Chasse au phoque

Chasse au phoque

Chasse aux phoques

Bateau de chasse aux phoques, dans le nord de la mer du Labrador, 1884
Vêtements d'Iglulik: phoque et caribou (1999)
Préparation d'un phoque annelé (2000)

La chasse aux phoques est une chasse ancienne pratiquée par les Inuits dans la région Arctique qui s'en sont servis pour maints usages en récupérant la viande, la fourrure, la graisse (ou l'huile) et les os. La vocation de la chasse est toute autre aujourd'hui, les mœurs Inuits ayant d'ailleurs changé, et la chasse commerciale et l'intérêt pour les peaux de phoques, qui sont d'une qualité unique, s'étant bien développés depuis leur avènement au XVIIIe siècle. La chasse a surtout animé un débat dont les antagonistes sont les chasseurs et les opposants à la chasse, aussi appelés groupes animalistes.

Sommaire

Historique

La chasse aux phoques et autres mammifères marins a connu un essor depuis près de trois siècles. Dans les mers du Sud, des millions d'éléphants de mer et d'otaries à fourrures sont chassés. Un prédateur naturel du phoque en Arctique, le morse, et l'Éléphant de mer du nord ont frôlé l'extinction. En France, au XIXe siècle, une colonie de phoques gris comptait plusieurs centaines d'individus en baie de Somme. Une chasse intensive fut la cause de la disparition progressive sur les bancs de sable de la baie de Somme. En 1930, on observe une baisse des reproductions et en 1960, les derniers individus disparaissent. Depuis 1987, la chasse aux blanchons (petit du phoque, dont la fourrure est blanche) est interdite.

Aujourd'hui

Dans l'Est du Canada, les populations du phoque du Groenland et du phoque gris, deux espèces chassées, ne sont pas menacées. Selon le rapport gouvernemental canadien (E1-01) sur l'évaluation des stocks de phoque du Groenland de l'Atlantique du Nord-Ouest 2000, la population aurait un peu plus que triplé depuis le niveau de 1970 passant de 1,7 millions à 5.2 millions d'individus en 2000. La chasse y a lieu sur le littoral entre Terre-Neuve et le Labrador et dans le golfe Saint-Laurent. Elle fait depuis des années l'objet de violentes protestations de la part de la communauté internationale, dont les animalistes, qui accusent la violence et la cruauté de cette chasse. En fait, le gourdin utilisé (agapik ou akapik) n'a pas bonne presse, c'est un marteau qui sert à tuer en cassant la boîte crânienne, muni d'un pic pour ramener le butin sur la glace. Selon l’article 29 du Règlement sur les mammifères marins de la Loi sur les pêches canadiennes, ce n'est qu'après avoir administré un test de réflexe de clignement qui ne provoque aucun clignement que le chasseur peut saigner le phoque en coupant ses deux artères axillaires. Cette méthode d'abattage est obligatoire selon les conditions de permis des chasseurs canadiens.

Six espèces de phoques sont concernées par cette chasse : le phoque du Groenland, le phoque à capuchon, le phoque gris, le phoque annelé, le phoque barbu ainsi que le phoque commun, dont la population globale dépasse les six millions d'individus[réf. nécessaire]. Après l'embargo mené contre la fourrure blanche des blanchons, dont la chasse révolta l'opinion publique, les chasseurs se sont tournés sur la fourrure argentée des phoques plus vieux. En effet, cette dernière plaît beaucoup aux Russes et aux Chinois[réf. nécessaire]. L'huile, la viande, le collagène et les autres produits dérivés du phoque n'ont pas beaucoup de succès commercial au Canada, entre autres à cause des boycotts s'opposant à cette chasse, alors qu'en Norvège, le gouvernement travaille à une exploitation systématique de ces parties autres que la peau[réf. nécessaire], qui sont de grande valeur commerciale.

Mesures de protection

La chasse des petits du phoque du Groenland et du phoque à capuchon est interdite depuis 1987. Le règlement sur les mammifères marins interdit le commerce, le troc ou la vente de fourrures de ces petits phoques, aux États-Unis. De plus, il est interdit de chasser les phoques dans leurs aires de reproduction, de mise à bas, le temps que les jeunes soient sevrés, qu'ils deviennent autonomes (soit 12 jours).

Pour la chasse des phoques adultes, le Canada a mis en place un système de quotas depuis 1971. On ne chasse les phoques qu'après qu'ils ont perdu leur pelage de blanchon vers l'âge de 12 jours. L'introduction de la US Marine Mammal Protection de 1972 interdit l'import de fourrures de phoques sur le territoire des États-Unis depuis le Canada.

En 1983, la communauté économique européenne bannit l'importation de blanchons et de dos bleus. En conséquence, la récolte diminue de façon draconienne. La Norvège et le Canada appliquent à la chasse aux phoques une réglementation rigoureuse et sévère qui comporte des dates et des quotas précis, spécifie les méthodes pour abattre les animaux, prévoit une formation obligatoire des chasseurs ainsi que l'homologation et le contrôle des navires utilisés. En France, les phoques jouissent d'une protection légale depuis 1961.

Campagnes des société protectrices des animaux et contre-arguments

Le blanchon n'est plus chassé au Canada, mais il continue d'alimenter le discours animaliste. Photo: Un blanchon pendant la période de chasse 2006, non loin du quai de Grosse-Île, aux Îles-de-la-Madeleine.

De nombreuses associations, telles que l'IFAW ou la Humane Society of United States mènent régulièrement des campagnes contre la chasse aux phoques. En France, dans les années 1980, Brigitte Bardot a beaucoup fait pour protéger les blanchons. En 1987, le Canada adoptait le règlement sur les mammifères marins interdisant notamment la chasse aux blanchons et encadrant davantage les pratiques de chasse[1].

En mars 2006, l'ex-membre des Beatles, Paul McCartney a été invité par la Humane Society of United States pour venir combattre la chasse aux Îles-de-la-Madeleine. Les médias relatèrent une image de son épouse tentant de caresser un blanchon sans succès : non seulement ces animaux sauvages ne veulent pas de contact avec les humains, mais toucher un blanchon de son odeur d'humain risque de le condamner à être abandonné par sa mère avant la fin de l'allaitement[réf. nécessaire].

Certains (pas Pêches et Océans Canada[2]) disent que cette activité régule les stocks de morue, le phoque étant son principal prédateur, et qu'elle représente un « apport socio-économique ». Le même égard envers les stocks de poisson poussent la Norvège à vouloir contraindre les populations de phoques. De plus, les troupeaux de phoques sont, en éliminant leurs selles dans l'eau, un facteur d'implantation de leurs vers parasites (Anisakidae) à la chaîne alimentaire qui les nourrit[3]. Une abondance accrue de phoques concourt alors à une abondance accrue de ces vers parasites, notamment chez la morue, espèce d'importance commerciale. Dans les cas où le poisson n'a pas été congelé, les larves dissimulées ont une incidence en santé publique[4]. «Les scientifiques d’Islande croient fermement que les parasites du phoque gris sont la menace la plus importante qui pèse sur leurs stocks de morue»[5].

Les chasseurs répondent que les phoques sont des animaux sauvages que les humains ont le droit de chasser. Ils rappellent qu'ils ne sont pas menacés, que l'organisation mondiale du commerce autorise le commerce sans restriction de la plupart des produits du phoque et que les Inuits pratiquent une chasse viable. Ils revendiquent le droit des Inuits de continuer à chasser comme ils l'ont toujours fait. Pour sauver les phoques, la meilleure chose à faire selon eux serait d'essayer de freiner les changements climatiques qui détruisent les glaces marines — l'habitat des phoques en Arctique.

Les chiffres

Depuis 1980 environ, le gouvernement canadien accorde aux pêcheurs canadiens à peu près 325 000 prises annuelles sur des phoques âgés d'au moins 12 jours[réf. nécessaire]. Certaines prises n'ont été nourries qu'au lait. Le nombre de jours où se déroule la chasse varie d'une année à l'autre et fait vivre de 12 000 à 15 000 familles canadiennes. La saison de la chasse trouve son paroxysme fin mars au large des îles-de-la-Madeleine et de l'Île-du-Prince-Édouard ainsi que sur la Côte-Nord du Québec, et en avril au large de Terre-Neuve. D'autres pays, dont la Norvège, pratiquent la chasse au phoque, mais c'est principalement au Canada qu'on exploite cette ressource.

Cette activité rapporte beaucoup d'argent : 30 $CAN par peau aux Îles-de-la-Madeleine en 2009 (moitié moins à Terre-Neuve). Cela représente un chiffre d'affaires de près de 19 millions de dollars canadiens chaque année[réf. nécessaire]. Les agents des pêches de Pêche et Océans Canada contrôlent l'application des lois et préviennent les situations houleuses entre chasseurs et animalistes. Les recettes des campagnes de boycott des produits marins canadiens sont également faramineuses : selon le documentaire de Raoul Jomphe, le revenu annuel de la directrice des campagnes au Canada de la Humane Society of United States, Rebecca Aldworth, s'élève autour du demi-million de dollars, alors qu'un chasseur typique gagnera une fois l'an moins de 10 000 $ pour ses peaux, un montant représentant 25 % de son salaire annuel[réf. nécessaire].

En 2004, un recensement de la population de phoques du Groenland permet de constater qu'elle est saine et stable avec 5,8 millions d'individus, soit le triple de ce qu'elle était en 1970. Les populations de phoques du Groenland et de phoques à capuchon de l'Atlantique nord comptent environ 8 millions de têtes dont trois millions dans les zones où chasse la Norvège. Elles sont toutes les deux en augmentation. En France, les protections ont permis aux phoques gris de constituer une petite colonie en Bretagne. Le phoque est revenu en baie de Somme depuis 1986. Depuis 1992, cette petite colonie prospère avec deux à quatre naissances par an.

Au Canada, des quotas de 975 000 prises ont été répartis sur 3 ans jusqu'en 2003. En 2005, on a autorisé 320 000 prises, quantité correspondant au tiers des nouveaux phoques de l'année, ce qui ne nuit pas au maintien de la population. Les opposants à la chasse invoquent la possibilité que ces chiffres soient faussés par le braconnage[6].

Débat sur la chasse

Le fait que la chasse au phoque nourrit pendant 7 mois quelques 15 000 familles de pêcheurs (en hausse) est un fait économique certain dont il faut tenir compte[réf. nécessaire], mais les revenus de cette chasse contribuent à moins de 1 % de l’économie de la province de Terre-Neuve-et-Labrador, quelque 25% du revenu annuel des chasseurs et de leur famille[réf. nécessaire]. Les prises doivent êtres âgées de plus de 12 jours. La chasse aux blanchons étant interdite depuis 1987, les chasseurs doivent attendre que les phoques aient perdu leur pelage blanc et puissent se débrouiller seuls sur la glace, sans leur mère. Les prises comprennent donc pour l'essentiel des jeunes de moins de 3 mois, mais aucun blanchon.

Les techniques de chasse actuelles se font majoritairement avec le gourdin (akapik). Trois coups réglementaires doivent être donnés pour s'assurer que le phoque est bel et bien mort, et plusieurs études démontrent que cette technique est rapide sans trop de souffrances pour le phoque[réf. nécessaire]. Le phoque est ensuite saigné quand on coupe ses veines natatoires et ce n’est qu’alors qu’on enlève sa peau. C'est en août 1984 que le gouvernement canadien établit la Commission royale sur les phoques et l'industrie de la chasse au phoque au Canada. Présidée par le juge Albert H. Malouf, cette dernière avait pour mandat de rassembler l'information et formuler des recommandations sur les répercussions de la chasse au phoque afin d'établir une nouvelle politique fédérale sur la question. Elle devait aborder tant les répercussions socioculturelles, les avantages économiques que les considérations d'ordre moral. Le rapport Malouf se termine sur plusieurs propositions. Les commissaires jugent que la chasse au phoque devrait se poursuivre, mais avec une réglementation plus restrictive. Ils se prononcent également sur les méthodes d'abattage, estimant que le gourdin et l'arme à feu ne sont pas cruels. Étant donné l'interdiction européenne sur l'importation des peaux de bébés phoques, la commission recommande le développement de marchés potentiels au pays même pour les produits du phoque, autres que ceux dérivés des bébés phoques.

Le Canada invoque les aspects traditionnel, légitime et commercial de cette chasse, arguments forts de leur défense. En effet, actuellement le commerce de la fourrure de phoque est tolérée en Europe et permise en Russie, en Chine et dans beaucoup de pays du monde, car les espèces concernées ne sont pas menacées d'extinction et ne sont donc pas listées en Annexe I de la CITES ni même sur la Liste Rouge de l'IUCN. Les diplomaties européennes éprouvent donc quelques difficultés sur le plan légal pour opposer des arguments valables à cette chasse. Toutefois, aux États-Unis, la loi sur la Protection des mammifères marins (Marine Mammal Protection Act) stipule clairement qu'il est illégal de tuer des mammifères marins ou de faire le commerce des produits dérivés.

Aussi, pour préciser le cadre scientifique de cette chasse mais reconnaissant son caractère caduc avancé par le Canada, les députés Mark Watts, Catherine Stihler et Phillip Whitehead siégeant au Parlement européen ont pris cette question au sérieux et ont déposé un texte le 20 octobre 2003. Ils demandent que le Conseil international pour l'exploration de la mer (CIEM) et le Groupe des spécialistes du phoque de l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature et de ses ressources (IUCN) étudient « les conditions des populations de phoques dans les eaux européennes et leurs interactions éventuelles avec le secteur de la pêche ». Ils réclament notamment que la Commission récolte « toutes les données nécessaires sur les dommages causés par les phoques aux engins de pêche et sur les captures imputables aux phoques dans les eaux européennes ainsi que sur les effets des activités de pêche sur les populations de phoques. »

Il existe environ six millions de phoques et cela représente effectivement une population en développement. Les troupeaux sont riches et peuvent supporter une chasse annuelle régulière et contrôlée.[réf. nécessaire]

En mars 2007, le documentaire Phoques – Le film, de Raoul Jomphe sème la controverse en présentant le visage caché de la chasse aux phoques. Les dessous de la guerre médiatique que mènent annuellement les groupes animalistes contre cette chasse est mise à la lumière du jour lorsque les actions de la représentante canadienne de la « Humane Society des États-Unis » (HSUS), Rebecca Aldworth, sont filmées, mettant en doute leur crédibilité et leurs tactiques visant à financer leurs activités. Depuis plusieurs années, journalistes et professionnels du secteur affirment que ces groupes de protection des animaux mènent des campagnes de désinformation en utilisant des images trompeuses pour alimenter leurs campagnes de financement.

Les articles en faveur de cette chasse sont principalement de sources canadiennes; parmi ces journalistes, scientifiques ou politiques, citons le journaliste (et chasseur) Louis-Gilles Francoeur du quotidien montréalais Le Devoir. On dit que la seule association écologique qui soutient cette chasse est le WWF Canada, mais très peu d'associations écologiques s'opposeront à cette chasse pour des raisons proprement écologiques. Greenpeace a d'ailleurs fait la girouette dans ce dossier; quoiqu'elle ait choisie de réintégrer les rangs des opposants à la chasse en 2005, son coordonnateur québécois, Steven Guilbault, cité par Le Devoir, affirmait en 2004: «L'espèce n'est pas en danger, contrairement à d'autres mammifères marins — ce qui est le cas de plusieurs espèces de baleines, notamment — que nos organisations essaient de protéger et de défendre sur d'autres océans »[6].

Voir aussi

Notes

  1. Justice Canada
  2. Mythes et réalités sur la pêche au phoque au Canada [1]
  3. MARCOGLIESE, D.J., J.J. NAGLER, D.G. CYR, 1998. Effects of exposure to contaminated sediments on the parasite fauna of American plaice (Hippoglossoides platessoides). Bull. Environ. Contam. Toxicol., 61: 88-95.
  4. Site de Santé Canada sur comment identifier et isoler les anisakidés.
  5. Compte-rendu du colloque 2005 sur les phoques sur le site de Pêches et Océans Canada
  6. a  et b Francœur, Louis-Gilles. Chasse aux phoques: Greenpeace change de camp, dans Le Devoir, le 31 mars 2005.

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