe: Вильгельм Генрихович Фишер), né le 11 juillet 1903 à Newcastle upon Tyne en Grande-Bretagne, décédé le 15 novembre 1971 à Moscou, a été l'un des « illégaux » soviétiques les plus remarquables du XXe siècle, le chef d’un réseau clandestin d'espions soviétiques aux États-Unis sous les noms de code "Frank" et "Marc", ainsi que sous les identités usurpées d’Andrew Kayotis, de Martin Collins et d’Emil Robert Goldfus (également Goldfuss, Goldfuß). Lors de son arrestation par le FBI et du procès aux Etats-Unis en 1957 Fischer a usurpé l’identité] d’un autre collègue du KGB, le lieutenant-colonel à la retraite mort en 1955 Roudolf Ivanowitsch Abel (en russe Рудольф Иванович Абель), la gardant pour le restant de sa vie.

Sommaire

Biographie

Jeunesse et famille

Le futur espion naquit sous le nom de Wilhelm Fischer le 11 juillet 1903 au n°140 de Clara street, à Benwell, à Newcastle upon Tyne, en Grande-Bretagne.

Son père, Heinrich Fischer (Генрих Матвеевич Фишер), était un Allemand né en Russie impériale en 1871 (il mourut à Moscou en 1935).

Agitateur et compagnon de route de Lénine, Heinrich Fischer, le futur père de Wilhelm, avait été arrêté par la police politique de l’Empire russe, Okhrana, en 1889 et condamné à trois ans d'exil. En 1901, il avait émigré de Russie en Grande-Bretagne où pendant vingt ans, comme secrétaire d’une cellule du Parti social-démocrate, il organisait le mouvement syndical des ouvriers à Newcastle upon Tyne. Il faisait également de la contrebande des armes vers la Russie. En 1922 il a publié en allemand le livre « En Russie et en Angleterre » (« В России в Англии », Bericht über sein Leben und Wirken in Newcastle).

La mère de Wilhelm, Lubov Vassilievna (en russe Любовь Васильевна), était sage-femme.

Wilhelm avait un frère aîné : Heinrich Fischer junior.

En 1919, Wilhelm Fischer à l’âge de 16 ans réussit l'examen d'entrée à l'université de Londres (mais n’a pas poursuivi longtemps les études) et devint le sujet de sa Majesté George V. Pour le passeport britannique il a changé les nom et prénom allemands Wilhelm Fischer contre leurs équivalents anglais – William Fisher.

En 1920, toute la famille Fischer retourna en Russie bolchevique et, peu de temps après, le frère aîné de Wilhelm se noya. La mort de Lénine, en 1924, fit perdre les appuis politiques au père de Fischer qui passa de la capitale soviétique à la province de Vologda.

1920 – 1927 : premières années en Russie bolchevique

À Moscou à l’âge de 17 ans le jeune Fischer travailla d'abord comme traducteur au Komintern qui servait de vivier des personnels aux services secrets soviétiques et comme le réseau d’espionnage à l’étranger pour le compte du parti de Lénine. À cette période la théorie dominante était celle de la révolution permanente de Léon Trotski et de la propagation inexorable du brasier du communisme dans le monde entier jusqu’à la victoire finale universelle. Pour la première fois Fischer fut formé en méthodes d’espionnage par les tchékistes.

En 1924 en URSS Wilhelm réussit l'examen d'entrée à l’université orientaliste où il passa une année à la faculté des études hindoues. Malgré de bons résultats il n’a pas voulu continuer les études supérieures car tous les jeunes communistes ne rêvaient que d’une seule et unique chose : la lutte armée, la guerre mondiale révolutionnaire. En laissant tomber pour la seconde fois les études civiles, Wilhelm Fischer servit dans l'Armée rouge en 1925-1926, officiellement - comme opérateur radio au Premier régiment des télécommunications de la Circonscription militaire de Moscou. C’était le temps où l’Armée rouge commença la formation secrète des cadres militaires allemands sur le territoire de l’URSS en violation du traité de Versailles.

Après le service militaire Wilhelm n’a pas repris les études à l’université. Fischer travailla quelques temps à l’Institut de recherches de l’aviation militaire de l’Armée rouge.

1927 : entrée aux services secrets bolchevicks

En 1927 Wilhelm Fischer entra au Département étranger - INO (espionnage extérieur) du Guépéou, service de sécurité soviétique qui avait remplacé la Tcheka. Son premier poste d’élément opérationnel auxiliaire fut lié principalement aux télécommunications codées pour le Service des "illégaux" soviétique.

Le jeune tchékiste Wilhelm Fischer se maria à Moscou avec Eléna Stépanovna Lébédéva (en russe : Елена Степановна Лебедева), violoncelliste dans l'orchestre d'un théâtre pour enfants. Leur fille Evelyn naquit en 1929.

1931 – 1934 : première mission d’espionnage à l’étranger

En 1931, Wilhelm Fischer alla en Norvège pour sa première mission secrète longue à l’étranger, avec sa femme et sa fille. Il y travailla pour le compte des réseaux des « illégaux » sous le nom de code « Frank ».

Sujet britannique depuis 1919, William Fisher renouvela au Royaume-Uni son passeport britannique le plus simplement du monde. Ce document authentique à l’effigie du « british lion » permit à l’espion soviétique de voyager sans encombres sous son propre nom anglais dans différents pays européens (entre autres la Grande-Bretagne, la France, l'Allemagne, la Turquie). Wilhelm Fischer y participa à la mise en place du réseau des stations clandestines de radio. Pour des besoins opérationnels, de temps en temps, il se camouflait en artiste car il savait très bien dessiner et faire des photos.

1935 – 1938 : opérateur radio des Cinq de Cambridge

En 1934, Wilhelm Fischer revint en Union soviétique. Très rapidement, en 1935, il fut envoyé de nouveau à l'étranger en mission secrète. Comme opérateur radio-chiffreur il a rejoint un réseau clandestin en Grande-Bretagne et transmit de Londres à Moscou des informations qui lui venaient du groupe connu comme « Les Cinq de Cambridge » constitué autour de Kim Philby.

1938 : mission en Pologne

En 1938, à la veille de la Deuxième guerre mondiale, le tchékiste Wilhelm Fischer fut envoyé en mission secrète à Tchernovtsy, près de la frontière entre Bucovine, le territoire polonais occupé par les nazis et la Galicie (qui fut annexée par l’URSS en 1939) pour y participer au recrutement des agents secrets parmi les Allemands, Polonais et des minorités ethniques ukrainiennes.

1938 : promotion et disgrâce

Peu après le tchékiste Wilhelm Fischer rentra à Moscou pour une promotion. En 1938 il reçut les épaulettes du lieutenant de la sécurité d’État au NKVD (grade spécial correspondant à celui du commandant dans l’Armée rouge).

L’année 1938 en URSS fut une des périodes des « purges » staliniennes massives parmi les tchékistes qui par milliers étaient accusés sans preuves et exécutés par leur propre service. Wilhelm Fischer (William Fisher) eut beaucoup de chance, malgré ses vraies origines allemandes et sa réelle naissance en Empire britannique (nombreux étaient ceux pour qui on inventa de pareils détails « compromettants » avant de les fusiller).

Wilhelm Fischer fut « seulement » limogé du Département étranger du NKVD. Tombé en disgrâce relative, l’ancien lieutenant de la sécurité d’État déchu travailla dans la Chambre de commerce de l’URSS et puis dans des usines aéronautiques d’abord comme technicien, ensuite comme ingénieur.

1941 – 1945 : Grande guerre patriotique

C’est la guerre contre l’Allemagne hitlérienne qui avait valu à Wilhelm Fischer le retour aux services secrets soviétiques. En septembre 1941 il a été rappelé au NKVD à la 4ème Direction des missions spéciales dirigée par Pavel Soudoplatov, pour y prendre le poste du chef d’une unité des transmissions dans la brigade spéciale détachée. La Direction de Soudoplatov était en charge des liquidations physiques des « ennemis du peuple » à l’étranger et des opérations de sapes dans les territoires occupés par les nazis.

Dans la brigade détachée Fischer dirigea l’unité des « jeux radio » avec les Allemands à partir de 1942. Ces opérations spéciales consistaient à propager de la désinformation et à mettre en place les pièges pour les groupes infiltrés d’Abwehr, espionnage militaire nazi, en faisant travailler, depuis Moscou et sous le contrôle du NKVD, les opérateurs radio emprisonnés.

Pendant la guerre Wilhelm Fischer partagea un appartement à Moscou avec deux autres collègues, dont un certain Rudolf Abel, un « volksdeutsche » né en 1900 à Riga en Lettonie faisant partie de la Prusse impériale. C’est justement l’identité de ce collègue que Wilhelm Fischer usurpa par la suite lors du procès aux États-Unis en 1957. Leur troisième collègue tchékiste fut Kyril Khenkine, futur dissident et auteur d’un livre sur la vie de l’espion Wilhelm Fischer alias Rudolf Abel (Cyrille Chenkine, L'Espionnage soviétique : le cas Rudolf Abel, Fayard, 1981).

1946 – 1948 : de nouveau dans le service des « illégaux »

En 1946 Fischer a été transféré des personnels du MGB dans le Comité d'information près le Conseil des ministres d’URSS (plus tard près le ministère des Affaires étrangères). C’est ainsi que s’appelait le service des renseignements soviétiques après la deuxième Guerre mondiale. Sous le commandement opérationnel du colonel Alexandre Korotkov du Service des "illégaux" soviétique, Fischer suivit un programme spécial de formation pour sa future tâche clandestine aux États-Unis devenus à cette époque l’ennemi n°1 de l’URSS stalinienne.

1948 – 1957 : espion dans la clandestinité aux États-Unis

Le 12 octobre 1948 sous noms de code « Mark », Wilhelm Fischer quitta l’URSS pour les États-Unis où il entra le 16 novembre 1948 du territoire du Canada sous l’identité usurpée d’Andrew Kayotis, un authentique Américain mort en Russie.

Le salaire de l’espion « illégal » était de $500 par mois (équivalent à $3.570 en 2000) et il reçut encore $5.000 ($35.700 en 2000) pour établir la « couverture » de ces activités d’espionnage clandestin.

La tâche générale de Fischer était la réorganisation du réseau « illégal » d'espions aux États-Unis et l'établissement d’un système autonome des radiocommunications avec Moscou.

Konon Molody sur un timbre commémoratif de l'URSS en 1990

En 1946 Fischer a eu sous son commandement Konon Molody. Le jeune éclaireur Molody jouait le rôle subalterne et remplissait les tâches techniques dans la chasse secrète des nazis - criminels de guerre avant de repartir en Grande-Bretagne pour y créer son propre réseau des « illégaux » [1].

À ce moment-là les Américains savaient que les Soviétiques possédaient les armes nucléaires. La guerre froide et la course aux armements entre les pays de l’OTAN et ceux du Pacte de Varsovie étaient déjà lancées.

En 1948-1949 Fischer dirigea les opérations d’approche et du recrutement des scientifiques américains de niveau supérieur travaillant dans le nucléaire. Il le faisait sous le prétexte de la coopération « avec la communauté scientifique anti-fasciste internationale » sans faire apparaître son appartenance directe au KGB.

L'une des sources les plus importantes d'information de l’espionnage soviétique venant des laboratoires atomiques de Los Alamos était Théodore Alvin Hall (noms de code « PERSEUS », « MLAD »). Cet étudiant américain avait commencé à fournir les informations confidentielles lorsqu’il avait juste 19 ans parce qu'il « était inquiet des dangers du monopole américain des armes atomiques ». Fischer a rencontré personnellement Théodore Hall à New York en 1949 pour lui enlever ses derniers doutes et sentiments de culpabilité envers son pays.

Dans ses activités d’espionnage clandestin le colonel Fischer était secondé, entre autres, par un couple d’espions américain bien connus - Lona et Morris Cohens (noms de code « LESLY » et « VOLONTAIRE ») qui sont devenus ses amis intimes. Les époux Cohens étaient des stalinistes convaincus et ont recruté beaucoup d'informateurs. Ils ont rempli les fonctions des facteurs clandestins entre les scientifiques atomiques, y compris Théodore Hall, et leurs officiers traitants, dont Fischer.

En 1950 Wilhelm Fischer, prétendu photographe et peintre, s’est arrangé un studio d’artiste dans un appartement de Brooklyn sous l’identité usurpée d'un autre américain mort : Emil R. Goldfus.

Quand les époux Rosenberg ont été démasqués et arrêtés par le FBI en 1950, les Cohens s’étaient sauvés à Paris. Plus tard ils ont été arrêtés en Grande-Bretagne. Ils ont écopé de 20 ans d’emprisonnement mais ont été échangés par la suite.

Après plusieurs arrestations d’agents secrets soviétiques aux États-Unis, Fischer a été rappelé à Moscou en 1955 pour y subir pendant plusieurs mois les interrogatoires dans le service du contre-espionnage extérieur du KGB. Il a été lavé de tout soupçon et est reparti pour la suite de sa mission clandestine aux États-Unis. À cette occasion Fischer a demandé le rappel en URSS de son aide Hayhanen qui devait le trahir plus tard.

1957 : trahison et arrestation

L’opérateur radio Hayhanen (nom de code "Vick") avait été assigné au réseau de Fischer en 1952 pour remplacer un autre subalterne, Robert, mort sur son chemin aux États-Unis quand son bateau a coulé en mer Baltique]. Alcoolique, paresseux et indiscipliné, Hayhanen a fini par s’attirer les foudres du QG du KGB.

Début mai 1957, déjà sur son chemin de retour pour l’URSS où l’attendaient la disgrâce et les mesures disciplinaires, Hayhanen était allé à l’Ambassade américaine à Paris pour y demander l’asile en Occident.

Le « Centre » (QG) du KGB pressentant le danger potentiel venant de Hayhanen, avait ordonné encore en avril 1957 à Fischer de partir préventivement de New York et de se cacher dans un premier temps. Le colonel s'était sauvé en Floride où il est resté « en sommeil » pendant deux mois.

Après la confirmation de la trahison de Hayhanen, des agents du contre-espionnage extérieur soviétique ont surveillé le studio artistique du prétendu Goldfus à New York mais n'ont détecté aucune surveillance du FBI qui pourtant y était. Fischer était autorisé de retourner à New York.

Le vieux loup d’espionnage, Fischer pourtant ne se sentait pas en sécurité. Sans aller directement dans son studio new-yorkais où il était connu sous l’identité usurpée d'Emil R. Goldfus, le 13 juin 1957 Fischer s’est enregistré à l’hôtel « Latham » sous le faux nom de Martin Collins. Il y est passé une dizaine de jours sous la surveillance discrète du FBI sans la déceler. Le contre-espionnage américain voulait attendre la reprise des activités d’espionnage de Fischer pour le prendre en flagrant délit. Finalement il a été décidé de l’arrêter à cause d’une possibilité de sa fuite des États-Unis. L’arrestation de Fischer a eu lieu le 22 juin 1957.

L'histoire de la trahison de Hayhanen et de l’arrestation de Fischer est décrite en détails sur le site Web du FBI parmi les « Cas célèbres » [2].

1957 – 1961 : enquête, procès et emprisonnement aux États-Unis

Au début des interrogatoires au FBI, Wilhelm Fischer ne disait rien. Mais pour l’espionnage aux États-Unis il risquait la chaise électrique. Une fois réfléchi, il a changé de tactique.

D’abord, sans confirmer son appartenance à l’URSS, il a prétendu avoir trouvé en Allemagne pendant la guerre un magot en dollars américains, avoir acheté sur le marché noir les papiers d’identité d’Andrew Kayotis et d’Emil R.Goldfus, s’être fuit au Canada et de là s’être introduit illégalement aux États-Unis. En admettant les délits mineurs d’immigration illégale et d’usurpation d’identités américaines, il niait tout ce qui était en rapport avec l’espionnage.

Photo du vrai Rudolf Abel

Lorsque le FBI l’a confronté aux matériaux et appareillages d’espion trouvés chez lui et surtout aux témoignages de Hayhanen, Wilhelm Fischer a de nouveau changé de tactique. Cette fois il a soit disant admis être un ressortissant soviétique d’origine allemande mais a donné l’identité usurpée d’un autre collègue tchékiste - lieutenant-colonel à la retraite Rudolf Abel mort à Moscou en 1955.

Les preuves contre Fischer-Abel n’étaient pas directes et irréfutables. Certes, Hayhanen l’a dénoncé, mais la personnalité de ce témoin était trouble : alcoolique indiscipliné et amoral, traître. Certes, le FBI a trouvé le matériel d’espionnage dans le studio du prétendu artiste Goldfus, mais ne l’a jamais pris en flagrant délit d’espionnage, ni arrêté ses contacts, ni trouvé ses sources secrètes. Finalement, Fischer-Abel a été condamné à 30 ans de prison échappant à la peine de mort.

1962 : échange et retour en URSS

Le 10 février 1962 Fischer-Abel a été échangé sur le pont de Glienicke, à la frontière entre Potsdam (RDA) et Berlin-Ouest, contre un agent de la CIA, capitaine Francis Gary Powers, pilote américain capturé de l'avion espion U-2 abattu au-dessus du territoire de l’URSS le 1er mai 1960.

Cet échange a fait connaître dans le monde entier l’identité de Rudolf Abel usurpée par le colonel du KGB Wilhelm Fischer qui, de son côté, est resté dans l’anonymat total pendant des décennies encore.

Après un très court séjour en RDA, Wilhelm Fischer est parti en URSS pour y passer le reste de sa vie.

1962 – 1968 : gloire amère du colonel Abel

A son retour en URSS de la prison américaine et une fois passé la procédure d’interrogatoires musclés pour être sûr de sa loyauté, le vaillant éclaireur Wilhelm Fischer a repris le service au rang militaire du Colonel à la PGOU.

Vu le tapage médiatique en Occident autour de l’affaire « Abel », le pouvoir politique soviétique et le KGB ont décidé de faire de lui un des exemples du travail héroïque d’éclaireurs. Toujours sous l’identité usurpée de Rudolf Abel Wilhelm Fischer a été autorisé à donner des interviews aux médias des pays du Pacte de Varsovie. Le tout bien évidemment scrupuleusement organisé et orchestré par le KGB.

Wilhelm Fischer ne pouvait néanmoins pas être décoré des insignes de héros de l’Union soviétique car, malgré tout, il a échoué dans une mission, même à cause d’une trahison d’un autre. L'ex américain Emil R. Golfus n'a été décoré, si l'on peut dire, que de l'Ordre de Lénine pour le vol des secrets atomiques des États-Unis.

Bien évidemment, un espion grillé ne retourne quasiment jamais dans le service actif. Wilhelm Fischer comme beaucoup d'autres a dû se contenter des postes d'enseignant à l'Ecole du Drapeau rouge du KGB où il a côtoyé Konon Molody, Kim Philby, George Blake et d’autres espions grillés et transfuges connus.

En 1968 le colonel Fischer est parti à la retraite. On raconte qu’il aurait été assez critique par rapport à la société en URSS de la période de la stagnation bréjniévienne.

1971 : maladie et décès

Faits curieux et anecdotes

  • Sur l'initiative de Fischer en Angleterre, Kyril Khenkine, son compagnon de route depuis plusieurs années prit contact avec le célèbre physicien russe, Pyotr Kapitsa, futur prix Nobel de physique 1978. Khenkine croyait qu'il était très important pour Fischer de persuader Kapitsa de revenir de Grande-Bretagne en Union Soviétique. Mais une fois que Kapitsa fut rentré en URSS, son passeport lui fut confisqué par les autorités soviétiques et on l'empêcha de voyager à l'étranger, tout en lui accordant un grand nombre de privilèges et en faisant construire pour lui un institut de recherches. Dans les mémoires d'Andrei Sakharov, Kapitsa confirme l'incident et mentionne également le nom de Fischer.
  • On dit que les agents du contre-espionnage du KGB se relevaient pendant les derniers mois près du lit de Fischer mourant du cancer dans l’espoir d’entendre une confession éventuelle du son recrutement comme agent double par le FBI entre 1957 et 1962. Sa fille Evelyn a rapporté que les derniers mots du colonel du KGB Wilhelm Fischer étaient en anglais : « N'oublie pas que nous sommes des Allemands avant tout… »
  • L’ironie du sort a voulu que jusqu’à la fin de sa vie le colonel du KGB Wilhelm Fischer fut connu uniquement sous le nom volé par lui à son collègue Rudolf Abel, mort en 1955. En 1990 un timbre soviétique commémoratif a été émis où le portrait de Fischer figure encore sous le nom de Rudolf Abel. Même actuellement il est toujours classé par le SVR sous cette fausse identité[6]. La gloire, même amère, n’a jamais vraiment rattrapé Wilhelm Fischer et est allée pour toujours à Rudolf Abel. Même sur la tombe de Wilhelm Fischer au cimetière du monastère Donskoï à Moscou [7] est inscrit également le nom usurpé de Rudolf Abel, faisant croire que les deux sont enterrés ensemble.

Décorations de Wilhelm Fischer

En principe dans les articles sur Fischer ne figure pas la liste exhaustive de ses décorations, mais au vu de son état de service, des faits de guerre publiés, de ces décorations annoncées, il devait être décoré au moins des ordres, médailles et insignes suivants :

Notes et références

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • Cyrille Chenkine, L'espionnage soviétique : le cas Rudolf Abel, « Fayard », 1981
  • Spy Book: The Encyclopedia of Espionage, by Norman Polmar and Thomas B. Allen, published by Greenhill Books, (ISBN 1-85367-278-5) (1997)
  • The Mitrokhin Archive: The KGB in Europe and the West, by en:Christopher Andrew (historian) and en:Vasili Mitrokhin, published by Penguin Books, (ISBN 0-14-028487-7) (1999)
  • Гордон Лонсдейл: Моя профессия – разведчик, Издательство: Орбита, 1990 г. Твердый переплет, 320 стр. ISBN 5-85210-023-4. Тираж: 100000 экз. Формат: 84x108/32, Acheter ce livre sur le Site Ozon.ru
  • Le livre d'Agranovsky Profession : l'étranger

Liens externes

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