Yacef Saadi

Yacef Saadi

Yacef Saâdi

Yacef Saadi (né à Alger le 20 janvier 1928) est l'un des chefs du Front de libération national algérien.(FLN) lors de la bataille d'Alger en 1957, pendant la Guerre d'Algérie. Il a joué son propre rôle dans le film de Gillo Pontecorvo, La Bataille d'Alger, qu'il a également co-produit.


Sommaire

Biographie

Il commença sa vie professionnelle comme apprenti boulanger. En 1945, il rejoignit le Parti du peuple algérien (PPA), parti nationaliste interdit par les autorités françaises auquel succéda le Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD). De 1947 à 1949, Yacef Saadi servit dans l'aile paramilitaire du MTLD, l'Organisation Spéciale. Après le démantèlement de l'OS, Yacef Saadi se rendit en France et y vécut jusqu'en 1952, puis il retourna en Algérie, où il reprend son métier de boulanger dans la Casbah.

Il rallie alors le FLN, au début de la guerre d'Algérie, en 1955 [1]. En juin 1955, il est envoyé en Suisse pour une mission de liaison avec Ben Bella [1]. Expulsé par les autorités helvétiques, il est arrêté à Orly par la police française, transféré à Alger, emprisonné, puis libéré en septembre contre la promesse d'informer la DST sur les activités du FLN à Alger [1], il va « donner » aux services français tous les messalistes notoires de la Casbah, en suite il parvient à se défaire de ce double jeu risqué en plongeant dans la clandestinité, devenant le bras droit de Larbi Ben M'Hidi, chef du FLN pour la zone militaire d'Alger [1].

En mai 1956, il était le chef militaire FLN de la Zone autonome d'Alger (ZAA) faisant de lui l'un des leader algérien lors de la bataille d'Alger.

Dans le même temps, des négociations secrètes se déroulent à Belgrade et à Rome durant l’été 1956. Mais les plus radicaux des militants de l'Algérie française s'organisent en groupuscules paramilitaires, sous la direction d'André Achiary, ex-officier du SDECE qui fut sous-préfet dans le Constantinois au moment du massacre de Sétif (1945). Avec des membres de l'Union française nord-africaine, créée par Robert Martel, Achiary monte l'attentat de la rue de Thèbes, dans la Casbah d'Alger, dans la nuit du 10 août 1956, qui fait 16 morts et 57 blessés, et marque un tournant dans la guerre d'Algérie [1]. Patrick Rotman souligne ainsi, dans L'Ennemi intime (2002), qu'« à Alger, le contre-terrorisme a précédé le terrorisme » [2]. Yacef Saâdi, qui était alors le chef militaire du FLN à Alger, déclarera ensuite à la journaliste Marie-Monique Robin :

« Jusqu'au massacre de la rue de Thèbes, nous ne faisions des attentats à Alger qu'en réponse à des arrestations massives ou à des exécutions. Mais là, nous n'avions plus le choix: fous de rage, les habitants de la Casbah ont commencé à marcher sur la ville européenne pour venger leurs morts. J'ai eu beaucoup de mal à les arrêter, en les haranguant depuis les terrasses, pour éviter un bain de sang. Je leur ai promis que le FLN les vengerait. »

Les négociations de paix sont rompues, et le gouvernement de Guy Mollet (SFIO) met alors un terme à la politique des négociations. Larbi Men M'Hidi décide d'étendre les actions terroristes à la ville européenne, afin d'atteindre les couches urbaines, en particulier la bourgeoisie arabe, et de faire d'Alger une caisse de résonance pour toucher l'opinion publique métropolitaine et internationale. Après l'envoi à la guillotine de responsables FLN, ce dernier donne comme instructions : « Descendez n'importe quel Européen de dix-huit à cinquante-quatre ans. Pas de femmes, pas d'enfants, pas de vieux. ».

Le 24 décembre 1956, Amédée Froger, un ultra, président de l'Association des maires de l'Algérois est assassiné. Selon Saâdi, cet assassinat fut commandé par les ultras de l'armée française pour déstabiliser le pouvoir civil et provoquer la prise du pouvoir des militaires (Saâdi, La Bataille d'Alger, 1997), mais Marie-Monique Robin affirme que « ce point n'est toutefois pas du tout établi » [3].


La bataille d'Alger

Avec Ali la Pointe pour adjoint , il crée les filières de conception, de réalisation, de stockage et de distribution de bombes et organise les séries d’attentats à la bombe dans Alger entre l’automne 1956 et l’été 1957. Ces attentats, perpétrés par de très jeunes femmes d’allure européenne dans les lieux publics (bars et restaurants, hôtels, avenues et boulevards, transports en commun, stades, dancings) font des dizaines de morts.

Le 7 janvier 1957, 8 000 hommes de la 10e DP de retour d’Égypte, où ils ont participé à la campagne de Suez, pendant laquelle l'armée s'est sentie humiliée, entrent dans Alger avec pour mission de « pacifier » la ville. La division est commandé par le général Jacques Massu, à qui Robert Lacoste vient de donner les pleins pouvoirs, assisté des colonels Marcel Bigeard, Roger Trinquier, Fossey-François et Yves Godard.

Le FLN lance ensuite un mot d’ordre de grève générale pour le 28 janvier. Les parachutistes brisent la grève en quelques jours, ouvrant les magasins de force, allant chercher à domicile avec des camions les travailleurs et les fonctionnaires absents au travail.

Saadi remplace Larbi Ben M'hidii après sa mort, en mars 1957, exécuté par le général Aussaresses [4].

Juillet 1957, il entretient en parallèle des relations clandestines avec l’ethnologue Germaine Tillon (membre en 1955 du cabinet de Jacques Soustelle, gouverneur de l’Algérie ), pour tenter de mettre fin à la spirale des exécutions capitales et des attentats aveugles.


L'arrestation

Les forces de l’ordre se demandent comment elles vont se saisir de Yacef Saadi ! C’est alors qu’elles réussissent à mettre la main sur un de ses amis nommé Ghandriche Hacène, plus connu sous le pseudonyme de Zerrouk : c’était le chef de la région 3 de la zone d’Alger. Après plusieurs jours de palabres et de marchandages, les services du GRE (Groupe de renseignements et d'exploitation) dirigé par le capitaine Paul-Alain Léger sous le commandement du colonel Yves Godard d'Alger Sahel font basculer Zerrouk dans le camp français et incorporé dans l'équipe des « bleus-de-chauffe », ce sont des anciens combattants FLN faits prisonniers, et qui ont été « retournés », c'est-à-dire qu'après un certain temps de réflexion, ils s'étaient portés volontaires pour lutter contre leur ancien camp. Ces hommes étaient particulièrement efficaces car ils connaissaient parfaitement les groupes auxquels ils appartenaient quelques mois auparavant. Zerrouk ne parle à personne de son revirement et évite de mettre sa femme au courant de sa nouvelle situation. Le capitaine Léger pensait qu’il possédait maintenant un élément important pour la capture de Yacef Saadi. Léger imagine de mettre en contact Houria, la jeune femme brune trompée, avec Zerrouk. Ce dernier envoya la jeune femme porter un message à son épouse. Dans cette lettre, il affirmait que Houria était sa collaboratrice et qu’il fallait la cacher dans sa maison ! C’est ce qui se passa et Houria, une fois dans la place, put observer à loisir les gens qui se présentaient chez Zerrouk. Un jour, elle réussit à faire passer un message à Léger : elle décrivait un homme qui venait très souvent sonner chez son hôte : il était facile à reconnaitre car il promenait toujours en tenant une petite fille de 5 ans par la main. Grâce à ce renseignement, le visiteur fut rapidement identifié, et son domicile repéré n° 4 rue Caton dans la Casbah. Mais cela ne signifiait pas que Yacef Saadi se cachait à cette adresse.

Le 23 septembre, les gendarmes d’Alger arrêtent un homme nommé Djamel : ce dernier fut interrogé par le GRE : il avoua connaître Yacef Saadi et ajouta qu’il l’avait rencontré rue Caton ! Ces deux renseignements qui se recoupent donnent la convection que Yacef Saadi loge bien dans cette rue. Le lendemain, mardi 24 septembre, à 2h30, une opération est lancée, les paras du 1er REP sous le commandement du colonel Jean Pierre et les harkis du capitaine Léger bouclent totalement la rue Caton. Les hommes pénètrent dans la maison. La propriétaire protesta énergiquement contre cette intrusion et prétendit être une informatrice des services français. Mais quelques harkis la reconnurent : c’était la veuve d’un chef FLN ; elle participait également à la chaine de soutien aux hommes de la ZAA. La fouille de la maison commença. Yacef Saadi était effectivement présent dans l’immeuble avec sa compagne et sa collaboratrice : Zohra Drif. Ils se cachèrent dans un petit réduit au fond d’une salle de bain. Les paras eurent vite repéré la planque. Yacef Saad, il a sans doute compris qu'il avait été trahi, pour les faire reculer, lança une grenade dans le couloir. Les éclats blessèrent le colonel Jean Pierre. Les paras disposèrent alors une importante quantité d’explosifs dans les couloirs afin de faire sauter l’immeuble si Yacef Saadi ne se rendait pas, il n'avait pas le choix, il négocie ensuite sa reddition avec le colonel Godard et le capitaine Allaire, pour bénéficier le statut de prisonnier de guerre, au petit matin, il se rend à un détachement du 1er REP et fait des aveux détaillés plus de cent pages, condamné à mort. Le général Paul Aussaresses a prétendu [réf. nécessaire] que, pendant sa détention, il fournit aux forces françaises l'endroit où se cachait son adjoint, Ali la Pointe. Cette version est cependant démentie par Marie-Monique Robin, qui affirme qu'Ali la Pointe a été repéré par les « bleus-de-chauffe » grâce à Zerrouk. [5].


Il vit sa peine de mort commuée, après le retour de Charles de Gaulle au pouvoir, en 1958. Libéré après les accords d'Évian du 18 mars 1962, et proche de Ben Bella, il fonde alors Casbah Films, une société de production cinématographique financée par des capitaux algériens et yougoslaves [6]. En parallèle, il crée une affaire d’import-export.


En juillet 1963, il est nommé par Ahmed Ben Bella président du C.N.A.P. (Centre National d’Amitié avec les Peuples, destiné à faire connaître internationalement les réalisations du socialisme algérien).

Tandis qu'il était en prison, Yacef Saadi écrivit ses mémoires de la bataille, qui furent publiés en 1962 sous le titre Souvenirs de la Bataille d'Alger. En 1966, après la fin de la guerre, Saadi produit le film de Gillo Pontecorvo, La bataille d'Alger

Le 6 janvier 2001, il est nommé sénateur par le président Bouteflika sur le contingent de 29 nominations qui lui est réservé.

Articles connexes

Liens externes

Références

Bibliographie

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