Deflation

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En économie, une déflation est une baisse de l'indice des prix observée sur une période suffisamment longue[1] (plusieurs trimestres). Le phénomène opposé, bien plus fréquent, est l'inflation (hausse des prix). Les prix étudiés sont implicitement les prix à la consommation, et l'indice de prix utilisé est alors l'indice des prix à la consommation (IPC). La déflation ne doit pas être confondue avec la désinflation qui est un ralentissement de l'inflation, donc une diminution du taux d'inflation, c'est-à-dire que le niveau général des prix augmente moins vite.

La déflation est ainsi un mouvement persistant à la baisse, au fil du temps, du prix moyen des biens et services, c'est-à-dire du coût de la vie. Sans mention explicite, il ne s'agit pas de la baisse du prix d'un bien ou même des prix d'un secteur d'activité, mais du niveau moyen de l'ensemble des prix. On parle de déflation sectorielle, pour les prix d'un secteur particulier (par exemple, le secteur informatique a connu au cours des années 1990 et 2000 une déflation sectorielle), et de déflation des actifs (immobiliers, financiers, etc.) lorsque ce sont les prix de certains ou de tous les actifs qui sont étudiés. L'évolution du niveau général des prix à la consommation peut être déconnectée de celles des actifs financiers ou immobiliers.

Au cours du XXe siècle, les périodes de déflation ont été exceptionnelles. Après les accords de la Jamaïque (1976), les banques centrales ont cherché à éviter les périodes de déflation. Elles s'inquiètent de la déflation parce que beaucoup d'outils de la politique monétaire deviennent dans ce cas inefficaces et la déflation peut conduire à une spirale déflationniste. Le thème a ressurgi à l'occasion de la déflation observée au Japon depuis 1998 et de l'incapacité des économies occidentales à retrouver le chemin d'une croissance soutenue. L'économie mondiale s'est ralentie nettement depuis la mi-2000, phénomène aggravé suite aux attentats terroristes de septembre 2001. Dès lors, si la demande ne se fait pas plus pressante, il ne peut y avoir de tensions sur les prix et un risque de déflation peut apparaître[2].

Sommaire

Périodes historiques de déflation

Les périodes de déflation historiques les plus connues ont été :

  • la période de 1873 à 1896 dans les pays développés, marquée par un taux de croissance économique élevé et une grande prospérité économique[3] ;
  • la Grande dépression. La déflation qui a eu lieu est généralement expliquée par la contraction monétaire due à la grave crise économique et la contraction de la dette ;
  • la période de faible déflation au Japon dans les années 1990 et 2000, qui a suivi le krach boursier et immobilier en 1991 conséquence de la bulle spéculative japonaise. Les explications économiques de cette déflation sont multiples et non unanimes. On invoque notamment la décroissance démographique japonaise et la proximité des pays émergents d'Asie qui font baisser les prix de production.

À la fin du XIXe siècle il y eut une longue période de déflation, mais, durant laquelle la croissance était soutenue. Cette déflation était due à une croissance modérée de la masse monétaire, à cause de l'étalon-or[3], et à une forte croissance de la productivité, en partie en raison de deux chocs technologiques majeurs : la diffusion de l'énergie électrique et la révolution des transports[réf. nécessaire]. Durant cette période le prix des actifs a diminué de façon continue.

Une autre période de déflation générale, à laquelle on fait le plus souvent référence, est celle de la Grande dépression des années 1930 après l'effondrement des actifs boursiers de 1929. Entre décembre 1929 et mars 1933, les prix ont baissé de 27% aux États-Unis[réf. nécessaire]. Ce net recul se traduisit alors par un effondrement de la demande et donc de l'activité. L'emploi baissa de 16% en trois ans et l'ensemble des salaires versés subit un recul de plus de 40%, créant dans le pays une situation sociale dramatique.

La possibilité d'une déflation durant l'année 2009 est envisagée par plusieurs pays.

Théorie et description

La déflation peut être la traduction d'un net ralentissement ou d'une baisse de la demande, et elle est associée dans ce cas à une période peu favorable à l'activité économique. Néanmoins, une période économiquement morose n'est pas forcément conjuguée à une déflation (cf. épisodes de stagflation), et une déflation sectorielle peut être une bonne chose pour l'activité générale.

Déflation générale

Une déflation générale a des conséquences néfastes sur l'économie, puisqu'elle décourage l'investissement — en rendant moins attractif l'emprunt qui le finance généralement — et, lorsque le consommateur anticipe que la déflation va se prolonger, elle va l’inciter à différer sa consommation en thésaurisant — une même somme d'argent permettra d'acheter davantage de biens dans le futur, par rapport à un achat immédiat. Si une baisse temporaire des prix entraîne en général une augmentation de la consommation (« effet prix »), le phénomène de thésaurisation prend le dessus sur l'effet prix au cours des déflations prolongées.

Cette situation n'est pas forcément bénéfique pour les salariés, dont les revenus peuvent simultanément diminuer — les salaires étant cependant souvent rigides à la baisse, du moins au tout début du cycle.

Les agents économiques ayant des dettes souffrent particulièrement de la déflation, car leurs créances nominales demeurent constantes alors qu'en termes réels elles représentent davantage de pouvoir d'achat.

Les banques centrales s'inquiètent particulièrement de la déflation parce que beaucoup d'outils de la politique monétaire deviennent inefficaces, et parce qu'elles craignent que la déflation conduise par un cercle vicieux à une spirale déflationniste.

Déflation sectorielle

La déflation sectorielle est généralement une bonne chose quand elle est la traduction de la transformation d'une nouveauté technologique en bien de grande consommation et en gains de productivité. On retrouve là, les études sur la question de la valeur économique initiées par Alfred Marshall.

La révolution des transports par chemin de fer au XIXe siècle, la diffusion de l'électricité, le développement de la consommation des biens électroménagers, de la voiture, de l'aviation, des produits bruns, de l'informatique et de la téléphonie, ont provoqué une érosion des prix accompagnée d'une croissance forte de la richesse et de l'emploi dans les nations industrialisées. La baisse continue des prix dans ces secteurs a permis au plus grand nombre de s'équiper ou de profiter de ces nouvelles technologies appliquées, suscitant de nouveaux gains de productivité et l'ouverture de nouveaux marchés au niveau mondial.

L'exploitation de la main d'œuvre bon marché des pays asiatiques depuis les années 1970, et surtout depuis l'arrivée de la Chine dans la production mondiale de produits industriels depuis les années 1990, a permis un développement rapide et immense de l'emploi et de la richesse dans les pays asiatiques et une explosion du commerce international, par exemple dans le textile, la chaussure, les jouets, le petit matériel électronique ou ménager et les objets de décoration. Cependant, des pans entiers de l'industrie ont disparu en Europe et aux États-Unis, mais ces disparitions ont permis de dégager et de faire évoluer la main d'œuvre pour des secteurs plus productifs et d'ouvrir les vielles économies industrielles vers de nouveaux marchés — services financiers, informatique, téléphonie, aviation, machines outils.

La déréglementation peut aussi être un facteur de bonne déflation en favorisant par la concurrence la baisse des coûts des services — télécommunications, assurances — et l'introduction de nouveaux services, créant de ce fait de nouveaux emplois et de nouvelles richesses.

Baisse des prix et baisse des revenus

La déflation a des effets importants sur la répartition des revenus en provoquant des déséquilibres dans les comptes des entreprises et en minant l'efficacité des politiques monétaires. Cet effet sur la répartition du revenu a été mis en évidence dans un célèbre article d'Irving Fisher, paru en 1933 et dans lequel il montre comment, dans les périodes de déflation, les agents économiques endettés voient leur situation se dégrader rapidement. Si le montant de la dette est d'un montant fixe, la déflation va avoir pour effet d'augmenter le poids de son remboursement, ceci relativement aux autres postes de dépenses, ce qui va alors engendrer, de façon globale, une réduction de la demande et donc de l'activité.

Les principaux bénéficiaires d'une déflation semblent être les créanciers, du moins au début, cependant sur le moyen terme, la chute du prix des actifs boursiers et immobiliers appauvrit aussi ceux qui les détiennent lorsqu'ils sont obligés de les réaliser; ils vont alors faire très attention avant de se lancer dans de nouvelles opérations patrimoniales.

Les plus importants consommateurs, ceux qui ont tendance à consommer la plus grande part de leur revenu, et qui sont aussi souvent ceux qui sont le plus endettés, voient leurs remboursements augmenter en valeur relative par rapport aux autres prix. Ils vont donc chercher à se désendetter plutôt qu'à consommer contribuant à accentuer le marasme général.

Durant le XIXe siècle, la croissance du crédit était limitée par les faibles infrastructures bancaires et la parité or des monnaies. En 1932 le niveau d'endettement a connu un maximum historique aux États-Unis. L'endettement a ensuite progressivement baissé jusqu'au milieu des années 1950. Il a depuis fortement augmenté et se situe désormais bien au-dessus du niveau atteint en 1929.

Un autre résultat de la déflation est le fait que les consommateurs peuvent être incités à reporter leurs achats afin de bénéficier de prix ou de promotions qu'ils espèrent toujours plus attractifs ; ce phénomène, en reportant l'acte d'achat est donc, également, hautement négatif sur le niveau général de l'activité. Ainsi, plus la part de la consommation dans le PIB est élevée dans une économie et plus la déflation fait peser des risques importants. Jusqu'en 2008, la part de la consommation dans le PIB américain était bien au-dessus des normes historiques et ce phénomène était commun à un moindre niveau pour l'ensemble des pays développés.

Dans une période de déflation, les entreprises subissent une réduction de leurs marges du fait que leurs prix de vente baissent alors que les coûts de production demeurent relativement fixes. Cette stabilité est essentiellement la résultante, non seulement, des contrats à long terme passés avec les fournisseurs, mais surtout de la stabilité des salaires liés aux contrats de travail ou aux conventions collectives. Avec le temps, un ajustement s'opère, mais toujours avec du retard, ce qui mine la rentabilité générale des entreprises, les fragilise et augmente les risques de faillites.

Politique des banques centrales contre la déflation

Pour lutter contre la déflation, les banques centrales ont la possibilité de répondre par une baisse des taux d'intérêt, mais il y a alors trois limites majeures à cette politique, car une baisse des taux peut conduire à reporter le problème à plus tard en l'aggravant[réf. nécessaire] :

  • Les acteurs économiques très endettés et disposant d'actifs importants (immobilier, actions), profitent de la baisse des taux pour restructurer leurs dettes ou s'endetter un peu plus. On peut alors voir apparaître des bulles dans le prix de l'immobilier, des actions et ou des matières premières.
  • Le potentiel de baisse des taux d'intérêt est naturellement limité car, si ceux-ci peuvent être nuls, voire légèrement négatifs (voir Taux d'intérêt négatifs — comme, par exemple, en Suisse en 1979 —, ils ne peuvent pas descendre durablement très en dessous de 0%.
  • Les taux très bas et même négatifs peuvent contribuer à assécher le marché du crédit, lorsque les institutions financières utilisent les banques centrales comme un coffre-fort. Elles préfèrent alors placer leurs liquidités même en y perdant un peu pendant quelques trimestres plutôt que prendre le risque de les perdre dans des projets industriels ou financiers, ce qui contribue à amplifier la crise et à augmenter la déprime générale.

L'expérience des politiques économiques [réf. nécessaire] montre qu'il est de fait très difficile de sortir d'une période de déflation par une baisse des taux d'intérêt. Le Japon est englué dans la déflation depuis le krach boursier et immobilier qu'il a connu en 1990. Pourtant il a maintenu depuis une politique de taux 0.

Les autorités décisionnelles qui ont la responsabilité des politiques économiques doivent donc être très vigilantes, afin d'intervenir le plus en amont possible, et de tenter de modifier les anticipations d'achats. C'est pour cette raison, que les autorités monétaires américaines, européennes, mais aussi le FMI n'hésitent pas à mettre l'accent sur ce risque, avec comme objectif justement d'affecter les anticipations des agents économiques.

Une proposition plus radicale : les banques centrales nationales pourraient augmenter fortement la masse monétaire par création monétaire exogène (selon la métaphore de Milton Friedman, faire un « helicopter drop » (lâcher de billets par hélicoptères). Concrètement la banque centrale financerait directement la dépense de l'État qui par exemple accorderait des aides financières aux ménages. Cette solution est politiquement difficile à mettre en œuvre parce qu'elle suppose d'acter politiquement que les dettes actuelles seront remboursées en "monnaie de singe". Une telle pratique est ouvertement inflationniste, elle porte tort aux banques et autres acteurs privés qui vivent de la hausse continue de l'endettement et de la création de monnaie par ce biais. En Europe, les dépenses des États nationaux sont très étroitement surveillées dans le cadre des règles de gestion régissant la monnaie européenne, l'euro, et il apparaît peu plausible que la banque centrale européenne prenne en charge les déficits nationaux.

Cette politique de compensation de la baisse de l'endettement par une hausse de la création de monnaie par la banque centrale est plus facile lorsque la monnaie de la banque centrale (billets, pièces, réserves obligatoires) représente un pourcentage élevé de la masse monétaire totale. Or, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les banques centrales contrôlent une part de plus en plus réduite de la masse monétaire. Les billets et pièces, qui représentaient encore près de 25 % de la masse monétaire en 1950, en représentent désormais moins de 5 % — de l'ordre de 1 % pour les pays développés. Les banques centrales sont donc de moins en moins bien placées pour contrecarrer une baisse de l'encours de l'endettement et de la création monétaire privée afférente.

La déflation au Japon

Article connexe : économie du Japon.

Le Japon a connu depuis la fin des années 1990 une situation monétaire particulière marquée par une période déflationniste.

L'économie japonaise plonge dans la récession après l'éclatement de la bulle spéculative japonaise en 1991. La Banque du Japon décide alors de baisser graduellement les taux d'intérêt jusqu'à 0,5 % en 1995. Du début de 1999 au milieu de 2000, devenue indépendante du pouvoir central, elle abaisse le taux d'intérêt à 0 % (Zero Interest Rate Policy). En mars 2001, elle adopte une politique dite d'« assouplissement quantitatif » qui tente d'accroître la liquidité et de faciliter le recours au crédit :

  • émission massive de monnaie.
  • achat de bons du Trésor japonais.
  • large augmentation du montant des réserves des banques commerciales déposées auprès de la banque centrale.

Le Japon continue à connaître la croissance pendant cette période, en particulier après 2003. En 2006, le Japon semble sortir de la déflation, le premier ministre libéral Jun'ichirō Koizumi déclarant que « l'on observe des signes de sortie de la déflation »[réf. nécessaire]. Pour la première fois depuis huit ans, les prix ont en effet augmenté pendant trois mois d'affilée en 2005. Toutefois, la consommation des ménages salariés a baissé dans le même temps de 4,7 %. Le 9 mars, la Banque du Japon renonce officiellement au principe de l'assouplissement quantitatif, tout en maintenant pour le moment les taux d'intérêt à zéro. La monnaie japonaise a beaucoup baissé, sous l'effet des comportements d'arbitrage privés (carry trade) qui empruntent au Japon à des taux faibles pour investir aux États-Unis (notamment) à des taux plus élevés. Le Japon a renoué avec des excédents commerciaux très importants. Ces deux facteurs indiquent que le Japon a eu tendance à exporter sa déflation et à renouer avec une inflation interne sous l'effet du reste du monde plus que par des modifications internes.

Notes et références

  1. European Macroeconomics, Robert J. Barro et Vittorio Grilli, 1994, chap. 8, p. 142. ISBN 0333577647.
  2. OFCE-Sciences politique, Risque de déflation par la dette en Europe et aux États-Unis
  3. a  et b (en) A Plea for (Mild) Deflation, Cato Institute, 1999

Voir aussi

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