Drapeau de l'Acadie

Drapeau de l'Acadie
Drapeau de l'Acadie
Drapeau de l'Acadie
Utilisation FIAV 110100.svg Symbole version officiel
Proportions 2:3, plusieurs variations
Adoption 15 août 1884
Éléments tricolore de bandes bleue, blanche et rouge de même taille, avec étoile dorée dans la bande bleue

Le drapeau de l'Acadie, aussi appelé le drapeau acadien ou le tricolore étoilé, est le drapeau national de l'Acadie. Il est composé de trois bandes verticales: bleue à gauche, blanche au centre et rouge à droite; une étoile jaune est situé dans le canton (en haut de la bande bleue). Il a été adopté le 15 août 1884 à Miscouche, à l'Île-du-Prince-Édouard (Canada) et utilisé pour la première fois le lendemain.

Inspiré du drapeau français et symboliquement associée à la mer et à la foi catholique, le drapeau fut proposé par Marcel-François Richard comme compromis entre les différentes factions nationalistes, influencées à la fois par la France, le Québec et le clergé et divisés entre la modernité et la tradition et entre l'ouverture à la Francophonie et l'identité acadienne.

Il est le symbole national acadien le plus populaire, utilisé tant par les gouvernements que par les institutions et la population.

Sommaire

Histoire

Drapeaux antérieurs

Jacques Cartier utilise les armoiries de France lorsqu'il prend possession du territoire en 1534; ces armoiries sont D'azur aux trois fleurs de lys d'or[1].Lorsque Pierre Dugua de Mons fonde l'Acadie en 1604 à l'île Sainte-Croix, c'est la bannière de France qui flotte sur la colonie; cette bannière est dérivée des armoiries[1]. La France abandonne ce drapeau en 1610[1]. Le drapeau blanc de la marine française est ensuite généralement considéré comme le drapeau de la Nouvelle-France, qui comprend l'Acadie[1]. En 1663, lorsque la Nouvelle-France devient une partie du domaine royal, un drapeau est adopté[2]; le drapeau blanc est toutefois parfois utilisé[1].

La colonie est attaquée en 1613 par Samuel Argall[1]. En 1621, l'Acadie est renommée Nouvelle-Écosse.

En 1710, les britanniques prennent possession de la partie continentale de l'Acadie. Suite à la déportation des Acadiens, les symboles français tombent généralement dans l'oubli jusqu'à la fin du XIXe siècle[1].

Origines du drapeau actuel

Lors de la renaissance acadienne, l'élite souhaite la création de symboles nationaux, ce qui permettrait d'unir la population malgré l'absence de reconnaissance officielle et de gouvernement[3]. Cette proposition suit un courant plus vaste de la seconde moitié du XIXe siècle, où les Canadiens français et d'autres peuples ailleurs dans le monde se dotent de symboles, souvent inspirés par d'autres plus anciens ou par ceux de leur métropole[4]. Toutefois, l'élite est divisée sur deux questions, la première étant si, pour assurer l'épanouissement de la culture acadienne, ceux-ci doivent se fusionner aux Canadiens français ou poursuivre leur propre développement[4]. Le second problème étant que, bien que l'adoption d'un symbole inspiré de la France fasse l'unanimité, est-ce que le symbole doit rappeler l'ancien régime ou être une appartenance pragmatique à la France moderne, comme l'ont alors déjà fait les Canadiens français en adoptant le Tricolore[4]. En fait, le clergé canadien français joue alors un rôle très important dans les institutions acadiennes et voit le nationalisme acadien comme une « annexe » à celui canadien français[4]. Camille Lefebvre parvient d'ailleurs à faire adopter, comme au Québec, Saint Jean-Bapstiste comme saint patron à Memramcook et dans certains autres villages durant les années 1860[4]. Quant au tricolore, il est associé à la religion puisque le régime de Napoléon III est officiellement catholique[5]. Après 1867, Camille Lefebvre lève en fait le tricolore à chaque 24 juillet à Memramcook[5]. En 1880, lors d'une conférence aux États-Unis, la proposition d'un drapeau pour une union francophone d'Amérique du nord, qui est en fait le tricolore, est adopté par les participants, incluant les Acadiens[5]. Le tricolore français perd de sa popularité dans les années 1870, étant associé davantage au républicanisme[6]. En 1877, Philéas-Frédéric Bourgeois fait même installer l'ancien drapeau fleurdelisé français au collège Saint-Joseph de Memramcook; il est encore en place en 1881[6]. Tous ces développements suivent en fait la situation au Québec et en France[6]. Un troisième camp, dirigé par le curé Marcel-François Richard, fait son apparition: celui-ci désire la création d'un drapeau acadien distinct[7]. Le curé Richard est aussi l'instigateur du culte de Marie de l'Assomption, dont la fête était nationale en France durant l'Ancien régime[7].

La première Convention nationale acadienne est convoquée en 1881 à Memramcook. Un comité, composé principalement de prêtre acadiens, parvient à faire adopter l'Assomption de Marie comme fête nationale[8]. Plusieurs défenseurs de Saint-Jean-Baptiste et d'une manière générale les Canadiens français n'acceptent pas la défaite, parlant même d'ingratitude et de séparatisme de la part des Acadiens et un mouvement – ou cabale selon l'historien Robert Rumilly – tente alors à tout prix de faire changer la fête nationale[9]. Marcel-François Richard demande quant à lui à l'évêque de légitimer le choix fait à la convention[9].

Le débat finit par se recentrer sur le choix d'un drapeau national, les défenseurs du particularisme Acadien souhaitant multiplier les références à Marie à l'opposé des défenseurs de Saint-Jean-Baptiste souhaitant limiter le développement d'une identité nationale distincte[9]. Les tenants de Saint-Jean-Baptiste supportent principalement un drapeau inspiré par celui de l'ancien régime en France, soit un drapeau blanc, contrairement au sens commun tel que noté par l'historien Perry Biddiscombe[10]. Les tenants du particularisme suivent une logique semblable: certains drapeaux liée symboliquement à Marie sont proposés mais la majorité des partisans soutiennent le tricolore français[10]. C'est d'ailleurs le cas de Marcel-François Richard, qui propose le drapeau actuel de l'Acadie, malgré ses convictions[11]. Il semble en fait qu'il craigne qu'une trop grande division entre francophones empire les relation avec les anglophones, déjà tendues à l'époque[11]. Il craint aussi que l'éloignement avec les Canadiens français ait ateint un point de non-retour, ce qui serait désastreux en terme d'aide religieuse et en éducation[12]. En fait, dès 1882, Marcel-François Richard prétend que le drapeau de Marie – un bicolore bleu et blanc – le drapeau du pape, le drapeau de la France et l'Union Jack se prêtent à la création d'un drapeau acadien; il ignore ensuite l'Union Jack, à cause des problèmes avec les anglophones. Il propose également d'ajouter un bateau au futur drapeau acadien mais ce symbole est à la place inclut sur l'insigne acadienne[12].

Le drapeau est proposé le 15 août 1884 par le curé François-Marcel Richard, lors de la deuxième Convention nationale acadienne à Miscouche. Monseigneur Richard choisit ce drapeau en souvenir des origines françaises du peuple acadien et en hommage à ses pères fondateurs[13].

Marie Babineau en 1885.

Le premier drapeau est brodé probablement en 1883 par Marie Babineau, une institutrice originaire de Saint-Louis de Kent amie du curé Richard; elle prend alors un drapeau français commercial, découpe un trou en forme d'étoile dans le canton bleu et brode un morceau de tissu jaune en dessous[14]. Ce premier exemplaire est conservé au Musée acadien de l'Université de Moncton[13].

La première levée officielle du drapeau acadien a lieu le lendemain, 16 août 1884, en face de l'église de Miscouche[15]; le second usage a lieu le même jour, sur un paquebot rapportant des délégués au Nouveau-Brunswick[16]. Il semble d'ailleurs que le drapeau est popularisé à l'origine à l'Île-du-Prince-Édouard et à l'est du Nouveau-Brunswick; il est utilisé pour la première fois à l'extérieur des provinces de l'Atlantique à Waltham, au Massachusetts, en 1895[17].

Opposition puis popularisation

C'est dans ce contexte que la droite francophone amplifie son opposition au tricolore et ses dérivés et que le drapeau de Carillon, ou Carillon Sacré-Coeur lorsqu'une représentation du Sacré-Cœur y est ajoutée, est créé par l'abbé Elphège Filiatreault à Saint-Hyacinthe en 1902 et adopté par la Société Saint-Jean-Baptiste en 1903; le drapeau actuel du Québec est dérivé du drapeau de Carillon[18]. Ce drapeau est popularisé à l'extérieur du Québec et certains souhaitent alors rétablir la Saint-Jean-Baptiste comme fête nationale de l'Acadie[19]. Selon plusieurs photographies anciennes, le Carillon Sacré-Cœur est utilisé conjointement au tricolore étoilé ou même le remplace, notamment au collège Saint-Joseph en 1903, causant une bataille médiatique forçant la direction à se rétracter et à rétablir le tricolore étoilé en 1904[20]. L'élite acadienne reste généralement en faveur du tricolore étoilé et L'Évangéline ainsi que dans une moindre mesure Le Moniteur acadien publient des articles en sa faveur[20], L'évangéline affirmant même en 1908 que « nul n'a le droit de lever un drapeau contre le DRAPEAU »[21]. L'opposition au tricolore étoilé s'amoindrit vers 1910 et il est même installé en 1912 à Québec lors du Premier Congrès de la langue française au Canada[21].

Plusieurs Acadiens tentent par la suite de dissocier le drapeau de l'Acadie de celui de la France, par exemple en ajoutant un sacré-cœur et une image de la Vierge Marie à la bande blanche, ou en donnant aux couleurs une interprétation religieuse ou liées aux qualités acadiennes[22].

Après la Première Guerre mondiale, le nationalisme acadien s'essouffle. Il reprend de vigueur durant les années 1950, ou certains membres de l'élite désirent un « combat intense pour la sauvegarde et la promotion de l'étendard acadien »[23]. Les années 1960 sont une période contestataire et de nombreux étudiants considèrent que le drapeau n'est « pas assez radical »[23]. Parmi leurs principaux faits d'armes, le drapeau est retiré de force du Collège Saint-Joseph alors qu'une faucille et un marteau sont ajoutés dans la bande bleue à Moncton[23]. Durant les années 1970, le Parti acadien propose la création d'un drapeau moins colonial[23].

Toute ces tentatives ont pourtant peu d'effet et le drapeau de l'Acadie est désormais très populaire[23],[24],[13]. Le drapeau de l'Acadie est reconnu officiellement par le Nouveau-Brunswick en 1982[25],[26].

Description et symbolisme

Les dimensions du drapeau varient d'un fabricant à l'autre et il ne semble pas y avoir de standard. L'original avait un ratio 2:3. Il n'y a pas non plus de standard pour les couleurs. L'original avait un bleu très sombre. On retrouve des bleus ou rouges très clairs, mais c'est plutôt rare[27]. Il n'y a parfois même pas d'étoile, notamment lorsque des guirlandes de fanions bleus, blancs et rouges sont utilisés.

Une étoile dorée ou "stella maris", l'étoile de mer, fut ajoutée à sa partie bleue. Cette étoile de couleur papale guide le peuple comme les marins et en rappelle sa foi catholique romaine. Elle est aussi le symbole de la Vierge, Notre-Dame de l'Assomption, patronne et protectrice de l'Acadie. On voit alors que l'Acadie utilisait des symboles religieux pour unifier les Acadiens[13]. "Stella Maris" est aussi le titre de l'hymne acadien.

Utilisation

Le drapeau de l'Acadie est d'un usage courant. Il est hissé à Province House durant toute l'année 2004[28]

Usage décoratif ou publicitaire

Le drapeau de l'Acadie est fréquemment utilisé de manière décorative, parfois pour faire la promotion du tourisme. L'un des exemples les plus connus en est le centre d'information touristique de Grande-Anse, constitué d'un phare peint aux couleurs du drapeau. Durant les années 1980, les progressistes-conservateurs néo-brunswickois de Richard Bennett Hatfield utilisent Stella Maris à la place des points dans ses publicités francophones.

Dans la culture

Le drapeau figure sur Acajou, la mascotte des Jeux de l'Acadie. Acadieman porte le drapeau sur son uniforme, mais avec une tête de mort à la place de l'étoile.

La série de six tableau Les Grandes heures du peuple acadien, de Claude Picard, mettent en valeur l'adoption des symboles nationaux, incluant le drapeau[29].

Un timbre canadien émit le 15 août 2005 et conçu par Pierre-Yves Pelletier commémore la Déportation des Acadiens ainsi que le Lieu historique national de Grand-Pré et comprend le drapeau de l'Acadie[30].

Notes et références

  1. a, b, c, d, e, f et g http://www.pch.gc.ca/special/jdn-nfd/hist/hist-fra.cfm#a2
  2. Jacques Lacoursière, Jean Provencher et Denis Vaugeois, Canada-Québec 1534-2000, synthèse historique, Sillery, Éditions du Septentrion, 2000, 592 p. (ISBN 9782894481868), p. 98 
  3. Biddiscombe 1999, p. 43
  4. a, b, c, d et e Biddiscombe 1999, p. 44
  5. a, b et c Biddiscombe 1999, p. 45
  6. a, b et c Biddiscombe 1999, p. 46
  7. a et b Biddiscombe 1999, p. 47
  8. Biddiscombe 1999, p. 48
  9. a, b et c Biddiscombe 1999, p. 49
  10. a et b Biddiscombe 1999, p. 50
  11. a et b Biddiscombe 1999, p. 51
  12. a et b Biddiscombe 1999, p. 52
  13. a, b, c et d (fr) http://cyberacadie.com/index.php?/symboles/Notre-drapeau-...-notre-fierte.html
  14. Biddiscombe 1999, p. 54
  15. Un peuple à unir, Numéro spécial de "la Petite Souvenance", I.-P.-E., 1984.
  16. Biddiscombe 1999, p. 57
  17. Biddiscombe 1999, p. 59
  18. Biddiscombe 1999, p. 63
  19. Biddiscombe 1999, p. 64
  20. a et b Biddiscombe 1999, p. 65
  21. a et b Biddiscombe 1999, p. 66
  22. Biddiscombe 1999, p. 67
  23. a, b, c, d et e Biddiscombe 1999, p. 68
  24. Biddiscombe 1999, p. 69
  25. http://www.francopedie.ca/w2/index.php?title=Nouveau-Brunswick/Les_%C3%A9v%C3%A9nements_historiques
  26. http://www.sanb.ca/?Id=176
  27. (en) Description du drapeau sur Flags of the World
  28. http://francopresse.ca/index.cfm?Sequence_No=30743&Id=30743&Repertoire_No=1151936421&Voir=document_view&secteur=300
  29. http://www.petitesouvenance.com/les-grandes-heures-du-peuple-acadien-2/
  30. (en) The Unitrade Specialized Catalogue of Canadian Stamps, The Unitrade Press, 2006, ISBN 1-894763-20-3.

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) Perry Biddiscombe, « « Le Tricolore et l'étoile »; The origin of the Acadian National Flag, 1867-1912 », dans P.A. Buckner, Gail G. Campbell et David Frank, The Acadiensis Reader, vol. 2 : Atlantic Canada After Confederation, Fredericton, Acadiensis Press, 1999 (ISBN 0-919107-45-1) 

Articles connexes


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