Densite de Schnirelmann

Densite de Schnirelmann

Densité de Schnirelmann

En mathématiques, la densité de Schnirelmann d'une suite de nombres est une manière de mesurer de quelle façon la suite est « dense ». Elle a été nommée en l'honneur du mathématicien russe L.G. Schnirelmann, qui fut le premier à l'étudier.

Intuitivement, nous ressentons qu'il y a « plus » de nombres impairs que de carrés parfaits ; toutefois, l'ensemble des nombres impairs n'est pas « plus grand » en fait que l'ensemble des carrés parfaits : les deux ensembles sont infinis et dénombrables et peuvent par conséquent être mis en bijection. Nous avons donc besoin d'une meilleure manière pour formaliser notre notion intuitive. C'est ce qu'effectue la densité de Schnirelmann.

Sommaire

Définition

Soit A \subseteq \N, un ensemble d'entiers naturels. On pose A(n)\,\! le nombre d'éléments de A \cap [1, n], c’est-à-dire le nombre d'éléments de A\,\! qui soient inférieurs ou égaux à n\,\!. Alors, la densité naturelle de Schnirelmann de A est définie comme :

\sigma (A) = \inf_{n} \left ( \frac{A(n)}{n}\right )

c’est-à-dire la borne inférieure de l'ensemble \{\frac{A(n)}{n}, n\in \N\}.

Cette définition permet de dire que cette densité existe à chaque fois et qu'elle est unique, puisque tout sous-ensemble minoré de \R possède une borne inférieure (ce qui n'aurait pas été le cas si l'on avait considéré la limite \lim_{n\rightarrow \infty} \frac{A(n)}{n} qui n'est pas forcément définie).

Par exemple, l'ensemble des nombres impairs possède une densité de Schnirelmann de \frac {1}{2}. Celle des carrés des nombres entiers \{1, 4, 9, 16, 25 \dots\} ou des nombres premiers de Mersenne est nulle, bien que ces deux ensembles soient infinis.

Propriétés

La fonction densité de Schnirelmann \sigma: \mathfrak{P}(\N) \rightarrow \R (où \mathfrak{P}(\N) est l'ensemble des parties de \N) possède les propriétés suivantes, pour A \subseteq \N :

  1. 0 \le \sigma (A) \le 1 : A(n)\,\! est toujours inférieur ou égal à 1 et supérieur ou égal à 0.
  2. \forall n, A(n) \ge n.\sigma (A), ce qui découle de la définition de \sigma (A)\,\! comme borne inférieure.
  3. \sigma (A) = 1 \Leftrightarrow A = \N
  4. 1 \notin A \Rightarrow \sigma (A) = 0 : si 1 \notin A, A(1)=0\,\! et donc la borne inférieure de l'ensemble des \frac {A(n)}{n} est forcément 0.
  5. \sigma (A)=0 \Rightarrow \forall \epsilon>0, \exists n\ t.q. A(n) < \epsilon.n

On pourrait se demander qu'elle est l'utilité d'une telle fonction de densité, puisqu'elle est extrêmement sensible aux premières valeurs de l'ensemble considéré (l'ensemble des nombres pairs, par exemple, a une densité de Schnirelmann nulle). Schnirelmann et Linnik exploitèrent ceci comme nous le verrons.

Théorèmes de Schnirelmann

Si nous posons \mathfrak{G}^2 = \{k^2\}_{k=1}^{\infty} (l'ensemble des carrés des nombres entiers), alors le théorème des quatre carrés de Lagrange — qui stipule que tout nombre entier peut être exprimé sous la forme de somme de quatre carrés — peut être réexprimé sous la forme :

 \sigma\left (\mathfrak{G}^2 \oplus \mathfrak{G}^2 \oplus \mathfrak{G}^2 \oplus \mathfrak{G}^2\right ) = 1.

\oplus est l'opérateur de la somme d'ensembles des sous-ensembles \mathfrak{G}^2.

Il est clair que  \sigma \left (\mathfrak{G}^2\right ) = 0. En fait, nous avons toujours  \sigma\left (\mathfrak{G}^2 \oplus \mathfrak{G}^2\right ) = 0 et on pourrait se demander à partir de quel point la somme des ensembles atteint la densité de Schnirelmann 1 et comment elle augmente. Il se trouve que  \sigma\left (\mathfrak{G}^2 \oplus \mathfrak{G}^2 \oplus \mathfrak{G}^2\right ) = \frac {5}{6} et on peut voir qu'ajouter \mathfrak{G}^2 une fois encore produit un ensemble plus peuplé, c’est-à-dire \N.

Schnirelmann réussit à développer cette idée dans les théorèmes suivants, en se dirigeant vers une théorie additive des nombres, et démontra qu'ils étaient une nouvelle ressource (potentiellement puissante) pour attaquer d'importants problèmes, tels que le problème de Waring et la conjecture de Goldbach.


Le premier théorème est une formulation plus faible du théorème de Mann :

Soient A\,\! et B\,\! deux sous-ensembles de \N. Alors \sigma\left (A \oplus B\right ) \ge \sigma (A) + \sigma (B) - \sigma (A) \cdot \sigma (B).

\sigma (A) + \sigma (B) - \sigma (A) \cdot \sigma (B) = 1 - \left (1 - \sigma (A)\right )\cdot \left(1 - \sigma (B)\right ). Par induction, nous avons la généralisation suivante, sous forme de corollaire :

Soit A_i \subseteq \N une famille finie de sous-ensembles de \N. Alors \sigma \left (\oplus A_i\right ) \ge 1 - \prod_{i}\left (1 - \sigma \left (A_i\right )\right ).

Ce théorème fournit le premier aperçu du comportement d'accumulation des sommes d'ensembles. Il semble malheureux que sa conclusion arrive avant de montrer que \sigma\,\! est superadditive (c’est-à-dire que \sigma \left (A\oplus B\right ) = \sigma (A) + \sigma (B)). Schnirelmann y pallie avec les résultats suivants, qui suffisent pour la plus grande partie de son objectif :

Soient A\,\! et B\,\! deux sous-ensembles de \N. Si \sigma (A) + \sigma (B) \ge 1, alors A \oplus B = \N.
Soit A \subseteq \N. Si \sigma (A) > 0\,\!, alors il existe un entier k\,\! tel que A\oplus A\oplus \ldots \oplus A = \N, où la somme de A\,\! est répétée k\,\! fois.

Ce dernier théorème est explicitement connu comme « Théorème de Schnirelmann ».

Une application de ce théorème permet d'exprimer tout nombre entier comme somme de nombres premiers : soit A=\left \{0, 1, 2, 3, 5, 7, 11 \ldots \right \} l'ensemble des nombres premiers auquel on adjoint 0 et 1. Schnirelmann a montré que \sigma(A)=0\,\!, mais que \sigma \left (A \oplus A \right )>0. Par application du théorème de Schnirelmann, il existe un nombre entier k\,\! tel que k\,\! fois la somme de A \oplus A soit égale à \N. C’est-à-dire qu'il existe un nombre s\,\! tel que tout nombre entier soit au plus égal à la somme de s\,\! nombres premiers.

Ce nombre s\,\! est appelé « Constante de Schnirelmann ». En 2004, la meilleure estimation de cette constante est s \le 7\,\!.

Bases additives

Un sous-ensemble A \subseteq \N avec la propriété que A \oplus A \oplus \cdots \oplus A = \N pour une somme finie, est appelé une base additive, et le plus petit nombre de termes requis est appelé le degré de la base. Donc, le dernier théorème exprime que tout ensemble avec une densité de Schnirelmann strictement positive est une base additive. Dans cette terminologie, l'ensemble des carrés \mathfrak{G}^2 = \{k^2\}_{k=1}^{\infty} est une base additive de degré 4.

Théorème de Mann

Historiquement, les théorèmes ci-dessus étaient des indicateurs pour le résultat suivant, qui est le meilleur raffinement possible du Théorème 1, et démontré comme étant difficile à attaquer. Il devint connu comme l'hypothèse α + β, utilisée par Landau dans la démonstration du Théorème 1.1 et finalement démontré par Mann en 1942.

Théorème (Mann, 1942) Soient A et B des sous-ensembles de \N. Dans le cas où A \oplus B \ne \N, nous avons encore

\sigma(A \oplus B) \ge \sigma(A) + \sigma(B).

Problème de Waring

Soit k et N des nombres naturels. Soit  \mathfrak{G}^k = \{i^k\}_{i=1}^\infty. Définissons  r_N^k(n) comme étant le nombre de solutions enières positives de l'équation

 x_1^k + x_2^k + \cdots + x_N^k = n

et  R_N^k(n) comme étant le nombre de solution entières positives de l'inégalité

 0 \le x_1^k + x_2^k + \cdots + x_N^k \le n,

pour les variables xi, respectivement. Ainsi  R_N^k(n) = \sum_{i=0}^n r_N^k(i). Nous avons

  •  r_N^k(n) \leftrightarrow n \in N\mathfrak{G}^k
  •  R_N^k(n) \ge \left(\frac{n}{N}\right)^{\frac{N}{k}}

Le volume du bloc N-dimensionnel défini par  0 \le x_1^k + x_2^k + \cdots + x_N^k \le n, est borné par le volume de l'hypercube de taille n1 / k, en conséquence R_N^k(n) = \sum_{i=0}^n r_N^k(i)= n^{N/k}. La partie difficile est de montrer que cette borne fonctionne encore sur la moyenne, c.à.d.,

Lemme (Linnik) Pour tout k \in \N il existe N \in \N et une constante c = c(n), dépendant seulement de k, telle que pout tout n \in \N,

r_N^k(m) < cn^{\frac{N}{k}-1}

pour tout 0 \le m \le n

Avec ceci en main, le théorème suivant peut être démontré de façon élégante. (Le lecteur est invité à donner une démonstration de ceci...)

Théorème Pour tout k il existe N pour lequel \sigma(N\mathfrak{G}^k) > 0.

Nous avons ainsi exprimé la solution générale du problème de Waring :

Corollaire (Hilbert, 1909) Pour tout k il existe N, dépendant seulement de k, tel que chaque nombre entier positif n peut être exprimé comme la somme d'au plus N k-ième puissances.

Conjecture de Goldbach

...

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