Élection du président de l'Assemblée nationale du Québec en 2008

Élection du président de l'Assemblée nationale du Québec en 2008

L'élection du président de l'Assemblée nationale du Québec en 2008 a été rendu nécessaire suite à la démission de Michel Bissonnet le 14 juillet 2008. L'élection a été marquée par une opposition de l'Action démocratique du Québec à la candidature libérale de Yvon Vallières. Cette opposition a mené à un coup de théâtre, la veille de l'élection, où l'ADQ a annoncé vouloir appuyer un quatrième candidat non-déclaré, le député péquiste François Gendron, afin de pouvoir rallier le Parti québécois et battre le candidat libéral. Cette stratégie s'est avéré un succès et François Gendron, député d'Abitibi-Ouest, est devenu le deuxième président de l'Assemblée nationale à ne pas provenir du parti gouvernemental. L'autre étant Arthur Turcotte, député conservateur-indépendant, élu lors de la formation du gouvernement minoritaire de Lotbinière en 1878.

Sommaire

Contexte

C'est le 21 juin 2008 que La Presse fait état des rumeurs voulant que le président de l'Assemblée nationale en poste, Michel Bissonnet remette sa démission[1]. Le principal intéressé annonça, le 14 juillet 2008, son intention de se présenter au poste de maire de l'arrondissement de Saint-Léonard, suite au départ récent de Frank Zampino[2]. La démission de Michel Bissonnet survient dans un contexte difficile de gouvernement minoritaire. Plusieurs avaient soulevé la difficulté que ce dernier avait à occuper ce poste, notamment en regard du plusieurs critiques venant de son parti sur son attitude trop encline aux partis d'opposition[2]. La démission étant survenue durant l'été, moment où l'Assemblée nationale ne siège pas, l'élection devait avoir lieu lors de la séance suivante[3].

Candidatures

Dans les quelques jours suivants la démission de Bissonnet, plusieurs libéraux sont vus pour lui succéder : Pierre Paradis, Fatima Houda-Pépin, Jacques Chagnon[4] et François Ouimet[5], mais c'est toutefois sur Yvon Vallières que le premier ministre Charest jettera son dévolu[6]. Dans les rangs adéquistes, le choix du candidat s'est rapidement porté sur Marc Picard, alors troisième vice-président de l'Assemblée[4],[7]. Du côté du Parti québécois, le caucus décida de présenter l'ancien ministre Maxime Arseneau, député des Îles-de-la-Madeleine[8].

L'élection

L'Action démocratique du Québec s'est montrée opposée à la candidature de Yvon Vallières dès le mois d'août 2008. Le parti considérait que Vallières était un « fiers-à-bras » des libéraux[9]. Mario Dumont avait alors dit que :

« À un caucus, tu décides que c'est le « goon »[10] et six mois après, à un autre caucus, tu décides que c'est M. Gentilhomme qui rallie les gens de tous les horizons[9] »

— Mario Dumont

Il faisait alors référence à l'attitude d'Yvon Vallières dans certains débats à l'Assemblée où celui-ci aurait pris des positions très partisanes. Les remarques de Dumont à l'endroit de Vallières vaudront au chef un concert de réprimandes de la part des libéraux[11]. Plusieurs analystes avaient d'ailleurs été étonnés de cette prise de position de l'ADQ[12],[13]. L'ADQ justifia son opposition sur le candidat lui-même, mais aussi sur l'attitude du gouvernement envers cette élection. Selon le leader parlementaire de l'opposition, Sébastien Proulx, une tradition était établie de consulter l'Opposition officielle avant de choisir un candidat pour la présidence de l'Assemblée[14]. Il semblerait que Jean Charest n'ait pas contacté Mario Dumont à ce sujet. L'équipe libérale démentira cette affirmation[15]. Vallières mènera tout de même une campagne pour convaincre les députés de sa candidature. Par preuve de bonne foi, il démissionnera de son poste de président du caucus libéral[5].

Alors que tout se dirigeait vers une élection à trois candidats où Yvon Vallières aurait fort probablement gagné (le Parti libéral était le parti avec le plus de siège), l'Action démocratique surprend la classe politique en proposant un 4e candidat la veille de l'élection : le péquiste et doyen des députés François Gendron[16]. Ce faisant, le candidat adéquiste Marc Picard se retirait de la course et demandait à Maxime Arseneau d'en faire autant. La manœuvre surprit non seulement le Parti québécois, mais soulèvera l'ire du leader du gouvernement Jean-Marc Fournier. Lors d'une conférence, ce dernier ne ménagea pas les partis d'opposition qualifiant le geste de « rupture de la cohabitation » et de « manoeuvre faite pour tromper »[17]. En effet, outre entre 1878 et 1882, le président de l'Assemblée nationale avait toujours été choisi parmi les députés du parti formant le gouvernement.

L'élection a eu lieu le 21 octobre 2008, lors de la première séance parlementaire au retour de l'été. L'élection du député d'Abitibi-Ouest, François Gendron s'est faite sans difficulté en raison de l'appui de l'Action démocratique du Québec et du Parti québécois[18].

Le mandat de François Gendron a débuté dans la controverse alors que ce dernier a été obligé d'interrompre le discours du premier ministre Jean Charest alors que celui-ci prétendait qu'il avait usé de « subterfuge » et avait « caché » sa candidature[19]. Jean Charest avait, un peu plus tôt, refusé de respecter une tradition parlementaire voulant que le premier ministre et le chef de l'Opposition officielle aillent chercher le président sur son siège de député pour l'emmener au fauteuil du président[19],[13].

Impacts et analyse

Le Parti libéral a réagi fortement aux manœuvres de l'opposition en raison d'un droit qui semblait acquis au gouvernement depuis des siècles : le choix de la personne qui occupe le poste de président de l'Assemblée. Bien qu'aux dires de l'ADQ le gouvernement ait agit dans une optique de confrontation, le député Yvon Vallières avait effectué plusieurs gestes conciliants pour démontrer son intérêt pour le poste. Toutefois, en raison de l'impact limité de la personne qui occupe le poste de président, plusieurs journalistes n'ont pas manqué de soulever que Jean Charest cherchait depuis plusieurs semaines une raison pour convoquer des élections générales. Faire paraître les partis d'opposition comme obstructeurs lui donnerait une excuse facile pour demander aux Québécois de donner une majorité au Parti libéral[20].

Citations

« les circonstances menant à votre [François Gendron] élection portent atteinte au climat de confiance nécessaire au fonctionnement de notre assemblée. Historiquement, l'élection du président de notre assemblée est un moment important, un moment solennel, ou les parlementaires choisissent celui parmi eux, celui qui présidera leur débat. [...] Dans les derniers jours, les deux partis d'opposition se sont prêté à un malheureuse intrigue. Cela a des conséquences. Les Québécois doivent savoir à quel jeux de coulisse se sont livrés l'ADQ et le PQ. [...] jamais le scénario qui s'est joué au cours des deux dernières heures n'a été évoqué. Nous comprenions tous les trois [les chefs de partis], que chaque parti respecterait sa parole. [...] Est-il normal que vous même n'ayez jamais communiqué avec mon leader, avec moi ou avec quiconque de notre caucus pour nous informer de votre candidature. Est-il normal vous avez joué de subterfuge [...] Monsieur le président, est-il normal que pour occuper le fauteuil de président de l'Assemblée nationale du Québec, vous ayez dû caché votre candidature [...] Et je ne connais aucun autre parlement de tradition britannique où un président aura été élu, envoyé au fauteuil, sans qu'il n'y ait préalablement une consultation avec le gouvernement. Aucun. Et en 216 ans d'histoire au Québec, ce n'est jamais arrivé[19] »

— Jean Charest, Discours du premier ministre suite à l'élection de François Gendron

« La seule chose dont je suis certaine, c’est que Pauline Marois voulait se débarrasser de Gendron, parce qu’il n’est pas bon[21] »

— Diane Lemieux, ancienne leader du Parti québécois[22]

Notes et références

  1. Éric Clément, « Bissonnet envisage de revenir à la mairie », dans La Presse, 21 juin 2008, p. A10 
  2. a et b La Presse Canadienne, « Michel Bissonnet retourne à la politique municipale : Le président de l'Assemblée nationale se présentera à la mairie de Saint-Léonard pour l'équipe de Gérald Tremblay », dans Le Devoir, 15 juillet 2008, p. A3 
  3. . En vertu de la procédure parlementaire « [...] si la charge de Président devient vacante, l’Assemblée ne peut expédier aucune autre affaire avant d’avoir élu à nouveau un Président [...] ». Voir François Côté (dir), La procédure parlementaire. 2e édition, Québec, Assemblée nationale du Québec, 2003, 136 p. (ISBN 2-551-21767-9) [lire en ligne] 
  4. a et b Tommy Chouinard, « Succession de Michel Bissonnet à la présidence de l'Assemblée nationale : Pierre Paradis est pressenti », dans La Presse, 18 juillet 2008, p. A12 
  5. a et b Michel Corbeil, « Vallières tient à la présidence de l'Assemblée nationale », dans Le Soleil, 11 septembre 2008, p. 16 
  6. Caroline Chrétien, « Vallières président de l'Assemblée nationale ? », dans La Tribune, 2 août 2008, p. 3 
  7. Gilbert Lavoie, « L'adéquiste Marc Picard se porte candidat », dans Le Soleil, 18 septembre 2008, p. 27 
  8. [[Presse canadienne|Presse canadienne]], « Maxime Arseneau à la présidence de l'Assemblée nationale? », dans La Presse, 20 septembre 2008, p. A21 
  9. a et b Robert Dutrisac, « L'ADQ rejette la candidature d'Yvon Vallières », dans Le Devoir, 26 août 2008, p. A5 
  10. Un goon est un terme utilisé principalement au hockey pour désigner un joueur qui souhaite se battre ou frapper l'adversaire. (Source: voir goon sur le Wiktionnaire)
  11. Robert Dutrisac, « Les libéraux ne digèrent pas les attaques adéquistes sur Yvon Vallières », dans Le Devoir, 27 août 2008, p. A4 
  12. .Denis Lessard, « Valllières ira vanter ses mérites à l'ADQ », dans La Presse, 5 septembre 2008, p. A7 
  13. a et b Denis Lessard, « Ça va être musclé au Parlement », dans La Presse, 22 octobre 2008, p. A3 
  14. Simon Boivin, « L'ADQ menace de barrer la route à Vallières », dans Le Soleil, 25 août 2008, p. 10 
  15. Michel Corbeil, « L'ADQ ment, accuse Charest », dans Le Soleil, 27 août 2008, p. 5 
  16. L'Action démocratique du Québec et le Parti québécois se liguent pour faire un pied de nez au gouvernement Charest. Joane Price et Sébastien Perron. Bulletin national et international. SRC. Première Chaîne, Montréal. 20 octobre 2008 à 18h.
  17. Antoine Robitaille, « «Rupture de la cohabitation» à Québec : L'élection d'un président dégénère en crise parlementaire », dans Le Devoir, 21 octobre 2008, p. A1 
  18. . Il est important de noter qu'il est impossible de savoir, bien que cela est fort probable, si les députés des deux partis ont bel et bien appuyé la candidature de Gendron. En effet, suite à un accord unanime entre les députés à l'Assemblée, le vote s'est fait au scrutin secret.
  19. a, b et c Débats à l'Assemblée nationale. 21 octobre 2008 [écouter en ligne]
  20. Vincent Marissal, « Une crise sur mesure », dans La Presse, 23 octobre 2008, p. A8 
  21. Gilbert Lavoie, « Diane Lemieux scandalisée : L’ancienne leader du PQ estime que Pauline Marois et François Gendron ont manqué à leur parole », dans Le Soleil, 21 octobre 2008, p. 11 
  22. Plusieurs personnes n'ont pas manqué de souligné que Diane Lemieux s'était fait enlever son poste de leader par Gendron à l'arrivée de Pauline Marois au poste de chef du Parti québécois. Voir [réf. nécessaire]

Voir aussi

Articles connexes

Articles généraux
Articles sur les candidats

Liens externes

« Le départ de Michel Bissonnet ne doit donc pas signifier la fin du processus menant à l'adoption d'une réforme parlementaire. Cette fois-ci, ce projet de réforme ne doit pas rejoindre les nombreux projets que l'on retrouve au cimetière des bonnes intentions. Il doit être adopté. Le contexte d'un parlement de cohabitation facilite les discussions. Débattu depuis plusieurs années, le projet de réforme parlementaire en est à une phase ultime de discussions entre les partis. »

Lettre ouverte du député adéquiste Marc Picard demandant de continuer la réforme parlementaire, surtout dans le cadre de la crise sur l'élection d'un président, Marc Picard était à ce moment candidat au poste de président.

 


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