Dynamiterie de Paulilles

Dynamiterie de Paulilles

42°30′0″N 03°07′10″E / 42.5, 3.11944 La dynamiterie de Paulilles était une usine d'explosifs française, située dans le sud des Pyrénées-Orientales à Paulilles, qui a fonctionné de 1870 à 1984. La manipulation de produits dangereux et instables a entraîné plusieurs explosions accidentelles, entre 1877 et 1958. C'est aujourd'hui part d'un site protégé.

Une partie de l'ancienne usine a été transformée en musée dans le cadre du plan de réhabilitation de la baie mené par le Conservatoire du littoral. On peut y voir des témoignages et vidéos sur la vie de l'usine ainsi que des maquettes. Des visites guidées de la baie sont également proposées.

Sommaire

Histoire

Guerre franco-prussienne (1870-1871)

Article connexe : Guerre franco-prussienne.
Caisse de cartouches de 100 g de dynamite-gomme BAM Nobel-Bozel produites à l'usine de Paulilles entre 1957 et 1984 (janvier 2006).

Parce que la France, durant la guerre de 1870, craignait l'avance de l'ennemi prussien, Gambetta autorisa la création d'une fabrique d'explosifs Nobel (dynamite et nitroglycérine) à Paulilles, qui était on ne pouvait plus éloigné de l'Est.

Située entre Banyuls et Port-Vendres et à proximité du hameau de Cosprons, cette fabrique se consacra essentiellement à la production d’explosifs pour l’armement et pour les gros chantiers de génie civil (Mines de Batère, canal de Panamá, percement du Transibérien).

La première dynamiterie française fut implantée à Paulilles (ou Paulille), à la fin de l'année 1870, afin de fournir de la dynamite aux armées françaises alors en guerre contre la Prusse et une coalition de principautés allemandes. Mais, à la lecture des documents conservés, il apparaît que, Paul Barbe, le créateur de l'usine s'est servi du prétexte de la guerre et que la dynamiterie de Paulilles n'a que très peu fourni d'explosifs à l'armée. Au contraire, la dynamiterie était vouée à fournir de la dynamite à l'industrie privée, en particulier dans le secteur du BTP[1].

Développement et première fermeture (1870-1872)

Une petite partie des restes de l'usine (la chaufferie) ainsi qu'une partie de la plage de Paulilles (mars 2007).

Durant les années 1870-1872, Paul Barbe tente de mettre en place une organisation et une gestion rationnelle du territoire qu'il a acquis auprès de M. Bernadi Vincent le 3 décembre 1870. Trois dynamiteries se succèdent. Le territoire initial qui accueillait quatre bâtiments répartis sur 8 000 m², abrite, lors de la fermeture le 1er février 1872, treize bâtiments ventilés sur 10 000 m²[1].

Réouverture et diversification (1876-1968)

Lors de la réouverture, durant l'année 1876-1877, la dynamiterie s'étend sur 24 000 m² et accueille plus d'une trentaine de bâtiments. Désormais, la dynamiterie mène une politique d'accroissement territorial continue, afin d'accroître sa production, qui se diversifie.

En 1914, la dynamiterie produit plus de quinze types de dynamite, des engrais ainsi que des tuyaux en caoutchouc[1].

Évolution et fermeture définitive (1969-1984)

Dès 1969, la manufacture d’explosifs conventionnels s'effaça peu à peu au profit du placage par explosifs, assuré localement jusqu’en 1984, date de fermeture définitive de la dynamiterie.

Chronologie

  • 1868 : contrat entre Alfred Nobel et Paul Barbe ; Barbe devient le seul et unique concessionnaire des produits Nobel pour la France[2].
  • 2 août 1870 : début de la guerre franco-allemande.
  • 1er septembre 1870 : défaite de Sedan.
  • 4 septembre 1870 : proclamation de la Troisième République. Gambetta autorise la création d'une usine d'explosifs à Paulilles « Le plus loin possible de la frontière allemande »[3].
  • Novembre 1870 : Paul Barbe, représentant en France de l’ingénieur suédois Alfred Nobel, pose la première pierre de l'usine, au bord de la plage. Les travaux sont réalisés par les employés de la société Langlade et Laporte, chargée de construire la voie ferrée reliant Perpignan à la frontière espagnole[2].
  • 5 décembre 1870 : début de la production à la dynamiterie Nobel PRB (Poudreries Réunies de Belgique)[4],[2].
  • Janvier 1871 : signature d'un armistice et avènement de la Commune.
  • 27 janvier 1871 : arrêté préfectoral autorisant l'ouverture de la dynamiterie[2].
  • 4 septembre 1871 : le gouvernement Thiers rétablit le Monopole d'État sur les explosifs[2].
  • 1er février 1872 : la dynamiterie de Paulilles cesse sa production[2].

Sur les autres projets Wikimedia :

  • 26 mars 1875 : lettre de Paul Barbe à M. le Préfet du département des Pyrénées Orientales, sollicitant la réouverture de Paulilles.
  • 7 juin 1875 : création de la Société Générale pour la fabrication des Dynamites Nobel[5].
  • 22 juin 1875 : Paul Barbe vend, pour 3 millions de francs la dynamiterie de Paulilles à la SGD[2].
  • 24 juillet 1877 : première explosion[6].
  • 1876-1877 : après une étude administrative, la dynamiterie reçoit l'autorisation de redémarrer sa production[2].
  • 1880 : la production atteint 552 tonnes de dynamite par an.
  • 27 janvier 1882 : une terrible explosion fait vingt morts dans une salle de conditionnement de la dynamite, dont huit de Banyuls-sur-Mer[7].
  • 1916 : construction d'une nouvelle dynamiterie.
  • 1927 : la Société Générale devient la Société Nobel Française.
  • 1934 à 1936 : se produiront encore deux explosions qui feront trois victimes.
  • 1956-1957 : la Nobel Française fusionne avec Nobel-Maletra pour former Nobel-Bozel.
  • 17 novembre 1958 : une explosion fait un mort et quatre blessés graves.
  • 1968-1969 : construction de l'atelier de placage par explosifs, démarrage de cette activité.
  • 1969 : la production est de 4 000 tonnes d'explosifs par an.
  • 1984 : fermeture définitive de la dynamiterie, et transfert des activités de placage à Rivesaltes en 1991.

Les ouvriers

Agriculteur-pêcheur-ouvrier

Les populations locales ont très vite compris les bénéfices financiers et sociaux qu'elles pouvaient tirer de leur travail à l'usine, cependant, elles n'en ont pas pour autant délaissé leur mode de vie agricole.

En effet, de nombreux ouvriers de la dynamiterie continuent de travailler leurs vignes et leurs oliviers mais aussi continuent à participer aux grandes campagnes de pêche qui se pratiquent aussi bien à Collioure qu'à Banyuls-sur-Mer ; l'agriculteur-pêcheur est devenu agriculteur-pêcheur-ouvrier[1].

Espagnols

Dès 1875, et jusqu'après la Seconde Guerre mondiale, 40% des ouvriers et ouvrières de l'usine sont d'origine espagnole.

L'emploi de cette main d'œuvre immigrée a des raisons géographique et historique. D'une part, cela tient à la proximité avec la frontière franco-espagnole (Catalogne), d'autre part cela correspond à l'arrivée des exilés républicains de la Retirada lors de la guerre d'Espagne (1936-1939).

Annamites

Face au manque de main d'œuvre locale provoqué par la mobilisation et les pertes de la Première guerre mondiale, 1 000 ouvriers Annamites (Indochine française) sont employés à la manufacture de Paulilles et sont logés dans des camps[8].

Un groupe important de ces travailleurs est soigné contre la fièvre typhoïde[9].

Transformation du site de Paulilles

Paulilles vue depuis la mer, avec les restes de la dynamiterie à gauche (février 2006).

Projet de complexe touristique

Suite à la fermeture de l'usine en 1984, le promoteur immobilier Jean-Claude Méry élabore un projet de reconversion du site de Paulilles en un complexe touristique[10]. Néanmoins, ce projet rencontre une forte opposition de la part d'associations protectrices de la nature et il est finalement abandonné[10].

Réhabilitation (1998-2008)

En 1998, la friche industrielle de 32 hectares est finalement rachetée pour 7,5 millions de francs par le Conservatoire du littoral qui classe le site pour le protéger[4].

En juin 2008, après des travaux de réhabilitation et des aménagements routiers et paysagers, le site de Paulilles est ouvert au public par le Conseil Général des Pyrénées-Orientales[11].

Notes et références

  1. a, b, c et d Salles Christine, Paulilles : La création d'un territoire industriel. 1870-1914
  2. a, b, c, d, e, f, g et h Salles Christine, Paulilles : La création d'un territoire industriel.1870-1914
  3. Internobel nr.1, mars 1969, p.2
  4. a et b Paulilles de nos jours - Site du Conservatoire du littoral
  5. Internobel nr.2, juin 1969, p.13
  6. Michel J. Ferrer, Terre de nos pères, imp. Minusprint, 2000, page 185
  7. D'après Le Républicain des Pyrénées Orientales du 26 janvier 1882, signature J.A.
  8. René Martial, La race française: le sol, les racines, la souche, la croissance et les greffons (Arabes, Normands, Italiens, Hollandais, etc.) : la greffe inter-raciale, la trilogie, histoire, psychologie, biologie : la nouveau rejet ou transfusion sanguine ethnique, Mercure de France, 1934, page 137
  9. Société d'hygiène publique, industrielle et sociale, Annales d'hygiène publique, industrielle et sociale, J.-B. Baillière et Fils, 1926, page 402
  10. a et b Caroline Chaussin, Paulilles, Côte Vermeille, Conservatoire du Littoral, Actes Sud, 2009, page 45
  11. Site de l'ancienne dynamiterie Nobel [PDF]

Bibliographie

Histoire
  • À bas les masques, recueil de lettres de J.J. Roux, imprimerie-typographie Ch. Latrobe, Perpignan, 1886
  • La catastrophe de l’usine de Paulilles, L'Indépendant du 30 mai 1913
  • John Arthur Davies, Littoral-le retour de la nature: l'Anse de Paulilles. Pyrénées orientales, Volume 3 de Visa (Trézélan), Filigranes, 2001 (ISBN 978-2-914381-17-8)
  • L'AMIC (Association Médiatrice d'Iintérêt Collectif), Paulilles ou la mémoire ouvrière, édition Les Presses littéraires, 2005
  • Jean-Claude Xatart, Paulilles: l'arbre de vie - mémoire de 1870 à 1970, Les Presses littéraires, 2007 (ISBN 978-2-35073-173-5)
  • Paulilles: La création d'un territoire industriel. 1870-1914, Salles Christine, mémoire de Master, sous la direction de M. Castaner-Munoz, Maître de conférence en histoire de l'art moderne et contemporaine, Université de Perpignan, Via-Domitia, juillet 2007.
  • Caroline Chaussin, Paulilles - Côté Vermeille, Conservatoire Du Littoral, Actes Sud, 2009 (ISBN 978-2-7427-8064-8)
Roman
  • Thérèse Roussel, La balle au mur, édition Mare Nostrum, novembre 2001
  • François Darnaudet, Boris au pays vermeil, série « Le Poulpe », éditions Baleine - Le Seuil, 2001. Roman policier où les slogans et graffitis sauvages, inscrits sur les locaux désaffectés, sont évoqués.
  • Lucas Danemine, Les oubliés de Paulilles: Secrets enfouis & enquêtes enfouis, Les Presses Litteraires, 2010 (ISBN 2-35073-375-0)

Liens internes

Liens externes


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