- Lemme de normalisation de Noether
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Le lemme de normalisation de Noether, dû à la mathématicienne allemande Emmy Noether[1], donne une description des algèbres de type fini sur un corps.
On fixe une algèbre de type fini A sur un corps (commutatif) K.
Sommaire
Énoncé
Lemme de normalisation de Noether[2] : Il existe un entier positif ou nul d et un homomorphisme fini injectif de K-algèbres
- Remarques
- L'entier d est alors égal à la dimension de Krull de A. Si A est intègre, c'est aussi le degré de transcendance du corps de fractions de A sur K.
- Il existe une version graduée du lemme de normalisation de Noether[3] : Soit A une algèbre graduée sur un corps K, engendrée par un nombre fini d'éléments homogènes de degrés strictement positifs. Alors il existe un entier positif ou nul d et un homomorphisme fini injectif de K-algèbres graduées
- L'homomorphisme fini implique que tout élément a de A est entier sur , c'est-à-dire qu'il vérifie une relation polynomiale du type
avec les .
Une esquisse de preuveOn présente A comme le quotient d'un anneau de polynômes par un idéal I que l'on peut supposer non nul. On choisit arbitrairement un élément non nul dans I. On cherche un changement de variables de sorte que dans les variables , P soit unitaire en Tn. Ce changement de variable est possible avec avec un convenable lorsque K est infini. C'était la preuve original de Noether[réf. souhaitée]. Si K est fini (ou quelconque), l'idée de Nagata[4] est de considérer des changements de variables du type avec une suite d'entiers naturels mi qui croît très rapidement. Une fois ce changement de variables trouvé, on a
- Exemples
- L'algèbre K[X,1 / X] = K[X,Y] / (XY − 1) est finie sur la sous-algèbre de polynômes K[X + 1 / X] (elle est engendrée comme module par 1 et X).
- Soit A = K[X,Y] / (XY). Alors l'homomorphisme , qui envoie T sur x+y (l'image de X+Y dans le quotient A), est injectif et fini.
Applications
- Supposons que A soit aussi un corps, alors A est une extension finie de K. C'est une forme du théorème des zéros de Hilbert. En effet, sous la présentation ci-dessus, on voit aisément que est aussi un corps. Ce qui implique que d = 0 et donc que A est fini sur K.
- Supposons A intègre. Alors pour tout idéal premier de A, on a[5] :
En particulier, pour tout idéal maximal de A, l'anneau local est de dimension dim A.
- Supposons que A soit Cohen-Macaulay, alors A est libre de rang fini sur un anneau de polynômes . Ceci résulte du fait que A est alors localement libre de rang fini sur [6] et du théorème de Quillen-Suslin.
Signification géométrique
- Toute variété algébrique affine sur K est un revêtement fini (ramifié) d'un espace affine (c'est-à-dire qu'il existe un morphisme fini surjectif vers un espace affine ).
- L'énoncé ci-dessus admet un analogue projectif : toute variété projective de dimension d sur K est un revêtement fini (ramifié) d'un espace projectif .
Extension séparable
On suppose que A est intègre. L'injection donnée par le lemme de normalisation induit une extension finie des corps de fractions . Quand K est de caractéristique nulle, l'extension est automatique séparable. Dans le cas général, on a[7] :
- Il existe toujours un homomorphisme fini injectif qui induise une extension finie séparable (sous la condition, nécessaire, que Frac(A) soit une extension séparable (transcendante) de K).
En termes géométriques, toute variété algébrique affine V intègre, géométriquement réduite, de dimension d, admet un morphisme fini surjectif , qui soit de plus génériquement séparable (autrement dit, il existe un ouvert dense U de tel que la restriction soit un revêtement étale (en)).
Le même énoncé reste valide en remplaçant V par une variété projective (intègre et géométriquement réduite) et l'espace affine par l'espace projectif[8].
Généralisation
Si A est de type fini sur un anneau commutatif intègre R et contenant R, alors il existe f dans R, non nul, et un homomorphisme fini injectif de R-algèbres après localisations
[9] Un tel homomorphisme n'existe pas en général sur R (considérer par exemple R = K[X] et A = RX = R[1 / X]).
Exemples d'applications
- Supposons que A soit aussi un corps, alors A est une extension finie de K. C'est une forme du théorème des zéros de Hilbert.
- En effet, sous la présentation ci-dessus, on voit aisément que est aussi un corps. Ce qui implique que d = 0 et donc que A est fini sur K.
- Supposons A intègre. Alors pour tout idéal premier de A, on a[5] :
- En particulier, pour tout idéal maximal de A, l'anneau local est de dimension dim A.
- Supposons que A soit de Cohen-Macaulay, alors A est libre de rang fini sur un anneau de polynômes .
- Ceci résulte du fait que A est alors localement libre de rang fini sur [6] et du théorème de Quillen-Suslin.
- Soit un morphisme de type fini entre schémas noethériens. On suppose f dominant (i.e. f(X) est dense dans Y). Alors l'image de f contient une partie ouverte dense de Y.
- En effet, on se ramène facilement au cas où X, Y correspondent à des anneaux intègres A, R avec R un sous-anneau de A. D'après la forme généralisée du lemme de normalisation, il existe h dans R non-nul et un homomorphisme fini injectif . On en déduit alors facilement que l'image de f contient l'ouvert principal (non-vide) D(h) de Y. Ce résultat conduit à la preuve du théorème de Chevalley sur l'image de parties constructibles.
- Soit A un anneau de Jacobson. Soit B une A-algèbre de type fini. Alors pour tout idéal maximal de B, l'image réciproque est un idéal maximal de A.
- On se ramène facilement au cas où B est un corps de type fini sur (et contient) A. On en déduit une injection finie . Donc est un corps et d = 0. Il suit que Af est un corps. Comme A est de Jacobson, on trouve que f est inversible et donc que A est un corps.
- On déduit faiclement de la propriété qui précède que toute algèbre de type fini sur un anneau de Jacobson est de de Jacobson.
- Toute variété algébrique géométriquement intègre X est birationnelle à une hypersurface d'un espace affine. Cela veut dire que X contient un ouvert non-vide qui est isomorphe à un ouvert d'une hypersurface.
Notes
- (de) E. Noether, « Der Endlichkeitsatz der Invarianten endlicher linearer Gruppen der Charakteristik p », dans Nachrichten von der Gesellschaft der Wissenschaften zu Göttingen, vol. 1926, 1926, p. 28-35 [texte intégral] Il semblerait que l'énoncé original se trouve dans
- Serge Lang, Chapter X, §4
- David J. Benson, Theorem 2.2.7
- M. Nagata, I, § 14
- David Eisenbud, Corollary 13.4
- Winfried Bruns et H. Jürgen Herzog, Proposition 2.2.11
- Irena Swanson et Craig Huneke, Theorem 4.2.2
- Kiran Kedlaya, More étale covers of affine spaces in positive characteristic, J. Algebraic Geom. 14 (2005), 187–192
- M. Nagata, I.14.4.
Bibliographie
(en) David J. Benson, Polynomial invariants of finite groups, London Mathematical Society Lecture Note Series, Vol 190, 1993
(en) Winfried Bruns et H. Jürgen Herzog, Cohen-Macaulay Rings, Cambridge Studies in Advanced Mathematics, 39, 1993
(en) David Eisenbud, Commutative algebra with a view toward algebraic geometry, Springer, coll. « Graduate Texts in Mathematics » (no 150), 1995 (ISBN 9780387942698)
(en) Serge Lang, Algebra, Addison-Wesley Publ. Co., second edition, 1984.
(en) Masayoshi Nagata, Local rings, Interscience Publ., New York, 1962.
(en) Irena Swanson et Craig Huneke, Integral closure of ideals, rings, and modules, London Mathematical Society Lecture Note Series, vol 336, 2006
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