Fitzwilliam Darcy

Fitzwilliam Darcy
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Fitzwilliam Darcy
Personnage de fiction apparaissant dans
Orgueil et Préjugés
Thompson-Darcy.jpg
Mr Darcy, vu par Hugh Thomson (1894)
Origine Pemberley, Derbyshire, (Royaume-Uni)
Genre masculin
Activité(s) chasse, lecture, gestion du domaine
Caractéristique(s) grand, réservé, orgueilleux (et très riche)
Âge 27 ans
Famille Georgiana Darcy, 16 ans (sœur)
Lady Catherine de Bourg (tante)
le colonel Fitzwilliam (cousin)
Entourage Charles Bingley et ses sœurs
Ennemi(s) George Wickham
Créé par Jane Austen
Roman(s) Orgueil et Préjugés

Fitzwilliam Darcy est un personnage de fiction créé par la femme de lettres anglaise Jane Austen. Il est le protagoniste masculin principal de son roman le plus connu et le plus apprécié[1] Orgueil et Préjugés (Pride and Prejudice), paru en 1813. Il n'est jamais appelé par son prénom mais toujours Mr Darcy par les dames et Darcy par son ami Charles Bingley et par la voix narratrice.

Hôte de son ami Bingley, nouveau locataire d'une belle propriété près de la petite ville de Meryton dans le Hertfordshire, il est admiré au début par le voisinage, car il a de la prestance, et, surtout, il est le très riche (et célibataire) propriétaire d'un grand domaine dans le Derbyshire, Pemberley. Mais, considérant la société locale avec un mépris hautain et une morgue tout aristocratique, il suscite rapidement l'antipathie générale et plus particulièrement celle de la spirituelle Elizabeth Bennet, qu'il a regardée de haut à leur première rencontre, refusant sèchement de l'inviter à danser. Alors qu'elle éprouve à son encontre une animosité et un ressentiment durable, il se rend rapidement compte qu'elle l'attire beaucoup trop et qu'il serait prêt à se mésallier. Tout l'art de la romancière va consister à donner des occasions vraisemblables de rencontre à ces deux orgueilleux remplis de préjugés, dont elle surveille avec une ironie tendre et discrète l'évolution psychologique parallèle, à travers les quiproquos et les obstacles humains, sociaux et matériels, offrant à Darcy l'occasion de monter ses réelles qualités de cœur.

Jane Austen a créé avec Darcy le plus complexe (intricate) et le plus élaboré de tous ses personnages masculins[2]. Son intelligence, ses qualités humaines et sa capacité à se remettre en question le rendent digne du cœur et de la main d'Elizabeth, « la plus admirable et la plus attachante des héroïnes » selon William Dean Howells[3]. Dans un roman dont la popularité ne se dément pas, où Darcy est « le type même du beau prince qui épouse la bergère », il séduit le lecteur, selon Catherine Cusset, par « son caractère de beau ténébreux et sa fierté généreuse[N 1] ».

Sommaire

Genèse du personnage

Fierté de classe et préjugés

Les romans où l'orgueil et la fierté du nom (pride) entraînent les préjugés du héros (en général de haute naissance) ou de sa famille, envers une alliance avec la jeune fille (de condition modeste) qu'il aime sont nombreux à la fin du XVIIIe siècle[4], et Jane Austen avait de nombreux modèles de personnage orgueilleux, en particulier dans Cecilia de Fanny Burney, roman publié en 1782 qu'elle avait lu et apprécié. Sir Delvile, l'un des tuteurs de l'héroïne, la riche mais roturière Cecilia Beverley, quoique d'une politesse souvent exquise, montre constamment un extraordinaire orgueil de classe. « Il se sent autorisé, comme chef d'une ancienne et honorable famille, à se croire un peu au-dessus des gens à peine sortis de l'obscurité et de la poussière »[5]. Son fils unique, Mortimer, qui fait pourtant (discrètement) preuve d'humanité et de générosité envers les humbles, finit par avouer à Cecilia qu'il l'aime depuis longtemps mais qu'il est déchiré entre le devoir et l'amour, lui exposant minutieusement son débat intérieur et lui expliquant qu'il ne peut la demander en mariage[6], car sa situation[N 2] « lui interdit d'aspirer à elle, sauf à commettre un acte qui le dégraderait pour toujours, lui et sa famille », et il la blesse par « son arrogance héréditaire ». Un des prétendants de Cecilia, Sir Robert, a pris, dès leur première rencontre, la désagréable habitude « de l'observer d'une manière hautaine, qui montrait la haute opinion qu'il avait de lui-même[7] ».

La première demande en mariage de Darcy s'inspire du passage d'un roman épistolaire de Samuel Richardson paru en 1753 et très apprécié de Jane Austen : l'Histoire de Sir Charles Grandison[8], dans lequel un personnage nommé Sir Hargrave Pollexfen déclare son « ardente affection » et sa « violente passion » à Harriet Byron avec un peu trop de suffisance et de hauteur pour qu'elle le croie sincère, et écoute son refus avec « colère et un air d'insolence[9] ».

Certains traits de Darcy, comme la réserve hautaine et le sentiment de supériorité, se retrouveront dans Lord Osborne[10], personnage du roman inachevé de Jane Austen The Watsons, décrit comme un très beau jeune homme à l'air froid et mal à l'aise dans la salle de bal de la ville de D., « n'appréciant pas la compagnie des dames et ne dansant jamais[11] ».

Évolution

William Cavendish, par Sir Thomas Lawrence, en 1811.

On peut voir dans l'évolution du hautain et méprisant Darcy face au refus d'Elizabeth, un lointain écho de Paméla ou la Vertu récompensée (Pamela, or Virtue Rewarded), roman épistolaire de Samuel Richardson, publié en 1740, dont l'héroïne, la vertueuse servante que le maître finit par épouser, est toujours extrêmement populaire[12]. Comme le riche Mr B., au comportement hardi et grossier que Pamela ne peut pas considérer comme un gentleman, Darcy, s'il veut mériter d'être épousé, doit apprendre à corriger ses façons humiliantes envers ceux qui lui sont socialement inférieurs.

Mais Darcy emprunte la plupart de ses traits de caractères, sa réserve, son obstination, sa hauteur, à Sir Charles Grandison lui-même, « cet excellent gentleman, qui dédaigne se disputer pour des bagatelles, [...] est apprécié par ceux qui le connaissent bien, et ne considère qu'en second le jugement ou l'approbation du monde »[13]. Comme lui encore, il est austère, plutôt pessimiste, semble manifester une sorte d'insensibilité et un constant contrôle de soi[14]. Tous les deux sauvent leur sœur d'un enlèvement par un militaire coureur de dot et possèdent un domaine « où les beautés naturelles ont si peu été contrariées par un mauvais goût ». Tous les deux sont les meilleurs des frères, des amis, des maîtres[15].

Les efforts de Darcy pour marier l'imprudente Lydia Bennet et George Wickham doivent aussi quelque chose à Sir Charles, qui met beaucoup de constance et d'argent à persuader les autres personnages de se marier[8], et sauve la réputation d'Harriet Byron (qu'il finira par épouser) ; mais, contrairement à Sir Charles qui se fait admirer, Darcy agit dans la plus grande discrétion et pour une personne qui ne comprendra jamais tout ce qu'elle lui doit[16]. Il n'est pas non plus un parfait parangon de vertu comme Sir Charles[17]. Il a découvert ses failles et s'est senti obligé de réparer les conséquences d'un « orgueil mal placé » (mistaken pride)[18]. Il a agi surtout avec « le désir de rendre Elizabeth heureuse » (the wish of giving happiness to [her]). Chez lui, l'orgueil n'est pas seulement contrecarré, il est « complètement écrasé » (properly humiliated). Darcy, une fois accompli son examen de conscience et son autocritique, est prêt à accepter l'indépendance d'esprit d'Elizabeth, voire ses taquineries, et à traiter en égaux les Gardiner, qu'il apprécie indépendamment de leur position sociale[19].

Contexte historique et choix du nom

En 1812, au moment où Jane Austen met la dernière main à son roman, le propriétaire du domaine de Chatsworth est, depuis la mort de son père un an auparavant, William George Spencer Cavendish, 6e duc de Devonshire, beau célibataire de vingt-deux ans, fils de Lady Georgiana[20], célèbre pour sa beauté et son esprit. Une de ses deux sœurs porte, elle aussi, le prénom de Georgiana. Le duc de Devonshire est un Whig influent et le nom de Fitzwilliam Darcy rappelle celui de deux autres Whigs connus à l'époque, Robert d'Arcy, quatrième comte d'Holdernesse (1718-1788), et William Fitzwilliam, quatrième comte Fitzwilliam (1748-1833), qui ont occupé de hauts postes ministériels[21].

Les Austen étant Tories, l'arrogance de Darcy pourrait être une satire de l'attitude détestable des Whigs envers les « Pittite lories » (les perroquets de Pitt, cette gentry, dont font partie les Bennet et les Austen, qui soutint la politique conservatrice de William Pitt), et la timidité excessive de sa sœur Georgiana une subtile pointe d'ironie[20]. Les patronymes Darcy et de Bourgh sont d'origine normande ; le prénom de Mr Darcy, Fitzwilliam[N 3], étant le nom de famille de sa mère, Lady Anne Fitzwilliam, la fille d'un comte, Jane Austen confère à la branche maternelle de son personnage une lointaine origine royale, le préfixe fitz (bâtard de sang royal) indiquant une ascendance royale illégitime.

Portrait

Article principal : Orgueil et Préjugés.
Chatsworth House. Pour un certain nombre de critiques, c'est le modèle du château de Pemberley[23].

Mr Darcy[24] est un homme jeune (il a vingt-sept ans au début du roman), décrit brièvement au chapitre III : il est grand, bel homme, a de la prestance, mais l'air fier et hautain. Très réservé, peu loquace, facilement cassant, il possède « une quantité prodigieuse d'orgueil familial »[25]. Intelligent, il peut se montrer froidement rationnel, mais aussi révéler une surprenante sensibilité[26] et des qualités d'homme d'action.

Situation sociale et contexte familial

Depuis la mort de son père, environ cinq ans auparavant, il est le maître du splendide domaine de Pemberley[N 4], dans le Derbyshire, qui rapporte annuellement 10 000 livres net[29],[N 5], et fait de lui un des célibataires les plus fortunés de Grande-Bretagne, même si certains nobles, comme Lord Cavendish, le propriétaire de Chatsworth, sont huit à dix fois plus riches.

Il a une sœur beaucoup plus jeune que lui, de onze ou douze ans peut-être (« She is more than ten years my junior », précise-t-il dans sa lettre à Elizabeth)[31], dont il est le tuteur, responsabilité qu'il partage avec un cousin germain, le colonel Fitzwilliam. Jane Austen, répugnant, au nom de la cohérence interne[32], à citer des personnages qui n'ont aucun rôle dans l'histoire[N 6], outre le colonel, elle n'évoque qu'une tante maternelle, Lady Catherine de Bourgh, dont il est le neveu préféré et qui a l'intention de le marier à sa fille, la malingre et souffreteuse Anne, pour renforcer le pouvoir et la richesse de leurs familles, selon l'habitude de l'aristocratie traditionnelle, qu'elle soit territoriale (landed gentry) ou de naissance (nobility)[33],[34].

Caractère

Comme le point de vue privilégié est celui d'Elizabeth Bennet, le caractère de Darcy n'est dévoilé que progressivement, au fur et à mesure qu'elle en découvre des facettes, et à travers son interprétation, longtemps faussée par son préjugé initial[35]. Cependant la narratrice suggère des pistes pour mieux cerner un personnage qui « possède toutes les qualités » (has got all the goodness)[36], en invitant à le comparer avec son compagnon d'enfance George Wickham, qui a seulement « l'air de toutes les posséder » (all the appearance of it)[17]. Le soin qu'il met à enrichir sa bibliothèque familiale montre son désir de préserver les traditions dans une époque trouble, en perte de repères (in such days as these)[37]. D'autres indices, souvent très discrets, soulignent sa moralité au regard de l'opinion générale : ainsi, une plaisanterie de Bingley à Netherfield apprend au lecteur qu'il respecte strictement le repos dominical[N 7] et, durant le séjour d'Elizabeth à Rosings, pendant la semaine qui précède Pâques, alors que le colonel Fitzwilliam fait de fréquentes visites au presbytère, on « ne l'a vu qu'à l'église »[38].

C'est un observateur affûté et sans indulgence, à « l'œil narquois » et « ironique » (a critical et a satirical eye) estime Elizabeth. Il pratique l'humour à froid, à l'égard de Sir William par exemple, ou de Caroline Bingley[N 8], dont il sait qu'elle aimerait bien se faire épouser. Il est sérieux, réfléchi, réservé, toujours maître de soi. Cela ne veut pas dire qu'il ne ressente pas d'émotions violentes, au contraire, mais il s'efforce de toujours les garder sous contrôle[39]. Lucide sur lui-même, il reconnaît que son caractère « manque de souplesse » (« My temper.. is too little yielding »)[40] ; il prétexte, pour justifier son silence en société, qu'il n'a pas le « talent »[N 9] de lier facilement conversation avec des personnes qu'il ne connaît pas[N 10], mais c'est surtout parce qu'il « il ne veut pas s'en donner la peine » (« He will not give himself the trouble »), comme l'affirme le colonel Fitzwilliam[43].

En lisant sa lettre explicative, Elizabeth comprend que c'est un homme de devoir, rempli de respect filial pour son « excellent père » et attentif protecteur de sa jeune sœur ; en visitant son domaine de Pemberley, elle apprend qu'il est aimé comme « le meilleur propriétaire et le meilleur maître qu'on puisse trouver » (« The best landlord and the best master than ever lived »), et qu'il remplit ses devoirs héréditaires et familiaux avec sérieux : il est « bon pour les pauvres » (« affable to the poor »), et se montre un grand frère plein de sollicitude pour Georgiana[44].

Évolution du personnage

Article connexe : Elizabeth Bennet.

L'homme orgueilleux

« Elle est passable, mais pas assez jolie pour me tenter », ch. 3 (Hugh Thomson, 1894)

Premiers contacts

Ses relations avec Elizabeth, dès leur première rencontre au bal organisé à Meryton, sont un constant malentendu, fondé à la fois sur son comportement et sur la remarque à Bingley, qu'elle surprend[45] et qui suscite son animosité. Malgré l'insuffisance de cavaliers, il refuse de l'inviter, jugeant la petite provinciale qu'elle est « passable, certes, mais pas assez jolie pour [le] tenter »[46]. Même si la remarque n'était pas destinée aux oreilles d'Elizabeth, il ne s'est pas soucié qu'elle l'entende ou non. Mais, alors qu'elle reste sur la première impression qu'elle s'est faite de lui, il est obligé de revenir progressivement sur les jugements peu charitables qu'il a portés sur elle au début[N 11], et que Caroline Bingley se fait un plaisir de lui rappeler lorsqu'ils se retrouvent à Pemberley : « Je me souviens, lorsque nous avons fait sa connaissance dans le Hertfordshire, combien nous avons tous été stupéfaits d'apprendre qu'on la considérait comme une beauté ; et je me rappelle notamment une remarque que vous avez faite un soir, alors qu'ils avaient dîné à Netherfield : elle, une beauté ! J'aurais aussi bien pu appeler sa mère une femme d'esprit »[48].

Plus il la fréquente, plus il se sent attiré par elle : elle est la seule personne étrangère à son cercle d'amis avec qui il engage volontairement la conversation, avec qui il sort de sa réserve, allant jusqu'à sourire parfois, d'un sourire de connivence, qui souligne le plaisir qu'il prend à sa conversation[49]. Il aborde avec elle des sujets sérieux et même beaucoup plus personnels qu'il n'est d'usage selon les strictes règles de la bienséance, comme on le voit à Netherfield[40] et surtout à Hunsford[50],[51].

Le séjour d'Elizabeth à Netherfield

C'est au cours des trois jours qu'Elizabeth passe à Netherfield qu'il a l'occasion non seulement d'apprécier la vivacité de sa conversation, mais aussi son attrait physique. Alors qu'elle arrive pour voir sa sœur, « les bas crottés et les joues enflammées par l'exercice », il admire son teint avivé par la marche, (tout en se demandant, il est vrai, s'il était convenable pour une jeune fille de faire tout ce chemin toute seule) et note que ses yeux sont « rendus plus brillants par l'exercice ». Cette remarque, comme la première sur le même sujet, à Lucas Lodge, est surtout une provocation à l'adresse de Miss Bingley, mais il lutte de toutes ses forces contre une attirance[52] dont la narratrice prend la peine de préciser les étapes : Elizabeth l'attire et le trouble au point de lui faire perdre son assurance et son flegme habituel ; aussi, dès qu'il s'en rend compte, se réfugie-t-il derrière un masque de froideur et la voit-il partir avec soulagement[53]. Cependant, si le lecteur peut interpréter correctement l'attitude de Darcy à son égard, Elizabeth en est incapable, elle qui « ne pouvait même pas supposer qu'elle pût être l'objet de l'admiration d'un si hautain personnage » (« She hardly know how to suppose that she could be an object of admiration to so great a man »[54]). Et Darcy de son côté ne se rend pas compte qu'elle est trop occupée à le taquiner pour reconnaître les signes d'admiration qu'il lui a montrés[35].

« Laissez-moi vous dire avec quelle ardeur je vous admire et je vous aime » (Hugh Thomson, 1894).

Ses conceptions de rang et de statut social sont bousculées par la spontanéité et les manières enjouées (playfullness) d'Elizabeth. Perturbé et déstabilisé de constater qu'elle est plus à son goût que les femmes qu'il peut fréquenter dans son milieu[52], il doit la compter dans la « demi-douzaine de jeunes femmes » qu'il considère comme véritablement « accomplies » et admettre qu'elle est son égale sur le plan intellectuel. Par certains côtés, elle lui ressemble, malgré leur différence de rang et de fortune. Elle l'exprime ironiquement, sous forme de boutade, à un moment où elle n'en a pas conscience – et ne pourrait l'admettre puisqu'elle a « décidé » de le détester[55] – lorsqu'ils dansent à Netherfield[N 12], affirmant d'un ton sentencieux (harshly)[56] : « J'ai toujours vu une grande ressemblance dans notre tournure d'esprit. Nous avons tous les deux un tempérament peu sociable, réservé, peu enclin à parler, sauf si nous envisageons de dire quelque chose qui étonnera l'assistance et sera transmis à la postérité avec tout le brillant d'un proverbe » (I have always seen a great similarity in the turn of our minds. We are each of an unsocial, taciturn disposition, unwilling to speak, unless we expect to say something that will amaze the whole room, and be handed down to posterity with all the éclat of a proverb)[N 13]. En fait, elle est comme lui intelligente et observatrice, comme lui aussi elle méprise les conventions sociales stupides, déteste la vulgarité[58], aime la lecture et apprécie une « nature dont la beauté n'est pas contrariée par des fautes de goût »[59].

À Rosings Park et Hunsford

Lorsque le hasard les réunit à nouveau à Rosings Park, il se retrouve au même point qu'à Netherfield, à la différence que le colonel Fitzwilliam, qui ne sait rien du milieu d'origine d'Elizabeth, apprécie beaucoup sa compagnie[60]. Malgré ses efforts, il n'arrive plus à résister à l'attirance qu'il ressent pour elle, ce qui l'amène à la demander en mariage, de façon totalement inconséquente, puisqu'il a tout fait pour séparer Bingley de Jane[61], et malgré toutes les préventions qu'il a contre son entourage. Il les lui détaille complaisamment, conscient de commettre une mésalliance et de trahir sa caste en lui offrant une promotion sociale digne de Cendrillon. Sa déclaration formelle, apologie de ses sentiments et de ses raisons de l'épouser, ressemble étrangement à celle de Mr Collins, par son assurance et sa suffisance[62]. Il s'imagine égoïstement qu'elle admirera son débat interne et lui sera reconnaissante de l'honneur qu'il lui fait. Il est en tout cas persuadé qu'elle attend sa déclaration, comme il le lui avouera plus tard, reconnaissant sa fatuité[62].

Mais le lecteur n'« entend » pas les mots exacts qu'il dit à Elizabeth[63]. Après sa première phrase, « En vain ai-je lutté, rien n'y fait. Je ne peux réprimer mes sentiments. Permettez-moi de vous dire avec quelle ardeur je vous admire et vous aime », on passe au discours narrativisé, car c'est l'image que s'en fait Elizabeth que présente la narratrice. Et c'est une image d'autant plus intolérable qu'elle vient d'apprendre son rôle auprès de Bingley, ce qui explique sa colère[63] et son ressentiment. Quant à lui, le refus d'Elizabeth l'a stupéfié et un de ses reproches l'a particulièrement blessé, celui de ne pas s'être conduit en gentleman ; il se sent trop peu maître de lui pour réfuter calmement les accusations concernant Wickham qu'il sait injustes. D'ailleurs, l'écouterait-elle ?

La lettre à Elizabeth

Au lieu d'être rebuté par son refus, il ressent le besoin de se justifier et d'expliquer ses actes. La lettre qu'il écrit à Elizabeth va la forcer à le voir tel qu'il est et à déconstruire l'image qu'elle s'était faite de lui[63]. Par son caractère privé, elle permet des explications qu'il serait probablement incapable d'exprimer de vive-voix, et un ton qui s'affranchit des précautions oratoires du code des bonnes manières[64]. Elle est très longue, écrite serré, argumentée. Il ne se défend pas, ne s'excuse pas, il demande justice. Il s'explique clairement, en exposant les problèmes et analysant point par point ses actions[65]. Il ne peut supporter qu'elle puisse croire qu'il a agi « au mépris des sentiments d'honneur et d'humanité » (in defiance of honor and humanity) envers Wickham et rejeté « volontairement et sans raison » (willfully and wantonly) « le compagnon de [sa] jeunesse », que son père aimait.

Il lui expose, de façon argumentée[N 14], d'abord les motifs qui l'ont poussé à éloigner Bingley de Jane, admettant qu'elle puisse les trouver insuffisants, même s'il « n'a pas encore appris à les condamner » (I have not yet learnt to condemn them). Il développe longuement ses relations avec Wickham et dévoile avec beaucoup d'émotion un secret de famille, la tentative d'enlèvement de sa sœur, puis reprend un ton plus formel pour sa conclusion[65] : « Voilà, Mademoiselle, le fidèle récit des événements auxquels nous avons étés mêlés tous les deux », terminant par un touchant « Dieu vous bénisse ».

En dépit de l'affirmation de l'exorde (« Ne craignez pas, Mademoiselle, que [cette lettre] contienne la répétition des sentiments [...] qui, hier soir, vous ont si fort offusquée ») et d'un ton volontairement neutre, cette lettre soigneusement composée est une tentative pour s'attirer les bonnes grâces d'Elizabeth[66]. Il ne peut complètement cacher l'amertume qu'il ressent d'être si mal jugé par une femme qu'il admire, mais il l'excuse d'avoir cru aux mensonges de Wickham, puisqu'elle ignorait tous ces détails. Elizabeth, accablée par ces révélations, va décortiquer cette lettre et, obligée de reconnaître sa véracité, entamer de son côté une douloureuse introspection.

The real gentleman

L'évolution psychologique de Darcy n'est pas relatée dans le roman et le lecteur découvre brusquement le « Darcy nouveau » en même temps qu'Elizabeth, et par ses yeux, à Pemberley. Lorsqu'ils se rencontrent inopinément, Darcy est aussi surpris et ému qu'elle, puisqu'il « sursaute littéralement » (absolutely started) et, que « leurs joues à tous deux se couvrent d'une très vive rougeur » (the cheeks of each were overspread with the deepest blush), signe de leur embarras réciproque[67]. D'abord « figé par la surprise », il montre une extraordinaire politesse (les mots civil et civility reviennent sept fois) en engageant la conversation avec une Elizabeth horriblement mal à l'aise. Il doit faire un effort pour retrouver son sang-froid habituel, sans y parvenir tout à fait, puisque « sa voix n'était pas aussi calme que d'habitude » (his accent had none of its usual sedateness).

Darcy revient à Longbourn avec Bingley (Hugh Thomson, 1894).

Le lecteur ne saura qu'à la fin, par une des longues conversations explicatives[68]de Darcy avec Elizabeth[69], comment ses reproches (surtout celui de ne pas s'être conduit en gentleman) l'ont amené à sérieusement prendre en compte ses critiques, lutter contre ses préjugés et assouplir son comportement. Il a pris conscience que ses parents l'« avaient poussé, encouragé, voire exhorté à se montrer égocentrique et fier, à ne pas se soucier des personnes étrangères à son cercle familial » (« [They] allowed, encouraged, almost taught me to be selfish and overbearing; to care for none beyond my own family circle »). Il reconnaît qu'Elizabeth lui a ouvert les yeux sur son insupportable vanité, en lui donnant une « dure leçon ». Et l'amour qu'il lui porte lui a donné le courage de s'amender, de faire l'effort de se montrer plus sociable avec l'entourage d'Elizabeth[70], et d'écouter sans broncher les compliments de Sir William[71].

C'est par une indiscrétion, puisqu'il ne veut surtout pas qu'Elizabeth le sache, qu'elle apprend le rôle d'« ange de justice »[N 15] qu'il a joué dans le sauvetage de la réputation de Lydia – partant, de toute la famille – en négociant avec Wickham pour le contraindre à l'épouser, parce qu'il ne veut pas qu'Elizabeth pâtisse de cette situation[72], qu'il considère qu'il a sa part de responsabilité et le devoir de restaurer l'ordre social[73]. Elle apprend par la même occasion qu'il a agi en étroite collaboration avec son oncle Gardiner, dont il a pu apprécier l'intelligence, le goût et la bonne éducation, faisant mentir la méchante prédiction d'Elizabeth[74] : « Mr Darcy a peut-être entendu parler d'un endroit comme Gracechurch Street, mais un mois d'ablutions lui semblerait à peine suffisant pour s'en purifier si jamais il y mettait les pieds » (« Mr Darcy may perhaps have heard of such a place as Gracechurch Street, but he would hardly think a month's ablution enough to cleanse him for its impurities, were he once to enter it »).

Il fait amende honorable auprès de son ami, dont il a bien vu qu'il n'avait pas oublié Jane Bennet, et « lui a donné la permission », comme dit Elizabeth qui ne peut s'empêcher de le taquiner[N 16], de renouer avec elle. Invité subtilement par Elizabeth à s'expliquer, il prend le risque (relatif, puisque la visite de Lady Catherine lui a donné de l'espoir) d'un second refus[N 17] car sa deuxième demande laisse à Elizabeth une ouverture : « Si vos sentiments sont les mêmes qu'au printemps dernier, dites-le moi tout de suite... un mot de vous, et je n'aborderai plus jamais ce sujet ». Ce n'est pas un amoureux bien démonstratif, contrairement à ceux des romans sentimentaux qui font le bonheur des bibliothèques de prêt (circulating library). Jane Austen, qui a plutôt tendance à se moquer du jargon des amoureux[77], préfère laisser son lecteur libre d'imaginer ce qu'il dit à Elizabeth lorsqu'il exprime son bonheur « avec autant de bon sens et de cœur qu'on peut en prêter à un homme passionnément amoureux » (as sensibly and as warmly as a man violently in love can be supposed to do)[78].

Elizabeth ne peut s'empêcher de taquiner Mr Darcy (C.E. Brock).

Une fois châtié le snobisme aristocratique qu'il professait « parmi les étrangers », Darcy laisse apparaître sa véritable nature, celle d'un homme généreux, humaniste, avec un profond sens de l'honneur et de ses devoirs[79], un homme « parfaitement aimable » et digne d'être aimé, un authentique gentleman. Il est aussi capable, maintenant, contrairement à Lady Catherine, ridiculement arc-boutée sur les antiques et stériles privilèges du nom et de la terre, de reconnaître les mérites de la classe sociale montante, cette middle class laborieuse liée au commerce et à l'industrie, représentée par les Gardiner[19], qu'il a traités avec la plus grande amabilité lorsqu'ils lui ont été présentés, avec lesquels il s'est allié pour sauver la réputation de Lydia[80], qu'il reçoit maintenant à Pemberley « de la façon la plus intime » et qu'il aime profondément, « plein de gratitude envers les personnes qui, en conduisant Elizabeth dans le Derbyshire, avaient été l'instrument de leur union »[81]. Et, dans sa vie privée, il sait apprécier les manières gaies et alertes (lively, sportive manners), les plaisanteries et l'indépendance d'esprit de son épouse[82].

Traitement littéraire

Pour rendre la complexité de son personnage de papier visible au lecteur, Jane Austen va multiplier les points de vue narratifs. La narratrice omnisciente fournit quelques éléments descriptifs et suggère quelques pistes pour le cerner, lui-même s'exprime dans ses conversations (au style direct) et se dévoile dans sa lettre à Elizabeth, mais le regard des autres personnages montre qu'on peut le « lire » et l'interpréter de façons contradictoires[83].

Un archétype

Jane Austen dote Darcy des traits archétypiques du héros noble traditionnel empruntés à Sir Charles Grandison[14] : il est « beau », il est « grand », il a de la « prestance », un « noble maintien », il est aussi un personnage de grande moralité, logique, calme, serein, maître de lui-même, d'apparence austère, qui prend des décisions et agit entièrement en se fondant sur la logique. Mais elle lui ajoute des traits de caractère négatifs comme l'arrogance et le manque de délicatesse, qui appartiennent au type traditionnel du riche séducteur de la jolie jeune fille pauvre[84],[N 18] et qui masquent ses qualités de cœur aux yeux de certains autres personnages.

Jane Austen utilise fréquemment l'opposition de deux tempéraments, l'un calme et l'autre vif, deux sœurs, deux ami(e)s, deux rivales[85]. Chez les Bennet, le caractère de Jane est l'opposé de celui d'Elizabeth. Pour Darcy, elle crée deux types d'opposition. D'abord, elle souligne la profonde amitié et le contraste entre les deux amis, Darcy, intelligent, mais« hautain, réservé, sévère », à la politesse distante[86] et Bingley, ouvert, plein d'entrain, toujours à l'aise en société, mais plus superficiel, manquant de caractère et trop dépendant de Darcy[87]. Mais elle en crée aussi une autre, plus subtile, entre les deux « frères » ennemis, Darcy le parfait honnête homme et Wickham le mauvais garçon menteur et manipulateur[N 19], ce qui lui donne l'occasion de mettre à l'épreuve le jugement d'Elizabeth sur réalité et apparence[79].

Le point de vue de la narratrice

À Lucas Lodge, Elizabeth est déterminée à ne pas danser avec Darcy, mais il ne prend pas mal son refus. (C.E. Brock, 1895).

La narratrice n'exerce pas directement son ironie envers Darcy, laissant ce plaisir à son héroïne, tout au plus s'amuse-t-elle à le placer avec Elizabeth dans des situations déstabilisantes pour l'un ou l'autre, compte-tenu de leurs sentiments réciproques, comme le remarque Laurie Lyda[88] : il est disposé à danser avec elle à Lucas Lodge, mais ne se sent pas offensé par sa résistance malicieuse ; il la prend par surprise en l'invitant à Netherfield, mais elle n'est pas fâchée d'être sa cavalière au vu de tout le monde. La narratrice pratique aussi l'humour des occasions ratées[89] : quand Darcy vient à Hunsford faire sa déclaration, Elizabeth vient de découvrir son rôle dans la défection de Bingley, et quand il lui rend visite à Lambton, elle vient d'apprendre l'enlèvement de Lydia.

Quelques indices montrent qu'il n'est pas le monstre d'orgueil froid et d'indifférence hautaine que s'imagine Elizabeth. Les modifications de ses sentiments et de son attitude à son égard sont signalées au lecteur, qui est témoin de la progression de sa passion[85]. Il n'y a pas d'utilisation de la focalisation interne pour Darcy[52], contrairement à Elizabeth, mais il est le seul personnage dont la narratrice omnisciente éclaire le débat intérieur et l'évolution psychologique, tout en précisant bien qu'Elizabeth n'en est pas consciente. Elle relève ainsi la découverte « mortifiante » des qualités (physiques) de la jeune fille[90], en particulier la vivacité de ses yeux noirs[61], l'obligeant à reconsidérer ses premières impressions, puis les étapes de l'attraction irrépressible qu'il éprouve pour elle pendant son bref séjour à Netherfield : d'abord aucune femme ne l'a « subjugué » à ce point[91], puis « il sent le danger de lui accorder trop d'attention »[40], et enfin, il est soulagé de la voir partir parce qu'« elle l'attirait plus qu'il ne l'aurait voulu »[92]. L'interaction directe entre une héroïne sûre d'elle et un héros déstabilisé est quelque chose d'assez nouveau dans la fiction romanesque[93].

Plus tard, lorsqu'un concours de circonstances les réunit fortuitement à Pemberley, c'est en focalisation externe que sont soulignés sa surprise, son trouble, sa voix altérée, la politesse de ses questions, le silence qui tombe... signes extérieurs d'une forte émotion, qu'Elizabeth tente d'analyser ensuite, « ne sachant que penser »[94]. Mais le lecteur est prévenu, lui, que « Darcy voulait absolument se laisser charmer [par Elizabeth] »[95]. Pour certains critiques, comme Marvin Mudrick, ce portrait de Darcy dans la deuxième partie du roman le rapproche un peu trop du héros conventionnel des romans sentimentaux comme ceux de Fanny Burney[96].

Regard et jugement d'autrui

Elizabeth Bennet

Elle est le regard privilégié, dont les sentiments et le jugement, présentés en focalisation interne[97], évoluent peu à peu. Elle commence par interpréter toujours négativement les mots ou les attitudes de Darcy, à cause de l'image de lui qu'elle s'est construite. Elle la lui renvoie avec une franchise un peu agressive quand il vient la demander en mariage, lui reprochant « arrogance, suffisance, mépris égoïste des sentiments d'autrui »[98]. Ainsi, elle lui trouve un « sourire dont elle crut deviner l'origine » dans leur premier tête-à-tête à Hunsford, et « un sourire de fausse incrédulité », lorsqu'elle l'accuse d'avoir brisé le bonheur de Jane. La première déclaration maladroitement prétentieuse de Darcy, est filtrée par sa subjectivité et son ressentiment[63] : « Elle pouvait facilement voir qu'il était certain d'une réponse positive. Il parlait d'appréhension et d'anxiété, mais son attitude exprimait une réelle assurance » (she could easily see that he had no doubt of a favourable answer. He spoke of apprehension and anxiety, but his countenance expressed real security[99]).

Plus tard, elle passe de la surprise incrédule, à Pemberley en entendant les éloges de Mrs Reynolds : « Est-ce là Mr Darcy ? » ; au doute, à Lambton, quand il devient distant et préoccupé : « elle comprit aussitôt » qu'il s'éloignait d'elle ; puis au trouble, quand elle le voit revenir à Longbourn avec Bingley : « sa stupéfaction était presque semblable à celle qu'elle avait ressentie en découvrant le changement de son comportement dans le Derbyshire », au fur et à mesure que ses sentiments pour lui évoluent[100] et qu'elle admet l'idée que, finalement, « sa tendresse [pour elle] et ses vœux n'ont pas changé ».

Les autres personnages

Les détracteurs

Darcy apparaît en premier à travers le regard et les commérages des habitants de Meryton (Chapitre III). La narratrice en précise les étapes : « un autre jeune homme », l'« ami » de Bingley, « Mr Darcy » qui attire l'attention de l'assemblée par sa noble prestance et la rumeur de sa grande richesse[101]. Mais très vite l'admiration se tourne en animosité quand Darcy ne daigne pas se plier aux usages : « il était l'homme le plus orgueilleux, le plus désagréable du monde ». La superficialité des critères[102] et la versatilité de l'opinion de Meryton, « société bavarde et volubile, vouée au snobisme et à la calomnie »[103], seront souvent dénoncées au cours du récit.

De tous, Mrs Bennet est la plus vindicative, la plus ridiculement tenace dans la « véhémence de sa désapprobation ». La narratrice souligne l'outrance de ses critiques : « elle raconta avec beaucoup d'aigreur et quelque exagération l'impolitesse choquante de Mr Darcy [...] un homme très déplaisant, affreux [...] Je déteste tout à fait cet homme »[104], et signale qu'Elizabeth, avant de quérir son approbation pour épouser Darcy, se demande « si toute sa richesse et sa noblesse suffiront à vaincre l'horreur qu'il lui inspire »[105].

George Wickham est le plus sournois, sa version diffamatoire des faits frôlant de près la vérité. À une Elizabeth choquée mais satisfaite d'être confortée dans son antipathie, il brosse avec délectation – Darcy, plus tard, le soupçonnera d'avoir voulu se venger – le portrait d'un « frère ennemi »[N 20], injustement cruel à son égard, jaloux de la préférence de son père pour son filleul[N 21]. Rien de ce qu'il lui raconte du comportement de Darcy envers ses tenanciers et Georgiana[107] n'est faux, mais il l'attribue uniquement à la vanité et l'orgueil familial.

Les admirateurs
Lady Catherine se déclare persuadée de l'attachement croissant de Darcy pour Rosings.

Ils sont de deux sortes, leur vision de Darcy est donc contrastée, et la narratrice les traite différemment :

Il y a les ambitieux, intéressés par la situation sociale et la richesse du grand propriétaire foncier, qu'elle traite toujours avec ironie[108] et qui verront leurs espoirs déçus. Miss Bingley, « sa fidèle assistante »[109] qui aimerait bien se faire épouser, approuve tout ce qu'il dit et cherche à lui complaire, ne lui reconnaissant aucun défaut dont on puisse se moquer[110]. Lady Catherine, pétrie d'orgueil et de volonté de puissance, admire en lui le maître de Pemberley, « l'héritier d'une famille très ancienne quoique non-titrée », le neveu qui, en épousant sa riche héritière de fille, augmentera la richesse et le pouvoir de la famille, mais elle n'a finalement pas d'emprise sur lui[111].

Et il y a ceux dont l'attachement à Darcy repose sur l'affection et la connaissance de ses qualités, mais ils dépendent de lui : Charles Bingley, l'ami fidèle, a une confiance un peu trop aveugle[87], Georgiana, la petite sœur, un amour rempli d'un respect quasi filial. Mrs Reynolds, l'intendante dévouée, qui le connaît depuis l'enfance, fait de lui un portrait moral particulièrement flatteur, « s'étendant sur ses nombreux mérites avec énergie » : il est bienveillant envers les pauvres comme son père avant lui, c'est le meilleur des maîtres et des propriétaires, tous les employés du domaine ne diront que du bien de lui[112]. Pour Elizabeth, les appréciations de Mrs Reynolds ébranlent un peu plus les certitudes que la lettre de Darcy avait déjà entamées[113] : « Y a-t-il éloge de plus de valeur que celui d'un serviteur intelligent ? ».

Les indécis

Les autres personnages, plus sobres ou plus sages, n'ont pas d'opinions tranchées : Jane, toujours mesurée, ne veut pas juger Darcy sans autres preuves que des confidences non vérifiées (et elle considère comme un critère de qualité qu'il soit tombé amoureux d'Elizabeth). Charlotte Lucas lui reconnaît le droit d'être fier, compte-tenu de sa situation dans le monde. Mrs Gardiner reste prudente quand Wickham le dénigre, car elle n'a que de vagues souvenirs d'on-dit sur le caractère du jeune Fitzwilliam Darcy. Après l'avoir rencontré à Pemberley, elle ne lui reconnaît qu'un peu de « hauteur[114] », qu'elle ne juge « pas déplacée », et, après son intervention pour organiser le mariage de Lydia, écrit à Elizabeth tout le bien qu'elle pense de lui, de ses opinions et de son comportement à leur égard.

L'expression directe

Contrairement à Wickham, Darcy ne porte pas de masque : l'homme public et son être intime sont identiques[115] ; aussi ses interventions dans les dialogues éclairent-elles les côtés désagréables comme les côtés profonds de son personnage, mais c'est dans la lettre à Elizabeth où il analyse ses motivations[65], et lui dévoile des faits que seul le colonel Fitzwilliam connaît aussi[63], qu'il parle à voix nue. Cette lettre, dont Elizabeth est obligée d'admettre la sincérité et la véracité, relève du monologue intérieur[66] et révèle directement au lecteur toute la complexité, le contexte familial, le sens des responsabilités de Darcy, sans le biais de la narratrice omnisciente, ou l'écran d'Elizabeth.

Les conversations explicatives finales entre les deux héros, signes qu'ils ont tous deux vaincu leurs pré-jugés et leur orgueil mal placé (improper pride), soulignent leur compréhension mutuelle, fondées sur la tolérance et le compromis[116]. Jane Austen y présente un Darcy courtois, ouvert, sincère, préfiguration du héros selon les normes de la littérature victorienne[106].

De l'écrit à l'écran

Orgueil et Préjugés est, de tous les romans de Jane Austen, celui qui a bénéficié du plus grand nombre d'adaptations, que ce soit pour le grand ou le petit écran. Mais transposer à l'écran un texte publié en 1813 pose au scénariste et au metteur en scène un certain nombre de problèmes. De plus, comparer les diverses interprétations du personnage nécessite d'avoir accès aux œuvres, ce qui n'est possible, en France, que pour certaines[117].

La demande en mariage à Hunsford, par Laurence Olivier dans le film de 1940.

Le personnage principal est toujours un personnage féminin dans les romans de Jane Austen, et Darcy apparaît au lecteur essentiellement sinon exclusivement à travers la vision d'Elizabeth. Cette position effacée ne peut satisfaire un spectateur et surtout une spectatrice moderne[118] qui a besoin de voir un héros masculin digne d'être aimé par l'héroïne. Les scénaristes ont donc souvent étoffé le rôle de Darcy, pour en faire un héros à part entière et non un personnage secondaire. Il faut aussi satisfaire un public dont la mentalité a beaucoup évolué, des spectateurs habitués aux love stories romantiques. Les adaptations rééquilibrent donc la relation hommes/femmes, en donnant aux protagonistes masculins une place de choix dans l'intrigue[119].

Mais les adaptations sont aussi tributaires de l'époque où elles sont réalisées. Dans la première version pour le cinéma, celle de 1940, l'intrigue est menée selon l'esthétique à la mode des screwball comedies hollywoodiennes, et Laurence Olivier joue un Darcy snob, méprisant Elizabeth parce que d'une classe sociale inférieure à la sienne. La rapidité de l'action ne permet pas de donner de la profondeur au personnage[120], et ses apparitions à l'écran sont peu nombreuses. Son rôle est souvent réduit à celui de faire-valoir de Greer Garson, qui joue une Elizabeth délurée et insolente. Cependant l'acteur, qui a joué avec succès Heathcliff l'année précédente, a un jeu très expressif, particulièrement dans la scène de la demande en mariage ou celle de la réconciliation[120].

Colin Firth reste pour nombre de spectateurs « le parfait Mr Darcy »[121].

Le scénario et la mise en scène de la version de 1980, en cinq épisodes pour la BBC, présentent, comme dans le roman, un Darcy vu de l'extérieur : le spectateur le voit donner sa lettre à Elizabeth, il découvre l'arrivée de Darcy à Pemberley et ce qu'il a fait pour Lydia en même temps qu'Elizabeth. Le grand et sombre David Rintoul joue un personnage méprisant et snob, distant et réservé, mais la production a choisi de ne pas faire apparaître dans le jeu de l'acteur l'évolution psychologique du personnage[122], aussi garde-t-il une certaine raideur et un visage impassible, qui ne s'éclaire qu'à la fin, dans les scènes d'explication tirées des chapitres 16 et 18 du tome III, où on le voit sourire à une Elizabeth au comportement plutôt réservé, sous les branches d'un grand arbre[123].

L'adaptation en 6 épisodes que fit Andrew Davies pour la BBC en 1995 fait au contraire la part belle à Darcy, mettant en évidence ce qui n'est qu'esquissé, ou sous-entendu, dans le roman. Colin Firth en fait un personnage hautain et sûr de lui, mais rapidement troublé par Elizabeth, et attiré par elle sexuellement et intellectuellement. La mise en images d'éléments narratifs comme la lettre à Elizabeth, et des scènes ajoutées, comme la scène d'ouverture où on le voit à cheval avec Bingley et celle où il s'entraîne dans une salle d'armes, font apparaître une personnalité complexe[123]. Mais, pour Andrew Davies, Darcy est aussi un jeune homme qui a besoin parfois de se libérer du carcan des responsabilités qui lui incombent, d'où la scène de l'étang, scène de purification qui symbolise sa transformation[124], puisqu'il se débarrasse, en même temps que de ses habits, de son orgueil et de ses préjugés sociaux. Les scènes finales, ajoutées aussi, montrent le double mariage, puis un Darcy maintenant très souriant, qui, une fois que la calèche qui les emporte loin de la société s'est ébranlée, embrasse sa jeune épouse, geste que Jane Austen aurait certainement jugé très « improper », mais qui répond aux attentes des spectateurs modernes[125].

La dernière version hollywoodienne, le film sorti en 2005, centre à nouveau le récit sur Elizabeth, et montre un Darcy très jeune, plus timide qu'orgueilleux, un jeune homme qui pleure encore la mort de ses parents, qui se cherche encore, subjugué corps et âme par l'amour[126]. Dans l'interprétation de Matthew Macfadyen Darcy est un personnage qui a beaucoup de mal à échapper à sa conception hiérarchisée de la société[127], mais qui doit passer à une vision complètement romantique de la vie pour se faire accepter par Elizabeth. Leur attirance sexuelle réciproque est visible dès la scène orageuse de la première demande en mariage, mais ce Darcy-là doit encore mûrir émotionnellement. Son défaut est moins l'orgueil qu'une sorte de maladresse agressive dans son comportement[126].

Postérité du personnage

Darcymania et avatars

Dans le monde anglo-saxon, Jane Austen est souvent considérée comme la créatrice du roman d'amour, (romance novel, que la collection Harlequin a contribué à populariser) et Darcy non seulement comme le plus romantique des héros de toute la littérature[128], mais comme l'archétype de l'idéal masculin[129]. L'intérêt pour le « délicieux » Darcy, comme l'appelle Mary Russell Mitford, commence dès la parution du roman et, en admirant « un homme comme Darcy »[130], elle semble oublier qu'il est un être de papier.

À l'écran

Darcy interprété par Laurence Olivier

Cependant, la « Darcymania » s'applique surtout aux adaptations à l'écran : il y en a eu une première vague en 1940 à la sortie du film américain, autour de Laurence Olivier. Une autre, centrée sur Colin Firth, a suivi la diffusion du téléfilm de la BBC en Angleterre puis aux États-Unis en 1996. Le réseau Internet l'a relayée : plusieurs sites consacrés à Jane Austen sont apparus, notamment le très sérieux Republic of Pemberley, qui contient aussi des « fanfictions » dont un grand nombre ont Darcy comme personnage principal[131], et Derbyshire Writers' Guild[132]. Des œuvres imprimées ont suivi, la plupart en langue anglaise[133]. La diffusion du téléfilm en DVD et en version française a fait découvrir la série, et parfois le roman, aux francophones et entraîné la création de forums en français[134].

Les deux adaptations modernisantes d'Orgueil et Préjugés font de Darcy un étranger confronté à une société spécifique : un Anglais à une communauté mormone dans Pride & Prejudice: A Latter Day Comedy en 2003, et un bel Américain à la société indienne dans Coup de foudre à Bollywood, (Bride and Prejudice) en 2005, se heurtant à une Elizabeth qui poursuit ses études ou tient à son travail[135].

L'interprétation de Darcy par Matthew Macfadyen dans le film de Joe Wright de 2005 a relancé une vague de Darcymania, quoique nettement moins marquée que celle suscitée par Colin Firth. L'audience, liée à une sortie sur grand écran et à la présence de Keira Knightley dans le rôle principal, a entraîné l'apparition en français de forums, de blogs et d'œuvres de fiction inspirées par cette vision de Darcy, qui proposent une suite de l'histoire[136].

En littérature

L'avatar de papier le plus célèbre reste Marc Darcy, le romantique rival de Daniel Cleaver dans le cœur de Bridget Jones, personnage créé le 28 février 1995 par Helen Fielding pour The Independant. Inspiré par l'interprétation de Colin Firth, Marc Darcy apparaît le 3 janvier 1996 dans les colonnes du journal. Son rôle est beaucoup plus développé dans le roman paru en octobre 1996[135].

Les nombreux auteurs d'adaptations du roman, qu'il s'agisse de réécritures (développement des ellipses narratives, par exemple) ou d'œuvres dérivées (prequels, sequels), donnent souvent beaucoup de place à Darcy. On peut citer, parmi une vaste production parfois réussie, Fitzwilliam Darcy, Gentleman, (trois volumes, 2003, 2004, 2005) de Pamela Aidan, ou The Darcys and the Bingleys (2008) de Marsha Altman[137]. Les auteurs imaginent aussi le couple Darcy résolvant des mystères ou des intrigues policières, comme North by Northanger (or the Shades of Pemberley) : A Mr & Mrs Darcy Mystery de Carrie Bebris (2007) ou exploitent le goût du public pour les histoires de vampires et le paranormal, d'où le parodique Orgueil et préjugés et zombies ou Mr. Darcy Vampyre de la prolifique Amanda Grange[138], parus en 2009.

Ailleurs...

Prosper Mérimée, qui avait à défendre sa réputation de séducteur, se met en scène dans un roman paru en 1833, La Double Méprise[139], sous le masque du personnage principal masculin qu'il appelle Darcy[140].

Dans le film britannique St Trinian's, sorti en 2007, où joue Colin Firth, le petit chien s'appelle Mr Darcy.

Durant la campagne électorale pour l'élection présidentielle américaine de 2008, on a pu lire, dans le New York Times du 3 août 2008, un article développant l'idée que « le sénateur (Obama) est une incarnation moderne de l'intelligent, hautain, réservé et pointilleux Mr Darcy »[141].

Dans un contexte tout différent, une protéine (MUP), qui joue un rôle important dans l'attraction sexuelle d'une souris pour un mâle donné, a été baptisée Darcin en 2010, en hommage ironique à Darcy (et la fascination qu'il exerce tant sur Elizabeth Bennet que sur les lectrices d'Orgueil et Préjugés)[142],[143].

Représentations

On sait que Jane Austen se faisait une idée très précise de Jane et Elizabeth Bennet[144], mais elle n'a pas dit comment elle imaginait Mr Darcy. Les premières représentations de Darcy apparaissent dans les éditions illustrées du roman, au XIXe siècle, par C. E. Brock en 1885[145] et Hugh Thomson en 1894[146].

Pour les besoins des séries de 1980 et 1996 ont été exécutés deux miniatures et deux portraits : un portrait en buste de Darcy/Rintoul pour la première et un grand portrait en pied de Darcy/Colin Firth dans le style de Thomas Lawrence pour la seconde. Dans le film de 2005, c'est un buste en marbre de Darcy/Macfadyen, qu'Elizabeth contemple. Ce buste se trouve toujours[147] dans la galerie des sculptures de Chatsworth House [148].

Notes et références

Notes

  1. Interview p. XII, dans l'édition 2010 de Orgueil et préjugés chez GF-Flammarion, traduit et présenté par Laurent Bury, (ISBN 9782081229518).
  2. Une clause du testament qui fait de la roturière Cecilia une riche héritière stipule que son mari devra prendre le nom de Beverley, car elle est la dernière du nom, sinon elle sera déshéritée.
  3. Ce prénom est signalé deux fois : Mrs Gardiner se souvient « avoir entendu dire naguère que Monsieur Fitzwilliam Darcy... » (she recollected having heard Mr. Fitzwilliam Darcy formerly spoken...) et lorsqu'il écrit à Elizabeth, Darcy signe de son nom complet : Fitzwilliam Darcy. Il est fréquent à l'époque de donner comme prénom à un fils le nom de famille de sa mère, surtout quand elle vient d'une très bonne famille, ce qui explique que Darcy ait comme prénom le patronyme de son cousin le colonel[22].
  4. Chatsworth House est considéré par Donald Greene[27] comme le modèle ayant inspiré le château de Pemberley, d'autant que Jane Austen a séjourné tout à côté lors de la révision de Pride and Prejudice de 1811. Mais tous les critiques ne sont pas d'accord, puisque Chatsworth est nommé comme l'un des lieux visités par les Gardiner. Vivien Jones[28] signale que William Gilpin fait, dans ses Observations de 1772, une description très peu enthousiaste de ce domaine, et que, en décrivant Pemberley, « Jane Austen continue la tradition dix-huitiémiste de la création de paysages à connotation morale, où s'équilibrent la nature et l'art, la beauté et l'utilité ».
  5. Ce qui correspond à quelque 15 000 £ brut, car les taxes (on est en guerre avec la France) sont considérables : taxes foncières, taxes sur les fenêtres, les chevaux de monte, les véhicules, la soie, les serviteurs (pas les servantes), les chiens, les produits courants (café, sucre, sel, chandelle, savon...)[30]
  6. Dans le dernier chapitre de Northanger Abbey, la narratrice précise qu'elle « est consciente que les règles de la composition lui interdisent d'introduire un personnage qui n'a pas de lien avec l'histoire » (aware that the rules of composition forbid the introduction of a caracter non connected with my fable)
  7. Jane Austen 1853, p. 43 : « le dimanche soir, quand il n'a rien à faire ».
  8. Par exemple Jane Austen 1853, p. 49 : « Vous avez choisi [de vous promener avec Elizabeth], soit parce que vous avez des confidences à échanger [il sait bien que non], soit pour [me] faire admirer l'élégance de votre démarche [ce dont il est persuadé] ».
  9. Mais « toute censure de soi-même est un compliment indirect » a dit Samuel Johnson, que Jane Austen admirait beaucoup. (Rapporté par James Boswell dans The life of Samuel Johnson, 25 avril 1778, cité dans le tome I des Œuvres romanesques de Jane Austen coll. La Pléiade, note 2, p. 1067). Darcy a précédemment reproché à Bingley « cette apparence d'humilité », qu'il a qualifiée de « vantardise indirecte »[41].
  10. « I have not the talent of conversing easily with those I have never seen before »[42]. C'est peut-être de la timidité ou de l'orgueil méprisant, mais c'est aussi de l'impolitesse, un refus de se plier aux règles du savoir-vivre.
  11. Ian Watt[47] considère que les relations conflictuelles entre Elizabeh et Darcy relèvent de la tradition de l'invective de la comédie classique : ils commencent par dire du mal de l'autre à leur entourage, puis, une fois réunis, entament un combat verbal qui, à son paroxysme, entraîne le rejet, l'auto-punition, l'apprentissage et le changement.
  12. Pour la symbolique des bals dans la relation entre Darcy et Elizabeth, voir les bals, fonction symbolique.
  13. Lorsque, dans le salon de Rosings Park, il vient lui parler quand elle est au piano, et lui dit : « nous ne jouons ni l'un ni l'autre pour des inconnus » (« We neither of us perform to strangers »), il souligne à son tour leur ressemblance, précise John Wiltshire[57].
  14. Toute personne qui faisait ses Humanités apprenait au cours de ses études secondaires les règles de la rhétorique classique et l'art du discours
  15. Avenging Angel est le terme employé page 12 dans The Making of Pride and Prejudice, de Sue Birtwistle & Susie Conklin, Penguin Books 1995, (ISBN 0-14-025157-X), pour mettre en évidence cette action quasi héroïque de Darcy, s'élançant à la recherche de l'homme qui a failli ruiner la réputation de sa sœur l'année précédente, marchandant avec lui et l'achetant en quelque sorte, en payant son brevet d'officier et la dot de Lydia, tout cela par amour pour Elizabeth - sachant que s'il l'épouse, cet homme honni deviendra son beau-frère.
  16. Ce n'est qu'à moitié une plaisanterie : Darcy a l'attitude paternaliste traditionnelle du landlord avec Bingley[75] comme avec sa sœur, « incapable d'offenser un frère qu'elle considère presque comme un père ».
  17. Pour Mary Waldron[76], Jane Austen n'exploite pas la situation de la façon conventionnelle qui voudrait que le secret, les doutes, les quiproquos se prolongent interminablement.
  18. Sur The Republic of Pemberley, Bethany Grenald, « a fait une comparaison entre Darcy, que rejette Elizabeth » et Crawford que rejette Fanny Price dans Mansfield Park.
  19. Son nom Wickham rappelle l'adjectif wicked : méchant, mauvais.
  20. Pour Jennifer Preston Wilson, Jane Austen actualise le mythe biblique des frères rivaux, en particulier les jumeaux Jacob et Esaü[106].
  21. Le terme anglais Godson (mot-à-mot fils [en] Dieu) souligne plus que le terme français la filiation spirituelle.

Références

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  56. Jane Austen 1853, p. 80
  57. John Wiltshire 2001, p. 111
  58. Lydia Martin 2007, p. 72
  59. Jane Austen 1853, p. 212
  60. Jane Austen 1853, p. 151
  61. a et b Mary Waldron 2001, p. 54
  62. a et b John Wiltshire 2001, p. 105
  63. a, b, c, d et e John Wiltshire 2001, p. 113
  64. Beyond Drawing-Room Conversation sur JASNA, 2005
  65. a, b et c The Masculine Pen : Caracter and Correspondance in Pride and Prejudice sur JASNA, 2002
  66. a et b Elisabeth Lenckos, « Why don’t Austen’s lovers write more often? » sur JASNA, 2005
  67. Mary Ann O'Farrell, The nineteenth-century English novel and the blush, 1997 (ISBN 9780822318958) [lire en ligne], p. 15-16 
  68. Ann Elizabeth Gaylin 2002, p. 37
  69. Jane Austen 1853, p. 323-324
  70. Pride and Prejudice: A Classic Love Story sur JASNA, 1989
  71. Jane Austen 1853, p. 336
  72. Secrets, Silence and Surprise in Pride and Prejudice sur JASNA, 1989
  73. Michael Kramp 2007, p. 86-87
  74. Jane Austen 1853, p. 124-125
  75. Michael Kramp 2007, p. 82
  76. Mary Waldron 2001, p. 59-60
  77. Pierre Goubert 1975, p. 68
  78. Jane Austen 1853, p. 320
  79. a et b The Two Gentlemen of Derbyshire sur JASNA, 2005
  80. Jane Austen, Vivien Jones 2003, p. xxxiv
  81. Jane Austen 1853, p. 340, dernière phrase du roman.
  82. Jane Austen, Vivien Jones 2003, p. xxxv
  83. John Wiltshire 2001, p. 109
  84. Mary Waldron 2001, p. 40
  85. a et b Pierre Goubert 1975, p. 129
  86. Jane Austen 1853, p. 13
  87. a et b Pierre Goubert 1975, p. 202
  88. The Function Of Dance in Pride and Prejudice sur JASNA, 2001
  89. Lydia Martin 2007, p. 190
  90. Jane Austen 1853, p. 19
  91. Jane Austen 1853, p. 45 bewitched = ensorcelé.
  92. Jane Austen 1853, p. 51
  93. Mary Waldron 2001, p. 51
  94. Jane Austen 1853, p. 218
  95. Jane Austen 1853, p. 227
  96. Marvin Mudrick 1968, p. 119-120
  97. Jean Kaempfer & Filippo Zanghi, « Le point de vue du personnage » sur Université de Lausanne, 2003
  98. Ivor Morris, Jane Austen and the interplay of character, 1999 (ISBN 9780485121421) [lire en ligne]  p. 6
  99. Jane Austen 1858, p. 166-167
  100. John Wiltshire 2001, p. 116
  101. Jane Austen 1853, p. 7
  102. Lydia Martin 2007, p. 27
  103. Norhtrop Frye, cité par Lydia Martin 2007, p. 37
  104. Jane Austen 1853, p. 10
  105. Jane Austen 1853, p. 329
  106. a et b The Development of Darcy in Pride and Prejudice sur JASNA, 2004
  107. Jane Austen 1853, p. 69-72
  108. John Halperin, « Inside Pride and Prejudice » sur JASNA, 1989
  109. Jane Austen 1859, p. 33
  110. Marvin Mudrick 1968, p. 121
  111. Marvin Mudrick 1968, p. 103
  112. Jane Austen 1853, p. 215
  113. Judith Terry, « Servants in Jane Austen’s England » sur JASNA, 1988
  114. John P. Hardy, Jane Austen's heroines: intimacy in human relationships, 1984 [lire en ligne]  p. 53
  115. John Wiltshire, p. 118
  116. Ann Elizabeth Gaylin 2002, p. 36
  117. Lydia Martin 2007, p. 17
  118. Lydia Martin 2005, p. 58
  119. Lydia Martin 2007, p. 61
  120. a et b Sue Parrill 2002, p. 51
  121. On the move: Colin Firth sur The Sunday Times, 17 juin 2007
  122. Lydia Martin 2007, p. 105
  123. a et b Comparing the two BBC P&Ps sur The Republic of Pemberley. Consulté le 6 avril 2010
  124. Lydia Martin 2007, p. 71
  125. Lydia Martin 2007, p. 110
  126. a et b Pride & Prejudice (2005) Proves Itself a Film for Our Time sur JASNA, 2007
  127. Joe Wright’s Pride & Prejudice : From Classicism to Romanticism sur JASNA, 2007
  128. Darcy's Vampiric Descendants sur JASNA, 2009
  129. Michael Kramp 2007, p. 88-89
  130. B. C. Southam, Jane Austen: the critical heritage, p. 55 
  131. Bits of ivory
  132. Derbyshire Writers' Guild sur austen.com
  133. Jane Austen Sequels
  134. The Inn at Lambton
  135. a et b Appropriating Austen sur JASNA, 2008
  136. Âmes sœurs, une suite d'Orgueil et Préjugés de Jane Austen
  137. Isabelle Ballester, Les nombreux mondes de Jane Austen [lire en ligne]  p. 98-103
  138. Amanda Grange, Mr. Darcy Vampyre, 2009 
  139. Prosper Mérimée, La Double Méprise 
  140. Cité dans Anne Boquel, Étienne Kern, Une histoire des haines d'écrivains: de Chateaubriand à Proust, Flammarion, coll. « Champ essais », 2010 (ISBN 9782081231467) 
  141. Mr. Darcy Comes Courting sur New York Times. Consulté le 26 avril 2010
  142. Darcin: a male pheromone that stimulates female memory and sexual attraction to an individual male's odour, BMC Biol, juin 2010
  143. Moskowitz, « Biologists Learn Why Mice Go Gaga for Urine » sur FoxNews.com, FOX News Network, 3 juin 2010. Consulté le 9 juin 2010
  144. Lettre du lundi 24 mai 1813 à Cassandra
  145. Illustrations sur The Republic of Pemberley
  146. Illustrations de Hugh Thomson 
  147. Buste de Darcy
  148. La galerie de sculptures de Chatsworth

Annexes

Bibliographie

Bibliographie primaire

Bibliographie secondaire

  • (en) Ann Elizabeth Gaylin, Eavesdropping in the novel from Austen to Proust, Cambridge, Cambridge University Press, 2002 (ISBN 0521815851) [lire en ligne] 
  • (en) Jocelyn Harris, Jane Austen's Art of Memory, Cambridge University Press, 2003, 284 p. (ISBN 9780521542074) [lire en ligne], partie 4 : Pride and Prejudice 
  • (en) Michael Kramp, Disciplining love: Austen and the modern man, Ohio State University Press, 2007, 202 p. (ISBN 9780814210468) [lire en ligne]  Chapitre 4 : Improving Masculinity in Pride and Prejudice
  • (en) Marvin Mudrick, Jane Austen: irony as defense and discovery, University of California Press, 1968, 267 p. [lire en ligne] 
  • (en) Sue Parrill, Jane Austen on film and television: a critical study of the adaptations, McFarland, 2002, 221 p. (ISBN 9780786413492) [lire en ligne]  édition illustrée
  • (en) Reeta Sahney, Jane Austen's heroes and other male characters: a sociological study, Abhinav Publications, 1990, 193 p. (ISBN 9788170172710) [lire en ligne] 
  • (en) Dennis Walder, The Realistic Novel, 1995 [lire en ligne] 
  • Pierre Goubert, Jane Austen : étude psychologique de la romancière, PUF (Publications de l'Université de Rouen), 1975 [lire en ligne] 
  • Lydia Martin, Les adaptations à l'écran des romans de Jane Austen: esthétique et idéologie, Editions L'Harmattan, 2007, 270 p. (ISBN 9782296039018) [lire en ligne] 

Articles connexes

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