Conscience (biologie)

Conscience (biologie)
La conscience, telle qu'elle était conçue au XVII ème siècle.

On appelle conscience le sentiment, la perception, la connaissance plus ou moins claire que l’être humain a de lui-même, de sa propre existence, ainsi que du monde extérieur. Alors que les aspects philosophiques et psychologiques sont développés dans l'article principal sur la conscience, cet article annexe se concentrera sur les évidences scientifiques (biologiques) de la conscience.

L'étude de ce phénomène a été longtemps négligé sur le plan scientifique, faute d'outils conceptuels et expérimentaux[1], tandis qu'il faisait l'objet d'intenses débats dans les domaines de la philosophie, de la métaphysique et de la religion. En ce début du XXIe siècle, s'il n’existe pas encore d’explication complète de la conscience, les neurosciences commencent à décrypter le support biologique de phénomène de l'esprit.

Dans les années 1980, les études du phénomène de la conscience concernaient surtout l'attention. Actuellement, les recherches scientifiques sur la conscience sont basées sur des analyses statistiques d'activités cérébrales, l'imagerie cérébrale, et l'étude de cas particuliers où les états de consciences sont altérés en raison de lésions cérébrales, d'épilepsie, de blessures ou d'interventions chirurgicales.

Les résultats de ces études suggèrent que la conscience est un phénomène complexe, qui émerge de l'interaction entre plusieurs régions et processus cérébraux. Elle serait le résultat de processus cognitifs de haut niveau. Sa fonction concernerait le contrôle des activités cérébrales les plus complexes. La conscience n'existerait que chez les primates ayant un degré élevé d'encéphalisation. Elle apparaîtrait progressivement au cours du développement, consécutivement à la maturation des réseaux neuronaux du néocortex. Ces structures neurales dont l'organisation spécifique serait à l'origine du phénomène de conscience seraient un ou des réseaux de circuits spécialisés, phylogénétiquement récents, localisés dans les aires frontales et dans les aires corticales associatives postérieures (précunéus et gyrus cingulaire postérieur) de l'hémisphère dominant ou langagier.

Sommaire

Définition de la conscience

En comparant les données expérimentales provenant d'animaux, de personnes en bonne santé et de patients ayant des troubles de la conscience, il est possible de caractériser différents états de conscience et niveaux de consciences.

États de conscience

Parmi les états de conscience, on peut distinguer des états normaux, des états altérés (par des maladies, des traumatismes ...) et des états modifiés (par des psychotropes ...). Les états normaux de conscience existent à l'état d'éveil et cessent durant le sommeil. Dans l'état normal, on distingue plusieurs niveaux de conscience. Les principaux niveaux sont :

  • La conscience primaire ;
  • La conscience réflexive ;
  • La conscience de soi.

Ils sont caractérisés par un fonctionnement normal du métabolisme cérébral, et par l'intégrité des structures impliquées dans la conscience.

Les états altérés de conscience sont consécutifs à des traumatismes, des lésions ou des maladies qui ont endommagés la structure cérébrale. Les principaux états altérés sont :

  • L'évanouissement ;
  • La conscience minimale (fluctuation ou forte diminution de l'état de conscience) ;
  • L'état végétatif (existence d'un état d'éveil, mais sans perception. Le métabolisme cérébral est diminué parfois jusqu'à 70% du niveau normal) ;
  • Le coma (absence de conscience, d'éveil, de sensibilité et de motilité, avec une conservation relative des fonctions réflexes et végétatives).

Les états modifiés de conscience sont en général transitoires, et proviennent de la consommation de substances psychotropes, ou d'activités particulières (hypnose, transe, méditation ...). Durant ces états, les sensations, les perceptions, les émotions et le psychisme sont modifiés.

Niveaux de conscience

En comparant en particulier les capacités cognitives de différentes espèces animales, il apparaît différents niveaux de conscience :

  • La conscience primaire (consciousness), au sens général, qui serait l'état le plus primaire et le plus basique du phénomène de conscience (représentation consciente de l'environnement et du corps du sujet). La plupart des animaux seraient limités à ce niveau de conscience ;
  • La conscience introspective ou réflexive, qui correspondrait à une représentation consciente des représentations (être conscient d'avoir conscience) ;
  • La conscience de soi (self-awareness), qui serait un état supérieur de conscience, où le psychisme accède à une connaissance claire et immédiate, non seulement de son activité, mais en plus de son identité propre et singulière, et tel que l'auteur de sa propre activité (capacité du sujet à se percevoir comme étant l'auteur de ses pensées). Seul les hominidés et les dauphins auraient accès à ce niveau de conscience. La conscience de soi est à distinguer de la reconnaissance de soi (self-recognition), capacité cognitive – généralement inconsciente – d'un organisme à se reconnaître à partir d'informations sensorielles olfactives, auditives, visuelles, etc.

Processus conscients et inconscients

L'étude de la conscience met en évidence un fait remarquable : la plupart des processus du système nerveux sont inconscients (au sens cognitif). C'est le cas de tous les processus réalisés par la moelle épinière et le tronc cérébral incluant :

Mais c'est également le cas de nombreux processus cérébraux effectués par les structures plus complexes du prosencéphale, dont tout particulièrement le néocortex[2],[3] :

  • tous les processus dits « automatiques » (lecture, conduite d'un véhicule …)[4] ;
  • la capacité de perception et de localisation d'un stimulus tactile ;
  • les ajustements précis des mouvements liés à la coordination visuo-motrice ;
  • la « décision » de l'exécution d'un acte moteur ;
  • certains processus cérébraux liés à des réactions émotionnelles de peur ;
  • la reconnaissance des visages est un processus au moins partiellement inconscient ;

Le cerveau de patients ayant une héminégligence traite cependant l'information visuelle présentée dans le champ « négligé »[5]. Après lésion du cortex visuel, le cerveau reste capable de localiser inconsciemment des objets dans le champ visuel (phénomène de la « vision aveugle »). Dans la pathologie appelée prosopagnosie, la reconnaissance consciente d'un visage est impossible, mais les réactions physiologiques indiquent que le visage vu est inconsciemment reconnu. Certaines données montrent qu'apparemment le traitement du stimulus perçu emprunte le même chemin, que la perception soit « consciente » ou « inconsciente »[3].

Les expériences les plus intéressantes concernent la prise de décision. Lors d'une expérience où des personnes devaient appuyer sur un bouton dès qu'elles ressentaient un stimulus tactile les chercheurs observent qu'

« Alors que 500 ms sont nécessaires pour répondre consciemment à un stimulus tactile d'une intensité proche du seuil, il suffit de 100 ms pour donner une réponse motrice (appuyer sur un bouton) à ce même stimulus. Toutefois, le sujet aura l'impression d'avoir appuyé sur le bouton après avoir senti le stimulus, référant ainsi son mouvement à une expérience consciente ultérieure[2]. »

Toutes ces données, provenant de personnes normales et de cas cliniques, montrent que la conscience n'est pas nécessaire pour la plupart des processus cérébraux. Ainsi, la conscience ne peut pas être considérée comme une étape nécessaire à l'accomplissement de certaines opérations, ni comme l'attribut systématique de certains secteurs du fonctionnement mental[2].

Ces données montrent l'existence d'une dissociation entre les processus cérébraux et la conscience[6]. Le phénomène de « conscience » n'interviendrait pas dans le fonctionnement des processus cérébraux mais aurait une fonction cognitive supérieure de contrôle de l'action en cours. D'après Libet B. :

« Le processus « conscient » de l'action, conséquence secondaire du processus « inconscient » initial, pourrait avoir pour fonction, selon, d'autoriser la poursuite, ou au contraire de suspendre l'action en cours de préparation[7]. »

Neurobiologie de la conscience

En analysant les données expérimentales (EEG, etc.) et cliniques (coma, etc.), les régions cérébrales suivantes seraient impliquées dans l'état de « conscience »[8] :

Les connexions fonctionnelles entre les régions cérébrales suivantes seraient également impliquées dans la « conscience » :

  • Entre le cortex préfrontal gauche et le précunéus ;
  • Entre les noyaux thalamiques intralaminaires et le précunéus.

En tenant compte des connaissances actuelles sur les fonctions respectives de ces différentes régions, il semble possible de regrouper ces structures neurales en deux grands types : 1) les structures qui auraient une fonction d'activation du cortex cérébral, et 2) les structures directement impliquées dans la genèse du phénomène de « conscience ». Les structures qui auraient une fonction d'activation du cortex cérébral, à savoir la formation réticulée pontique et les noyaux intralaminaires du thalamus, appartiennent à un système relativement bien connu, le système activateur ascendant. Ces structures ne seraient pas directement impliquées dans le processus de « conscience », mais auraient un rôle indirect, par l'activation généralisée du néocortex. Un haut niveau d'activité du cortex serait une condition nécessaire mais non suffisante à l'émergence de l'état de « conscience ». Les structures directement impliquées dans la genèse du phénomène de « conscience » semblent toutes être des structures corticales associatives, organisées en réseaux.

Les données provenant de l'étude de cerveaux dédoublés après section du corps calleux (Split brain) indiquent que les régions corticales les plus cruciales à l'état de « conscience » seraient situées dans l'hémisphère dominant ou langagier[9],[10],[11].

Ces donnés, couplées à celles obtenues sur des patients en état de coma et montrant l'importance des connexions fonctionnelles entre le précunéus et le cortex préfrontal gauche et l'importance du précunéus et du gyrus cingulaire postérieur, semblent indiquer que les structures clés de l'état de « conscience » seraient un ou des réseaux de circuits spécialisés localisés dans les régions préfrontales et corticales associatives postérieures de l'hémisphère dominant ou langagier[8].

Enfin, des données expérimentales obtenues sur des sujets en état de repos indiquent que certaines des régions cérébrales impliquées dans la « conscience » seraient phylogénétiquement récentes[12].

Toutes ces données permettent de supposer, avec une bonne probabilité d'exactitude, que le phénomène de « conscience » serait dépendant de réseaux spécifiques associant les régions cérébrales les plus récentes et complexes, c'est-à-dire les aires corticales associatives polymodales, dans l'hémisphère dominant.

En conclusion, la conscience n'existerait que chez les primates ayant un système nerveux très développé et elle apparaîtrait progressivement dans l'enfance, consécutivement au développement des réseaux de neurones connectant entre elles les régions les plus complexes du cerveau (aires associatives polymodales). Sous toutes réserves, la fonction de la conscience serait le contrôle supérieur des activités cérébrales les plus complexes[10],[12].

Il semblerait, en fonction des données actuellement disponibles, que les structures neurales dont l'organisation spécifique serait à l'origine du phénomène de conscience seraient un ou des réseaux de circuits spécialisés, phylogénétiquement récents, localisés dans les régions frontales (cortex frontal) et dans les régions corticales associatives postérieures (précunéus et gyrus cingulaire postérieur) de l'hémisphère dominant ou langagier (l'hémisphère gauche chez 95 % des personnes).

Au niveau fonctionnel, pour qu'il puisse exister la conscience d'un objet spécifique, il faudrait, à la fois, que le module cérébral qui traite de cet objet soit intensément et durablement actif (durée supérieure à 250 ms), et, en plus, que les réseaux de circuits spécialisés localisés dans les régions frontales et corticales associatives postérieures de l'hémisphère dominant ou langagier soient également et simultanément actifs[3].

Pour donner un exemple, la vision consciente d'un objet impliquerait une activité intense et supérieure à 250 ms dans le cortex occipital (qui est le cortex visuel) et également dans le réseau impliqué dans la conscience (le cortex frontal, ainsi que le précunéus et le gyrus cingulaire postérieur de l'hémisphère dominant).

Approches méta-scientifiques de la conscience

Face à l'inconnu, plusieurs approches de la conscience existent pour tenter de comprendre la conscience. L'une, issue du matérialisme, ne postule pas de projet divin ou autre dans la conscience. Cette approche est bien représentée par Richard Dawkins. Une autre admet, dans différentes variantes, l'existence d'un éventuel monde immatériel, ou d'un « monde des idées ». C'est celle de Denys Turner, Sir John Eccles, Roland Omnès ou Alain Connes. Une troisième est celle de Daniel Dennett. Pour être complet, il convient de citer aussi celle de Roger Penrose, pour l'originalité de ses vues qui se démarquent des trois précédentes (il admet l'existence d'un monde des idées, tout en le faisant entrer dans un cadre physique/mathématique, donc in fine matérialiste). Les approches hors matérialisme pur restent considérées comme marginales.

Contexte matérialiste

L’hypothèse où tout ce qui est observé dans l’univers peut s’expliquer sans faire appel à une intervention divine ou spirituelle est appelée matérialisme. Dans cette conception, tout ce qui existe est formé de matière. La science opère dans un cadre matérialiste. D'après le darwinisme, l’être humain est le produit d'un processus d’évolution par sélection naturelle. On peut donc supposer que la conscience est un caractère ayant été acquis car il apportait un avantage sélectif. Au cours de l'évolution, elle serait devenue nécessaire pour assurer la survie en milieu hostile.

Le scientifique, dans sa tentative d’expliquer la conscience, la définit comme étant une fonction du cerveau. Il existe alors deux possibilités :

La conscience en tant que logiciel

Cette possibilité est très utilisée dans les films de science-fiction où l’on présente, par exemple, des ordinateurs qui absorbent pendant un certain temps les connaissances de certaines personnes dont le corps reste inanimé durant le temps du transfert.(exemple Avatar )

Des chercheurs comme Ray Kurzweil[13] ont envisagé la possibilité d'une survie de l’être humain par le transfert de l’ensemble de son contenu mental dans des réseaux de neurones artificiels dans la perspective que la conscience suivrait ce transfert. Dans de tels scénarios, la conscience est perçue comme un logiciel qui aurait la capacité de quitter le corps pour être transféré sur un autre support, ordinateur ou corps artificiel.

Cette hypothèse amène une question : un logiciel peut être recopié. Que se passerait-il si le logiciel conscience était dupliqué sur plusieurs supports en plusieurs exemplaires ? Si la conscience est un logiciel, il devient possible de créer des ordinateurs conscients (à titre d'exemple, le roman : Destination vide). Si un programmeur pouvait créer un ordinateur si puissant qu'il en devienne conscient, que serait-il capable de faire ? Un programme informatique est une suite d’instructions. La suite d’instructions va-t-elle créer dans l’ordinateur qu'il soit conscient de sa propre existence ? Ou ne sera-t-il capable que de mimer la conscience ?

Cette approche pose un certain nombre de problèmes fondamentaux, soulevés notamment par Roger Penrose.
De la même manière qu'un système formel est fondamentalement limité dans les propositions qu'il peut démontrer (voir Théorème de Gödel), une machine de Turing (sur laquelle un logiciel s'exécute) est également fondamentalement limitée : un ensemble important de problèmes ou de propositions seront inaccessibles à un logiciel donné. Or, l'esprit humain se distingue précisément par sa capacité à constamment dépasser ses limites.

On peut noter également les échecs récurrents de l'intelligence artificielle à émuler une conscience[14], même élémentaire, malgré des puissances de calcul toujours en croissance exponentielle.

La conscience en tant que propriété de la matière

Dans l'hypothèse où la conscience n'est pas un logiciel mais en restant dans la perspective matérialiste, il reste l’hypothèse qu’il existe des propriétés de la matière que les scientifiques n’ont pas encore découvertes. Ces propriétés permettraient à la matière, dans une certaine configuration, de générer le phénomène de la conscience. La mécanique quantique semble à l’heure actuelle être la théorie la plus favorable à la naissance d’une hypothèse pouvant expliquer comment la matière peut générer le phénomène de la conscience car :

  • Les phénomènes quantiques permettent d'envisager d'implémenter des « algorithmes » qui seraient non implémentables sur des machines de Turing, qui possèdent les limitations soulignées au paragraphe précédent (voir aussi ordinateur quantique).
  • L'aspect non encore totalement élucidé de la décohérence quantique permet d'imaginer que celle-ci pourrait être influencée par des paramètres cachés, qui pourraient être source de conscience (l'état des neurones serait ainsi influencé par ces paramètres cachés)

Johnjoe Mac Fadden pense que la conscience est une propriété des champs électromagnétiques générée par le cerveau humain[15].

Roger Penrose explore la possibilité que la conscience puisse être générée par des superpositions quantiques à grande échelle, notamment situées dans les microtubules constitutifs du cytosquelette des neurones.


André Maurois, dans Les Silences du colonel Bramble, compare le fonctionnement de la conscience à un ministère : chaque soir ses employés le quittent pour aller dormir, reviennent le matin, sont renouvelés intégralement tous les quarante ans par le jeu des départs en retraite, et pourtant il s'agit bien du même ministère sans qu'il existe pour autant d'âme immatérielle du ministère.

Contexte spiritualiste

La difficulté à expliquer la conscience dans un contexte matérialiste conduit à l’hypothèse que la conscience est, peut-être, la caractéristique de quelque chose qui n'est pas matériel. Cette nouvelle conception permet d’éviter certaines des difficultés rencontrées dans le contexte matérialiste, mais pose d'autres problèmes théoriques car elle implique qu’il existe une partie de l’existentiel qui n’a pas encore été abordée par la physique. L’avantage d’une telle conception est de se dire que si la conscience n’appartient pas au corps physique, elle peut ainsi survivre au renouvellement matériel évoqué plus haut. Et si la conscience survit au renouvellement matériel du corps, il y a des chances qu’elle survive à la destruction finale de celui-ci qu’est la mort physique. On peut aussi supposer que la conscience après la mort réintègre un autre corps puisque certains hypnotiseurs prétendent avoir amené certaines personnes à se rappeler leurs vies précédentes sous hypnose.

Un des problèmes soulevés par une conception spirituelle de la conscience est de savoir comment celle-ci communique avec le corps physique. Comment la volonté peut-elle agir sur le corps en induisant des influx nerveux dans les nerfs. Sir John Eccles, prix Nobel de physiologie en 1963, invoque la mécanique quantique en postulant l’hypothèse selon laquelle l’esprit interviendrait en modifiant la probabilité d’émission du transmetteur chimique. Le champ de probabilité en physique quantique par l’indétermination qu’il génère au niveau physique permettrait au monde spirituel de contrôler le monde physique[16].

Conscience et perception du temps

La perception du temps semble très liée aux émotions. Lors d'une expérience désagréable, le temps semble s’écouler plus lentement, alors que lors d'une expérience agréable, le temps semble s’écouler plus rapidement. Cette constatation nous mène à nous poser une question fondamentale. Puisque l’écoulement du temps nous paraît si différente selon les moments, qu’en est-il de l’écoulement réel du temps indépendamment de nous ?

Nous avons une sensation de l’écoulement du temps, mais cette sensation étant différente selon les moments, nous pouvons penser que l’écoulement du temps que nous croyons réelle n’est peut-être qu’une illusion, une sensation programmée dans notre cerveau. À quelle vitesse le temps peut-il s’écouler si nous-mêmes avons une perception si variable de son écoulement ?

Frank Tipler introduit une notion de temps subjectif qui se distingue du temps physique. Selon Tipler, une unité de temps subjectif correspond à une information traitée (l'esprit étant considéré comme un système de traitement). La sensation d'écoulement du temps serait donc différente selon la quantité d'information que l'esprit humain est en mesure de traiter et donc dépendrait du stade d'évolution de celui-ci.

Des considérations en théorie des cordes amènent à penser que le temps physique ne s'écoule pas. La conscience parcourrait le temps qui est figé, un peu comme une voiture parcourt une route.

La situation se complique lorsque l'on se place dans le cadre de la théorie d'Everett. Dans ce cadre, l'évolution du monde n'est pas linéaire mais arborescente. À chaque instant[17] l'évolution emprunte simultanément toutes les possibilités prévues par la mécanique quantique, et on peut alors légitimement se poser la question de savoir ce qu'il advient de la conscience individuelle. Notre conscience se divise-t-elle aussi pour coexister simultanément dans des mondes parallèles ? Paul Jorion répond négativement à cette question. Selon lui, la conscience emprunterait le chemin d'évolution qui est le plus favorable pour elle[18].

Histoire de l'étude de la conscience

Descartes localisait la conscience dans la glande pinéale.

Sigmund Freud[19] localisait la conscience sur la couche externe du cerveau. La couche interne, selon lui, correspondait à l’inconscient.

Plus récemment le prix Nobel Roger Sperry, après avoir sectionné le corps calleux et la commissure antérieure reliant les deux hémisphères du cerveau dans le but de soulager les personnes atteintes de l’épilepsie, constata une forme de dédoublement de la conscience. Une des deux consciences était verbale et analytique et semblait correspondre à l’hémisphère gauche du cerveau. L’autre conscience, plus subjective, semblait correspondre à l’hémisphère droit du cerveau. Roger Sperry en déduisit que la conscience n'est pas localisée à un endroit particulier dans le cerveau. Selon lui, c’est comme si toutes les parties du cerveau y contribuaient de concert (voir [1]).

Notes et références

  1. (en) Horst Hendriks-Jansen, Catching ourselves in the act: situated activity, interactive emergence, evolution, and human thought, Cambridge, Massachusetts Institute of Technology, 1996, relié (ISBN 978-0-262-08246-4) (LCCN 96000972), p. 114 
  2. a, b et c JEANNEROD Marc, Traitement conscient et inconscient de l'information perceptive, Revue internationale de psychopathologie, I:13-34, 1990.
  3. a, b et c NACCACHE Lionel, DEHAENE Stanislas, La perception subliminale : un aperçu sur l'inconscient, Pour la Science, 302:96-102.
  4. SIEROFF Eric, Les mécanismes attentionnels, in SERON Xavier , JEANNEROD Marc ; (Ed) : Neuropsychologie humaine, Mardaga, Liège, 1994
  5. IMBERT Michel, Perception visuelle et conscience, Pour la Science, 302:90-95, 2002.
  6. DELACOUR Jean : Science et conscience, Pour la science, 302:26-32, 2002.
  7. LIBET B. (1985), Unconscious cerebral initiative and the role of conscious will in voluntary action, Behav. Brain Sci., 8, 529-566.
  8. a et b LAUREYS Steven, FAYMONVILLE Marie-Élisabeth, MAQUET Pierre, Quelle conscience durant le coma, Pour la science, 302:122-128, 2002.
  9. SPERRY Roger, "Lateral specialization in the surgically separated hemispheres." In: F. Schmitt and F. Worden (Eds.), Third Neurosciences Study Program (Cambridge: MIT Press) 3: 5-19 (1974)
  10. a et b GAZZANIGA Michael, IVRY Richard, MANGUN George, Cognitive neuroscience : the biology of the mind, Norton & Company, 2nd edition, 2002
  11. BARRY Julien, Neurobiologie de la pensée, Presse Universitaire de Lille 1995
  12. a et b MAZOYER Bernard, L'imagerie cérébrale : IRM et TEP, Pour la Science, 302:43-49, 2002.
  13. KurzweilAI.net
  14. « Criticism of AI models of consciousness doesn’t fit this pattern. As I observed at the outset, almost no one in the field is “working on” consciousness, and certainly there’s no one trying to write a conscious program. It is seldom that a journalist can make a breathless report about a robot that will actually have experiences!! » Artificial Intelligence and Consciousness Drew McDermott Yale University]
  15. Automates Intelligents : Echanges
  16. Welcome to upsy.net
  17. en simplifiant, car la notion d'instant elle-même possède un certain flou en mécanique quantique.
  18. Paul Jorion - Pourquoi les hommes ont neuf vies comme les chats - 2000
  19. Sigmund Freud: Métapsychologie, Ed.: Presses Universitaires de France, 2010, ISBN 2130579574

Bibliographie

Annexes

Articles connexes

Liens externes

Le cerveau à tous les niveaux


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