Raymond Molinier

Raymond Molinier

Raymond Molinier (né en 1904 à Paris, mort en 1994) était l'un des deux leaders du trotskisme en France lors de l'entre-deux-guerres, rival de Pierre Naville, lié aux surréalistes.

L'entre-deux-guerres

Né au 24 rue Vieille-du-Temple, Molinier est le fils d'une Auvergnate, couturière à domicile, et d'un père travaillant aux Halles[1]. Cadet d'une famille de cinq enfants, et atteint de tuberculose, il vivait alors dans un deux-pièces du Sentier [1]. Faisant le coup de feu dès l'adolescence contre les milices patriotiques (il tire son premier coup de feu à 14 ans[1]), il rencontre Trotsky, quai de Jemmapes, en 1915, qui parle avec Alfred Rosmer, Pierre Monatte, Martov et Antonov-Ovseenko [1].

Molinier commence à diffuser Clarté, la revue du PCF de Barbusse, en 1923[1]. Il rencontre alors sa future épouse, Jeanne Martin des Pallières, aristocrate descendant d'une lignée de généraux d'Empires [1]. Elu par ses amis juifs du Bund à la direction de la section locale du PCF, il quitte le Sentier après son mariage, pour s'installer rue de Géorgie, dans le XVIe [1] (Jeanne finira par devenir la maîtresse de Lev Sedov, le fils de Trotsky[2]).

Fréquentant Boris Souvarine après le congrès de Tours (1920), il découvre l'Opposition de gauche, menée par Trotsky, en 1924, et est exclu du PCF en même temps que Souvarine, Loriot, Rosmer et Monatte[1]. Même sa femme vote pour son exclusion, avant de le rejoindre[1]. L'exclusion ne fait alors que retirer le droit de vote au sein du parti, Molinier continuant donc à militer aux côtés de celui-ci [1], donnant des cours d'alphabétisation et de marxisme près de la place Gambetta[1]. Avec sa femme, il fait alors partie du comité de rédaction du Bulletin communiste publié par Souvarine, qui mène l'Opposition de gauche[1].

Après l'expulsion de Trotsky de l'URSS, en 1929, Molinier lui rend visite à Prinkipo, en Turquie[1], rencontrant alors Pierre Frank et Jean Van Heijenoort[1]. Molinier participe alors à la création de La Vérité, en août 1929, puis, l'année suivante, de la Ligue communiste. Pierre Naville l'écarte cependant rapidement de la direction de la Ligue[1]. En 1934, après les émeutes du 6 février et le tournant « entriste » annoncé par Trotsky qui oppose l'unité à la tactique « classe contre classe » du PCF, Molinier et Franck adhèrent en tant que tendance organisée à la SFIO. Le 3 août 1934, Raymond Molinier signe ainsi un texte, dans La Vérité, intitulé « Unité organique? Oui! » dans lequel il va jusqu'à envisager la fusion entre la SFIO et le PCF[3].

Après l'expulsion des trotskystes de la SFIO (1935) et la création du Parti ouvrier internationaliste (POI), représentant officiel du trotskysme, Molinier et Franck, exclus du courant trotskyste officiel en décembre 1935 par Naville, crééent en mars 1936 le Parti communiste internationaliste (PCI). Ils publient alors La Commune, et sont également exclus de la Quatrième Internationale, publiant début 1939 Correspondance internationale [4].

La Seconde guerre mondiale

Au printemps 1939, Molinier et Franck sont en Belgique, bientôt rejoint par Rodolphe Prager (futur historien de la LCR) qui a déserté [4]. Molinier et Franck sont les seuls à échapper à l'offensive allemande, partant pour le Royaume-Uni, leurs amis belges étant presque tous arrêtés, de même que Prager, à son retour à Paris[4]. Molinier tente alors de nouer des contacts avec les trotskistes britanniques, restant isolés des trotskistes français pendant toute la guerre[4]. Avec Franck, il envoie une lettre à Trotski le 1er juillet 1940 pour se réconcilier[4]: la réponse est positive, mais Trotski est assassiné avant qu'ils ne puissent accepter son offre[4].

Après l'arrestation de Franck pour désertion, par la police britannique, Molinier s'engage, avec des faux papiers, pour les Forces belges libres[4]. L'Intelligent Service l'envoie à Lisbonne via un vol en direction du sud de la France, où il doit attendre les ordres[4]. Il monte alors une couverture avec le cirque des Cairoli, très apprécié en Allemagne[4]: ceux-ci font venir de toute l'Europe occupée des militants, sous couverture d'artistes [4]. Pendant trois mois, Molinier permet ainsi à de nombreux trotskistes d'échapper aux nazis (dont le fils et la maîtresse de Jean Van Heijenoort[4]), puis, ne pouvant prolonger son visa au Portugal, part pour le Brésil, où il demeure pendant toute la guerre[4].

Il est réintégré en février 1944 dans la Quatrième Internationale[5], mais demeure au Brésil.

Notes et références

  1. a, b, c, d, e, f, g, h, i, j, k, l, m, n et o Christophe Nick, Les Trotskistes, Fayard, 2002, p. 174 sq
  2. Christophe Nick, Les Trotskistes, Fayard, 2002
  3. Christophe Nick, Les Trotskistes, Fayard, 2002, p. 199
  4. a, b, c, d, e, f, g, h, i, j, k et l Christophe Nick, Les Trotskistes, Fayard, 2002, p. 296sq
  5. Chronologie du trotskisme en France (1928-2009) sur Dissidences.net (13 p.)

Wikimedia Foundation. 2010.

Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Raymond Molinier de Wikipédia en français (auteurs)

Игры ⚽ Поможем написать курсовую

Regardez d'autres dictionnaires:

  • Raymond Molinier — (1904 1994) was a leader of the Trotskyist movement in France prior to World War II. At the outbreak of that conflict he was abroad and only returned after the cessation of hostilities. He ceased his activity as a militant at this time …   Wikipedia

  • Parti communiste internationaliste (raymond molinier) — Pour les articles homonymes, voir Parti communiste internationaliste. Le Parti communiste internationaliste est un parti trotskiste français créé par Raymond Molinier et Pierre Frank en mars 1936, et qui publie journal « La… …   Wikipédia en Français

  • Parti communiste internationaliste (Raymond Molinier) — Pour les articles homonymes, voir Parti communiste internationaliste. Le Parti communiste internationaliste est un parti trotskiste français créé par Raymond Molinier et Pierre Frank en mars 1936, et qui publie journal « La… …   Wikipédia en Français

  • Molinier — is a surname, and may refer to: Auguste Molinier Pierre Molinier Raymond Molinier This page or section lists people with the surname Molinier. If an internal link inten …   Wikipedia

  • Molinier — puede hacer referencia a: Auguste Molinier; historiador francés. Édouard Corniglion Molinier; político y general de brigada aérea francés. Pierre Molinier; fotógrafo, pintor y poeta francés. Raymond Molinier; líder del movimiento trotskista… …   Wikipedia Español

  • Molinier — Cette page d’homonymie répertorie les différents sujets et articles partageant un même nom. Les frères Molinier sont des historiens et historiens de l art de la fin du XIXe siècle. D origine populaire, ils ont marqué l histoire de leurs… …   Wikipédia en Français

  • Raymond d'Agiles —     Raymond d Agiles     † Catholic Encyclopedia ► Raymond d Agiles     (Or AGUILERS.)     A chronicler and canon of Puy en Velay, France, toward the close of the eleventh century. He accompanied the Count of Toulouse on the First Crusade (1096… …   Catholic encyclopedia

  • Raymond VII — • Count of Toulouse and son of Raymond VI (1197 1249) Catholic Encyclopedia. Kevin Knight. 2006. Raymond VII     Raymond VII     † …   Catholic encyclopedia

  • Pierre Molinier — Pour les articles homonymes, voir Molinier. Pierre Molinier est un photographe, un peintre et un poète français né le 13 avril 1900 à Agen et décédé par suicide le 3 mars 1976 à Bordeaux. Il est surtout connu pour ses tableaux érotiques et pour… …   Wikipédia en Français

  • Pierre Molinier — (April 13, 1900 March 3, 1976) was a painter, photographer and maker of objects . He was born in Agen (France) and lived his life in Bordeaux (France). He began his career by painting landscapes, but his work turned towards a fetishistic… …   Wikipedia

Share the article and excerpts

Direct link
Do a right-click on the link above
and select “Copy Link”