Controverse sur le servage au Tibet

Controverse sur le servage au Tibet

La controverse sur le sujet du servage au Tibet repose sur une question de terminologie et s'exprime dans un débat politique entre la République populaire de Chine et le Gouvernement tibétain en exil et dans un débat universitaire sur la notion même de servage dans le cadre de l'ancien Tibet.

Sommaire

Définition internationale du servage

Adoptée en 1956 en complément à la « Convention relative à l'esclavage » de 1926, la « Convention supplémentaire relative à l'abolition de l'esclavage, de la traite des esclaves et des institutions et pratiques analogues à l'esclavage » définit ainsi le servage :

« Le servage, c'est-à-dire la condition de quiconque est tenu par la loi, la coutume ou un accord, de vivre et de travailler sur une terre appartenant à une autre personne et de fournir à cette autre personne, contre rémunération ou gratuitement, certains services déterminés, sans pouvoir changer sa condition ».

La convention de 1926 définit l'esclavage ainsi :

« L'esclavage est l'état ou condition d'un individu sur lequel s'exercent les attributs du droit de propriété ou certains d'entre eux ».

Statut de serf

Selon Melvyn C. Goldstein et Cynthia M. Beall, le statut de de sujet (« serf ») au Tibet n'était pas obligatoirement synonyme de pauvreté. Ainsi, nombre de sujets du Panchen Lama à Lagyab Lhojang étaient riches, certains d'entre eux possédant de très grands troupeaux de plusieurs milliers de moutons et de chèvres et des centaines de yacks[1].

Le territoire concerné

Article connexe : Définitions du Tibet.

Pour définir l'existence du servage au Tibet, il est nécessaire de pouvoir définir le Tibet lui-même. Le gouvernement de la RPC limite le Tibet au secteur qu’il désigne sous le nom de région autonome du Tibet, à savoir les provinces de l'U, du Tsang et le Kham occidental alors que le gouvernement tibétain en exil prétend que d’autres secteurs ethniquement tibétains à l'est appartiennent aussi au Tibet [2],[3].

Outre la volonté de chasser les impérialistes du Tibet, l'existence d'un « servage féodal » est l'un des arguments principaux de la République populaire de Chine pour justifier sa prise de contrôle du Tibet. Selon la RPC :

« …se débarrasser de l'agression des impérialistes et briser le joug du système de servage féodal étaient devenus une nécessité historique du progrès social au Tibet et le désir ardent du peuple tibétain. La fondation de la République populaire de Chine en 1949 apporta un espoir aux Tibétains plongés dans un abîme de souffrance. Conformément à la règle du développement historique et en procédant dans tous les cas dans l'intérêt des Tibétains, le gouvernement populaire central concourut activement à la Libération pacifique du Tibet et adopta de grandes résolutions et d'importantes mesures comme la réforme démocratique, l'application de l'autonomie régionale des minorités ethniques, la mise en place du processus de modernisation sur une grande envergure, ainsi que la réforme et l'ouverture, etc. pour changer radicalement le destin du Tibet et stimuler énergiquement le développement de la société tibétaine. La Libération pacifique a ouvert la grande porte à la modernisation du Tibet » [4].

À cela, le gouvernement tibétain en exil répond :

« [...] Les justifications chinoises n’ont aucun sens. Tout d'abord, le droit international n'accepte pas ce type de justification. Aucun pays n’est autorisé à envahir, occuper, annexer et coloniser un autre pays simplement parce que sa structure sociale ne lui plaît pas. Deuxièmement, la RPC a apporté plus de souffrance au nom de la libération. Troisièmement, des réformes nécessaires ont été engagées et les Tibétains sont tout à fait capables de s'en charger » [5],[6].

Témoignages antérieurs à 1959

Le journaliste militaire britannique Edmund Candler, qui séjourna dans la capitale tibétaine en 1904 et en tira un livre, The Unveiling of Lhasa, décrit ainsi la société tibétaine de l'époque :

« Le pays est régi par le système féodal. Les moines sont les seigneurs, les paysans leurs serfs » [7].

Il ajoutait cependant :

« Les pauvres ne sont pas opprimés. De même que les petits locataires, ils travaillent sans réticence pour leurs maîtres spirituels, auxquels ils doivent une aveugle dévotion. Ils ne sont pas mécontents bien qu'ils donnent plus que le dixième de leurs faibles revenus à l'Église. Il faut se rappeler que chaque famille donne au moins un de ses membres à la prêtrise » [8].

Selon la traduction de Melvyn C. Goldstein, Ngawang Thondrup, un moine qui servit dans le gouvernement tibétain en 1948 et qui fut influencé par l'ex-moine et avocat des réformes Gendün Chomphel, rapporte que ce dernier disait en particulier qu'il fallait réformer un système où des gens sont propriétaires d'autres gens (en tibétain dagpo gyab). Il voulait dire que les nobles avaient des serfs (en tibétain miser) et des domaines, et qu'ils étaient propriétaires des gens [qui y vivaient]. Les serfs de la famille Tsarong, par exemple, devaient demander la permission de leur maître s'ils voulaient partir. Et les serfs ne possédaient pas la terre. Nous disions qu'il fallait réformer le système féodal. Selon Gendün Chomphel, les monastères n'avaient nul besoin de détenir des manoirs[9].

La tibétologue norvégienne Heidi Fjeld affirme pour sa part que là où Melvyn C. Goldstein traduit miser par « serf », les principales sources chinoises sur l'histoire sociale du Tibet ainsi que des personnes qu'elle a interrogées rendent ce mot par « roturier » ou « citoyen », ajoutant que « serf » serait alors une subdivision de miser[10].

Dans son livre Le vieux Tibet face à la Chine nouvelle, paru en 1953, la voyageuse française Alexandra David-Néel évoque, au chapitre sur les paysans, l'existence de paysans endettés à vie dans l'ancien Tibet :

« On aurait peine à trouver un paysan tibétain qui ne soit pas endetté à perpétuité ». Elle ajoute que l'origine en est, comme partout ailleurs, l'imprévoyance, et les mauvaises récoltes, mais aussi une stupide vanité associée à la superstition [11].

A la fin des années 1950, l'ethnologue italien Fosco Maraini, s’il mentionne la féodalité[citation nécessaire], affirme que « néanmoins, pour autant qu’on puisse l’être sur cette misérable terre, les Tibétains [lui] ont paru un peuple véritablement heureux. Le bonheur ne dépend pas aussi nécessairement de la structure sociale ou du système de gouvernement… » [12].

Le terme « serf » est employé en 1954 dans la traduction en français (tout comme serf dans celle en anglais) de Sieben Jahre in Tibet, les mémoires publiés en 1952 par l'explorateur autrichien Heinrich Harrer, qui séjourna au Tibet interdit [13] de 1944 à 1951 et qui enseigna l'anglais et la géographie au dalaï-lama [14],[15],[16] :

« Les domaines des nobles sont tellement vastes qu'il faut souvent chevaucher pendant deux jours avant d'atteindre leurs limites. Des serfs les cultivent, mais ils possèdent également des champs dont la récolte leur appartient en propre. Les intendants – qui sont, eux aussi, des serfs – ont la confiance du propriétaire et font figure de potentats ; ce sont eux les véritables maîtres ; les nobles, retenus à Lhassa par leurs obligations et les charges qu'ils occupent dans l'administration, se soucient fort peu de leurs propriétés. (...) Quelques hobereaux vivent au milieu de leurs serfs dans de sombres châteaux ».

À propos de la condition serve, le tibétologue Alex C. McKay rapporte l'évocation par un des agents commerciaux britanniques (sans préciser lequel) de « la domination et la brutalité des lamas et des responsables officiels à l'égard de la population serve » [17].

Robert W. Ford, un Britannique employé par le gouvernement tibétain comme opérateur radio dans la ville de Chamdo, dans le Kham, à la fin des années 1940, écrit dans ses mémoires, publiées en 1957, qu'« au Tibet, un propriétaire dispose de ceux qui sont sur ses terres comme de serfs ». Il rapporte que son boy, pour pouvoir entrer à son service, « avait dû obtenir une autorisation en bonne et due forme du propriétaire du domaine sur lequel il était né »[18]. Dans un compte rendu sur les réalisations des communistes au Tibet après l'entrée de l'armée populaire de libération en 1951, il fait état de l'abolition de la corvée de transport et de son avis que le servage lui aussi sans doute disparaîtra mais qu'en attendant tout le monde est serf [19].

Une des premières publications en anglais sur le Tibet à user du terme « serf » dans son titre est l'ouvrage écrit en 1959 par la journaliste américaine Anna Louise Strong, When Serfs Stood up in Tibet, publié par le gouvernement chinois [20],[21]. Dans un chapitre de ce livre, elle est amenée à évoquer la condition servile des paysans attachés à un manoir de la région de Lhassa et divisés en nantsam, tsaiba et duichun [22]. Anna Louise Strong est qualifiée de « procommuniste » par Dorothy Thompson[23], et l’historien anglais Patrick French qualifie son ouvrage de « honteux tellement il est mensonger » [24].

Révoltes de serfs (1re moitié du XXe siècle) selon des sources chinoises

Selon le livre blanc Fifty Years of Democratic reform in Tibet publié par le Conseil des affaires de l'État de la République populaire de Chine, nombre d'éléments montrent qu'au milieu du XXe siècle le servage féodal était assailli de nombreuses contradictions et agité de crises récurrentes. Les serfs pétitionnaient leurs maîtres pour obtenir l'allègement de leur fardeau, s'énfuyaient des domaines, refusaient de s'acquitter des redevances et des corvées, voire recouraient à la lutte armée[25].

L'ancien Tibet aurait connu à maintes reprises des jacqueries spontanées de serfs contre des responsables du gouvernement tibétain ou des propriétaires de serfs. Selon Jiawei Wang et Nyima Gyaincain :

  • En 1938, des paysans et des éleveurs de la zone des 39 Tribus étaient soumis à de lourdes corvées et impositions. 150 foyers de la tribu Gata firent remettre par un des leurs une pétition aux autorités du comté : il fut mis à l'ombre par le juge. Quelque 40 membres de la tribu cernèrent les bâtiments des autorités locales, étranglèrent le juge et s'emparèrent des armes de 45 soldats. Le gouvernement envoya des renforts, qui se livrèrent à une répression sanglante[26].
  • En 1926-1928, des habitants du comté de Bome livrèrent bataille contre les taxes exorbitantes imposés par le Gaxag : ce fut la plus grande jacquerie contre le gouvernement en un siècle. Le prince Gelang réunit 300 personnes pour attaquer nuitamment le campement de l'armée tibétaine, tuant 30 officiers et hommes de troupe. Le Gaxag envoya des renforts et régla la question par un bain de sang[27].
  • En 1931, Caiba, un noble de Gyadiu dans le comté de Rongzi dans le Shannan, avait des visées sur Gyamei, région fertile et très peuplée et à l'époque sous la juridiction du Gaxag. Au moyen de pots de vin, il obtint le droit de contrôler les taxes et la location des terres. Les serfs de Gyamei, furieux d'avoir des taxes à payer à la fois au gouvernement et à Caiba, tuèrent celui-ci à coups de pierres et de gourdins. Lorsque le gouvernement voulut réprimer la révolte, les serfs s'enfuirent. La lutte dura 28 ans. Ce n'est qu'en 1951 que le gouvernement tibétain consentit à ce que Gyamei ne soit plus sous la houlette de Caiba[27].

Le point de vue du gouvernement chinois sur le servage

Le gouvernement de la République populaire de Chine déclare qu'avant 1959, 95% de Tibétains vivaient dans un système de servage féodal [28] et mentionne des cas d'abus et de cruauté dans le système tibétain traditionnel [29].

Les serfs dépendaient essentiellement des trois grands groupes de propriétaires de domaines seigneuriaux : les fonctionnaires du gouvernement local, les nobles et les bonzes de la couche supérieure des monastères. Ces grands propriétaires représentaient moins de 5% de la population, mais possédaient la totalité des terres, des prairies, des forêts, etc., et le gros du cheptel [30].

Avant la Réforme démocratique, le Tibet abritait 2 676 monastères hébergeant 114 925 moines dont 500 petits et grands bouddhas vivants et 4 000 moines détenant réellement le pouvoir économique. A cette époque, un quart des hommes étaient moines. Les monastères de Drepung, Sera et Ganden accueillaient plus de 16 000 moines et possédaient 321 domaines, 9 800 ha de terre, 450 prés, 110 000 têtes de bétail et 60 000 serfs [31].

Pour sa part, la famille du 14e dalaï-lama possédait 27 manoirs, 30 pâturages, et plus de 6 000 serfs [32].

Dans la langue tibétaine, les serfs sont appelés tralpa (paysan cultivant un lopin et fournissant un travail gratuit au propriétaire), ou duigoin (petit feu). Ils représentent 90% de la population. Dépourvus de terres et de liberté individuelle, ils vivent dans le manoir du seigneur auquel ils sont attachés [30].

Il y a en outre les nangzan (5% de la population), serfs héréditaires (c.-à-d. de père en fils) dépourvus de moyens de production et de presque toute leur liberté personnelle [30].

Le site officiel Les droits de l'homme au Tibet, rapporte un dicton populaire tibétain disant que « les serfs n'ont que leur ombre à emporter, et que leur empreinte de pied à laisser »[33].

De même, sur le site officiel de Radio Chine Internationale (CRI online), Wang Gui, un tibétologue âgé de plus de 70 ans, ayant travaillé et vécu au Tibet de 1950 à 1981, cite un proverbe local pour évoquer les conditions de vie avant la Réforme démocratique : « Trois couteaux frappaient les serfs : les corvées, les impôts et les intérêts des prêts, trop élevés. Les paysans d'alors avaient alors trois options : l'exode, l'esclavage ou la mendicité. » [34].

Un troisième dicton, à ce que rapporte le site La Chine aujourd'hui, disait : « Les parents donnent la vie, mais les fonctionnaires possèdent le corps. On ne dispose ni de sa vie ni de son corps » [31].

Les sources chinoises[citation nécessaire] font valoir un ascendant moral fondé sur l'idée partagée que le Tibet pratiquait le « servage féodal » et était un « enfer sur la terre » avant 1950 [35].

Le débat politique

Une société fondée sur le servage ?

Dans un essai publié en 2003 (revu et corrigé en 2007), Friendly Feudalism:The Tibet Myth [36], le politologue américain Michael Parenti (en) rappelait l'existence du servage dans l'ancien Tibet, en se fondant principalement sur les travaux de Pradyumna P. Karan (The Changing Face of Tibet, 1998) [37] et de Stuart et Roma Gelder (Timely Rain: Travels in New Tibet 1964) [38] :

« Jusque 1959, (...) la plupart de la terre arable était toujours organisée en domaines seigneuriaux travaillés par des serfs. Même un auteur sympathisant du vieil ordre admet que "bon nombre de domaines ont appartenu aux monastères et la plupart d’entre eux ont amassé d’immenses richesses"... Le monastère de Drepung était un des plus grands propriétaires terriens dans le monde, avec ses 185 manoirs, 25 000 serfs, 300 grands pâturages et 16 000 bergers. La richesse des monastères est allée aux lamas ayant le grade le plus élevé, beaucoup d’entre eux étant les rejetons de familles aristocratiques. Les leaders séculiers firent aussi bien. Un exemple notable était le commandant en chef de l’armée tibétaine, qui possédait 4 000 kilomètres carrés de terre et 3 500 serfs » [39].

Stuart et Roma Gelder furent les rares personnes à avoir été autorisées par les autorités chinoises à visiter le Tibet, alors fermé aux voyageurs étrangers. Selon Warren W. Smith Jr, si les Gelder ont reconnu que « des Tibétains étaient tout à fait disposés à dire à leurs auditeurs ce qu’ils souhaitaient à leur avis entendre », ils ne savaient pas que d’anciens serfs ayant les pires histoires de mauvais traitements avaient été encouragés à s'étendre sur leurs histoires et avaient fait carrière en racontant leurs récits aux Chinois, aux Tibétains, et aux visiteurs étrangers[40].

L'écrivain Pierre Chapoutot porte un jugement sans nuances sur la société de l'ancien Tibet :

« Jusqu'à ce qu'il tombe aux mains des communistes, le Tibet a été une société féodale extraordinairement arriérée et brutale, dans laquelle quelques dizaines de clans (laïques ou religieux) exploitaient une population réduite dans son écrasante majorité au servage et au silence »[41].

Jean-Luc Mélenchon, homme politique français qui voit dans l'intervention chinoise une « abolition légitime du servage », déclarait en 2008[42]:

« jusqu’au jour de 1956 où le régime communiste a décidé d’abolir le servage au Tibet et régions limitrophes. Dans une négation des traditions, que j’approuve entièrement, les communistes ont abrogé les codes qui classaient la population en trois catégories et neuf classes dont le prix de la vie était précisé, codes qui donnaient aux propriétaires de serfs et d’esclaves le droit de vie, de mort et de tortures sur eux ».

Pico Iyer, un journaliste dont le père est ami du dalaï-lama et qui s'est entretenu en privé avec lui pendant plus de trente ans, utilise le terme de « servage » pour décrire la société précommuniste au Tibet :

« Pour ainsi dire dès qu'il s'exila, en 1959, le dalaï-lama saisit l'occasion de se débarrasser d'une bonne partie de la paperasserie et du servage qui pesait sur le Tibet dans le passé »[43].

En mars 2008, la tibétologue Katia Buffetrille, a confirmé la fait que dans l'ancien Tibet, « effectivement, il y avait du servage, de l'esclavage même », précisant que « la société était très hiérarchisée, seul le clergé et les nobles pouvaient être propriétaires terriens ». Elle ajoute cependant « Mais, à la fin du XIXe siècle, des réformes ont été entreprises par le 13e dalaï-lama (1876-1933), qui a même aboli la peine de mort en 1898 »[44].

Le taux de serfs (individus sans possession mais redevables auprès d'aristocrates, de monastères ou du gouvernement) est estimé, de manière approximative, à 30% selon Thomas Laird[citation nécessaire][45].

Ou une société simplement inégalitaire ?

Phuntsok Wangyal, qui fonda le parti communiste tibétain dans les années 1940, décrit l'ancien système comme étant marqué par l’inégalité et l’exploitation [46].

Le dalaï-lama utilise parfois le terme de « serf », ainsi en 1991 :

« Les rapports entre le propriétaire et le serf étaient bien plus doux au Tibet qu'en Chine et les conditions des pauvres étaient bien moins dures » [47].

Il a cependant affirmé, en 2006, que le terme de « serf » était excessif pour décrire les paysans pauvres au Tibet[45]. Il reconnaît qu'il y avait des inégalités dans la société tibétaine mais qu'à l'époque il n'était pas conscient du terme « serf », les mots nyamthag (les faibles et les pauvres) ou chabang (les pauvres sujets) étant plus courants[48].

Le dalaï-lama affirme avoir lui-même diminué certains impôts et dettes[45]. Dans un entretien avec Johann Hari en 2004, il déclare avoir a engagé des réformes majeures durant les quelques années où il a dirigé le Tibet « dans une alliance difficile avec les Chinois ». Il rapporte avoir établi un système judiciaire indépendant et aboli le système de la dette héréditaire, qui était, explique-t-il, « le fléau de la communauté paysanne et rurale », piégeant celle-ci dans une servitude envers l'aristocratie[49].

Anna Louise Strong, pour sa part, rapporte que les dettes féodales furent annulées le 17 juillet 1959 par le Comité préparatoire de la région autonome du Tibet[50].

Selon Hu Yinan et Wu Jiao, entre 1951 et 1959, le statut des serfs est resté inchangé d'un commun accord entre le gouvernement tibétain et les responsables chinois en vertu de l'Accord en 17 points sur la libération pacifique du Tibet[51]. L'article 11 de l'accord stipule que sur la question des diverses réformes à apporter au Tibet, les autorités centrales n'exerceront aucune contrainte et le gouvernement local du Tibet exécutera ces réformes de son plein gré et lorsque le peuple exigera des réformes, la question sera réglée en prenant l'avis des instances dirigeantes du Tibet (In matters relating to various reforms in Tibet, there will be no compulsion on the part of the central authorities. The local government of Tibet shall carry out reforms of its own accord, and, when the people raise demands for reform, they shall be settled by means of consultation with the leading personnel of Tibet).

Plusieurs sources tibétaines décrivent les paysans et travailleurs tibétains pour appuyer leur propre vision d'un peuple tibétain qui était non seulement indépendant de la Chine, mais considérait les Chinois comme étranges et incompréhensibles, et qui de plus a été victime d’un génocide sous la domination chinoise [52]. Hugh Richardson, le représentant britannique au Tibet, en accord avec des auteurs tibétains, déclare qu’il y avait très peu de différences entre les riches et les pauvres[53].

Le journaliste Thomas Laird note que les spécialistes débattent de la validité d'application de ces termes au Tibet, et sont confrontés à un manque de données [54].

Un argument politique

D'un côté, la partie chinoise cherche à convaincre l'opinion internationale que le Tibet appartient historiquement à la Chine, et que les affaires du Tibet sont des questions internes à la RPC. De l'autre côté, les Tibétains cherchent à internationaliser leur cause, en partie en cherchant à convaincre l'opinion internationale que le Tibet était indépendant de l'empire chinois [55].

Se concentrant sur les questions de souveraineté nationale, la position du Gouvernement tibétain en exil est plus modérée dans le ton de certains de ses plus extrêmes partisans qui regroupent la domination des lamas ayant des idéaux bouddhistes tibétains, cherchant à promouvoir un dogme bouddhiste qui fait concurrence au dogme marxiste du 'servage féodal' en décrivant le Tibet sous la direction des lamas comme, selon les mots de Robert Thurman, « Un mandala de l'univers pacifique et perfectionné » [56].

Le Tibétologue Robert Barnett[57] écrit :

« Beaucoup d'auteurs ont cependant suggéré qu'une autre raison se dissimulait derrière l'insistance du gouvernement chinois à mettre cet argument en avant : un réel besoin politique de montrer que le Tibet était féodal et oppressif. Cela, est-il avancé, parce que dans la théorie marxiste la classe opprimée dans une société ainsi définie doit automatiquement être libérée, qu'elle soit consciente ou non de cette oppression. En d'autres termes, l'État chinois a besoin de montrer que la grande majorité des Tibétains était opprimée, afin de tenir pour une « libération » l'arrivée des armées chinoises à Lhassa, en 1951. De plus, il lui est nécessaire de présenter cette oppression comme considérable, et la société comme très primitive, afin d'expliquer pourquoi, dans le passé, il y a eu peu, ou pas, de soulèvements au Tibet, et apparemment aucun appel significatif de la paysannerie tibétaine pour une intervention chinoise en sa faveur.
La question de l'histoire sociale du Tibet est donc hautement politisée, et les proclamations chinoises à ce sujet constituent la partie cruciale d'un "fonctionnalisme" d'État, et non pas un acte d'exploration intellectuelle libre. Elles doivent, par conséquent, être traitées avec prudence. En fait, du point de vue des droits de l'homme, la question la plus immédiate n'est pas de savoir si le Tibet était une société féodale, mais si l'État chinois tolère actuellement des discussions ouvertes sur la féodalité du Tibet. D'évidence, les érudits tibétains et chinois ne sont pas autorisés à mettre en doute ouvertement le point de vue officiel selon lequel le Tibet était une société féodale oppressive. (...) Ces restrictions sur la discussion des questions historiques font qu'il est difficile d'accepter les déclarations du gouvernement chinois et des savants écrivant sur le sujet à l'intérieur des frontières chinoises » [58].

En réponse à cette position, on peut indiquer que d'autres auteurs comme Elisabeth Martens ou Domenico Losurdo, un philosophe italien, suggèrent inversement que le gouvernement tibétain en exil a tout intérêt à ce que l'opinion internationale n'ait pas connaissance des conditions sociales très dures prévalant avant le milieu du XXe siècle au Tibet, car cela pourrait réduire fortement l'adhésion de cette opinion à leur cause, et que, pour cette raison, les Tibétains en exil s'attellent à propager l'idée d'un Tibet alors idyllique, relayée notamment par les productions d'Hollywood, faisant ainsi fi des réalités historiques[citation nécessaire][59].

Le débat universitaire

En Europe, le servage, associé à la seigneurie est une condition sociale et historique appartenant principalement au Moyen Âge[60]. Pour une description de conditions sociales avant 1950 au Tibet voir Société tibétaine.

Le débat universitaire pour déterminer si le terme de « serf » est approprié pour décrire la société tibétaine pré-communiste se poursuit encore aujourd'hui.

Dans le débat universitaire, la nature du servage et l'utilisation du terme dans son application au Tibet par les sociétés orientales sont nuancées par certains universitaires. Ainsi, en 1971, le tibétologue Melvyn Goldstein écrivait : « Le Tibet a été caractérisé par une forme d'inégalité institutionnalisée qui peut être appelée servage diffus » [61].

D'autres universitaires ont mis en doute l'application du concept pour le Tibet. Un exemple récent en est Heidi Fjeld qui, en 2003, affirmait que les termes féodalisme et « serf » sont trompeurs pour qualifier le système social du Tibet, qu'elle décrit plutôt comme « une hiérarchie sociale à type de caste » [62]

Un autre promoteur déterminant du terme est l'historien [63] A. Tom Grunfeld, qui fonde ses écrits sur les travaux d’explorateurs britanniques de la région, en particulier Sir Charles Bell. On a prétendu que son livre n'était pas corroboré par l’histoire traditionnelle tibétaine, chinoise ou indienne et qu'il contient des inexactitudes et des déformations [21],[64], et que les extraits du livre de Bell choisis par Grunfeld sont sortis de leur contexte pour égarer le lecteur [65]. Grunfeld est une figure de proue pour les Chinois, qui louent son travail, son érudition, et son intégrité tandis que les exilés tibétains, qui répondent à ces louanges par autant de critiques [66], le qualifient de « sinologue » ne faisant pas autorité sur l'histoire tibétaine en raison de son incapacité à lire le tibétain [55].

Melvyn Goldstein a écrit de nombreux ouvrages sur la société tibétaine depuis les années 1960. Il y utilise le terme de serf pour traduire mi ser (littéralement « personne jaune ») [67] et pour décrire à la fois les classes de paysans sans terre et la classe des familles plus aisées possédant de la terre et redevables de taxes. Il écrit : « à l'exception d'environ 300 familles nobles, tous les hommes et les femmes laïques au Tibet étaient des serfs (mi ser) attachés, par attribution par descendance parallèle, à un seigneur particulier (dPon-po) par le biais d'une propriété, en d’autres termes les fils étaient attribués au seigneur de leur père mais les filles au seigneur de leur mère » [68]. Dans son livre de 1989, A History of Modern Tibet, Goldstein prétend que, bien que le servage ait été courant au Tibet, cela ne signifie pas qu’il s’agissait d’une société complètement statique. Il y avait plusieurs types de statut de serf, dont un des plus importants était le « bail humain », lequel permettait à un serf d’acquérir un degré de liberté personnelle. Ceci était une autre possibilité qui, bien que conservant le concept de seigneurie, libérait partiellement le mi ser des obligations envers un domaine foncier, habituellement en échange d'une redevance annuelle [61]. En 1997, Goldstein évoque « (...) les élites monastiques et aristocratiques qui détenaient la plupart des terres au Tibet sous forme de domaines féodaux comportant des paysans de type serf attachés à ces derniers de façon héréditaire » [69].

John Powers qualifie Goldstein de « généralement pro-Chinois »[70] mais voit dans son History of Modern Tibet un « traitement très équilibré » [71]. Goldstein se décrit lui-même comme ayant des opinions politiques conservatrices [72].

Les échanges qui eurent lieu de 1986 à 1989 dans une revue universitaire entre Melvyn Goldstein et l'anthropologue Beatrice Miller de l'Université du Wisconsin ont été un moment fort de ce débat. La validité d'application du concept de servage au Tibet fut débattue entre Goldstein et Miller dans une série de cinq articles publiés dans la revue The Tibet Journal."[73] Le débat fut inauguré par Goldstein dans le numéro XI de la revue, où il soutint la thèse que les caractéristiques de la société tibétaine étaient éminemment comparables au servage européen [74]. Il appuyait sa comparaison sur les caractéristiques du servage européen telles que décrites par l'historien français Marc Bloch, notamment [75] :

  • Le statut était héréditaire.
  • Un serf, contrairement à un esclave, avait des droits et jouissait en propre de moyens de production (la terre) mais ne les possédait pas.
  • Le seigneur avait le pouvoir légal de commander à ses serfs, y compris l'autorité judiciaire sur celui-ci ou celle-ci.

Goldstein soutint que la société tibétaine remplissait toutes ces conditions, et argumenta en détail contre les opinions divergentes spécifiques de ses collègues universitaires Miller, Franz Micheal, Dargyay et Aziz. Il étaya ses affirmations par des recherches, des récits de première main et des études de cas, et répondit aux critiques qui avaient été émises par ces chercheurs dans les années précédentes.

Seule Miller répondit dans le numéro suivant de The Tibet Journal, dans une courte lettre, en 1987. Elle reconnut l'érudition de Goldstein : « l'article de Goldstein (...) est sans faute. C'est un exemple remarquable de la collecte de sources de qualité dont il est coutumier » [76]. Elle était en désaccord cependant avec son interprétation, en particulier l'usage du mot « serf », et mit en question ses conclusions en affirmant :

  • Qu'un seigneur avait aussi des obligations envers le gouvernement central, donc les obligations spécifiques d'un paysan (tibétain : "mi ser") envers un seigneur n’étaient qu’un exemple des obligations sociales que tout le monde avait [76].
  • Que les obligations dues à un seigneur l'étaient collectivement par la famille, et non pas « personnellement » ou individuellement [77].
  • Que les obligations d'un paysan n'étaient pas si pénibles car il lui était facile de fuir [78].

Dans le numéro suivant, Goldstein fit la réponse suivante :

  • La nature des rapports que le seigneur entretenait avec le gouvernement central était radicalement différente des rapports paysan-seigneur et non pertinente aux rapports paysan-seigneur dont il discutait.
  • Alors que les obligations de corvée incombaient principalement aux ménages, le statut juridique du paysan était éminemment lié à sa personne, était héréditaire et non annulable [79].
  • Il souligna que fuir était illégal, punissable, et que les serfs européens s'enfuyaient aussi [80].
  • Il était en fort désaccord avec l'affirmation de Miller selon laquelle les rapports paysan-seigneur étaient fondamentalement contractuels [81].

Dans une publication et réponse ultérieure, Goldstein fut d'accord pour que chacun campe sur ses positions quant à l'usage du mot « serf » pour éviter une discussion terminologique susceptible de nuire à l'étude de conditions sociales. Il déclara que la fuite était un acte de désespoir coupant le serf de ses attaches familiales, sociales et économiques [82] À propos de la forme d’affranchissement partielle appelée « bail humain », il affirma qu'elle libérait seulement temporairement du service quotidien, mais non du service occasionnel, laissé à l'appréciation du seigneur ; le paiement de redevances annuelles nettes fixées par le seigneur était exigé ; elles étaient révocables selon la volonté du seigneur. Il était de ce fait d'avis que c'était une forme très faible d’affranchissement [83].

Dieter Schuh défend la thèse que ceux qui sont appelés « serf » étaient relativement prospères, comparativement à la majorité de la population, beaucoup plus pauvre que les « serfs » et bien souvent non « attachée à la terre » [84]

En se basant sur des récits autobiographiques, William Coleman soutient le fait que dans la pratique les Tibétains avaient bien plus d'autonomie que ce qui est décrit dans des documents écrits[85].

Notes et Références

  1. (en) Melvyn C. Goldstein et Cynthia M. Beall, 'Nomads of Western Tibet: the survival of a way of life, University of California Press ,1990, (ISBN 0520072111 et 9780520072114), 191 p., p. 54 : « To be a subject ("serf"), moreover, did not imply poverty. Many of the Panchen lama's subjects in Lagyab Lhojang were wealthy, some owning very large herds of several thousand sheeps and goats and may hundred yaks. ».
  2. (en) John Powers, History as Propaganda: Tibetan Exiles versus the People's Republic of China, Oxford University Press, 2004, (ISBN 978-0195174267), p. 163.
  3. Cf. Quelle solution politique pour le Tibet?, rapport présenté par M. Louis de Broissia, sénateur, série Relations interparlementaires France-Tibet, 2006, p. 17 : « Le territoire revendiqué par le gouvernement tibétain en exil depuis 1959 correspond au Pö Chölka Sum, c’est-à-dire au « Tibet des trois provinces » : Ü-Tsang, Kham et Amdo. Ce Grand Tibet a une superficie d’environ 3,8 millions de km2, soit sept fois la France. Il représente donc près de 40 % de la superficie de la Chine dans ses frontières actuelles (9,6 millions de km2) ».
  4. (en) Tibet's March Toward Modernization, People's Republic of China, 2001. Consulté le 2008-07-03.
  5. (en) Traditional society and democratic framework for future Tibet, Tibetan Government-in-Exile, 1996. Consulté le 2008-07-03
  6. Tibetan Government-in-Exile, Traditional society and democratic framework for future Tibet, op. cit. : « Whatever the case may be, for several reasons the Chinese justifications make no sense. First of all, international law does not accept justifications of this type. No country is allowed to invade, occupy, annex and colonize another country just because its social structure does not please it. Secondly, the PRC is responsible for bringing more suffering in the name of liberation. Thirdly, necessary reforms were initiated and Tibetans are quite capable of doing so. »
  7. (en) Edmund Candler, The Unveiling of Lhasa, Pentagon, London, 2007 : « The country is governed on the feudal system. The monks are the overlords, the peasantry their serfs ».
  8. Edmund Candler, op. cit., p. 246 : « The poor are not oppressed. They and the small tenant farmers work ungrudgingly for their spiritual masters, to whom they owe a blind devotion. They are not discontented, though they give more than a tithe of their small income to the Church. It must be remembered that every family contributes at least one member to the priesthood (...) ».
  9. Propos recueillis en 1992 et publiés dans (en) Melvyn C. Goldstein, A History of Modern Tibet: The Calm Before the Storm: 1951-1955, vol. 2, University of California Press, 2009, (ISBN 0520259955 et 9780520259959), 639 pages, p. 191-192.
  10. Heidi Fjeld, Commoners and nobles: hereditary divisions in Tibet, NIAS Press, 2005, (ISBN 8791114179 et 9788791114175) : « Where as Goldstein translates miser as serfs, both the main Chinese source on Tibet's social history (Xizang Renmin Chubanshe 1987) and the informants I interviewed translate miser as 'commoner' or 'citizen', and we might understand 'commoners' as a translation of miser and see 'serf' as a subdivision of miser. »
  11. Alexandra David-Néel, Le vieux Tibet face à la Chine nouvelle, Plon, Paris, 1953, 244 p.
  12. Tibet secret (Segreto Tibet), préface de Bernard Berenson, traduction de Juliette Bertrand (ouvrage orné de 68 héliogravures d’après les photographies de l’auteur), Arthaud, Grenoble, 1954 (parution initiale en 1952).
  13. Heinrich Harrer, Seven Years in Tibet, with a new epilogue by the author. Translated from the German by Richard Graves. With an introduction by Peter Fleming, First Tarcher/Putnam Hardcover Edition, 1997 (ISBN 0-87477-888-3). Détenu dans un camp de prisonnier britannique en Inde, Harrer rêve de gagner le Tibet interdit : « I wanted to get away to reach something, maybe even to reach that forbidden country lying beyond the highest mountains of the world ». Dans ses mémoires, abordant le refus systématique des autorités de délivrer des autorisations aux étrangers souhaitant se rendre dans le pays, il écrit : « The unchangeable policy was to present Tibet as the Forbidden Land ».
  14. (en) Heinrich Harrer, Seven Years in Tibet, E. P. Dutton, 1954 : « He insisted that I should immediately begin to teach him English » et « My young pupil was not yet in a position to travel, but that did not diminish his interest in world geography, which was soon his favorite subject ».
  15. Heinrich Harrer, Sept ans d'aventures au Tibet, Arthaud, 1954.
  16. Heinrich harrer, Seven Years in Tibet, op. cit. : « The estates of the landed gentry are often very large. It sometimes takes a whole day to ride across a property. Many serfs are attached to every estate; they are given a few fields to cultivate for their own profit, but are obliged to spend a certain time working for their landlord. The estate managers, who are often merely trusted servants, boss the serfs like little kings. Their own master lives in Lhasa, where he works for the government and has little time to bother about the property ».
  17. Alex C. McKay, "Truth", Perception, and Politics. The British Construction of an Image of Tibet, in Thierry Dodin et Heinz Räther, Imagining Tibet. Perceptions, Projections and Fantasies, Wisdom Publications, 2001, 465 p., p. 74 (ISBN 0861711912) et (ISBN 9780861711918) :« One (trade agent) recalls "the dominance and brutality of the lamas and officials towards the serf population" ».
  18. Robert W. Ford, Tibet Rouge. Capturé par l’armée chinoise au Kham, Olizane, 1999 (ISBN 2-88086-241-8), p. 20.
  19. (en) Robert W. Ford, Wind between the Worlds, David McKay Company, Inc., New York, 1957, p. 337 : « Already the oppressive system of requisitioning transport has been abolished and no doubt serfdom will go too. But they are all serfs now », Tibet Rouge. Capturé par l’armée chinoise au Kham, p. 287-288.
  20. (en) Anna Louise Strong, When Serfs Stood Up, New World Press, Peking, 1960.
  21. a et b Powers 2004, p. 167.
  22. (en) Anna Louise Strong, When serfs stood up in Tibet, chap. VII, Village East of Lhasa : « The Kumtan manor in which we stood, and the lands and serfs around it, had belonged to Khemey, one of the bigger nobles of Tibet whose family had been in government for generations, and who owned many manors and serfs. (...) Khemey had owned 303 souls in this manor, counting the children. He had twenty-two tsaiba families, forty-five duichun families and eighteen nantsam families. Every year they sowed 2,500 kes (420 acres) of land. Of these about 96 acres were managed by Khemey's steward directly, with the nantsams doing the labor; twenty-two acres were allotted to twenty-two tsaiba families in return for labor, and the remaining three hundred and more acres were rented out to tsaiba and duichuns and paid for by a part of the crop. The official terms for these rentals did not sound onerous, being around one fourth of the crop, but when the serfs finally paid what they owned on seed loans, implements and cattle loans and food loans, all at exorbitant interest, about seventy percent of what they took in went to Khemey, either as rent for land and house, or in payments on debts. All three types of serfs were subject to the lord's orders, to forced labor of various kinds, to flogging for whatever the lord considered misconduct. All had to get permission to marry or to leave the manor for even a short absence. If a lord had a serf tortured or even killed, the lord would not be punished ». »
  23. Dorothy Thompson. Misfortunes Of Red Agent« Anna Louise Strong, veteran American procommunist, was thrown out of the Soviet union as an American agent in those same years ».
  24. Patrick French :Tibet, Tibet Une histoire personnelle d'un pays perdu, traduit de l'anglais par William Oliver Desmond, Albin Michel, 2005, p. 294 : « ...la publication d’ouvrages aussi honteux tant ils sont mensongers que Tibet transformed de Israel Epstein, When Serfs Stood Up in Tibet de Anna Louise Strong ou au livre au titre carrément ridicule de Han Suyin, Lhassa, ville ouverte » (traduit en français sous le titre Lhassa étoile fleur).
  25. (en) A stagnant society on the edge of collapse, in Illustrated White Paper: Fifty Years of Democratic reform in Tibet, Beijing : « Plenty of evidence demonstrated that by the middle of the 20th century the feudal serfdom of theocracy was beset with numerous contradictions and plagued by crises. Serfs petitioned their masters for relief from their burdens, fled their lands, resisted paying rent and corvee labor, and even waged armed struggle. »
  26. (en) Jiawei Wang, NimaJianzan, The Historical Status of China's Tibet, 2e édition, 1977, pp. 260-261 : « In old Tibet, serfs, no longer able to bear the exploitation and oppression, had spontaneously risen to oppose Tibetan government officials and serf owners many times. »
  27. a et b Jiawei Wang, NimaJianzan, op. cit.
  28. (en) White Paper on Tibet's March Forward. Consulté le 2008-07-10
  29. Goldstein 1997, p.56
  30. a, b et c Système de servage féodal du Tibet, China Internet Information Center.
  31. a et b La vie misérable des serfs au Tibet avant la Libération, La Chine aujourd'hui. Toute l'actualité de Chine que les média ignorent, 20 février 2010.
  32. La famille du Dalai Lama avait 6 000 serfs, Le Quotidien du peuple en ligne, 20 mars 2009.
  33. Le développement économique et les droits du peuple à la vie et au développement, site Les droits de l'homme du Tibet, 328 tibet.cn, 18 février 2009.
  34. Tibet : l'émancipation des serfs, « grande victoire des droits de l'homme », jugent des experts, CRI online, 18 mars 2009.
  35. Powers 2004, p. 122 : « assert a moral authority based on the shared notion that prior to the Chinese takeover, Tibet was a "feudal serfdom" and a "hell on earth" ».
  36. (en) Friendly Feudalism: The Tibet Myth. Mis en ligne le 2008-06-23
  37. (en) Pradyumna P. Karan, The Changing Face of Tibet: The Impact of Chinese Communist Ideology on the Landscape, University Press of Kentucky, Lexington, Kentucky, 1976), p. 64.
  38. (en) Stuart Gelder and Roma Gelder, The Timely Rain: Travels in New Tibet, Monthly Review Press, New York, 1964, pp. 62 and 174.
  39. Michael Parenti, Le mythe du Tibet, site Mondialisation.ca, 17 mars 2008.
  40. (en) Warren W, Jr Smith, China's Tibet?: Autonomy or Assimilation, AltaMira Press, U.S, 16 mai 2008, (ISBN 074253989X) : « They also recognized that "Tibetans were very ready to tell listeners what they think they would like to hear," without knowing that some former serfs with the worst stories of abuse had been encouraged to elaborate their stories and had made careers out of telling their tales to Chinese, Tibetans and foreign visitors ».
  41. Pierre Chapoutot, Géopolitique du Tibet: Tibet imaginaire, Tibet réel, site Cafés géographiques, 27 février 2002.
  42. Je ne suis pas d’accord avec le boycott des jeux de Pékin et la propagande anti chinoise, blogue de Jean-Luc Mélenchon, 7 avril 2008.
  43. (en) Iyer, 2008, p. 176.
  44. Florence Perret, La répression est féroce, sur le site helvétique 24 heures (entretien avec Katia Buffetrille), 26 mars 2008.
  45. a, b et c (en) Thomas Laird, The Story of Tibet: Conversations with the Dalai Lama, Grove Press, 2006, pp. 317-319 (ISBN 0-80211-827-5).
  46. Goldstein, Sherap, and Siebenschuh, 2004, pp. 68-69.
  47. (en) HHDL, Freedom in Exile, 1991, p. 101 : « The relationship between landlord and serf was much milder in Tibet than in China and conditions for the poor were much less harsh ».
  48. Thomas Laird, op. cit. : « Je n’étais pas conscient du terme serf, mais il y avait des inégalités […] J’utilise ce terme aujourd’hui, mais à l’époque où il n’était pas populaire […] nous disions Nyamthag, les faibles et les pauvres, ou Chabang, les pauvres sujets », p. 316. : « Je pense que la situation féodale du Tibet comparée à celle de la Chine, de la Russie ou de l’Inde était meilleure », p. 319.
  49. (en) Johann Hari : Dalai Lama interview, The Independent (7 June 2004). : « In the brief years he was in charge of Tibet, in uneasy alliance with the Chinese, the Dalai Lama instituted major reforms of his own. He established an independent judiciary and abolished inheritable debt, which was, he explains, "the scourge of the peasant and rural community", trapping them in servitude to the aristocracy ».
  50. (en) (en) Strong, Anna Louise, When serfs stood up in Tibet, Beijing, New World Press, 1976 [lire en ligne], « VIII Lhalu's serfs accuse »  : « All "feudal debts" had been outlawed by the resolution passed July 17 by the Preparatory Committee for the Tibet Autonomous Region ».
  51. (en) Hu Yinan et Wu Jiao, Holiday to mark end of Tibet serfdom, China Daily, 16 janvier 2009 : « Although Tibet was peacefully liberated in 1951, the evil Statu(t)e of old Tibet had still been in place as per the 17-Article Agreement between the Central People's Government and the local government of Tibet ».
  52. Powers, 2004, pp. 9-12 : « Several Tibetan sources portray Tibetan peasants and workers to support their own view of a Tibetan people who were not only independent of China, but found the Chinese alien and incomprehensible, and who suffered genocide under Chinese rule. »
  53. Powers 2004, p. 22 : « he contends that the populace was generally happy and content, and he agrees with the Tibetan authors examined in this study that it was a deeply religious land with little difference between rich and poor. »
  54. Laird 2006, pp. 317-319. « Entre spécialistes, les discussions sont vives. Les paysans payaient, à la fois en nature et sous forme de corvée, divers impôts au gouvernement, aux monastères, aux nobles locaux. Mais est-ce que pour autant ça faisait d'eux des serfs ? Et si oui, combien y en avait-il ? (...) Malheureusement, les discussions sur ce sujet sont souvent entravées par l'absence de données précises, de plus dans certaines provinces, comme le Kham et l'Amdo, beaucoup de paysans n'avaient pas de seigneurs. »
  55. a et b Powers 2004, p. 8. « Chinese authors indicate that their goal is to make their readers understand that Tibet is an integral part of China and that therefore any criticism of China’s actions in Tibet is illegitimate because these are “internal affairs”. Tibetan writers want to internationalize the issue of Tibet’s historical status and indicate that they hope their works will convince readers that Tibet was an independent nation that was brutally and illegally invaded by its imperialist neighbor and that this will spur readers to join the Tibetan cause and agitate for their country’s independence. »
  56. Robert Thurman, Inner revolution: life, liberty, and the pursuit of real happiness, Riverhead Books, 1999, (ISBN 1573227196), « a mandala of the peaceful, perfected universe »
  57. (en) The Faculty and Scholars of the Weatherhead East Asian Institute: Robert J. Barnett. Mis en ligne le 2008-09-05
  58. Barnett 2008, p. 84 (NB, recherche en cours dans "Le Tibet est-il chinois?").
  59. Domenico Losurdo, La Chine, le Tibet et le dalaï-lama, sur le site Mondialisation.ca, 22 mars 2008 (publié initialement dans L’Ernesto. Rivista Comunista, n° 5, novembre/décembre 2003, pp. 54-57).
  60. Friedrich Hayek et Mikhaïl Gorbatchev ont affirmé que l'expérience de la PRC avec les fermes collectives et les communes populaires dans les années 1950 et 1960 est un retour au servage orchestré par le gouvernement (voir Le retour du servage).
  61. a et b Goldstein, Journal of Asian Studies, May 1971, pp. 521-34.
  62. (en) Heidi Fjeld, Commoners and Nobles:Hereditary Divisions in Tibet, Copenhague, Nordic Institute of Asian Studies, 2003, 1re éd. (ISBN 978-87-91114-17-5) [lire en ligne], p. 5 
  63. (en) A. Tom Grunfeld. Mis en ligne le 2008-06-23
  64. Powers 2004, p. 21.
  65. (en) Students for a Free Tibet: A Lie Repeated-The Far Left's Flawed History of Tibet. Mis en ligne le 2008-06-23
  66. Powers 2004, p. 165.
  67. Powers, 2004, p. 168.
  68. Goldstein, Central Asiatic Journal, p. 15
  69. Goldstein, 1997, p. 35.
  70. . Powers, 2004, p. 24.
  71. Powers 2004, p. 17.
  72. Lettre de Goldstein à WTN, juillet 2008, citée sur Goldstein's Response to Jamyang Norbu Phayul.com. « I actually have conservative political views »
  73. (en) Tibetan History and Social & Political Structure. Mis en ligne le 2008-07-03
  74. Goldstein (1986), pp. 80-86.
  75. Goldstein (1986), p.81.
  76. a et b Miller (1987), p. 65.
  77. Miller (1987), p. 66.
  78. Miller (1987), pp.66-67.
  79. Goldstein (1988), p. 62.
  80. Goldstein (1988), p. 64.
  81. Goldstein (1988), p. 65.
  82. Goldstein (1989), p. 56.
  83. Goldstein (1989), pp.56-59.
  84. Dieter Schuh, Das Archiv des Klosters bKra-šis-bsam-gtan-gling von sKyid-grong, Bonn, VGH-Wiss.-Verl., 1988.
  85. (en) William Monroe Coleman, Writing Tibetan History: The Discourses of Feudalism and Serfdom in Chinese and Western Historiography, Ann Harbor, UMI, 1999  (voir extraits en ligne « Goldstein's discussion is based on a collection of case studies conducted during his research. (...) I want to underscore the de facto autonomy and freedom obtained and maintained by the peasants in several of these studies. »)


Bibliographie

Liens internes

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