Collège de Léon

Collège de Léon

Le Collège de Léon était un des collèges de l'université de Paris et a été remplacé ainsi que son jumeau, le Collège de Tréguier, par le Collège de France.

Sommaire

Fondation

Il a été fondé en 1325 par l'archidiacre de Léon, Even de Kerobert[1], en même temps que l’évêque du Trégor, Monseigneur Guillaume de Coëtmohan, fondait le collège de Tréguier. L'archidiacre du Léon était le prélat qui dirigeait l'archidiaconé de Saint-Pol-de-Léon, un des trois archidiaconés de l'évêché de Léon. Nommé comme son évêque par le pape seul, et donc choisi par la curie romaine, il était un des soutiens directs de la politique catholique en France.

Avant la fondation du collège de Léon, l'évêché envoyait, comme la Cornouaille le faisait depuis 1317, ses meilleurs prêtres au Collège du Plessis qui accueillait les clercs de l'évêché de Saint-Malo, un des sept diocèses bretons, et pour lequel Monseigneur Geoffroy du Plessis Balisson avait ouvert ouvert un bâtiment propre en 1322, rue Saint-Jacques (ce qui est aujourd'hui le sud du collège de France et le nord du lycée Louis-le-Grand[2], avec des bâtiments annexes dans l'actuelle Sorbonne, à peu près en face de l'actuel Collège de France où se trouve l'observatoire). Quelques places leur étaient réservées. Ainsi la fondation du collège de Léon remonte en fait au moins à 1322.

La fondation se situe en pleine construction de la nouvelle cathédrale gothique de Saint-Pol-de-Léon qui ne sera inaugurée qu'en 1334. Elle s'inscrit précisément dans la mise en œuvre du projet du Saint-Siège d'une société cléricale dominée par les institutions religieuses qui voit effectivement le jour à cette époque[3].

Notoriété

Le collège du Léon, comme le collège du Trégor, accueillait des jeunes prêtres latinistes et francophones mais néanmoins de langue maternelle bretonne, avec un très fort accent et issus d'une culture qui passait encore au XIXe siècle aux yeux des Français pour plus barbare que celles des Hurons[4]. Ainsi le collège fut-il renommé plaisamment en déformant le nom de son fondateur "collège de Caribert". Une institution spécifique, aussi modeste fût elle, était donc bienvenue pour ces séminaristes trégorrois et léonards plus proches de Rome que de Paris.

Dès 1330, le recteur de Lannilis Even Bohic, fils du carme et poète Hervé Bohic, lui-même citoyen de Plourin, devient professeur de droit à l’université de Paris et doyen du chapitre cathédral de Paris[5].

Dès 1335, Henri Bohic enseigne le droit canon à la faculté Decret. En 1349, il publie le célèbre In quinque decretalium libros commentaria, commentaire des décrétales de Grégoire IX qui servira de référence dans l'enseignement universitaire jusqu’à la fin du XVIe siècle.

Cette même année 1349, Guillaume Bohic devient régent de l’Université de Paris[5].

À la génération suivante, en 1385, Guillaume Bohic junior accède au poste de procureur de l’officialité et Even Bohic junior parvient au diplôme de bachelier en théologie, c'est-à-dire le cursus le plus difficile[6].

Les Bohic ont donc parfaitement illustré l'insigne clérical qu'est l'hermine bretonne. Ils inaugurent une tradition légale commune à toute la Bretagne, symbolisée par la canonisation en 1347 de l'avocat Yves Hélory. Les juristes formés au collège du Léon ont eu naturellement une certaine influence sur le cours politique de l'histoire de Bretagne. Ainsi voit-on Henri Bohic soutenir la cause montfortiste d'Hervé VII de Léon. au cours de la guerre de succession de Bretagne. Ultérieurement et plus généralement, le Parlement de Bretagne, où siégeaient les soutiens de Nicolas Fouquet, fit trembler le centralisme de Louis XIV puis donna ses premiers fondements juridiques à la Révolution française par l'institution du Club Breton fondé par l'avocat rennais Isaac Le Chapelier sur le modèle de fonctionnement des parlementaires bretons, lequel club devint par le ralliement des parlementaires de Bordeaux, héritiers de Montesquieu, le Parti Girondin.

Postérité

Le collège, qui partageait à Paris avec les collèges du Plessis et de Tréguier, une chapelle propre, Saint Yves des Bretons, aujourd'hui détruite et antérieure d'un siècle (1355) à l'église Saint-Yves-des-Bretons de Rome, bénéficiait de l'appui des Rohan, seigneurs puis, à partir de 1491, date du mariage forcé d'Anne de Bretagne avec Charles VIII de France, princes de Léon, entre autres titres, et première fortune de France à ses jours.

Le collège est resté un collège mineur par le nombre d'élèves comparé aux nombres de prêtres du diocèse (mil deux cents[7] en 1630, trois cent quatre vingt quinze en 1790, soit la plus forte densité après le Vatican), en quelque sorte une représentation symbolique dans la capitale des universités. L'éloignement géographique et idéologique, puis les vicissitudes de l'université de Paris, ont fait que la formation des clercs a été assurée de façon privilégiée dans le diocèse lui même, sur lequel la curie avignonaise ou romaine avait un contrôle direct.

Cette tendance à la formation locale des Bretons, plutôt qu'à Paris, a été renforcée par une bulle papale de 1453 réservant les offices de Bretagne aux Bretons, notamment pour résoudre une difficulté de cumuls des bénéfices, et corollairement de langue, soulevée par le Duc[8]. La Contre-Réforme a ainsi fait du Grand Séminaire de Saint-Pol-de-Léon même et non de la faculté de théologie de Paris le premier centre de formation de prêtres missionnaires, en particulier une pépinière de Pères Blancs au XIXe siècle.

Pendant tout le XIVe siècle, le collège de Léon compte quarante et un clercs, hormis les ecclésiastiques ayant accédé à des postes supérieurs[8]. Sur la durée du XVe siècle, le nombre d'étudiants est sensiblement le même, quarante quatre[8]. Les excellents devenaient évêques ou abbés. Les bons devenaient recteurs de paroisses. L'inscription au collège assurait en tout cas un bénéfice. Ainsi en fut-il pour Hervé de Kerlech, docteur in utroque jure et recteur de Plouider, Maurice de Pencalet, docteur en décrets et recteur de Milizac, Yves Guidomar, licencié in utroque et recteur de Plounévez, Thomas Migam, licencié in utroque et vicaire de Lesneven. Grâce au collège de Léon et à la bulle de 1453, les paroisses du diocèse bénéficiaient d'un fort taux de doctorats et offrait à des hommes modestes un formidable ascenseur social.

Comme les autres collèges de l'université qui, au moment de l'expulsion des jésuites de France, n'avaient parfois plus qu'un seul boursier, il a été agrégé en 1763 avec le collège de Tréguier, qui survivait au sein du nouveau bâtiment du collège de France, au collège de Clermont, qui au contraire accumulait les succès.

Notes et références

  1. L. Kerbiriou, "La cité de Léon" in N°54, p. 49, Imprimerie cornouaillaise, Quimper, 1947 (imprimerie de l'évêché sans autre titre que le n° de volume).
  2. O. Truchet & G. Hoyau, Plan "La ville cité université de Paris", Au chef Saint Denis, Paris, 1550.
  3. G. Minois, Nouvelle histoire de la Bretagne, page 289, Fayard, 1992.
  4. G. Flaubert, Par les champs et par les grèves.
  5. a et b G. Minois, Nouvelle histoire de la Bretagne, page 252, Fayard, 1992.
  6. G. Minois, Nouvelle histoire de la Bretagne, page 253, Fayard, 1992.
  7. L. Kerbiriou, "La cité de Léon" in N°54, p. 87, Imprimerie Cornouaillaise, Quimper, 1947.
  8. a, b et c L. Kerbiriou, "La cité de Léon" in N°54, p. 49, Imprimerie cornouaillaise, Quimper, 1947.

Annexe

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