Commune De Paris (1871)

Commune De Paris (1871)

Commune de Paris (1871)

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La Commune de Paris désigne une période insurrectionnelle à Paris qui dura deux mois environ, du 18 mars 1871 jusqu'à la « semaine sanglante » (21 - 28 mai). Cette insurrection contre le gouvernement issu de l'Assemblée nationale, qui venait d'être élue au suffrage universel, établit une organisation proche de l'autogestion pour gérer la ville.

Dans plusieurs autres villes de France (Marseille, Lyon, Saint-Étienne, Narbonne, Toulouse, Le Creusot, Limoges[1]), des communes furent proclamées à partir du 23 mars 1871, mais elles furent toutes rapidement réprimées. Pour Karl Marx, c'est la première insurrection prolétarienne autonome.

Affiche publique

Sommaire

Origines

La Commune de Paris trouve sa source dans un élan républicain se référant à la Première République et au gouvernement révolutionnaire de la Commune de Paris (1792), ainsi qu'à l'insurrection populaire de juin 1848 sous la Deuxième République et qui avait été réprimée de façon sanglante par le gouvernement instauré par la Révolution de février 1848. C'est d'ailleurs depuis cette date que le drapeau rouge rallie les insurrectionnalistes et barricadiers, parce qu'il symbolise le sang du peuple ouvrier, le drapeau tricolore étant synonyme de répression (le drapeau rouge était à l'origine, sous la Révolution, le drapeau symbolisant la loi martiale ; le peuple a repris ce symbole pour se moquer des monarques et des soldats).

De 1804 à 1871, la France ayant vécu principalement sous des régimes monarchiques ou impériaux (Premier Empire, Restauration, Monarchie de Juillet, Second Empire), le régime républicain n'avait fonctionné que très peu d'années. En juillet 1870, Napoléon III entreprend une guerre mal préparée contre la Prusse qui le conduit rapidement à la défaite. Le 4 septembre 1870, à la suite d'une journée d'émeute, l'Empire est renversé et un Gouvernement de la Défense nationale s'installe à l'Hôtel de ville de Paris pour poursuivre la guerre contre les États allemands. Paris est assiégé et connaît une grave famine au cours de l'hiver 1870-71. Jules Fabre, signe un armistice avec Bismarck. Celui-ci prévoit, outre la fin des hostilités pour une période de quinze jours renouvelables, la convocation d'une Assemblée nationale, chargée de décider de la poursuite de la guerre ou de la paix. Les élections du 8 février, organisées dans la précipitation pour signer au plus vite l'armistice, envoient une forte proportion de monarchistes, candidats des listes "pour la paix", à l'Assemblée nationale. La plus grande partie des élus de Paris sont des républicains, des listes "pour la guerre", souvent extrémistes. En effet le peuple parisien pense s'être correctement défendu et ne se considère pas comme vaincu. Il existe un fossé grandissant entre les provinces et la capitale, confinant parfois à l'exaspération, la guerre ayant été déclenchée en grande partie sous la pression de la rue parisienne.

L'Assemblée se réunit d'abord à Bordeaux, puis à Versailles, pour ne pas tomber sous les révoltes parisiennes comme cela a failli se produire pendant le gouvernement de la Défense nationale (31 octobre notamment).

Depuis le 17 février, le gouvernement de la République est dirigé par Adolphe Thiers "chef du pouvoir exécutif" ; il cherche à conclure un traité de paix avec la Prusse. Les Parisiens, qui ont supporté un siège très dur, et sous le coup d'une fièvre obsidionale ( "la folie du siège" ), veulent protéger Paris des Prussiens et ouvrir une nouvelle ère politique et sociale[2]. Ils refusent que les troupes françaises récupèrent les canons de Paris et craignent que les Prussiens, entrés dans la ville, ne s'en emparent. C'est donc l'épreuve de force entre les royalistes, grands bourgeois et conservateurs provinciaux, tous favorables à une paix rapide avec l'Allemagne, retirés à Versailles et la population parisienne (essentiellement celle des quartiers de l'est parisien soumise aux très dures conditions salariales et sociales de l'époque et principale victime de la famine due au siège de Paris par les Allemands).

À Paris, la mixité sociale dans les quartiers, de règle depuis le Moyen Âge, a presque disparu avec les transformations urbanistiques du Second Empire. Les quartiers de l'ouest (VIIe, VIIIe, XVIe et XVIIe arrondissements) concentrent les plus riches des Parisiens (avec leur domesticité). Les quartiers centraux conservent encore des personnes aisées. Mais les classes populaires ont été regroupées à l'Est (XIe, XIIe, XIIIe, Xe, XVIIIe, XIXe et XXe arrondissements). Les ouvriers sont très nombreux : 442 000 sur 1,8 million d'habitants selon le recensement de 1866. S'y ajoutent de très nombreux artisans (près de 70 000, la plupart travaillant seuls ou avec un unique ouvrier) et de très petits commerçants dont la situation sociale est assez proche de celle des ouvriers. Ces classes populaires ont commencé à s'organiser. Le droit de grève qui a été accordé en 1864, a été très utilisé dans les dernières années du Second Empire. À l'occasion d'élections législatives de février 1864, des ouvriers publient le manifeste des Soixante, qui réclame la liberté du travail, l'accès au crédit et la solidarité. Depuis septembre 1864, il existe une Internationale ouvrière, qui a des représentants à Paris (en 1868, le gouvernement impérial dissout la section française de l'Internationale dont les membres ont participé à des manifestations républicaines). La loi sur la liberté de la presse de 1868, permet l'émergence publique de revendications économiques anti-capitalistes : la « nationalisation » des banques, des assurances, des mines, des chemins de fer (programme de Malon et Varlin pour les élections législatives de 1869)... Les blanquistes, qui prônent l'insurrection, se manifestent de plus en plus.

Les classes populaires parisiennes craignent de se voir une nouvelle fois frustrées des bénéfices de « leur » révolution de septembre 1870 (renversement du Second empire). Déjà, après les journées révolutionnaires parisiennes de juillet 1830 et après celle de février 1848, et les élections de mai 1848, les classes aisées avaient confisqué le pouvoir politique à leur profit, en installant la Monarchie de juillet et le Second Empire. En 1871, les Parisiens sont méfiants envers l'assemblée nouvellement élue en février 1871, où les deux tiers des députés sont des monarchistes de diverses tendances ou des bonapartistes. L'assemblée, méfiante du Paris populaire toujours prêt à s'enflammer, décide, le 10 mars, de siéger à Versailles (ville sous contrôle des Allemands et symbole de la monarchie absolue). L'assemblée mène une politique sociale qui va mettre en difficultés une partie des Parisiens, déjà éprouvés par le siège de la ville par l'armée prussienne (durant cette période, la consommation d'absinthe est multipliée par cinq)[citation nécessaire]. Le 10 mars, elle décide la suppression du moratoire des effets de commerce, des loyers et des dettes, désormais ce sont trois termes qui deviennent exigibles. De nombreux ouvriers, artisans et commerçants se voient menacés dans leurs moyens de vivre (on estime à près de 150 000 les personnes ainsi menacées de faillite ou de poursuites judiciaires). De plus, l'assemblée supprime la solde quotidienne de 1,50 franc des soldats de la Garde nationale, privant ainsi une partie des classes pauvres de Paris d'une source de revenus. Cette politique rappelle, aux plus vieux des Parisiens, celle menée au printemps 1848, par l'Assemblée dominée par le Parti de l'Ordre dont un des chefs était Thiers. Quand le gouvernement décide de désarmer les Parisiens ceux-ci se sentent directement menacés. Il s'agit de soustraire aux Parisiens les 227 canons entreposés à Belleville et à Montmartre. Les Parisiens considèrent ces canons comme leur propriété, qu'ils ont eux-mêmes payés lors de la guerre contre la Prusse par le biais de la souscription. Ils se voient sans défense vis-à-vis d'éventuelles attaques des troupes gouvernementales (comme en juin 1848). Cependant les Parisiens disposent de près de 500 000 fusils.

Déclenchement

Thiers avait commandé la construction des fortifications qui entouraient Paris, alors qu'il était ministre de Louis-Philippe. Il avait conçu cette enceinte pour défendre la ville contre des ennemis, mais avait aussi déjà calculé à l'époque que, pour mettre un terme aux insurrections populaires, il suffisait d'enfermer les insurgés dans la ville, puis de les réprimer. En février 1848, Thiers avait vainement proposé ce plan au roi Louis-Philippe, pour briser la révolution parisienne.

Le 17 mars 1871, Thiers et son gouvernement, évaluant mal l'état d'esprit des Parisiens, envoient la troupe sous le commandement du Général Vinoy au cours de la nuit s'emparer des canons de la butte Montmartre. Ce même jour, Thiers prend soin de faire arrêter Auguste Blanqui (républicain révolutionnaire insurrectionnaliste surnommé « l'Enfermé » parce qu'il avait passé plus de la moitié de sa vie dans les prisons des rois et de l'empereur) qui se reposait chez un ami médecin à Bretenoux (Lot). De là, il le fait transférer en Bretagne, sous surveillance militaire, avec ordre de tirer en cas d'évasion.

Les canons du 18 mars passant aux mains des insurgés

Le 18 mars, à Montmartre, au matin, le peuple parisien s'oppose à la troupe venue chercher les canons, puis, rapidement, celle-ci fraternise avec lui. Un peu partout dans Paris la population s'en prend aux représentants supposés du gouvernement, élève des barricades et fraternise avec la troupe. Deux généraux, Claude Lecomte et Clément Thomas (responsable de massacres en juin 1848), sont fusillés rue des Rosiers (en partie rue du Chevalier-de-La-Barre actuelle). C'est le début de l'insurrection. Thiers gagne Versailles. Environ 100 000 Parisiens, surtout provenant des quartiers chics de l'ouest parisien ou fonctionnaires, l'y suivent. Il semble qu'au cours des semaines suivantes, une bonne moitié de la population parisienne quitta la capitale.[réf. nécessaire]

Les acteurs de la Commune

Les élections sont organisées le 26 mars pour désigner les 92 membres du Conseil de la Commune. Compte tenu des départs de Parisiens avant et après le siège de Paris par les Allemands, et de ceux qui suivent Thiers à Versailles (100 000 selon les dires de Thiers) les abstentions sont d'environ 25 pour cent, nombre normal pour l'époque. L'élection d'une vingtaine de candidats « modérés », représentant les classes aisées, montre que les élections furent relativement libres. Les arrondissements de l'est et du nord (XVIIIe, XIXe, XXe, Xe, XIe), le XIIe et le XIIIe dans le sud ont voté massivement pour les candidats fédérés. Les Ier, IIe, VIIIe, IXe et XVIe ont quant à eux voté massivement pour les candidats présentés par les maires du Parti de l'Ordre (environ 40 000 voix) et les abstentions y ont été très importantes. En fait 70 siègeront, du fait de la démission rapide d'élus modérés et de l'impossibilité pour certains d'être présents à Paris (par exemple Blanqui) et des doubles élections. Le Conseil est représentatif des classes populaires et de la petite bourgeoisie parisiennes. On y trouve 25 ouvriers, 12 artisans, 4 employés, 6 commerçants, 3 avocats, 3 médecins, 1 pharmacien, 1 vétérinaire, 1 ingénieur, 1 architecte, 2 artistes peintres, 12 journalistes.

Toutes les tendances politiques républicaines et socialistes sont représentées jusqu'aux anarchistes. Parmi la vingtaine de « jacobins », admirateurs de la Révolution de 1789 et plutôt centralisateurs, on trouve Charles Delescluze, Félix Pyat, Charles Ferdinand Gambon, Paschal Grousset... À peine plus nombreux les « radicaux », partisans de l'autonomie municipale et d'une république démocratique et sociale, tels Arthur Arnould, Charles Amouroux, Victor Clément, Jules Bergeret, etc. On compte une dizaine de « blanquistes », adeptes de l'insurrection avant-gardistes, comme Jean-Baptiste Chardon, Émile Eudes, Théophile Ferré, Raoul Rigault, Gabriel Ranvier... Quelques « proudhoniens », partisans de réformes sociales siègent : Léo Fränkel, Benoît Malon, Eugène Varlin... Enfin des « indépendants » ont été élus, tels Jules Vallès et Gustave Courbet...

Rapidement le Conseil de la Commune se divise en « majorité » et « minorité ». Les majoritaires sont les « jacobins », les « blanquistes » et les « indépendants ». Pour eux le politique l'emporte sur le social. Se voulant les continuateurs de l'action des Montagnards de 1793, ils ne sont pas hostiles aux mesures centralisatrices voire autoritaires ; cependant ils voteront toutes les mesures sociales de la Commune. Ce sont eux qui imposeront la création du Comité de Salut public le 1er mai par 45 voix contre 23. Les minoritaires sont les « radicaux » et les « internationalistes » proudhoniens, ils s'attachent à promouvoir des mesures sociales et anti-autoritaires, ils sont les partisans de la République sociale. Ces tendances se cristalliseront le 28 avril, lorsque les majoritaires imposent la création d'un Comité de salut public, organisme que les minoritaires refusent car il leur semble contraire à l'aspiration démocratique et autonomiste de la Commune. Si ces luttes d'influence sont incomprises d'une grande partie des Parisiens, les deux tendances feront combat commun dès l'entrée des troupes versaillaises dans Paris.

À côté de ces personnalités, il ne faut pas oublier l'extraordinaire effervescence politique que manifestent les classes populaires de Paris. La tension politique est maintenue par les élections à répétition, le 26 mars pour le Conseil de la Commune et le 16 avril pour des élections complémentaires. Les cérémonies officielles permettent aussi les rassemblements : l'installation du Conseil de la Commune à l'hôtel de ville le 28 mars, les obsèques du socialiste Pierre Leroux à la mi-avril, la destruction de l'hôtel particulier de Thiers, la démolition de la Colonne Vendôme le 16 mai. Mais surtout la population peut se retrouver dans de nombreux clubs pour y discuter de la situation, proposer des solutions voire faire pression sur les élus ou aider l'administration communale. Réunis dans les lieux les plus divers, ils permettent à des orateurs réguliers ou occasionnels de faire entendre les aspirations de la population, en particulier la mise sur pied d'un nouvel ordre social favorable aux classes populaires (comme le Club de la Révolution animé par Louise Michel). Si ces clubs sont nombreux dans les quartiers centraux (Ier, IIe, IIIe, IVe, Ve et VIe arrondissements), les quartiers chics de l'ouest parisien n'en comptent aucun (VIIe, VIIIe et XVIe). Les clubs se fédérèrent le 7 mai afin d'avoir des contacts plus efficaces avec le Conseil de la Commune. S'ajoutant aux titres déjà existants, plus de 70 journaux sont créés pendant les 70 jours de la Commune. Mais la liberté de la presse est restreinte dès le 18 avril, et le 18 mai le Comité de Salut public interdit les journaux favorables au gouvernement Thiers. Les journaux les plus influents sont Le Cri du Peuple de Jules Vallès, Le Mot d'ordre d'Henri Rochefort, L'Affranchi de Paschal Grousset, Le Père Duchesne de Vermersch, La Sociale avec madame André Léo, Le vengeur de Félix Pyat, La Commune.

La Commune à l’œuvre

« La Commune de Paris, considérant que la colonne impériale de la place Vendôme est un monument de barbarie, un symbole de la force brute et de la fausse gloire, une affirmation du militarisme, une négation du droit international, une insulte permanente des vainqueurs aux vaincus, un attentat perpétuel à l'un des trois grands principes de la République française, la fraternité, décrète : La colonne de la place Vendôme sera démolie[3]. »

- Placard de la Commune de Paris

Dès le 29 mars, le Conseil de la Commune forme en son sein dix commissions : exécutive, militaire, subsistance, finances, justice, sûreté générale, travail, industrie et échanges, services publics et enseignement. Le 21 avril le Conseil décide qu'un membre de la commission exécutive est « délégué » auprès de chacune des neuf autres commissions pour en diriger les travaux. Gustave Cluseret devient délégué à la Guerre (remplacé le 1er mai par Louis Rossel lui-même remplacé le 10 mai par Charles Delescluze); Auguste Viard est Délégué aux Subsistances; Édouard Vaillant à l'enseignement; Raoul Rigault à la Sûreté générale (où il sera remplacé le 24 avril par Frédéric Cournet, puis le 13 mai par Théophile Ferré) ; Léo Fränkel, est nommé au Travail, à l'Industrie et aux Échanges; Jules Andrieu est aux Travaux publics. Le Comité de Salut public, créé le 28 avril, dont les attributions n'ont pas été précisées, vient empiéter sur celles des commissions et crée une certaine confusion (qui aboutira le 10 mai à la démission de Louis Rossel, délégué à la Guerre).

La Commune va administrer Paris jusqu'au 20 mai. Son action législatrice est considérable, de nombreuses mesures sont prises et appliquées à Paris pendant les 70 jours qu'elle dura. La plupart furent abolies après la destruction de la Commune. Sont décrétées des mesures d'avant-garde que la république n'a repris que plusieurs décennies plus tard.

Le Conseil de la Commune, commence par régler les questions qui sont à l'origine du soulèvement du 18 mars. Le 29 mars, un décret remet les loyers non payés d'octobre 1870 à avril 1871; la vente des objets déposés au Mont-de-Piété est suspendue. Le 12 avril, les poursuites concernant les échéances non payées sont suspendues, le 16 avril un délai de trois ans est accordé pour régler les dettes et les échéances. Le 6 mai, le dégagement gratuit des dépôts, faits au Mont-de-Piété, inférieurs à 6 francs est permis. La solidarité est également organisée. Une pension est versée aux blessés, aux veuves (600 francs) et aux orphelins (365 francs) des gardes nationaux tués au combat (8 et 10 avril). Le 25 avril un décret réquisitionne les logements vacants au profit des sinistrés des bombardements allemands et versaillais. Des orphelinats sont créés avec l'aide en fourniture des familles parisiennes. La question du ravitaillement est moins cruciale que pendant le siège hivernal de Paris par les Prussiens. Sauf le pain qui est taxé, les autres aliments se trouvent suffisamment grâce aux stocks accumulés après le siège, aux arrivages des terres agricoles et jardins compris entre les fortifications et les lignes allemandes. Pourtant, par sa circulaire du 21 avril, le gouvernement Thiers impose le blocus ferroviaire de la capitale. Des ventes publiques de pommes de terre, des boucheries municipales sont créées (22 avril) pour alléger le budget des familles (à l'époque essentiellement constitué du poste alimentation). Des cantines municipales, des distributions de repas (comme les Marmites de Varlin) fonctionnent, des bons de pain sont distribués.

Chute de la colonne Vendôme de André Adolphe Eugène Disderi (1819 - 1889)

La Commune prend quelques mesures symboliques : le drapeau rouge est adopté le 28 mars, et le calendrier républicain (an 79 de la République) est de nouveau en vigueur. La destruction de la colonne Vendôme, considérée comme le symbole du despotisme impérial, est décrétée le 12 avril et réalisée le 16 mai. La confiscation des biens de Thiers et la destruction de son hôtel particulier à Paris sont décidées (Thiers se fera rembourser plus d'un million de francs).

La démocratie citoyenne

L'appel du 22 mars énonce que "les membres de l'assemblée municipale, sans cesse contrôlés, surveillés, discutés par l'opinion, sont révocables, comptables et responsables" et leur mandat est impératif. C'est la consécration du gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple : une démocratie directe reposant sur une citoyenneté active. Cf. Constitution de 1793 dans laquelle le droit à l'insurrection est "le plus sacré des droits et le plus imprescriptible des devoirs".

La Commune de Paris a été favorable aux étrangers : "Considérant que le drapeau de la commune est celui de la République universelle ; considérant que toute cité a le droit de donner le titre de citoyen aux étrangers qui la servent...".

Vers l'émancipation des femmes

Pendant la Commune se crée le premier mouvement féminin de masse : l'Union des Femmes pour la défense de Paris et les soins aux blesses sous l'impulsion d'Elisabeth Dmitrieff, jeune aristocrate russe et de Nathalie Le Mel, ouvrière relieuse. Les femmes réclament le droit au travail et l'égalité des salaires; (un commencement d'application est mis en place pour les institutrices).- l'union des femmes participe au recensement des ateliers abandonnés par les patrons (les francs fileurs) partis se réfugier à Versailles et organise des ateliers autogérés; la commune reconnait l'union libre (elle verse aux veuves de fédérés mariées on non ainsi qu'à leurs enfants légitimes ou naturels une pension; les femmes mettent en application le décret de séparation de l' Eglise et de l'Etat dans les écoles et les hôpitaux; elles se battent comme Louise Michel et d'autres sous l'habit de fédérés et elles défendent Paris contre les Versaillais sur les barricades (une centaine place blanche avec Nathalie le Mel);sur le chemin de l'émancipation des femmes , la Commune a marqué une étape importante. [4]

Presse

La liberté de la presse est réaffirmée le 19 mars par le Comité central de la garde nationale. Les journaux anticommunards continuent donc de paraître à Paris, et se livrent à des attaques violentes contre le soulèvement et relaient les mots d'ordre politiques de Thiers. Aussi dès le 5 avril Le Journal des Débats et La Liberté, jugés proversaillais sont interdits. Le 12 ce sera Le Moniteur universel. La presse proversaillaise continuant ses attaques, le 9 avril, la Commission de Sûreté générale, rappelle que la "déclaration préalable" reste en vigueur pour la presse. Dès le 18 avril la Commune menace d'interdiction les journaux qui "sont favorables aux intérêts de l'armée ennemie" et qui continuent tout de même de paraître. C'est surtout en mai que la lutte contre la presse proversaillaise prend de la vigueur, le 5 mai, 7 journaux sont supprimés, le 11 ce sont 5 autres journaux et le 18 mai, 9 autres. Il est bien évident que la presse parisienne procommunarde ne peut être diffusée en province du fait de la vigilance du gouvernement Thiers.

Fonctionnaires

La Commune doit faire face à l'absentéisme des fonctionnaires, qui pour une grande part sont partis à Versailles avec Adolphe Thiers ou qui restent chez eux comme ce dernier leur ordonne. Il s'agit aussi de changer l'état d'esprit de ces agents publics recrutés sous le Second Empire. La Commune décide l'élection au suffrage universel des fonctionnaires (y compris dans la justice et dans l'enseignement), le traitement maximum sera de 6 000 francs annuels (l'équivalent du salaire d'un ouvrier) (2 avril) et le cumul est interdit (4 mai). Les fonctionnaires ne doivent plus le serment politique et professionnel.

Conditions de travail

Le Conseil de la Commune, issu d'un mouvement populaire, se préoccupe d'améliorer la condition des prolétaires. La Commune entend réaliser l'aspiration du mouvement ouvrier français du XIXe siècle : "l'émancipation des travailleurs par les travailleurs eux-mêmes" (la Sociale).

Le 20 avril, le travail de nuit dans les boulangeries est interdit, mais il faut lutter contre le travail clandestin par des saisies de marchandises et affichage de la sanction dans les boutiques. Le 16 avril, un décret réquisitionne les ateliers abandonnés par leurs propriétaires (assimilés à des déserteurs) et prévoit de les remettre à des coopératives ouvrières après indemnisation du propriétaire : deux ateliers fonctionneront ainsi pour la fabrication d'armes (la journée de travail y est de 10 heures et l'encadrement est élu par les salariés). Pour lutter contre une pratique patronale très répandue, la Commune interdit les amendes et retenues sur salaires dans les administrations publiques et les entreprises privées (28 avril). Pour lutter contre le sous salariat dans les appels d'offres concernant les marchés publics, un cahier des charges avec indication du salaire minimum est créé. Les bureaux de placement de la main d'œuvre, entreprises privées très florissantes sous l'Empire, monopoles agissant bien souvent comme des "négriers", sont supprimés et remplacés par des bureaux municipaux (20 avril).

La Commune annonce les prémices de l'autogestion. Dans les entreprises, un conseil de direction est élu tous les 15 jours par l'atelier et un ouvrier est chargé de transmettre les réclamations.

Justice

La plupart des professionnels de la justice ayant disparu, il faut pourvoir à tous les postes (il n'y a plus que deux notaires en activité dans Paris). Il y a beaucoup de projets mais faute de temps peu seront mis en application. Les enfants légitimés sont considérés comme reconnus de droit. Le mariage libre par consentement mutuel est décidé (16 ans pour les femmes, 18 ans pour les hommes) ; les actes notariaux (donation, testament, contrat de mariage) sont gratuits. Pour tempérer l'activité répressive de Rigault (à la Sûreté générale) il est décidé une sorte d’habeas corpus : les suspects arrêtés par le Comité central de la Garde nationale ou la Sûreté, doivent avoir une instruction immédiate de leur affaire (8 avril) ; les perquisitions et les réquisitions sans mandat sont interdites (14 avril) ; il est obligatoire d'inscrire le motif de l'arrestation sur les registres d'écrous (18 avril) ; une inspection des prisons est créée (23 avril).

Enseignement

Dans l'enseignement, le personnel de l'administration centrale est réfugié à Versailles, les écoles privées congréganistes, nombreuses car favorisées par la loi Falloux[5] de 1850, sont vidées de leurs élèves[6] depuis le décret du 2 avril "séparant l'Église de l’État". Les professeurs du secondaire et du supérieur, assez peu favorables à la Commune, ont déserté lycées et facultés. Édouard Vaillant, chargé de ce secteur, prévoit une réforme qui vise à l'uniformisation de la formation primaire et professionnelle. Deux écoles professionnelles, une de garçons et une de filles, sont ouvertes. L’enseignement est laïcisé : l'enseignement confessionnel est interdit, les signes religieux chrétiens sont enlevés des salles de classe. Une commission exclusivement composée de femmes est formée le 21 mai pour réfléchir sur l'enseignement des filles. Quelques municipalités d'arrondissement, celle du XXe en particulier, qui ont alors la responsabilité financière de l'enseignement primaire, rendent l'école gratuite et laïque. Notons que le personnel enseignant, qui est à la charge des municipalités, reçoit une rémunération de 1 500 francs annuels pour les aides-instituteurs et 2 000 pour les directeurs, avec égalité de traitement entre les hommes et les femmes.

Cultes

Dans le domaine des cultes, la Commune rompt avec le Concordat de 1802 qui faisait du catholicisme "la religion de la majorité des Français" et des curés et évêques des fonctionnaires. À la fin de l'Empire, les classes populaires parisiennes sont assez hostiles au catholicisme, très lié au régime impérial et aux conservateurs. L'anticléricalisme a été revigoré par la propagande blanquiste, très athée, et par l'attitude du pape Pie IX face à l'unification de l'Italie. Le 2 avril, la Commune décrète la séparation de l'Église (catholique) et de l'État, la suppression du budget des cultes, la sécularisation des biens des congrégations religieuses. Les religieux des couvents de Picpus, des Dames-Blanches et d'Arcueil sont inquiétés ou arrêtés sous divers prétextes. Les églises de Saint-Laurent et de Notre-Dame des Victoires sont perquisitionnées. L'archevêque de Paris, Georges Darboy, est arrêté comme otage le 2 avril. La demande d'échange avec Auguste Blanqui, détenu par le gouvernement Thiers, est repoussée le 12 avril puis le 14 mai par Adolphe Thiers. Monseigneur Darboy est exécuté par les Communards comme quatre autres ecclésiastiques en représailles de l'avance des troupes versaillaises.

Le gouvernement de Versailles contre la Commune de Paris

Les Prussiens contribuèrent à l'offensive contre la Commune. Ici, batterie prussienne au Fort d'Aubervilliers, pointée sur Paris.

Une grande partie de l'action de la Commune fut de lutter contre l'offensive menée par les troupes du gouvernement de Thiers : les « versaillais ».

Comme le prouve la correspondance télégraphique qu'il entretient avec Jules Favre qui négocie la paix avec les Allemands, Thiers bénéficie de l'appui du chancelier allemand Bismarck. Il s'agit en effet de mettre au plus tôt fin aux hostilités entre la France et l'Allemagne, une des conditions étant le désarmement de Paris. Alors que la convention d'armistice n'autorise que 40 000 soldats français en région parisienne, Bismarck libère rapidement près de 60 000 prisonniers de guerre qui peuvent s'adjoindre aux 12 000 soldats dont dispose Thiers. Le 1er avril, Thiers avoue à l'Assemblée nationale qu'il met sur pieds « une des plus belles armées que la France ait possédée ». Les versaillais seront 130 000 au début de la Semaine sanglante. Ces soldats d'une armée de métier (service de 7 ans) sont surtout issus du milieu paysan. Les conseils de révision écartent la plupart des jeunes gens des villes pour « déficience physique », en raison des conditions de travail que l'industrie de l'époque impose aux jeunes ouvriers, malgré la loi de 1841 sur le travail des enfants. Ils sont commandés par le vaincu de Sedan, le maréchal de Mac Mahon. En « banlieue » nord et est de Paris, qu'ils contrôlent, les Allemands laissent passer les troupes versaillaises qui veulent contourner Paris. De plus, les Allemands, par convention avec le gouvernement Thiers, occupent le Chemin de fer du Nord, établissent un barrage de troupes de la Marne à Montreuil et massent 80 canons et 5000 soldats près de la Porte et du fort de Vincennes (tenus par les fédérés de la Commune) bloquant ainsi la sortie par l'est de la capitale.

Face à cette armée nombreuse, expérimentée et bien armée, la Commune dispose des hommes de la Garde nationale. Depuis la Restauration, tous les hommes de 25 à 50 ans pourvus de leurs droits politiques en font partie. Les armes sont fournies par l'État, mais l'habillement reste à la charge du garde. À Paris, le recrutement se fait par arrondissement. Dans les limites communales le service est gratuit, mais le garde reçoit une solde s'il sert au-delà. Sous le Second Empire, tous les hommes mariés de 25 à 50 ans sont enrôlés. Le 12 août 1870, le gouvernement réorganise 60 bataillons. Les quartiers bourgeois de Paris (l'ouest et le centre de la capitale) en fournissent plus des trois quarts. Début septembre le gouvernement de la Défense nationale en crée 60 autres, fin septembre il y a 254 bataillons. Les nouvelles créations sont aux trois quarts issues des quartiers populaires de l'Est parisien (Xe, XIe, XVIIIe, XIXe et XXe arrondissements). On peut y voir l'influence du siège de Paris par les Allemands qui ranime la fibre patriotique des Parisiens, mais aussi l'espoir de toucher la solde, devenue le seul revenu des familles ouvrières touchées par le chômage consécutif au blocus de Paris par les Allemands. Au cours du siège, le manque d'entraînement des dits bataillons eut des résultats désastreux sur leur performance militaire, qui fut assez médiocre. L'attitude volontiers frondeuse des dits bataillons-qui refusèrent catégoriquement de se porter sur Sedan ne leur rallia pas exactement les autres unités françaises.

Le 5 avril la Commune décrète la mobilisation comme volontaires des jeunes gens de 17 à 19 ans et en service obligatoire des célibataires et hommes mariés de 19 à 40 ans. Ces hommes n'ont pratiquement pas d'expérience militaire et s'ils sont animés d'une ardeur républicaine sont assez réticents à la discipline et souffrent, malgré quelques exceptions remarquables (Dombrowski, Louis-Nathaniel Rossel), d'une insuffisance du commandement (les officiers sont élus plus sur leurs convictions que sur leurs capacités à diriger des soldats). En théorie la Commune dispose de près de 194 000 hommes de troupe, sous-officiers et officiers (nombre publié par le Journal officiel de la Commune le 6 mai). En fait les combattants sont moins nombreux. Les estimations vont de 10 000 (Camille Pelletan) à 41 500 (Cluseret, délégué à la Guerre, le 5 avril). On peut les estimer à 25-30 000 début avril et moitié moindre à la mi-mai. L'hémorragie peut s'expliquer par le fait que beaucoup d'inscrits ne le sont que pour la solde et restèrent spectateurs pendant les combats ; sans compter ceux qui périrent dans les opérations militaires contre les troupes versaillaises.

Le deuxième siège de Paris

Guerre civile, lithographie d'Édouard Manet, 1871

Les « versaillais » passent à l'attaque les premiers. Le 2 avril ils occupent le fort du Mont-Valérien, où les fédérés de la Commune ont négligé de s'installer, avantage considérable, puisque cette position domine toute la proche banlieue ouest de Paris. Le 30 mars, le général Gaston de Galliffet, déloge les fédérés du rond-point de Courbevoie et le 2 avril les « versaillais » s'emparent de Courbevoie et Puteaux, alors que les fédérés se replient vers Neuilly. Le 3 avril la Commune lance, sous les ordres de Flourens, Eudes et Duval, une contre-offensive en direction de Versailles, elle se solde par un échec à Rueil et à Châtillon. Gustave Flourens est assassiné par un officier de gendarmerie à Rueil, et Duval est fusillé avec son état-major le 4, sans procès, sur ordre du général Vinoy. Le même jour Gustave Cluseret est nommé délégué à la Guerre de la Commune. En réponse aux actes des versaillais, la Commune vote, le 5 avril, le décret des otages (3 otages fusillés pour un communard exécuté), qui ne sera mis en application que pendant la Semaine sanglante fin mai. Pendant trois semaines environ, les combats sont sporadiques mais les bombardements sont intensifs, en particulier sur Neuilly, qui le 25 bénéficie d'une suspension d'armes pour permettre l'évacuation de la population. Cette période permet à l'armée versaillaise de se renforcer.

Barricade, lithographie d'Édouard Manet, 1871

Le 26 avril, au soir, le village des Moulineaux est occupé par les « versaillais », qui le 29 menacent fort d'Issy (où des ordres contradictoires ont entraîné un début d'évacuation). Le 1er mai, Louis Rossel est nommé Délégué à la Guerre en remplacement de Cluseret qui a été révoqué. Le 4 mai les « versaillais », certainement aidés par une trahison (qui sera le prétexte de l’arrestation des dominicains d'Arcueil), enlèvent la redoute du Moulin-Saquet, où ils se livrent à des atrocités. Le 5, ils s'emparent du village de Clamart. Le 8, l'enceinte fortifiée de Paris est violemment bombardée de Grenelle à Passy, tandis que le 9, le fort d'Issy est pris par les « versaillais ». C'est le 8 mai que le gouvernement Thiers, adresse un ultimatum aux Parisiens qui sont sommés de capituler. Le 10 mai, Charles Delescluze remplace Louis-Nathaniel Rossel démissionnaire comme délégué à la Guerre. Le 13 mai les « versaillais » occupent le fort de Vanves, mais sont stoppés par l'artillerie de remparts de la Commune. Le 17 mai, la cartoucherie de l'avenue Rapp explose dans des circonstances peu claires. On parlera de sabotage, mais il s'agissait d'une poudrerie dans laquelle on faisait des travaux de soudage...

Le 20 mai, Jules Ducatel présent au bastion n° 24, permet aux « versaillais » de pénétrer dans Paris par la Porte de Saint-Cloud. Commence alors la Semaine sanglante. Jules Ducatel piqueur des Ponts-et-Chaussées qui n'est pas favorable à la Commune est arrêté par les fédérés, il allait être fusillé face à l'école militaire, quand il fut sauvé par l'arrivée de l'armée régulière. Son acte initial a conduit le directeur du Figaro Henri de Villemesant, à faire dans son journal une souscription publique qui rapporta 125000 francs Or à Jules Ducatel.

Répression

Article détaillé : Semaine sanglante.
Cadavres de Communards (Photographie attribuée à Eugène Disderi)

La Commune fut finalement vaincue durant la Semaine sanglante, qui débuta avec l'entrée des troupes versaillaises dans Paris le 21 mai pour s'achever avec les derniers combats au cimetière du Père-Lachaise le 28 mai. Les témoins mentionnent tous de nombreuses exécutions sommaires de la part des troupes versaillaises. On évoque, selon les sources, de 10 000 à 107 000 victimes (P.O. Lissagaray Histoire de la Commune de 1871). En contrepartie, les fédérés furent accusés d'avoir détruit une partie de Paris en incendiant de nombreux immeubles et en particulier plusieurs monuments publics historiques : le Palais des Tuileries, symbole du pouvoir royal et impérial, le Palais de Justice dont la Sainte-Chapelle échappa aux flammes, le Palais de la Légion d'honneur, la Cour des Comptes et l'Hôtel de Ville.

Hôtel de Ville

Le Louvre échappa à la destruction grâce à l'intervention d'un colonel de l'armée de Versailles qui ordonna aux soldats sous ses ordres d'intervenir pour empêcher que le feu au palais des Tuileries ne se communique au musée. La bibliothèque de l'Hôtel de Ville et la totalité des archives de Paris furent anéanties durant ces incendies, ainsi que tout l'état civil parisien (un exemplaire existait au Palais de Justice, l'autre à l'Hôtel de Ville qui furent tous deux la proie des flammes). La plus grande partie des archives de la police fut également détruite par le feu. D'autres richesses culturelles connurent le même sort, ainsi par exemple la maison de Prosper Mérimée rue de Lille, qui brûla avec tous ses livres, souvenirs, correspondances et manuscrits. Il est cependant nécessaire de rappeler que les bombardements incessants des troupes régulières françaises furent aussi responsables de nombreux incendies. Les tirs de l'artillerie versaillaise furent la cause de nombreuses destructions, notamment dans tout l'ouest parisien. Le ministère des Finances, rue de Rivoli, touché par eux, fut la proie des flammes. Des combats de rue farouches occasionnèrent à la capitale des dégâts gigantesques qu'il fut aisé, après coup, d'attribuer aux seuls fédérés vaincus.

Parallèlement, les communards exécutèrent 47 otages. La plupart étaient des religieux. Le plus célèbre d'entre eux, l'archevêque de Paris Mgr Georges Darboy, fut arrêté le 4 avril 1871 avec quatre innocents, sur l'ordre de la Commune de Paris qui agissait en vertu du « décret des otages » du 2 prairial An 79. Il fut enfermé à la prison de Mazas et exécuté à la Roquette suite à l'attaque des versaillais le 24 mai. Il faut ajouter à cette exécution le massacre des dominicains d'Arcueil et des jésuites de la rue Haxo.

La répression contre les communards fut impitoyable : il y eut beaucoup d'exécutions sans jugement, par exemple d'ouvriers dont les mains portaient ou semblaient porter des traces de poudre révélant l'emploi récent d'armes à feu. Les tribunaux de leur côté prononcèrent 10 137 condamnations : 93 à mort, 251 aux travaux forcés, 4586 à la déportation (en particulier en Nouvelle-Calédonie), le reste à des peines de prison variables. Seuls 23 condamnés à mort furent exécutés. Les lois d'amnistie n'interviendront qu'en 1880. Longtemps encore après ces évènements, la gauche resta hostile au général Gaston de Galliffet, surnommé pour son zèle répressif « le boucher de la Commune ». Seul l'écrivain Albert de Mun s'élèva contre la violence de la répression.

À l'emplacement du point de départ du soulèvement communard parisien, la basilique du Sacré-Cœur de Montmartre fut construite par l'Église et l'État pour, entre autres, « expier les crimes des fédérés ». Sa construction débuta en 1873.

Considérée par eux comme le premier pouvoir révolutionnaire prolétarien, la Commune de Paris a depuis été revendiquée comme modèle — mais avec des points de vue différents — par la gauche, l'extrême-gauche et les anarchistes ; elle inspira de nombreux mouvements révolutionnaires qui en tirèrent des leçons leur permettant d'entreprendre d'autres révolutions (la révolution russe et les conseils (soviets), la révolution espagnole et les collectivités, etc.).

Chronologie

Constitution de la garde nationale

Évocations artistiques

Littérature

Cinéma

  • La Nouvelle Babylone (Novyy Vavilon) (1929), film soviétique réalisé par Grigori Kozintsev et Leonid Trauberg. Un film muet en noir et blanc de 120 minutes dans sa version initiale et de 93 minutes dans sa version restaurée en 2004. Le film, plus qu'un produit de la propagande soviétique de l'époque, est une œuvre majeure qui s'inscrit brillamment dans la tradition expressionniste du début du siècle (exagération des formes et des contrastes par des angles de prise de vue improbables notamment). On y suit la rencontre et le destin tragique de deux amants amenés par les événements à se trouver de part et d'autre des barricades pendant la commune de Paris de 1871.

Théâtre

  • La Commune De Paris, mise en scène Robert Angebaud au Théâtre du Jour Compagnie Pierre Debauche (mars 2007)
  • Barricade par la compagnie Jolie Môme, création collective inspirée d'Adamov et Brecht. Crée à La cartoucherie, à Paris en 1999.

Musique

Bandes dessinées

Notes et références

  1. D’autres mouvements sont signalés à « Béziers, Perpignan (25 mars), à Grenoble (16 avril), Bordeaux (16 et 17 avril), Nîmes (le 18 avril), Périgueux, Cuers, Foix, Rouen, Le Havre et même à Alger, etc. » Cf. René Bianco, « 1871, la Commune... en province », Le Monde Libertaire, n° 1314, 3-9 avril 2003.
  2. Pour plus d'information, voir la page discussion de cet article.
  3. Martial Delpit, Enquête parlementaire sur l'insurrection du 18 mars, Paris, 1872
  4. brochure "les femmes et la Commune" Amis de la Commune de Paris 1871) [1]
  5. La loi Falloux du 15 mars 1850 est surtout connue pour l'autorisation faite aux religieux pour enseigner sans brevet mais elle rend aussi obligatoire la création d'une école de filles dans toute commune de 800 habitants.
  6. Plus de la moitié environ des 160 000 enfants parisiens scolarisés dans le primaire
  7. Texte du décret sur Wikisource
  8. Victor Hugo qui dira :"Le cadavre est à terre, mais l'idée est debout"

Voir aussi

Articles connexes

Affiche du Comité de Salut Public

Bibliographie

Témoignages historiques

Études historiques

  • Jean Baronnet et Jean Chalou, Communards en Nouvelle-Calédonie. Histoire de la déportation, Mercure de France, 1987.
  • Martin Breaugh, L'expérience plébéienne. Une histoire discontinue de la liberté politique, Payot, coll. «Critique de la politique», 2007.
  • Paul Ducatel, La Commune de Paris vue à travers l'imagerie Populaire, éditions Grassin, 1971.
  • Georges Bourgin, La Commune, collection Que-sais-je?, PUF.
  • Marcel Cerf, Edouard Moreau, l'âme du Comité Central de la Commune, Denoël, 1971
  • Marcel Cerf, Le mousquetaire de la plume, Henry Bauër. En annexe, lettres inédites de Louise Michel à Henry Bauër, Académie d'Histoire, 1975
  • Jeanne Gaillard, Communes de province, Commune de Paris, 1870-1871, Flammarion, Paris, 1971, 183 p.
  • Bernard Noêl, Dictionnaire de la Commune, Flammarion, collection Champs, 1978.
  • Jacques Rougerie, La Commune, PUF, coll.Que sais-je ? n°581
  • Jacques Rougerie, Paris libre, 1871, Le Seuil, 1971.
  • Jacques Rougerie, Paris libre, 1871, Seuil, Paris, 2004, 289 p.
  • William Serman, La Commune de Paris (1871), Fayard, Paris, 1986, 621 p.
  • Bertrand Tillier, La Commune de Paris, révolution sans image? Politique et représentations dans la France républicaine (1871-1914), Champ Vallon, 2004, 522 p.
  • Robert Tombs, La guerre contre Paris, 1871, Aubier, Paris, 1997.
  • Michel Winock, La Fièvre hexagonale. Les grandes crises politiques de 1871 à 1968, Seuil, Paris, 1995, 471 p.
  • "Histoire populaire et parlementaire de la commune de Paris", Édition Jacques-Marie Laffont et associés, Lyon, 1981.
  • Alain Amicabile, La Commune de Paris. Toujours vivante!, L'ingénu éditions , 2009, 292 p.

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