Concile de Piacenza

Concile de Piacenza

Concile de Plaisance

Statue d'Urbain II à Clermont, aujourd'hui Clermont-Ferrand.

Le concile de Plaisance était un synode composé d'ecclésiastes et de laïcs de l'Église catholique romaine, qui s’est déroulé du 1er mars au 5 mars 1095, à Plaisance.

Sommaire

Contexte

Ce concile se déroule à la suite de la querelle des Investitures, un important conflit politique qui a opposé le pape à l’empereur romain germanique à propos de la désignation et de la nomination des évêques et archevêques germanique. La lutte a été tellement âpre que l’empereur a tenté de déposer Grégoire VII et fait élire un certain Guibert, connu ensuite comme l’antipape Clément III.

Le pape Urbain II est sorti vainqueur de ce conflit et décide de convoquer les évêques d’Italie, de Bourgogne, de France, d’Alémanie de Bavière et d’autres provinces à un concile qui doit se tenir à Plaisance à la mi-carême (soit le 1er mars) 1095.

Le concile

Deux cents évêques ont répondu à la convocation, ainsi que quatre mille autres prélats et trente mille laïcs. Il y a tellement de monde que, faute d’église ou d’esplanade suffisamment vaste le concile doit se tenir dans la plaine à l'extérieur de la ville. Cette recrudescence de participants reflète l'autorité croissante de l'église peu après la mort du pape Grégoire VII.

Les canons adoptés

Le texte officiel des canons n’a pas été conservé et on en connaît actuellement deux versions, l’une issue du récit du chroniqueur Bernold, l’autre d’un document citant quinze capitula statutorum du concile de Plaisance

Les canons mentionnés par Bernold sont :

  1. Nul ne doit être admis à faire pénitence s’il ne renonce au concubinage, à la haine ou à toute autre péché mortel ;
  2. Aucun prêtre ne doit recevoir à la pénitence, si ce n’est que par commission de son évêque ;
  3. On ne doit pas refuser l’eucharistie à ceux qui se confessent d’une manière satisfaisante et n’appartiennent que de corps au parti des excommuniés[1] sans prendre part à leur service divin ;
  4. L’hérésie des simoniaques est condamnée ;
  5. celle des nicolaïtes est condamnée ;
  6. L’hérésie de Bérenger est anathémisée ; on déclare que le pain et le vin consacré sur l’autel sont changé vere et essentialiter[2] et non seulement figure au corps et au sang du seigneur ;
  7. on prononce l’anathème contre Guibert[3] et ses partisans ;
  8. on ne doit rien exiger pour la confirmation, le baptême et les enterrements ;
  9. les jeûnes des quatre temps sont fixés à la première semaine du carême, à celle de la Pentecôte, à la troisième semaine de septembre et de décembre ;

Les quinze capitula statutorum[4] sont les suivants :

  1. confirmation des ordonnances des papes contre les simoniaques ;
  2. toutes les consécrations obtenues à prix d’argent sont nulles ;
  3. la consécration par un simoniaque d’une personne élue de manière non simoniaque, lorsque celle-ci peut prouver ignorer l’indignité de son consécrateur, conserve tout son effet ;
  4. si l’élu savait son consécrateur simoniaque, la consécration est nulle ;
  5. ceux qui, encore enfants, ont obtenu une église à prix d’argent payée par leur parent, peuvent, par tolérance peuvent la conserver s’ils s’engagent à vivre de manière canonique ;
  6. ceux qui, adultes, ont obtenu une église à prix d’argent, peuvent par tolérance servir dans une autre église au même rang, et si ce n’est pas possible, servir dans le même église à un rang inférieur ;
  7. celui qui a été ordonné canoniquement avant une acquisition simoniaque, conservera son rang s’il rend ce qu’il a acquis à prix d’argent ;
  8. les consécrations faites par l’hérésiarque Guibert depuis sa condamnation ne sont pas valables ;
  9. idem pour les consécrations faites par tous les autres hérésiarques, et particulièrement les excommuniés ou ceux qui ont usurpé les sièges épiscopaux du vivant de leurs prédécesseurs ;
  10. les personnes consacré par des évêques régulièrement ordonnés et devenus plus tard schismatiques sont autorisés à conserver leur rang, s’il s’en montrent digne au point de vue de la morale et de la science[5] ;
  11. ceux qui se seront désormais consacrés par les schismatiques ne pourront pas bénéficier de cette tolérance ;
  12. Cette tolérance, imposé par la force des choses, ne peut pas porter préjudices aux saints canons ;
  13. ce canon est identique au huitième canon cité par Bernold ;
  14. ce canon est identique au neuvième canon cité par Bernold ;
  15. celui qui est ordonné dans une église doit demeurer dans cette église et personne ne peut posséder deux églises ;

On le voit, ces canons sont destinés à affirmer l’autorité du pape sur toute la chrétienté en excommuniant les dissidents et à lutter contre la simonie et la corruption du clergé. Mais ces règles strictes n’excluent pas le pardon et le repentir et permet aux religieux qui se trouve dans l’erreur de conserver leur situation en échange de la soumission et du repentir. De plus ce pardon s’applique aux erreurs du passé, mais ne peuvent en aucun cas être utilisé pour pardonner des errements futurs (11e et 12e capitula statutorum).

Les décisions relatives à la chrétienté

Parmi les laïcs se trouve Praxède, la femme de l'empereur Henri IV, qui vient pour se plaindre à propos des affaires relatives à son mari et des traitements que lui fait subir ce dernier. La même année, l'annulation de son mariage lui est accordée.

Sont également présents des ambassadeurs de Philippe Ier de France, venus pour faire appel de l'excommunication récemment prononcée envers leur souverain, après son divorce jugé illégal et son remariage avec Bertrade de Montfort. Yves de Chartres considère que le roi ne cherche en fait qu’à gagner du temps et recommande au pape de se défier des ambassadeurs de France. Un délai est cependant accordé à Philippe qui a jusqu'à la pentecôte (13 mai) pour rectifier la situation[6].

Hugues, légat et archevêque de Lyon est suspendu pour n’être pas venu au concile ni s’en être excusé[7].

Les envoyés de Byzance

Mosaïque représentant Alexis Ier Comnène.

A ce concile sont également présents des ambassadeurs envoyés par l'empereur byzantin Alexis Ier Comnène. Alexis avait été excommunié par Grégoire VII et, après plusieurs mesures de réintégration au sein de l'église, Urbain II avait levé définitivement l'excommunication en devenant pape en 1088, ce qui fait que les relations peuvent être qualifiées d'apaisées durant cette période. L'empire byzantin avait perdu la majeure partie de son territoire au profit des Turcs Seljoukides à la suite de la bataille de Manzikert en 1071 et Alexis espère que les chevaliers européens viennent l'aider à restaurer sa puissance en Asie mineure.

Les ambassadeurs ont exagéré probablement le danger immédiat encouru par l'empire, car les Seldjoukides sont alors en proie à des luttes intestines. Alexis fait aussi dire que Jérusalem est également détenue par les musulmans, sachant l'importance qu'avait cette ville aux yeux des catholiques, pour lesquels Jérusalem est au centre du monde.

Dès le concile de Plaisance, le pape engage les fidèles à prêter serment de partir combattre pour secourir Alexis. Puis en novembre 1095, à l’occasion d'un autre concile, celui de Clermont, Urbain II appelle toute la noblesse de la chrétienté[8] à partir aider l’empereur byzantin contre les Turcs et à délivrer les Lieux Saints. L’appel aura un énorme succès et de nombreux nobles se réuniront dans la première croisade.

Sources

La plupart des informations à propos du concile de Plaisance viennent du chroniqueur Bernold de Constance, qui était probablement lui-même présent, ainsi que de Ekkehard d'Aura et Guibert de Nogent, qui étaient peut-être à Plaisance sinon à Clermont. Il n’existe aucune source byzantine contemporaine citant les ambassadeurs mais le concile est mentionné par le chroniqueur du XIIIe siècle, Théodore Scutariotes, dont les travaux ont disparus.

Notes et références

  1. Le parti des excommuniés correspond aux partisans de l'empereur.
  2. vraiment et essentiellement.
  3. l’antipape Clément III.
  4. articles des décrets.
  5. S’agit-il de la science théologique ?
  6. En fait, la situation n'est toujours pas résolue en novembre 1095, et le concile de Clermont renouvelle l'excommunication. Ce n'est qu'en 1104 que Philippe et Bertrade se séparent définitivement.
  7. Il semble avoir fait amende honorable et être rétabli rapidement.
  8. à l’exception de la noblesse espagnole, chargé de défendre l'Espagne et l’Europe contre les musulmans andalous.

Annexes

Bibliographie

  • (de) Charles Joseph Hefele (trad. Dom H. Leclercq), Histoire des conciles d’après les documents généraux, vol. 5, 1863 (réimpr. 1912), p. 388 à 395 

Articles connexes

  • Portail des croisades Portail des croisades
Ce document provient de « Concile de Plaisance ».

Wikimedia Foundation. 2010.

Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Concile de Piacenza de Wikipédia en français (auteurs)

Игры ⚽ Нужно решить контрольную?

Regardez d'autres dictionnaires:

  • Piacenza — Plaisance (Italie) Pour les articles homonymes, voir Plaisance. Plaisance Le Palazzo Gotico de Piacenza …   Wikipédia en Français

  • Concile De Sutri — Synode de Sutri Le synode de Sutri (aussi appelé Concile de Sutri[1]) fut convoqué par le pape Grégoire VI à la demande de l Empereur germanique Henri III, qui voulait mettre un terme à l anarchie papale. Le synode se déroula du 20 au 23 décembre …   Wikipédia en Français

  • Concile de Sutri — Synode de Sutri Le synode de Sutri (aussi appelé Concile de Sutri[1]) fut convoqué par le pape Grégoire VI à la demande de l Empereur germanique Henri III, qui voulait mettre un terme à l anarchie papale. Le synode se déroula du 20 au 23 décembre …   Wikipédia en Français

  • Concile de sutri — Synode de Sutri Le synode de Sutri (aussi appelé Concile de Sutri[1]) fut convoqué par le pape Grégoire VI à la demande de l Empereur germanique Henri III, qui voulait mettre un terme à l anarchie papale. Le synode se déroula du 20 au 23 décembre …   Wikipédia en Français

  • Oswald von Wolkenstein — Innsbrucker Handschrift, 1432 Naissance 1376 ou 1377 Pustertal …   Wikipédia en Français

  • Alberto Cavallari — Pour les articles homonymes, voir Cavallari. Alberto Cavallari …   Wikipédia en Français

  • Plaisance (Italie) — Pour les articles homonymes, voir Plaisance. Plaisance Le Palazzo Gotico de Piacenza …   Wikipédia en Français

  • Adoration eucharistique — Un fidèle en adoration devant le Saint Sacrement. Dans l Église catholique romaine, l adoration eucharistique est une attitude de prière au cours de laquelle le Saint Sacrement c’est à dire, selon la doctrine de cette Église, le Corps du Christ… …   Wikipédia en Français

  • Congrégation pour le clergé — La Congrégation pour le Clergé a été fondée par la constitution apostolique Regimini Ecclesiae Universae de Paul VI publiée le 15 août 1967. Sommaire 1 Historique 2 Préfets 2.1 Sacrée Congrégation du Concile …   Wikipédia en Français

  • Synode de Sutri — Le synode de Sutri (aussi appelé Concile de Sutri[1]) fut convoqué par le pape Grégoire VI à la demande de l Empereur germanique Henri III, qui voulait mettre un terme à l anarchie papale. Le synode se déroula du 20 au 23 décembre 1046, à Sutri,… …   Wikipédia en Français

Share the article and excerpts

Direct link
Do a right-click on the link above
and select “Copy Link”