Dutch-Paris

Dutch-Paris

Dutch-Paris est un réseau de la résistance française. Son nom vient du fait qu'il était animé par des Hollandais et opérait principalement à Paris durant la Seconde Guerre mondiale.

Sommaire

Histoire

Il a été fondé par Herman Laatsman, un diplomate hollandais, et Johan Weidner, un pasteur adventiste. Le réseau travaillait en liaison étroite avec Londres grâce aux connexions de Johan Hendrik Weidner. Selon la biographie publiée à la mort de ce dernier par le New York Times[1], le Réseau Dutch-Paris a sauvé près de 800 juifs et de 100 aviateurs alliés pendant la Seconde Guerre mondiale. D'après les résultats des recherches scientifiques menées aux États-Unis, Megan Koreman, la liste des pilotes répertoriés comme ayant été sauvés par Dutch-Paris comprend aujourd'hui 142 noms.

Le réseau faisait également du renseignement pour le gouvernement néerlandais en exil à Londres. Il n'était pas composé seulement de hollandais et comprenait, en majorité, des français et des personnalités de diverses origines, dont le grand résistant allemand Karl-Heinz Gerstner. Ses membres travaillaient en collaboration étroite avec d'autres réseaux de résistants français (faux-papiers, passeurs, planques...).

Personnages marquants

  • Hermann Laatsman, diplomate hollandais, fondateur du mouvement
  • Johan Hendrik Weidner, cofondateur du mouvement
  • Suzanne Hiltermann, une des personnalités marquantes du Réseau sur Paris. Parlant allemand, anglais, français, néerlandais, son activité principale a été le rapatriement des pilotes américains tombés en France sous le feu de la DCA allemande en liaison avec les autres mouvements français de résistance.

Suzanne Hiltermann, Herman Laatsman de Bailleul et Johan Hendrik Weidner ont été décorés de la Medal of Freedom par Harry Truman, Président des États-Unis, pour les services rendus à la cause alliée et à la nation américaine.

L'évasion de Victor Ferrari

Le 13 novembre 1943 vers 13:00, le B-26 décroche de sa formation. Il descend de plus en plus rapidement. Les moteurs émettent des vibrations inquiétantes. Son navigateur, Victor Ferrari, appelle le pilote. "Prépare la sortie mais n'ouvre pas la trappe jusqu'à nouvel ordre !" lui crie ce dernier. Deux TW surgissent. Le pilote demande l'appui des appareils de combat de la flotte. Les P47 les chassent immédiatement (The navigator's odyssey).

Quand Victor lève les yeux à nouveau, le cockpit a volé en éclats. Regardant vers le bas, il note que le sol se rapproche dangereusement. Il décide de quitter l'appareil. Mais la trappe de sortie est gelée par le froid. Il ne parvient pas à l'ouvrir. Le bombardier vole à présent en dessous des 1 000 pieds. Il faut sortir à tout prix ! Victor se précipite dans le vide par la baie réservée aux bombes. L'air est glacial. Il tire trois fois sans succès sur le cordon d'ouverture de son parachute. Celui-ci refuse de s'ouvrir. Une dernière fois, il tire de toutes ses forces avec ses deux mains agrippées sur le cordon, la voilure se déploie enfin, lentement.

Ses pieds heurtent le sol, très brutalement ; le pararachute, qui vient à peine de s'ouvrir, retombe sur lui. De l'autre côté du canal, deux autres membres de l'équipage sont déjà là, entourés d'un groupe de hollandais. Malgré ses blessures, après s'être débarrassé de son lourd fardeau d'équipements qu'il dissimule dans un buisson, Victor plonge dans le canal glacé. Il rejoint les autres rescapés. Ne restez pas là ! Les allemands vont venir, leur enjoint un garçon hollandais qui parle anglais. Le groupe leur prête des bicyclettes.

Grâce à Eichelbaum, le garçon hollandais qui les conduit, ils atteignent une ferme. Le propriétaire ne parle pas anglais. Il les nourrit, leur donne des vêtements civils et les loge.

Quelques jours plus tard surgit un autre hollandais. Victor apprendra plus tard qu'il se nomme Peter Van Den Hurk. Peter doit d'abord les interroger. Il leur explique pourquoi: "Les allemands parachutent des faux pilotes. Nous les ramassons, croyant qu'ils sont américains. On les amène ensuite avec nous jusqu'aux Pyrénées. Là les allemands nous arrêtent et démantèlent notre réseau. Cela nous est arrivé plusieurs fois. Alors, on est prudents..." Après l'interrogatoire qui porte essentiellement sur la connaissance de l'Angleterre et de la ville de Londres, il valide leur statut d'équipage américain.

Ils sont ainsi pris en charge par le réseau Dutch-Paris. De nombreux jours sont passés dans leur cachette hollandaise. Puis le réseau (Joke Folmer) les escorte jusqu'à Bruxelles en franchissant la frontière près de Maastricht. Le groupe est rejoint par d'autres pilotes.

Instruction leur est donnée ne parler à aucun prix, même si des soldats allemands l'interrogent. Lorsqu'un soldat allemand demande à Victor du feu pour sa cigarette, ce dernier s'exécute sans dire un mot. A Bruxelles, un nouveau guide les prend en charge à bord du train Berlin-Paris. Le train arrive à Paris avec du retard, en raison de raids aériens.

Le guide est accueilli à la gare par quelqu'un qu'il connaît. Il apprend que la réservation de l'hôtel ne fonctionne pas. Le guide s'engage avec le groupe dans le métro à la Gare du Nord. A la sortie, il propose au groupe de tourner dans les rues et revenir au même point toutes les demi-heures. Pendant ce temps il va chercher de nouveaux relais. Victor repère à côté une grande église blanche (Montmartre probablement).

Après de très nombreux tours, le guide revient. Il dit qu'il va prendre le risque de demander à des hommes d'affaires d'inviter le groupe à déjeuner. Ils sont 10 américains et 2 anglais. Ces hommes d'affaires les invitent en effet. Ils ont toutefois la prudence de ne pas rester à la même table. Victor mange des escargots pour la toute première fois de sa vie.

Ensuite, les tours dans les rues reprennent jusqu'à 18 heures 30. A ce moment là, le guide revient avec une jeune fille. "Elle va vous escorter jusqu'à une ferme hors de la ville", dit-il. Ils reprennent le métro, puis un train. De là, la jeune fille les conduit à la ferme où ils vont rester deux semaines jusqu'à ce qu'une nouvelle personne intervienne : "Vous retournez à Paris. Le réseau va vous prendre en charge. Vous allez reprendre le train. Sur le quai de la gare un prêtre vous attendra". La personne montre une photographie du prêtre. "Ne marchez pas ensemble. Victor, tu marcheras sur le trottoir de gauche. Eddie tu marcheras de l'autre côté".

C'est Herman Laatsman qui a prévenu le prêtre de la rue Lhomond et qui a fait les arrangements nécessaires avec le concierge de l'Ecole Normale Supérieure pour qu'il puisse les accueillir dans la cave de l'Ecole. Le prêtre est là comme prévu pour conduire les divers équipages des avions abbattus réunis par Dutch-Paris. Ils se rendent à pied à l'Ecole. Le chemin paraît interminable à Victor. Il a de la peine à marcher, suite aux blessures provoquées par sa chute en Hollande.

A l'arrivèe, le prêtre enlève sa robe. Il découvre ainsi les deux énormes jambons qui sont cachés dessous. Il les donne à la compagnie avant de prendre congé. Une femme les fait descendre à la cave par l'échelle. Ils vont devoir passer là plusieurs jours, sans aucun confort. Ils attendent en se racontant des histoires ou en jouant aux cartes. Victor ne va pas bien. Sa jambe s'infecte de plus en plus.

Suite à plusieurs visites, la femme, qui s'appelle Suzanne Hiltermann, alias Touty, revient. Elle distribue les vrais faux-papiers qu'elle a fait fabriquer par le réseau, après avoir amené chacun des rescapés, un par un, au photomaton du boulevard Saint-Michel. Elle les prévient: "Demain on bouge. Maintenant, écoutez-moi attentivement. Le dernier groupe que nous avons déplacé a été pris et nous avons perdu les meilleurs de nos gens. La perte de nos guides est liée au fait qu'un des rescapés ne nous avait pas prévenu qu'il ne pourrait pas marcher durant 35 heures. Maintenant, je vous le demande, si l'un d'entre vous ne se sent pas capable de marcher aussi longtemps dans des circonstances difficiles, qu'il le dise tout de suite".

Personne n'ose piper mot. Ses compagnons regardent Victor, mais ne veulent pas le dénoncer. Finalement Victor prend la parole : "Ma'am, j'aurais peut-être des difficultés. Je vais avoir besoin d'un aide". A quoi, Touty répond: "Je serais là demain à 5h00 du matin pour te ramasser. J'aurai un médecin".

Elle revient le lendemain avec le médecin et une femme d'une cinquantaine d'années. Ni l'un ni l'autre ne parlent anglais. Touty traduit. Victor est gêné de devoir se déshabiller devant deux femmes. "Ce n'est pas le moment de se préoccuper de ces choses là" lui déclare Touty. Il retire son pantalon. Le médecin l'examine rapidement puis secoue la tête en fronçant les sourcils.

Après avoir échangé quelques mots avec le médecin, Touty se tourne vers Victor et lui dit: "Tu n'es pas en état de partir. Tu vas aller habiter l'appartement de la femme ici présente. Je t'amènerai moi-même à Toulouse dès que tu seras rétabli. En attendant tu auras une salle de bains et un gramophone. Cette femme est une infirmière. Elle te traitera bien". Avant de quitter l'école, Victor veut retourner à la cave pour dire au revoir à ses compagnons. Touty s'y oppose: "Non, nous n'avons pas le temps. Tu dois partir immédiatement".

Micheline Goestchel (1) héberge Victor dans son appartement rue Jasmin à Paris. Le réseau lui procure de nouveaux habits. Après deux semaines, comme promis, Touty vient rechercher Victor pour le conduire à Toulouse par le train de nuit. A Toulouse, ils rejoignent d'autres aviateurs. Victor leur demande de faire moins de bruit car ils mettent en danger la sécurité du groupe. Touty les confie à son contact de Toulouse, M. Moen (Edward Chait, un personnage clé du réseau Dutch-Paris).

Elle retourne à Paris où elle apprend qu'un membre du réseau vient d'être arrêté. Touty fonce vers son appartement, rue du Laos, pour détruire tous les documents compromettants. Elle y sera arrêtée. Torturée par la Gestapo, elle ne parlera pas. Elle sera détenue à Romainville et à Fresnes, avant d'être déportée par les Allemands au camp de Ravensbruck.

Pendant ce temps, le groupe de Victor séjourne à Toulouse. Il attend que les passeurs trouvent un moment favorable pour la traversée de la chaîne de montagne.

Cette dernière vient enfin. Elle s'avère longue et très difficile : humidité, froid, faim, terrible faim, manque de sommeil... Arrivés en Espagne après des jours et des nuits de marche, Victor et son groupe rencontrent un berger espagnol. Ce dernier les met en garde contre les allemands déguisés en civil qui, partout, les recherchent. Les guides les amènent via des lignes de bus ordinaires jusqu'à Lerida. Le 19 mars 1944, des employés de l'ambassade américaine les accueillent à leur descente du bus. Victor atteint Gibraltar le 23 avril 1944.

Le 27 avril 1944, il est de retour au Royaume-Uni.

(1) Micheline apparaît sur la liste très incomplète du réseau qui est donnée dans la biographie de Hermann Laatsman.

Sources et références

  • (en) Herbert Ford, Flee the captor : The story of the Dutch-Paris underground and its compassionate leader, John Henry Weidner, Review and Herald Publishing Association, 1994 (1re éd. 1966) (ISBN 0-8280-0882-5) [lire en ligne (page consultée le 9 juin 2010)] 
  • L'historienne américaine, Megan Koreman, a mené une recherche approfondie sur ce réseau. Une partie de ses travaux est publiée sur le blog Dutchparis http://dutchparisblog.com/?p=82.

Wikimedia Foundation. 2010.

Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Dutch-Paris de Wikipédia en français (auteurs)

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