Cornelia Africana

Cornelia Africana
Cornelia Africana
Cornélie et ses deux fils par Jules Cavelier (musée d'Orsay).
Cornélie et ses deux fils par Jules Cavelier (musée d'Orsay).

Naissance v. 189 av. J.-C.
Décès v. 100 Av. J.-C.
Ascendants Scipion l'Africain et Aemilia Paulla.
Conjoint Tiberius Sempronius Gracchus
Enfant les Gracques : Tiberius Sempronius Gracchus et Caius Sempronius Gracchus.

Cornelia Africana[1] (v. 189 av. J.-C. - v. 100 av. J.-C.) est la seconde fille de Scipion l'Africain et d'Aemilia Paulla. Selon Pline l'Ancien, elle serait née avec les parties sexuelles fermées, signe de mauvais augure[2]. Cette appréciation est un dénigrement qui participe à la dépréciation de ses fils, les Gracques, reprise par Pline.

Sommaire

Biographie

Son père Scipion l'Africain favorisa l'introduction de la culture grecque à Rome, Cornelia grandit et vécut dans un milieu cultivé et protecteur des écrivains, épris d'hellenisme, côtoyant le poète Ennius, puis l'historien grec Polybe de la même génération qu'elle, et l'auteur de théâtre Térence[3].

Elle épouse Tiberius Sempronius Gracchus, un homme politique romain, consul en 177 av. J.-C. et 163 av. J.-C.. Selon Pline l'Ancien[4], elle aurait eu douze enfants, dont les Gracques : Tiberius Sempronius Gracchus et Caius Sempronius Gracchus.

Recevant une mère de famille qui lui exhibait ses bijoux, elle fit durer la conversation jusqu'au retour d'école de ses fils, et déclara montrant ses enfants : « Haec ornamenta mea » (Voici mes bijoux)[5].

Elle laisse dans le souvenir des Romains la réputation d'une mère exemplaire dans le soin et l'éducation de ses enfants, dont elle s'occupa elle-même sans le secours d'une nourrice[6].

Cornelia, après la mort de son époux décide de ne pas se remarier et étudie les langues et la littérature latines et grecques.

Sur douze enfants, dix moururent de son vivant, et Tiberius et Caius furent assassinés. Selon Sénèque, Cornélie interdit à son entourage de maudire le sort et n'exprima pas ses regrets[7].

Rôle dans la carrière politique de ses fils

Un des aspects les plus importants de la vie de Cornelia est sa relation avec ses fils adultes. La plus grande partie de l’information que nous possédons sur son rôle durant cette période provient de ce que Plutarque écrivit dans Vie des hommes illustres. Elle est dépeinte comme active pendant leur carrière politiques, surtout celle de Gaius.

Plutarque décrit comment Gaius écarta une loi qui discréditait Marcus Octavius, le tribun que Tiberius avait destitué car Cornelia le lui demanda[8]. Il dit également qu’elle aidait Gaius à miner le pouvoir du consul Opimius en engageant des ouvriers agricoles étrangers. David Stockton pense que, que ce soit vrai ou pas, les fermiers et ouvriers agricoles étaient les partisans habituels des Gracques[9].

Plutarque nous rapporte également des traits d’humour de Gaius :

«  On rapporte bien des propos piquants et un peu affectés que tint Caius pour la défendre contre un de ses ennemis à lui : "Est-ce bien toi, dit-il, qui insultes Cornélie, la mère de Tibérius?" Et, comme l'insulteur était décrié pour son manque de virilité, il lui demanda une autre fois : "Et de quel droit te compares-tu à Cornélie? As-tu mis au monde ces enfants comme elle? Et pourtant tous les Romains savent qu'elle a été plus longtemps sans mari que toi, le soi-disant homme.". Plutarque, Vie des hommes illustres, vie des Gracques, 25. »

Si cet incident est exact, on peut supposer que Cornelia avait la réputation d’être une femme noble et chaste et les Gracques utilisaient cette réputation à leur avantage dans la rhétorique politique.

Extraits des lettres de Cornelia

Cornelia est une des quatre femmes romaines dont les écrits ont survécu. On possède deux extraits de lettres écrites à Gaius Gracchus, son plus jeune fils. Tous les érudits ne considèrent pas ces écrits comme authentiques[10]. La lettre démontre comment les femmes romaines exercaient leur influence dans une famille romaine. La lettre fut écrite avant le tribunat de Gaius. Gaius fut tué en 121 av. J.-C.. Les extraits sont conservés dans les manuscrits de Cornelius Nepos, le plus ancien biographe latin

«  Tu me diras qu'il est beau de se venger de ses ennemis. Personne plus que moi ne trouve ce projet grand et beau, si toutefois il peut s'accomplir sans compromettre le salut de l'État. Mais puisque cela ne se peut, le temps s'écoulera, les partis se multiplieront sans que nos ennemis périssent, et nous les laisserons ce qu'ils sont aujourd'hui, plutôt que de ruiner et de faire périr la république. Cornélius Nepos, Des historiens latins. »

«  J'oserais le jurer par un serment solennel, après ceux qui ont mis à mort Tibérius Gracchus, nul ennemi ne m'a causé autant de peine et de chagrin que toi par ta conduite ; quand tu devais me tenir lieu de tous les enfants que j'ai perdus, prendre soin d'écarter de mes vieux jours les moindres ennuis, et regarder comme une impiété de rien entreprendre d'important contre mon aveu. Et c'est moi, quand il me reste si peu de temps à vivre, qui ne peux même obtenir, par grâce pour mes derniers instants, que tu ne te mettes point en opposition avec moi et que tu ne ruines point ta patrie. Où nous arrêterons-nous enfin, et quand notre famille cessera-t-elle d'être en démence ? Quel sera le terme de ces égarements ? Quand serons-nous las de nous créer des chagrins et d'en créer aux autres ? Quand rougirons-nous de troubler et de bouleverser la république ? Si ce que je demande n'est pas possible, attends que je sois morte pour briguer le tribunal ; après moi, fais ce que tu voudras, je ne serai plus là pour le voir. Quand je n'existerai plus, tu m'honoreras par de pieux sacrifices, tu invoqueras le dieu ton père. Mais n'auras-tu pas honte d'implorer alors ces dieux que tu as négligés et délaissés tandis qu'ils vivaient, qu'ils étaient devant tes yeux ? Puisse Jupiter ne point permettre que tu persévères dans cette voie et que ton âme soit aveuglée à ce point ! Si tu persistes, je crains que tu n'attires, par ta faute, sur ta vie entière, de si terribles orages, que jamais tu ne puisses être heureux. Cornélius Nepos, Des historiens latins. »

Au début des années 40 av. J.-C., Cicéron, une contemporain de Nepos, raconte comment son ami Atticus discute de l’influence des mères sur le langage de leurs enfants. Atticus déclara avoir lu les lettres de Cornelia, mère des Gracques. Le style de ces lettres semble démontrer, pour Atticus, que les Gracques furent beaucoup plus influencés par le langage de leur mère que par son éducation.


Notes

  1. Il convient de signaler que ce surnom Africana ne fut pas en usage chez les Romains, qui distinguait cette Cornélia comme mère des Gracques. Le surnom Africana est une introduction moderne
  2. Pline l'Ancien, Histoire Naturelle, livre VII, 15, 2
  3. Marcel Le Glay, Rome, Grandeur et Déclin de la République, Ed Perrin, 1990, réédité en 2005, (ISBN 2262018979), p 162
  4. Pline l'Ancien, Histoire Naturelle, livre VII, 11, 13
  5. Valère Maxime, Faits et dits mémorables, IV, 4
  6. Tacite, Dialogue des orateurs, 28, 6
  7. Sénèque, Dialogues, livre XII, Ad Helviam Matrem de Consolatione, XVI, 6
  8. Plutarque, Vie des hommes illustres, vie des Gracques, 25
  9. David Stockton, The Gracchi (Oxford: Clarendon Press, 1979), 20.
  10. Vivante, Bella ed. Women's Roles in Ancient Civilizations. Westport: Greenwood Press, 1999

Voir aussi


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