Bataille De Cannes

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Bataille de Cannes

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Anéantissement de l'armée romaine par Hannibal lors de la bataille de Cannes

Date : 2 août 216 av. J.-C.
Lieu : Cannae en Apulie, dans le Sud-Est de l'Italie
Issue : Écrasante victoire carthaginoise
Bélligérants
Carthaginois, Celtes,
Numides et Ibères
République romaine et alliés Italiens de Rome
Commandants
Général: Hannibal Barca
Cavalerie lourde : Hasdrubal[1]
Cavalerie légère : Maharbal
Les consuls
Caius Terentius Varro
et Lucius Aemilius Paullus
Forces en présence
55 000 hommes
Infanterie lourde : 40 000
Infanterie légère : 6 000
Cavalerie : 8 000
8 légions romaines
8 légions alliées :
80 000 Romains et alliés,
dont 5 000 cavaliers
Pertes
6 000 tués 45 000 morts
29 tribuns et 80 sénateurs
20 000 prisonniers[2]
Deuxième Guerre punique
Sagonte — Tessin — La Trébie — Lac Trasimène — Cannes — Nola (1re) — Nola (2e) — Nola (3e) — Capoue (1re) — Silarus — Herdonia (1e) — Bétis — Capoue (2e) — Herdonia (2e) — Cissé — Numistro — Ausculum — Baecula — Grumentum — Métaure — Ilipa — Crotone — Zama
Liste des guerres et des batailles de la République romaine
Série Rome antique

La bataille de Cannes est une victoire décisive d'Hannibal sur les légions romaines, au cours de la deuxième guerre punique. Le 2 août 216 av. J.-C., le général carthaginois écrase les troupes romaines, deux fois et demi plus nombreuses, grâce à une manœuvre géniale qui est depuis 22 siècles toujours étudiée dans les écoles de guerre. Cette victoire lui permet de s'établir durablement dans le sud de l'Italie.

Sommaire

Sources antiques

Comme pour l’ensemble des guerres puniques, les sources dont on dispose sont essentiellement d'origine romaines. Les principaux auteurs sont Polybe et Tite-Live. Le premier est un otage grec à Rome, entre 166 av. J.-C. et 149 av. J.-C., vivant dans la gens Aemilia, qui compte de prestigieux généraux, tels que Paul Émile le Macédonien (le vainqueur de Pydna), et Scipion Émilien dont il devient l’ami. Ce même Scipion est le petit fils du consul Aemilius Paulus présent à Cannes. Il dispose donc d’informations de première main, mais potentiellement partiales. Bien que froid et rigoureux dans son travail, il peut être suspecté de rejeter la faute de la défaite du père de son hôte à Rome, sur Varron, soit à la suite de ses hôtes, soit par clientélisme[3].

Tite-Live lui se fait l’écho de la tradition. Farouchement anti-plébeien, il accable Varron.

Contexte

Les désastres romains du début de la deuxième guerre punique

Après leur défaites du Tessin, de la Trébie et surtout du lac Trasimène, les Romains avaient adopté une politique de temporisation mise en œuvre par le dictateur Quintus Fabius Maximus Verrucosus, dit Cunctator ("le Temporisateur") pour cette raison.

Hannibal, lentement affaibli par la guerre d'usure menée par le dictateur, cherche à engager une bataille rangée contre les forces romaines. Il s’installe dans le sud de l’Italie où il dispose d’alliés, et cantonne à Capoue, renommée dans toute l'Italie pour sa splendeur. Il espère ainsi provoquer les Romains et les forcer à se battre en plaine, là où il est le plus apte à utiliser son excellente cavalerie.

La campagne qui mène à Cannes

Du côté romain, on prépare les élections suivantes et, sur fond de conflit entre la plèbe et les patriciens, les consuls sont élus. Paul Émile comme Varron sont partisans d'une bataille mettant rapidement fin à la guerre, sous la pression de leurs électeurs[4]. Tite-Live signale que la tactique attentiste commençait à payer et que l'armée carthaginoise était presque à bout de vivres et avait les plus grandes difficultés à se ravitailler. C'est Varron qui commande à Cannes. Sa confrontation au génie militaire d'Hannibal donne un exemple de bataille classique (au sens propre, c'est-à-dire qu'il est encore étudié dans les écoles militaires) et démontre les limites des légions romaines.

Les consuls étant élus chaque année, ils n'avaient pas le temps de se former au commandement militaire. Rome avait donc mis en place une tactique éprouvée et simple, où le succès de la bataille reposait peu sur la valeur du général et essentiellement sur la discipline et la valeur des soldats romains, qui étaient citoyens et défendaient leurs biens.

Armées en présence

Tactique romaine

La bataille de Cannes (aujourd'hui Canne della Battaglia) se déroule en effet à proximité de l'Aufide en Apulie à quelques dizaines de kilomètres des premières colonies romaines. La disposition des troupes était toujours la suivante :

  • les légions romaines au centre : étant les mieux équipées, elles constituent le point fort du dispositif ;
  • les légions alliées les flanquant à droite et à gauche : étant moins bien équipées, elles forment un point faible ;
  • et la cavalerie, flanquant le tout et protégeant les ailes.

À l'intérieur des légions, les troupes étaient disposées en trois lignes, d'âge et d'équipement croissant. Là encore, les légions étant composées de citoyens payant leur équipement, les jeunes et les pauvres avaient un armement léger, alors que les plus vieux et les citoyens aisés étaient bien cuirassés. Les riches pouvant se payer un cheval formaient la cavalerie. Au cours de la bataille, après un harcèlement de l'adversaire par des troupes légères, la première ligne s'avançait pour enfoncer les lignes ennemies. Si elle était repoussée, elle reculait en bon ordre derrière la troisième ligne et c'est la deuxième qui prenait le relais.

Déroulement de la bataille

Manœuvres durant la bataille de Cannes. Situation initiale en bas, destruction de l'armée Romaine en haut

La bataille de Cannes reste dans l'histoire militaire la première bataille dite « d'extermination ». Elle inspirera de nombreux chefs de guerre car son plan nous est parfaitement connu.

Hannibal, qui est en infériorité numérique dans un rapport de 1 pour 2 pour ce qui est de l’infanterie, dispose d’un atout majeur : la cavalerie qu’il va utiliser avec génie. Les consuls Varron et Paul Émile dirigent l’armée romaine (qui à l’époque n’est qu’une troupe de citoyens en armes) et forme un immense rectangle d’environ 80 000 hommes (8 légions) qui se déplace en ordre. Hannibal oppose une seule ligne de fantassins à cette masse. Sur les deux ailes, Hannibal dispose sa cavalerie. L’aile de la cavalerie gauloise aura pour objectif de maintenir la cavalerie romaine pendant que l’autre aile prendra les Romains à revers.

Le coup de génie du Carthaginois sera de disposer une ligne beaucoup plus longue que le rectangle romain, puis de provoquer le contact entre ses lignes et la première ligne de l’armée romaine et enfin de faire reculer le centre de sa ligne de telle manière que ses fantassins forment une tenaille autour des Romains dont seul la première ligne reste en contact. La cavalerie lourde ibéro-gauloise arrive alors par l’arrière de l’armée Romaine et provoque l’un des plus grands massacres de l’Antiquité.

Les Romains, contenus par les Celtes et les Espagnols à l’avant, attaqués par la redoutable infanterie lourde carthaginoise sur les côtés et chargés par derrière par la cavalerie victorieuse d'Hannibal sont réduits peu à peu dans une poche dans laquelle ils sont enfermés. Caius Terentius Varro n’ayant plus de réserve voit son armée massacrée en quelques heures dans un bain de sang qui expliquera l’acharnement des Romains à réduire Carthage jusqu’aux fondations.

Bilan

Hannibal comptant les anneaux des chevaliers romains tombés pendant la bataille, par Sébastien Slodtz, 1704, musée du Louvre

Les chiffres proposés par Tite-Live et Polybe varient légèrement. Selon Tite-Live (Histoire romaine XXII-49) :

« 

On chiffre les pertes à 45 000 fantassins et 2 700 cavaliers, citoyens et alliés en nombre à peu près égal; parmi eux, les deux questeurs des consuls Lucius Atilius et Lucius Furius Bibaculus, 29 tribuns militaires, d'anciens consuls, d'anciens préteurs ou édiles, entre autres Gnaeus Servilius Geminius et Minucius qui avait été maître de cavalerie l'année précédente et consul quelques années plus tôt; en outre, 80 sénateurs ou magistrats ayant rang de sénateurs : enrôlés volontaires ils servaient comme simples soldats dans les légions. On dit qu'il y eut 3 000 prisonniers parmi les fantassins et 1 500 parmi les cavaliers.

 »

D'autre part, selon Polybe, considéré par la plupart des historiens comme plus impartial que Tite-Live, 10 000 Romains furent capturés, et près de 53 000 périrent au combat. Encore selon Polybe, près de 5 500 cavaliers Romains tombèrent sous les coups des Carthaginois.

Le consul Paul Émile trouve également la mort au combat, mais Varron parvient à s'échapper, à la tête d'un peu plus de 70 cavaliers.

Hannibal s'en tire avec 6 000 tués. Parmi ceux-ci figurent 4 500 Celtes. Ce sont eux qui ont, étant au centre, contenu le gros des forces romaines.

Conséquences sur la suite de la guerre

A l'issue de la bataille, la route de Rome était ouverte (toutefois, la question demeure de savoir si l'armée carthaginoise aurait pu s'emparer de Rome sans matériel de siège). Mais Hannibal aurait décidé de reposer son armée cette nuit-là. Selon la légende, un des généraux d'Hannibal, Maharbal, aurait déclaré à cette occasion: "Hannibal, tu sais vaincre mais tu ne sais rien de l'usage de la victoire !" (Hannibal, scis vincere, victoria uti nescis)

Rome aurait dû demander la paix, mais les Romains ne la demandaient qu’après une victoire : Rome refusa par exemple de racheter ses prisonniers (500 deniers pour les cavaliers, 300 pour les fantassins et 100 pour les esclaves). Elle reprit sa tactique de temporisation et reconquit patiemment le terrain perdu. Hannibal occupa ensuite pendant plus de dix ans le Sud de l'Italie, avant d'être rappelé en Afrique en 203 av. J.-C. Beaucoup pensent qu'Hannibal, malgré son écrasante victoire, avait une armée trop faible pour assiéger Rome, ce qui causa son repli en Italie du Sud. Cependant, certains soulignent que la stratégie d'Hannibal reposait sur la destruction du pouvoir de Rome en la privant d'alliés, et n'avait pas pour but la chute de Rome en tant que cité. Selon eux, Hannibal ne prit donc pas Rome par choix, et non parce qu'il n'en était pas capable.

Comme l'a souligné Richard M. Swain, « La victoire d'Hannibal à Cannes, bien qu'elle fût un chef d'œuvre de tactique, ne produisit pas de succès stratégique. Hannibal perdit la guerre contre Rome. ».

Influence sur l’art de la guerre

La bataille de Cannes est encore aujourd'hui étudiée dans les écoles militaires. Le général Schlieffen s'en inspira grandement dans son célèbre plan qui permit l’invasion du Nord de la France par l'Allemagne durant la Première Guerre mondiale, plan repris lors de la seconde guerre mondiale par Guderian et Erich von Manstein et mené à bien avec la victoire de l'Allemagne sur la France en 1940. Ce plan devait permettre de vaincre la France en 6 semaines.

À l'instar d'Hannibal, qui retint l'armée romaine avec ses troupes pour mieux encercler ses ennemis, lors de la seconde guerre mondiale les troupes allemandes retinrent les forces françaises près du Rhin pendant que l'autre partie de l'armée tenta d'encercler l'armée française. En effet, attirées dans le piège belge, les meilleures armées alliées avancèrent pendant que les blindés allemands effectuant un coup de faucille les attaquèrent dans leur dos. [5]

Plusieurs raisons sont avancées pour expliquer pourquoi le plan se solda par un échec en 1914. Le manque de troupes pour mener à bien l'attaque par le Nord (1/7 des troupes allemandes du front ouest) et les difficultés logistiques sont principalement avancées. Encercler un territoire aussi vaste que le quart Nord de la France est en effet bien plus difficile que encercler un terrain comme celui de la bataille de Cannes. Coordonner des manœuvres sur une aussi grande échelle demande des moyens de communication et de ravitaillement rapides et efficaces dont ne disposait pas l'armée allemande.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Bibliographie sur le sujet

  • Yann Le Bohec. Histoire militaire des guerres puniques. Éditions du Rocher, 1996

Sources de l’article

Notes et références

  1. À ne pas confondre avec Hasdrubal Barca, frère de Hannibal Barca, qui combat en Hispanie depuis le début de la guerre et jusqu'en 208 av. J.-C.
  2. Lucien Jerphagnon, Histoire de la Rome antique, Éditions Hachette Litterature, 2002, p.64
  3. Alain Alexandra. Nouveaux regards sur la bataille de Cannes. Cahiers du Centre d’études d’histoire de la défense n° 23, 2004. ISBN 2-11-094729-2. En ligne [1]. Consulté le 15 mars 2007 p 25
  4. Alain Alexandra. op. cit. p 1 et 26
  5. Karl-Heinz Frieser - Le Mythe de la guerre-éclair
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