Empereur Napoléon Ier

Empereur Napoléon Ier

Napoléon Ier

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Napoléon Ier
Empereur des Français
Ingres, Napoleon on his Imperial throne.jpg

Règne
18 mai 1804 - 11 avril 1814
20 mars 1815 - 22 juin 1815
Sacre 2 décembre 1804
(Cathédrale Notre-Dame de Paris)
Dynastie Maison Bonaparte
Titre complet Empereur des Français
Roi d'Italie
Médiateur de la Confédération suisse
Protecteur de la Confédération du Rhin
Prédécesseur Lui-même
(en tant que Premier Consul)
Successeur Louis XVIII (Roi de France)

Autres fonctions
Premier Consul de France
Période
10 novembre 1799 - 18 mai 1804
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Monarque
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Prédécesseur Directoire
Successeur Lui-même (en tant qu'empereur)

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Biographie
Nom de naissance Napoléon Bonaparte
Naissance 15 août 1769
Ajaccio, Pavillon royal de France.svg France
Décès 5 mai 1821 (51 ans)
Île Sainte-Hélène
Royaume-Uni Royaume-Uni
Père Charles Bonaparte
Mère Maria Letizia Ramolino
Conjoint(s) Joséphine de Beauharnais
Marie-Louise d'Autriche
Descendance Prince Napoléon François Bonaparte, prince impérial
Charles Léon
Alexandre Walewski
Résidence(s) Palais des Tuileries

Imperial Coat of Arms of France (1804-1815).svg
Empereurs des Français

Napoléon Bonaparte[1] (né le 15 août 1769 à Ajaccio, en Corse ; mort le 5 mai 1821 sur l'île Sainte-Hélène) fut général, Premier consul, puis empereur des Français. Il fut un conquérant de l'Europe continentale.

Objet dès son vivant d'une légende dorée comme d'une légende noire, il a acquis une notoriété aujourd'hui universelle pour son génie militaire (victoires d'Arcole, Rivoli, Pyramides, Marengo, Austerlitz, Iéna, Friedland, Wagram, La Moskova) et politique, mais aussi pour son régime autoritaire, et pour ses incessantes campagnes (voulues ou non) coûteuses en vies humaines, soldées par de lourdes défaites finales en Espagne, en Russie et à Waterloo, et par sa mort en exil à Sainte-Hélène sous la garde des Anglais.

Il dirige la France à partir de la fin de l’année 1799 ; il est d'abord Premier Consul du 10 novembre 1799 au 18 mai 1804 puis Empereur des Français, sous le nom de Napoléon Ier, du 18 mai 1804 au 11 avril 1814, puis du 20 mars au 22 juin 1815. Il réorganise et réforme durablement l'État et la société. Il porte le territoire français à son extension maximale avec 134 départements en 1812, transformant Rome, Hambourg, Barcelone ou Amsterdam en chefs-lieux de départements français. Il est aussi président de la République italienne de 1802 à 1805, puis roi d’Italie du 17 mars 1805 au 11 avril 1814, mais encore médiateur de la Confédération suisse de 1803 à 1813 et protecteur de la Confédération du Rhin de 1806 à 1813. Il conquiert et gouverne la majeure partie de l’Europe continentale et place les membres de sa famille sur les trônes de plusieurs royaumes européens : Joseph sur celui de Naples puis d'Espagne, Jérôme sur celui de Westphalie, Louis sur celui de Hollande et son beau-frère Joachim Murat à Naples. Il crée aussi un grand-duché de Varsovie, sans oser restaurer formellement l'indépendance polonaise, et soumet à son influence des puissances vaincues telles que la Prusse et l'Autriche.

Napoléon tente de mettre un terme à son profit à la série de guerres que mènent les monarchies européennes contre la France depuis 1792. Il conduit les hommes de la Grande Armée, dont ses fidèles « grognards », du Nil et de l'Andalousie jusqu'à la ville de Moscou. Comme le note l'historien britannique Eric Hobsbawm, aucune armée n'était allée aussi loin depuis les Vikings ou les Mongols et aussi de soumettre autant de grandes puissances de l'époque. Malgré de nombreuses victoires initiales face aux diverses coalitions montées et financées par la Grande-Bretagne (devenue le Royaume-Uni en 1801), l’épopée impériale prend fin en 1815 avec la défaite de Waterloo.

Peu d'hommes ont suscité autant de passions contradictoires que Napoléon Bonaparte. Selon les mots de l’historien Steven Englund : « le ton (…) qui convient le mieux pour parler de Napoléon serait (…) une admiration frisant l’étonnement et une désapprobation constante frisant la tristesse. »

Toute une tradition romantique fait précocement de Napoléon l'archétype du grand homme appelé à bouleverser le monde. Élie Faure, dans son ouvrage Napoléon, qui a inspiré Abel Gance, le compare à un « prophète des temps modernes ». D'autres auteurs, tel Victor Hugo, font du vaincu de Sainte-Hélène le « Prométhée moderne ». L'ombre de « Napoléon le Grand » plane sur de nombreux ouvrages de Balzac, Stendhal, Musset, mais aussi de Dostoïevski, de Tolstoï et de bien d'autres encore.

Sommaire

Biographie

Jeunesse et ascension dans l’armée

Naissance de Napoléon

Le Blason de la famille Bonaparte (avant Napoléon Ier).
Portrait de Charles Bonaparte, père de Napoléon.

Napoléon Bonaparte naît à Ajaccio, en Corse, le 15 août 1769, un an après le traité de Versailles par lequel Gênes cède l'île à la France. Il a pour nom de baptême Napoleone di Buonaparte (acte du 21 juillet 1771, mais sur son acte de mariage avec Joséphine de Beauharnais, il signa Napoleone Buonaparte). Issu d’une famille faisant partie de la noblesse de robe italo-corse dont la présence sur l'île est attestée depuis le XVIe siècle[2] (Maison Bonaparte d’origine toscane[réf. nécessaire]), il est le quatrième enfant (second des enfants survivants) de Carlo Maria Buonaparte, avocat au Conseil supérieur de l'île, et de Maria Letizia Ramolino. Son prénom, Napoleone (ou Nabulione selon la graphie corse[3]), lui est donné en mémoire d'un oncle mort à Corte en 1767[4].

La formation militaire

En 1777, Charles Bonaparte, représentant la noblesse, fait partie de la députation que l’Assemblée générale des États de la Corse envoie à Versailles auprès du roi Louis XVI. À cette occasion, le comte de Marbeuf, gouverneur de l'île, fait obtenir, auprès du ministre de la guerre le prince de Montbarrey, une bourse pour faire entrer le deuxième fils de Charles à l'école militaire, son frère aîné Joseph étant destiné à suivre une carrière ecclésiastique[5].

Le 1er janvier 1779, Charles Bonaparte fait entrer provisoirement ses deux fils Joseph et Napoléon au collège d’Autun. Napoléon y reste trois mois, le temps pour son père de faire les démarches pour le faire admettre à l'école militaire, devant pour cela fournir les preuves de sa noblesse et de quatre degrés d'ancienneté pour obtenir la bourse du roi[6]. Le dossier est examiné par le juge d'armes Antoine-Marie d'Hozier de Serigny[7]. Charles Bonaparte ayant fourni les preuves de noblesse de la famille, Napoléon est agréé par le ministère de la guerre pour entrer au collège militaire de Tiron, mais, suite à des défections, il est finalement admis à l’École royale militaire de Brienne-le-Château (Aube)[7].

Napoléon y entre le 15 mai 1779 en classe de septième[8]. C’est l’un des douze collèges de France qui accueillent les enfants de la petite noblesse. Il va y rester cinq ans. Considéré comme bon élève, particulièrement doué pour les mathématiques, Bonaparte n’aurait pas été très apprécié de ses camarades notamment à cause de son admiration pour Pascal Paoli[9]. Il montre déjà une propension à l’art du commandement, en organisant des jeux militaires dont il prend la tête. Une bataille de boules de neige, qu'il aurait dirigée un hiver, fait partie de sa légende[10]. Son frère Joseph, ayant abandonné son projet d'entrer au séminaire, étudie le droit ; Lucien entre au séminaire d’Aix-en-Provence et ses sœurs sont éduquées par Mme Campan.

Son père lui rend visite le 21 juin 1784[11]. Le 22 septembre de la même année, le sous-inspecteur des écoles Marie-Antoine-Sérapion Reynaud des Monts fait passer aux élèves cadets de Brienne l'examen d'entrée à l'École militaire de Paris, où après un an d'études ils pourront être affectés à un régiment d'artillerie, de génie, ou de la marine[12]. Napoléon est jugé apte à y entrer ainsi que quatre de ses condisciples. Il quitte l'école le 17 octobre et arrive cinq jours plus tard à Paris où il intègre la compagnie des cadets gentilshommes[13]. Le 24 février 1785, Charles Bonaparte meurt d'un cancer de l'estomac ; le rôle de chef de la famille échoit à l'aîné Joseph, mais Napoléon le juge d'un caractère trop faible pour diriger la famille[14]. En septembre, il passe l'examen de sortie de l'école afin d'intégrer un régiment d'artillerie, interrogé par le mathématicien Pierre-Simon Laplace. Il est reçu lieutenant en second, (42e sur 58) à l’examen de l’artillerie, et reçoit l’ordre de rejoindre la destination qu’il a choisie, le régiment d'artillerie de la Fère alors en garnison à Valence[15].

Il quitte Paris pour Valence le 30 octobre 1785. Le 15 septembre 1786, sept ans et neuf mois après son départ, il repose les pieds sur l’île de Corse à l’occasion de son congé de semestre. Le 1er juin 1788, il s’embarque pour rejoindre son régiment de La Fère en garnison à Auxonne et apprendre son métier d’artilleur. Dans ses loisirs, il travaille assidûment. Ses nombreuses lectures, qu’il accompagne de Notes[16], témoignent du sens dans lequel il a dirigé ses études et des sujets qui l’ont particulièrement attiré. Il quitte Auxonne, pour un congé de semestre début du mois de septembre 1789. Le 11 ou 12 février 1791, la fin de son congé le ramène dans la cité auxonnaise qu’il quitte définitivement le 14 juin 1791.

Les premières armes

Lorsque la Révolution éclate en 1789, le lieutenant Bonaparte a 19 ans. Il est présent depuis le 15 juin 1788 au régiment de La Fère, alors à l'école royale d'artillerie à Auxonne dirigée par le maréchal de camp-baron Jean-Pierre du Teil. Ce dernier lui confie la répression de la première émeute locale qui éclate le 19 juillet 1789.

Présent ponctuellement à Paris, le jeune officier est spectateur de l’invasion des Tuileries par le peuple le 20 juin 1792 et aurait manifesté alors son mépris pour l'impuissance de Louis XVI. Ce dernier signe quelques jours plus tard son brevet de capitaine, un de ses derniers actes publics.

Napoléon retourne à plusieurs reprises en Corse, où les luttes de clans ont repris, les Paolistes soutenant la monarchie à l’anglaise, et les Bonaparte la Révolution. Napoléon se fait élire lieutenant-colonel de la Garde nationale en mars 1792, en arrachant de force l’accord du commissaire du gouvernement. C'est à ce poste de commandant en second du bataillon Quenza-Bonaparte qu'il fait ses premières armes en février 1793, participant à la tête de l'artillerie à l'expédition de La Maddalena. Malgré l'efficacité et la détermination de Napoléon, l'opération commandée par Colonna Cesari, un proche de Paoli, est un échec cuisant. Cet événement et l’exécution du roi en janvier 1793 attisent la division avec les Paolistes, provoquant une révolte des indépendantistes.

Les désaccords entre Paoli et Bonaparte s'accentuent et, suite à une lettre de Lucien Bonaparte à la Convention pour dénoncer Paoli, la famille Bonaparte, dont la maison a été mise à sac, est contrainte de quitter l'île précipitamment à destination de Toulon, le 10 juin 1793. Peu après l'arrivée des Bonaparte dans le (nouveau) département du Var, la région se soulève contre la Convention et Toulon est livrée aux Britanniques par la population révoltée.

Capitaine d’artillerie depuis un an, Bonaparte est envoyé à Avignon en juillet 1793 déloger des fédéralistes marseillais, puis à Toulon en septembre. On lui confie, à la demande des commissaires Augustin Robespierre et Christophe Salicetti, un compatriote corse, le commandement de l'artillerie, avec le grade de chef de bataillon. Il y rencontre de jeunes officiers comme Marmont, Junot ou Victor. Le plan qu’il soumet au général Dugommier permet la reprise de la ville aux troupes royalistes et britanniques le 18 décembre. Ses ordres contribuent à forcer la flotte britannique à quitter la rade de Toulon et à priver ainsi les insurgés d'un soutien précieux. Il est fait général de brigade le 22 décembre. Après cette victoire, il sert en Italie.

Ses amitiés avec les jacobins lui valent d’être brièvement arrêté après la chute de Robespierre le 9 Thermidor an II (27 juillet 1794).

Le 13 vendémiaire, le mariage et l’armée d’Italie

Paul Barras.

Libéré, il refuse d'être affecté en Vendée et erre un temps à Paris sans commandement effectif, puis Barras lui demande le 13 vendémiaire an IV de réprimer l’insurrection royaliste contre la Convention nationale. À cette occasion, Bonaparte a sous ses ordres un jeune officier, Joachim Murat, son futur beau-frère. Ce dernier joue un rôle déterminant, en transférant à temps les canons indispensables depuis les Sablons jusqu'aux abords des Tuileries. La canonnade de Saint-Roch — où les boulets ont été remplacés par de la mitraille plus « efficace » — disperse les forces royalistes faisant de nombreuses victimes...

Quelques jours plus tard, Bonaparte est promu général de division, puis nommé commandant de l’armée de l'Intérieur, succédant à Barras qui devient l’un des cinq membres du Directoire.

Officier d’artillerie de formation, il innove vers cette époque dans l’utilisation de l’artillerie (canon de Gribeauval) comme force mobile d’appui des attaques d’infanterie.

Il doit à Joséphine de Beauharnais, amie et ancienne maîtresse de Barras, qu'il vient d'épouser au début de 1796, sa promotion à la tête de la petite armée d'Italie, appelée en principe à ouvrir un simple front de diversion. Il sait motiver ses hommes, connaît le terrain pour l'avoir parcouru en 1794, et fait une campagne d’exception, encore étudiée de nos jours dans toutes les Écoles de guerre. Il bat séparément quatre généraux Piémontais et Autrichiens (dont Colli, Von Beaulieu et Argenteau à Millesimo, Montenotte), et signe l’armistice de Cherasco avec le royaume de Sardaigne. Dans une deuxième phase, il bat une nouvelle armée autrichienne envoyée en renfort et commandée par Sebottendorf à Lodi et Beaulieu à Borghetto, ce qui lui assure la conquête de Milan.

Dans une troisième phase organisée autour du siège de Mantoue, il bat deux nouvelles armées autrichiennes commandées par Quasdanovich et Wurmser dans sept batailles, dont Castiglione et Roveredo. Enfin, les renforts commandés par Alvinczy sont à leur tour battus au pont d’Arcole et à Rivoli.

Tout en organisant l’Italie en Républiques sœurs sur le modèle de la République française, Bonaparte marche sur l’Autriche et signe seul les préliminaires de paix de Leoben. En un peu plus d’un an, il bat cinq armées autrichiennes, fréquemment à un contre deux, et décide seul du sort de la guerre, tandis que les armées françaises du Rhin sont battues par les Autrichiens pourtant affaiblis par la nécessité de transférer des troupes en Italie. En reconnaissance de ces hauts faits, la rue de Paris où habite Bonaparte est renommée rue de la Victoire.

Article détaillé : Campagne d'Italie (1796-1797).

Campagne d’Égypte

Article détaillé : Campagne d'Égypte.

À son retour d’Italie, en décembre 1797, Bonaparte est accueilli comme un héros par le Directoire qui organise une cérémonie officielle pour célébrer la paix de Campo-Formio. Il est nommé membre de l'Institut dans la classe de mathématiques. En février 1798, le Directoire soumet à Bonaparte l'idée d'une invasion de l'Angleterre. Il inspecte les côtes françaises de Boulogne, Calais et Dunkerque, en vue de la réalisation du projet. Sa popularité auprès des Français est de plus en plus importante. Le 23 février 1798, le gouvernement abandonne le projet d'invasion de l'Angleterre sur les conseils de Bonaparte, qui, lui-même influencé par Talleyrand, persuade alors le Directoire de porter la guerre en Égypte, où il pourra couper la route des Indes à la Grande-Bretagne. Le 24 février 1798, le rapport est présenté à Barras ; le 5 mars, inquiet de la popularité de Bonaparte, le Directoire le charge de mener l'expédition en Égypte, dans l'idée de s'en débarrasser.

En avril 1798 est créée l’armée d’Orient, placée sous les ordres de Bonaparte. Des scientifiques, noyau du futur Institut d’Égypte, l'accompagnent, ainsi que les généraux Kléber, Desaix, Murat, Lannes, Davout et Caffarelli.

Le 19 mai 1798, Bonaparte quitte Toulon avec le gros de la flotte française et parvient à échapper à la poursuite de la flotte britannique du contre-amiral anglais Horatio Nelson. Mais il s'agit peut-être d'une ruse des Anglais visant à laisser passer la flotte française pour mieux l'écraser plus tard. Sur leur route, les Français s’emparent de Malte, le 10-11 juin 1798, pour assurer les communications ultérieures avec la métropole. Le 19 juin 1798, après avoir laissé une garnison de 3 000 hommes sur place, la flotte met le cap sur Alexandrie qu’elle atteint le 1er juillet 1798. Après une courte résistance, la ville est prise le lendemain.

Bonaparte laisse 3 000 hommes à Alexandrie et longe la côte égyptienne vers l’est jusqu’au delta du Nil, qu’il remonte vers Le Caire. Le premier véritable combat de la campagne d'Égypte a lieu à Chebreïs le 13 juillet 1798 où les cavaliers mamelouks sont défaits, grâce à l’artillerie de l’armée d’Orient. Le 21 juillet 1798, à la bataille des Pyramides de Gizeh, Bonaparte bat à nouveau l’armée des mamelouks. Le 24 juillet 1798, Bonaparte et son armée entrent triomphalement au Caire. Les 1er et 2 août 1798, la flotte française est presque entièrement détruite à Aboukir par les navires d'Horatio Nelson. Désormais, les Britanniques sont maîtres de la Méditerranée et Bonaparte est prisonnier de sa conquête. Suite à cette défaite, les Turcs, le 9 septembre 1798, déclarent la guerre à la France. Il faut rappeler qu’à cette époque l'Égypte fait partie de l'empire ottoman, comme la majorité du Proche-Orient.

Pendant qu’il décide de faire de l'Égypte un véritable état capable de vivre en autarcie, Bonaparte envoie le général Desaix poursuivre Mourad Bey jusqu’en Haute-Égypte, complétant ainsi la soumission du pays. Poussés par les Britanniques et les Turcs, les mamelouks survivants travaillent la population du Caire, qui se révolte le 21 octobre 1798 contre les Français. Cette révolte est impitoyablement réprimée par les troupes. Bonaparte rétablit la situation et ramène le calme en décrétant une amnistie générale, non sans avoir fait canonner la Grande Mosquée du Caire et couper bon nombre de têtes, exhibées à la foule terrorisée.

En février 1799, Bonaparte décide de se déplacer en Syrie pour affronter les troupes ottomanes que le Sultan a envoyées pour attaquer les Français en Égypte. Le 10 février 1799, il quitte le Caire avec son armée et bat les Turcs aux combats d’El-Arich et de Gaza. Le 7 mars 1799, la ville de Jaffa est prise et pillée par les Français.

Napoléon Bonaparte ordonne l'exécution de quelque 2 500 prisonniers turcs qui sont fusillés, ou égorgés faute de munitions[17]. Par ce massacre, il espère impressionner ses adversaires.

C’est à ce moment-là que la peste apparaît dans les rangs français. Napoléon est favorable à l'euthanasie des soldats agonisants à l'aide de fortes doses d'opium (utilisé pour calmer la douleur), mais son médecin René-Nicolas Dufriche-Desgenettes s'y oppose énergiquement.

Le 19 mars 1799, Bonaparte met le siège devant Saint-Jean d’Acre. Le 13 avril 1799, les cavaliers de Junot mettent en déroute les cavaliers ottomans à la bataille de Nazareth et le 16 avril 1799, Bonaparte et Kléber écrasent l’armée turque de secours envoyée par le Sultan pour libérer le siège de Saint-Jean d’Acre à la Bataille du Mont-Thabor. Bien que victorieuse à cette bataille, le 16 avril 1799, l’expédition en Syrie est décimée par la peste puis arrêtée à Acre que Bonaparte essaie en vain, du 24 avril au 10 mai 1799, de prendre.

Le 17 mai 1799, Bonaparte décide d’abandonner le siège de la ville et retourne en Égypte. Le 14 juin 1799, il arrive au Caire et, dans un retournement de situation, bat les Turcs le 25 juillet 1799 à la bataille terrestre d'Aboukir.

La situation du Directoire lui paraissant favorable à un coup de force, Bonaparte, qui n'a plus de marine et ne dispose plus que d’une armée de terre diminuée et malade, abandonne le commandement de l’armée d’Égypte à Jean-Baptiste Kléber.

Le sort de l'expédition française d'Egypte, en l'absence de Bonaparte, est marqué par la victoire de Jean-Baptiste Kléber sur les Turcs à la bataille d’Héliopolis le 20 mars 1800, puis suite à l'assassinat de celui-ci le 14 juin 1800, par la capitulation de son successeur le général Menou le 31 août 1801 devant les forces turco-britanniques après la perte de 13 500 hommes, principalement victimes d'épidémies au cours des négociations de paix. Les soldats français restants sont rapatriés sur les vaisseaux britanniques vers la France.

Retour à Paris, situation de la France

Napoléon Bonaparte, qui a pris la mer le 23 août 1799 à bord de la frégate La Muiron, débarque à Saint-Raphaël le 9 octobre 1799 après avoir miraculeusement échappé aux escadres britanniques pendant les quarante-sept jours de la traversée. Sur le chemin qui le mène à Paris, il est acclamé par la population.

Le Consulat

Article détaillé : Consulat (histoire de France).

Le coup d’État

Article détaillé : Coup d'État du 18 brumaire.

Arrivé dans la capitale, le général s’entretient avec Talleyrand, homme politique d’expérience et fin connaisseur des forces en jeu.

Le schéma du coup d’État du 18 Brumaire (9 novembre 1799) prévoit les opérations suivantes : Bonaparte aura le commandement en chef de l’armée pour le maintien de l’ordre dans Paris et dans les assemblées. On envisage de déplacer les assemblées au château de Saint-Cloud sous le prétexte d’un péril jacobin ; en effet, depuis 1789, les assemblées se trouvent toujours sous la menace de la population parisienne.

L'essentiel des événements se déroule le 19 brumaire à Saint-Cloud. Les révisionnistes avaient envisagé une démission collective des cinq directeurs, mais les assemblées ont du retard car cette idée ne fait pas l’unanimité ; Bonaparte s’impatiente et décide d’intervenir.

Il tient un discours maladroit devant le Conseil des Cinq-Cents, hué par les députés qui l’accusent de vouloir instaurer la dictature. Bonaparte est alors contraint de quitter l’assemblée. Mais il prend rapidement la situation en main avec l’aide de son frère Lucien qui préside les Cinq-Cents. Lucien évite que Napoléon soit mis en cause par les députés qui veulent voter pour le mettre hors-la-loi ; il retarde le vote et va chercher Murat, qui vient avec la troupe et disperse les assemblées, prétextant que certains députés voulaient poignarder Bonaparte pour justifier une intervention armée (les représentations des députés sortant par les fenêtres et voulant poignarder Napoléon sont très répandues).

Bonaparte est de fait l’homme fort de la situation, qui fait basculer un coup d’État parlementaire en un coup d’État militaire. Mais il demeure attaché aux formes juridiques et, dans la soirée du 19 Brumaire, les députés restent à Saint-Cloud pour voter la décision de nommer deux commissions chargées de préparer une nouvelle constitution. On constate ainsi une volonté d’appuyer le régime sur le vote des représentants du peuple.

Le 20 brumaire, les trois Consuls sont désignés : Bonaparte, Sieyès et Ducos. C’est le début du Consulat. Roger Ducos est tout acquis à Bonaparte, alors que Sieyès, lui, n’entend pas se résigner à abandonner le pouvoir à Bonaparte seul. Il compte bien jouer un rôle dans le gouvernement du Consulat. Pour contrecarrer son encombrant collègue, Bonaparte, multipliant les provocations, maintient aux portefeuilles ministériels les ennemis de Sieyès en offrant les relations extérieures à Talleyrand et celui de la Police à Fouché.

Le travail de rédaction de la Constitution est confié officiellement à deux commissions législatives formées de députés des Cinq-Cents et des Anciens. Mais en fait, c’est Sieyès qui va proposer un projet. À l’examen, le projet s’avère trop complexe, voire irréaliste ; en effet, il prévoit l’instauration d’un régime démocratique fondé sur un pouvoir législatif fort, représenté par trois chambres, tandis que l’exécutif est réduit à une magistrature à vie purement honorifique et à deux consuls aux fonctions limitées.

Bonaparte profite des faiblesses de ce plan pour imposer son propre projet et se débarrasser de Sieyès. Du 4 au 13 décembre 1799, il réunit ainsi les deux commissions dans son bureau pour élaborer le texte de la nouvelle constitution.

La Constitution de l’an VIII est adoptée en comité restreint le 13 décembre 1799. Elle s’inspire en partie du projet de Sieyès, mais intègre les idées politiques de Napoléon Bonaparte, notamment concernant le pouvoir exécutif. Sieyès, lui-même, est chargé de désigner les trois consuls de la république : Bonaparte comme premier consul, puis Jean-Jacques-Régis de Cambacérès et Charles-François Lebrun, comme 2e et 3e consuls de la République. Sieyès, quant à lui, est relégué au poste de président du Sénat.

« Lorsque je me mis à la tête des affaires, la France se trouvait dans le même état que Rome, lorsqu’on déclarait qu’un dictateur était nécessaire pour sauver la République. »

— Bonaparte

La Constitution

La Constitution de l’an VIII entre en vigueur le 25 décembre 1799. Bonaparte établit la Constitution sous des apparences démocratiques, mais organise un pouvoir autocratique, dont toutes les évolutions ultérieures du régime ne feront qu’accentuer le caractère.

Le pouvoir législatif est divisé en trois assemblées (tricamérisme) :

La préparation de la loi appartient à l'exécutif, par le biais du Conseil d’État, chargé de rédiger les textes législatifs.

Le pouvoir fonctionne de manière autoritaire, les procédés de démocratie semi-directe (quelque peu fictive) sont soigneusement organisés et contrôlés. Le consul corrige lui-même les résultats s’ils ne sont pas satisfaisants. Le Consulat est une forme de despotisme éclairé, qui n'est pas étranger à l'expérience de Pasquale Paoli en Corse, dont le jeune Bonaparte a été un admirateur fervent.

Du Consul à l’Empereur

En 1800, Napoléon Bonaparte attaque une nouvelle fois l’Autriche. Le 14 juin 1800, il gagne de justesse la bataille de Marengo en Italie, grâce à la charge héroïque de Desaix, qui est tué lors de l’assaut, trépassant ainsi le même jour que Kléber au Caire.

Battus également à Hohenlinden par Moreau, les Autrichiens doivent signer le traité de Lunéville le 9 février 1801. Si son pouvoir était fragile au lendemain de Brumaire, la victoire de Marengo et ses suites consolident fortement la situation de Bonaparte.

Le 24 décembre 1800, une « machine infernale » (bombe) l’attend rue Saint-Nicaise. La voiture du Premier consul passe au grand galop. La bombe explose trop tard et seules les vitres du véhicule sont soufflées. Sur place, en revanche, c'est le carnage. On dénombre 22 morts et une centaine de blessés. Fouché, alors ministre de la Police, réussit à prouver que l’attentat est l’œuvre des royalistes, alors que Bonaparte est persuadé avoir affaire aux Jacobins. L’exécution du duc d’Enghien en sera une conséquence.

En 1802, Bonaparte demande que les cendres du maréchal de Turenne soient transférées aux Invalides. Il est en effet un fervent admirateur de Turenne, dont il reprendra avec succès la stratégie d’attaque par surprise (Bataille de Turckheim, 1675) dans ses campagnes de 1805 à 1812.

Derniers ennemis déclarés de la République Française, les Britanniques sont amenés à signer la paix d’Amiens le 25 mars 1802 (4 germinal an X, contresignée deux jours plus tard). Cette paix, qui prévoit la libre circulation de la flotte française dans l'Atlantique, permet à Bonaparte de mettre en branle son grand dessein pour l'Amérique. Il s'agit pour lui de développer la Louisiane, cet immense territoire qui s'étend sur la rive droite du Mississipi et qui revient de droit à la France depuis la signature secrète du Traité de San Ildefonso en 1800.

Pour cela il lui faut une base d'opérations sûre. La colonie de Saint-Domingue est tout indiquée. De cette tête de pont de la France dans le Nouveau-Monde, il pourra reprendre pied en douceur à la Nouvelle-Orléans sans brusquer le jeune état américain qui verrait son expansion vers l'Ouest définitivement circonscrite au Mississipi.

Mais à Saint-Domingue, Toussaint Louverture est un formidable obstacle à ce plan. Le général noir est Général en chef de la colonie au nom de la France depuis 1797 et il est suspecté de connivences avec les États-Unis d'Amérique avec lesquels, au mépris du principe de l'exclusif, il commerce ouvertement. D'ailleurs, l'année précédente il a fait voter par les grands planteurs, ses alliés objectifs, une constitution autonomiste qui fait de lui un gouverneur général à vie, et il a eu l'outrecuidance de l'envoyer en France pour simple ratification, une fois le fait accompli.

Cet acte de rébellion ouverte d'un chef de guerre réputé invincible et fermement accroché à son île tombe à pic pour justifier l'importance des forces commises à l'expédition qui se prépare. Et la raison d'État, froide et impérieuse, justifie également le rétablissement de l'esclavage dans les colonies du Nouveau Monde car il va sans dire que la Louisiane française doit se développer rapidement pour prendre de vitesse Anglais et Américains, ce qu'elle ne saurait se faire sans une main d'œuvre servile telle que celle exploitée à Saint-Domingue.

Voila pourquoi deux flottes font voile vers les Antilles, Leclerc, propre beau-frère de Bonaparte, vers Saint-Domingue avec 20 000 hommes et Richepanse vers la Guadeloupe avec 3 400 hommes.

Ces chefs sont munis d'instructions secrètes fort explicites rédigées de la main même de Bonaparte. Ils doivent prendre le contrôle militaire des deux colonies et désarmer les officiers indigènes avant de rétablir l'esclavage. Des proclamations sont prêtes, en français et en créole, qui visent à assurer les populations indigènes de l'attachement personnel de Bonaparte à la liberté. Cette pléthore de précautions démontre que ce dernier a compris que le succès ou l'échec dépend du secret ; les faits lui donnent raison.

Après une résistance acharnée de trois mois, le vieux Toussaint, trahi par ses officiers généraux habilement entrepris par Leclerc, dépose les armes puis est capturé et déporté en France où il mourra quelques mois plus tard, au Fort de Joux près de Pontarlier. Leclerc peut alors passer à la deuxième phase du plan et désarmer les officiers de couleur mais Richepance à la Guadeloupe a rétabli l'esclavage sans attendre et la nouvelle de cette trahison de la parole du Premier Consul fait basculer Saint-Domingue dans l'insurrection.

L'armée de Leclerc, affaiblie par une épidémie de fièvre jaune, recule partout. Leclerc obtient près de 20 000 hommes de renfort mais la fièvre jaune fait tomber inexorablement un tiers des Européens qui débarquent et Leclerc succombe lui-même. Les débris de son armée sont anéantis par les soldats de Jean-Jacques Dessalines, lequel proclame l'indépendance de l'ancienne colonie sous le nom indien d'Haïti.

Mais le temps de l'Amérique française est déjà passé. La paix avec l'Angleterre est rompue et l'Atlantique est redevenu une mer hostile. De guerre lasse, en 1803, Bonaparte vend la Louisiane aux États-Unis.

Bien plus tard, à Sainte-Hélène, Napoléon dira « j'aurais dû laisser Toussaint-Louverture diriger Saint-Domingue », un vœu pieux pour s'exonérer de l'opprobre esclavagiste qui entache son héritage. Mais en réalité, face au rêve américain de Bonaparte, Toussaint et la liberté des noirs ne faisaient pas le poids.

Après que Bonaparte eut étendu son influence sur la Suisse (qui met en place les institutions décentralisées actuelles) et sur l’Allemagne, une dispute à propos de Malte sert de prétexte aux Britanniques pour déclarer une nouvelle fois la guerre à la France en 1803, et pour soutenir l’opposition royaliste à Bonaparte. Celui-ci réagit : l’idée d’une invasion du Royaume-Uni se fait jour, et, pour ramener à la raison les royalistes qui peut-être complotent dans l’ombre, le Premier consul fait exécuter le duc d’Enghien, prince Bourbon. L’exécution qui se déroule à Vincennes après un simulacre de procès, ne suscite pas d’autres protestations que celles du Royaume-Uni, de la Russie et de l’Autriche qui s’en tiennent à quelques timides reproches. C'est cependant cet acte qui assoit la réputation de « Robespierre à cheval » de Napoléon (à Sainte-Hélène, Napoléon assumera cet acte, malgré la très probable implication de Talleyrand). Après ce gage donné aux républicains, dans la mesure où le Premier consul réitère le crime des régicides, celui-ci se couronne Empereur le 2 décembre 1804.

À proprement parler, l’Empire naît à la demande du Sénat. Steven Englund se rallie à l’opinion selon laquelle il s’agissait, initialement, de protéger la République. Le Consulat abattu, l’ordre se serait effondré avec lui. Empereur, il devenait une institution, scellant la pérennité des valeurs républicaines. Il pouvait mourir : l’hérédité du titre était censée protéger le pays des bouleversements et de la perte des acquis révolutionnaires (avec, en premier lieu, l’égalité, loin devant la liberté). C’est ainsi que les monnaies impériales portent, sans hypocrisie, la mention « Napoléon Empereur - République française ».

Par suite seulement, cet Empire « républicain », protégeant les acquis révolutionnaires, se fera « impérialiste ».

« La Révolution est fixée aux principes qui l'ont commencée : elle est finie[18] »

— Bonaparte.

L’Empire

Article détaillé : Premier Empire.

La symbolique impériale

Le sacre impérial, événement unique dans l’Histoire de France représenté sur le tableau de Jacques-Louis David, Le Sacre de Napoléon, est lourdement chargé en symboles. Le passage de la République à l’Empire nécessite la création d’armoiries impériales, ainsi que la création d’objets symboliques destinés à établir une tradition auparavant inexistante. Napoléon, qui se veut rassembleur, décide d’associer aux symboles de son règne les images qui ont pu représenter auparavant la France, ainsi que les pouvoirs forts européens.

Le Sacre de Napoléon, de Jacques-Louis David – Cette scène montre le moment où Napoléon prend des mains de Pie VII la couronne impériale pour en coiffer sa femme l’impératrice Joséphine.

L’aigle est choisi en référence aux aigles romaines, portées par les légions, mais il est également le symbole de Charlemagne, l’aigle éployée. C’est d’ailleurs une erreur de lecture qui donnera pour symbole de l’Empire français un aigle aux ailes déployées : en héraldique, éployée se dit des oiseaux et des animaux chimériques représentés avec les ailes étendues (un aigle à deux têtes aux ailes déployées en est un bon exemple). La couleur rouge du manteau impérial est une référence directe au pourpre de l’imperium romain. Napoléon se pose ainsi en héritier de l’Empire romain et de Charlemagne.

Les abeilles sont censées rappeler les Mérovingiens (des broches les représentant ayant été retrouvées dans des tombeaux de cette époque), et leur disposition sur les armoiries et le manteau impérial doit rappeler les fleurs de lys des Capétiens. La main de justice, utilisée par les Capétiens lors des sacres royaux, doit faire apparaître qu’il est l’héritier de leur pouvoir. Napoléon veut montrer qu’il est le fondateur de la « quatrième dynastie », celle des Bonaparte, après les Mérovingiens, les Carolingiens, et les Capétiens.

D’autres symboles utilisés pendant le sacre sont chargés de valeurs morales. Ainsi Napoléon tient-il un moment le globe de Charlemagne ; il porte la couronne de ce même empereur (ces deux éléments ayant été forgés de toutes pièces avant le sacre). Son épée et son sceptre sont dits « de Charlemagne » : ils ont été en réalité utilisés depuis plusieurs siècles par les Valois puis les Bourbons lors de leur sacre.

Napoléon et l’Église

Napoléon se fait couronner roi d’Italie le 26 mai 1805 à Milan

L'auto-sacre de Napoléon, sous les yeux du Pape, qui semble réduire le pape Pie VII à bénir le couronnement du chef d'État français, est également l’occasion de revenir sur les rapports entre la France et la papauté.

La signature du Concordat par le Premier consul en 1801 reconnaît le catholicisme comme la religion « de la majorité des Français », et non plus comme religion d’État. Les prêtres reçoivent désormais un traitement de la part de l’État. Afin de montrer sa puissance, Napoléon ne va pas se faire sacrer à Rome, comme autrefois Charlemagne et les Empereurs germaniques (jusqu'au XVe siècle), c'est le pape que l’on fera venir à Paris.

Napoléon l’accueille irrespectueusement en forêt de Fontainebleau, à cheval et en habit de chasse, voulant faire croire au caractère fortuit de la rencontre. Napoléon offensera encore le Souverain Pontife en lui prenant des mains la couronne de l’impératrice, mais surtout en se couronnant lui-même. De cette manière, il affirme la primauté du politique (et donc du séculier) sur le religieux.

Article détaillé : Le Sacre de Napoléon.

Le rapprochement entre Napoléon et l’Église est donc le fruit d’un calcul politique de la part de l'Empereur. Au-delà de la valeur morale qu’a pu avoir un sacre religieux aux yeux des catholiques, de la valeur symbolique d’un couronnement pontifical rappelant le sacre des empereurs germaniques, Napoléon se place à l’égal, voire au-dessus des rois européens comme successeur de Charlemagne et des empereurs de la Rome antique. La présence du pape au sacre donne une dimension morale et légitime supplémentaire à l’Empire.

Celui-ci n’est plus simplement le fruit d’une révolution, c’est un couronnement divin comme les autres souverains européens mais qu’aucun des souverains d’Europe ne peut égaler. Napoléon se place au même niveau que le souverain du Saint-Empire romain germanique avant de le dépasser pour devenir l'unique Empereur en Europe. François II l'avait d'ailleurs bien compris puisqu'après la proclamation de l'Empire français, il décrète que l'Autriche, alors archiduché, devient aussi un Empire.

La présence du pape est donc davantage un message aux pays européens qu’un hommage catholique de la part de Napoléon.

Napoléon, d’ailleurs peu sensible au sort du Vicaire du Christ, n’hésite pas à le retenir prisonnier à Fontainebleau. Dans l’idée d’affirmer la puissance de la France dans le domaine spirituel, il envisagera de transférer la résidence du pape de Rome à Paris, avant d’abandonner cette idée.

À la fin de sa vie, Napoléon reçoit l'extrême-onction des mains de l'abbé Jean-François de Kermagnan.

L’Empire victorieux

Première distribution de la Légion d'honneur instituée par l'empereur le 14 juillet 1804 dans la chapelle des Invalides d'après le peintre Jean-Baptiste Debret

En 1804, l’heure n’est donc pas encore aux vastes conquêtes, et, persuadé depuis longtemps que le seul moyen d’obtenir une paix définitive est de neutraliser le Royaume-Uni, Napoléon met au point, avec l’amiral Latouche-Tréville (qui mourra avant d’avoir pu l’exécuter), un plan visant à l’invasion du Royaume-Uni. Celui-ci échoue définitivement à la bataille de Trafalgar, où la flotte franco-espagnole commandée par l’amiral de Villeneuve est détruite par l’amiral Nelson. Le Royaume-Uni en tira la domination des mers pendant le siècle suivant.

En 1805, la Troisième coalition se forme en Europe contre Napoléon. L’Empereur qui, à Boulogne, supervisait les préparatifs en vue de l’invasion du Royaume-Uni, doit faire face à une guerre soudaine, et à l’autre bout de l’Europe. Il mène une offensive immédiate, acheminant la Grande Armée en Autriche à marche forcée, et s’assure une brillante victoire contre l’Autriche et la Russie à la bataille d’Austerlitz, dite « bataille des Trois-Empereurs ».

En 1806, la Prusse provoque un nouveau conflit. La campagne que mène Napoléon (« l’Esprit en marche », selon Hegel) est impressionnante de rapidité : il balaie l’armée prussienne à la bataille d'Iéna (doublée de la victoire de Davout à Auerstaedt où, avec 30 000 hommes, le Maréchal Davout bat les 63 500 Prussiens qui l'assaillent). L’année suivante, Napoléon traverse la Pologne, remporte une victoire sur les Russes à Friedland et finit par signer, à Tilsit, au milieu du Niémen, en une mise en scène conçue pour frapper les esprits, un traité avec le tsar Alexandre Ier, divisant l’Europe entre les deux puissances.

Cet homme formé dans les écoles et par les maîtres de l’Ancien Régime, officier de l’armée royale, brise les anciennes conceptions militaires. Il ne s’agit plus de livrer une guerre de siège à l’aide de 30 à 50 000 hommes, mais de rechercher la bataille décisive, engageant plus de 100 000 hommes s’il le faut. Il ne s’agit plus de rester maître du champ de bataille, mais d’anéantir l’ennemi.

En 1808, il crée la noblesse d’Empire : bientôt ses maréchaux et généraux arboreront les titres de comte d’Empire, prince de Neuchâtel, duc d’Auerstaedt, duc de Montebello, duc de Dantzig, duc d’Elchingen, roi de Naples.

Du 27 septembre au 14 octobre 1808, Napoléon donne rendez-vous à Alexandre Ier à Erfurt, pour un nouveau traité, afin qu’ils s’unissent contre l’Autriche qui menace de redéclarer la guerre à la France.
Le tsar refuse en préférant que ce traité soit établi dans le but de renouveler l’alliance qui s’était forgée entre eux l’année précédente à Tilsit ; cela permet en fait à Napoléon de s’assurer encore plus longtemps de la fidélité d’Alexandre. Mais c'est un échec car l'empereur s'aperçoit bientôt de la trahison de Talleyrand, qui avait approché le tsar en lui conseillant de résister à Napoléon, même s'il était séduit.

Articles détaillés : Traité de Tilsit et Congrès d'Erfurt.

En 1810, le « Grand Empire » compte 130 départements, d’Amsterdam à Rome, ainsi que plusieurs États vassaux et sa population est de 70 millions d’habitants, dont 30 seulement sont français ; l’Empire est à son apogée.

L’Empire napoléonien à son apogée en 1811     Empire français     États vassaux     Alliés de l'Empire
Napoléon dans son cabinet de travail peint par David (1812)

Le 2 avril 1810, il épouse l’archiduchesse Marie-Louise d’Autriche, qui, le 20 mars 1811, lui donnera un fils ; cet enfant sera surnommé le roi de Rome et nommé « Napoléon II ».

Articles détaillés : Marie-Louise d'Autriche et Napoléon II.

Campagnes de la péninsule Ibérique, d’Autriche, de Russie et d’Allemagne

Article détaillé : Le Premier Empire en 1812-1813.

À la suite de l’attitude britannique vis-à-vis des bateaux de commerce français, Napoléon tente d’imposer le Blocus continental visant à asphyxier l’industrie britannique. Le Portugal, vieil allié des Britanniques, refuse de signer ce traité. Napoléon recherche donc l’aide de l’Espagne pour envahir le Portugal. Il finit par envahir l’Espagne et installe son frère Joseph Bonaparte comme roi. Le Portugal est également envahi, mais les trois campagnes (1808, 1810, 1811), menées notamment par le général Junot et le maréchal Masséna ne mettent pas fin à la résistance anglo-portugaise ; le roi Jean VI de Portugal, la cour et le gouvernement portugais déménagent à Rio de Janeiro et le Brésil devient le siège du royaume jusqu'à 1821. Une partie de la population espagnole se soulève contre les Français. Bientôt, l'infanterie britannique commandée par le futur duc de Wellington prend pied en Espagne, en passant par le Portugal, en 1808 et, avec l’aide des nationalistes espagnols, pousse l’armée française hors de la péninsule Ibérique, en 1812. Alors que les meilleures troupes de l’armée française sont engagées en Espagne, l’Autriche attaque une nouvelle fois la France en Allemagne et elle est finalement vaincue lors de la bataille de Wagram. Le maréchal Lannes, compagnon et ami de Napoléon, périt à la bataille d'Essling.

Alexandre Ier, poussé par la noblesse russe acquise aux Britanniques, refuse de coopérer avec Napoléon pour porter le coup final au Royaume-Uni. Napoléon, croyant cette guerre inévitable, envahit la Russie en 1812. La Grande Armée, appuyée des alliés italiens, allemands, autrichiens, devient gigantesque : ce sont 600 000 hommes qui franchissent le Niémen.

Les Russes, dirigés par Koutousov, suivent la stratégie de la terre brûlée, reculant sans cesse devant les troupes françaises. La bataille de la Moskowa, le 12 septembre, est indécise. Bien que les Russes abandonnent le terrain, les pertes sont presque équivalentes dans les deux camps.

Dès le lendemain de l’entrée des troupes françaises dans Moscou, les Russes incendient la ville, et Napoléon doit faire retraite. L’hiver, soudain en ces régions, est dangereusement proche : Napoléon, espérant une démarche de la part d’Alexandre, fait retarder la retraite jusqu’au dernier moment. La Grande Armée entame alors une retraite désespérée vers l’Allemagne dans l’hiver russe, à travers les régions dévastées qu’elle avait parcouru à l’aller. Des 600 000 hommes qui entrèrent en campagne, seules quelques dizaines de milliers franchissent la Bérézina. La Grande Armée est détruite.

Article détaillé : Campagne de Russie (1812).

Encouragés par ce dramatique échec, plusieurs rois reprirent les armes contre la France. À la suite de deux victoires remportées en Allemagne (Bautzen et Lutzen), une partie de ses troupes le trahit et Napoléon subit une défaite décisive à Leipzig, aussi appelée « Bataille des nations », qui voit s’opposer 180 000 Français à 300 000 alliés (russes, autrichiens, prussiens, suédois). Le maréchal Poniatowski, prince polonais et neveu de Stanislas II, dernier roi de Pologne, y perd la vie en tentant de traverser l’Elster avec ses hommes. On dénombre 100 000 morts et blessés.

La campagne de France

Statue équestre de Napoléon Ier à Cherbourg
Acte de la première abdication, 12 avril 1814.
Article détaillé : Campagne de France (1814).

En 1814, une alliance entre le Royaume-Uni, la Russie, la Prusse et l’Autriche est formée. Malgré les incroyables victoires aux batailles de Champaubert et de Montmirail, que Napoléon remporte à la tête d’une armée de jeunes recrues inexpérimentées (les « Marie-Louise »), Paris tombe le 31 mars et les maréchaux forcent Napoléon à abdiquer. L’intention de Napoléon était d’abdiquer en faveur de son fils (Napoléon II), mais les puissances alliées exigent une abdication inconditionnelle.

Napoléon pense alors que les alliés vont le séparer de l’impératrice Marie-Louise d'Autriche et de son fils le roi de Rome ; alors, dans la nuit du 12 au 13 avril, il prend la dose de poison qui doit lui permettre de se suicider. On a longtemps cru qu'il s'agissait d’opium dans un peu d’eau mais il semblerait que ce ne soit pas le cas [19]. Les troubles et la nature du malaise de Napoléon ne correspondent pas à une intoxication par l'opium. Il choisit alors cette façon de mourir, pensant que son corps sera par la suite exposé aux Français ; il voulait en effet que sa garde reconnaisse le visage calme qu’elle lui connaissait au milieu des batailles.

En plein malaise, l’Empereur se plaint du lent effet de la substance qu’il a avalée. Il déclare à Armand de Caulaincourt : « Qu’on a de peine à mourir, qu’on est malheureux d’avoir une constitution qui repousse la fin d’une vie qu’il me tarde tant de voir finir ! ». Les nausées de Napoléon sont de plus en plus violentes, il se met à vomir. À la venue du docteur Yvan, Napoléon lui demande une dose de poison supplémentaire, pour qu’il puisse mourir enfin, mais le docteur refuse, en disant qu’il n’est pas un assassin et qu’il ne fera jamais une chose allant à l'encontre de sa conscience. Le docteur a lui-même une crise de nerfs, s'enfuit à cheval, et personne ne le revoit plus.

L’agonie de l’Empereur se poursuit, Caulaincourt sort de la pièce pour demander au valet de chambre et au service intérieur de garder le silence. Napoléon rappelle Caulaincourt en lui disant qu’il préférait mourir plutôt que de signer le traité. Les effets du poison se dissipent et l’Empereur peut reprendre ses activités normales[20].

Il est, par la suite, déchu par le Sénat le 3 avril et exilé à l’île d’Elbe, selon le Traité de Fontainebleau signé le 11 avril, conservant le titre d’Empereur mais ne régnant que sur cette petite île.

Les Cent-Jours

Article détaillé : Cent-Jours.

En France, Louis XVIII écarte « Napoléon II » et prend le pouvoir. Napoléon s’inquiète du sort de sa femme et surtout de son fils qui est aux mains des Autrichiens. Le gouvernement royaliste refuse bientôt de lui verser la pension promise et des rumeurs circulent quant à sa déportation vers une petite île de l’océan Atlantique sud. Napoléon décide donc de retourner sur le continent pour reprendre le pouvoir.

La Route Napoléon et le « Vol de l’Aigle »
  • 1er mars 1815 : Débarqués à Golfe-Juan, Napoléon et sa petite troupe gagnent Cannes où ils arrivent tard et d’où ils repartent tôt.
  • 2 mars : Voulant éviter la voie du Rhône qu’il sait hostile, Napoléon fait prendre alors la route de Grasse pour gagner, par les Alpes, la vallée de la Durance. Au-delà de Grasse, la colonne s’engage dans de mauvais chemins muletiers et s’arrête à Saint-Vallier, Escragnolles, et Séranon.
  • 3 mars : Après une nuit de repos, elle gagne Castellane ; dans l’après-midi, elle atteint Barrême.
  • 4 mars : Napoléon trouve à Digne la route carrossable et fait étape le soir au château de Malijai, attendant avec impatience des nouvelles de Sisteron dont la citadelle, commandant le passage étroit de la Durance, peut lui barrer la route.
  • 5 mars : Sisteron n’est pas gardée et Napoléon y déjeune, puis quitte la localité dans une atmosphère de sympathie naissante. Le soir, il arrive à Gap et y reçoit un accueil enthousiaste.
  • 6 mars : Il couche à Corps.
  • 7 mars : Il gagne la Mure, puis trouve en face de lui, à Laffrey, des troupes envoyées de Grenoble. C’est ici que se situe l’épisode fameux que commémore aujourd’hui, dans la « prairie de la Rencontre », un monument. Le soir même, Napoléon fait son entrée à Grenoble aux cris de « Vive l’Empereur ».

Les armées envoyées pour l’arrêter l’accueillent en héros partout sur son trajet, sur la route qui porte désormais son nom. Le maréchal Ney, qui avait juré à Louis XVIII de lui ramener Bonaparte dans une cage de fer, s’incline devant son ancien souverain, ce qui lui vaudra d’être le seul maréchal exécuté pour trahison lors de la Seconde Restauration. Napoléon arrive sans coup férir à Paris. Cette montée à Paris est connue comme le « Vol de l’Aigle », inspiré des paroles de Napoléon : « L’Aigle volera de clocher en clocher jusqu’aux tours de Notre-Dame ». En 1932, la Route Napoléon sera inaugurée entre Golfe-Juan et Grenoble. Des aigles volants jalonnent ce parcours.

Le retour au pouvoir et la défaite finale
HMS Northumberland (1798)

La fuite de Louis XVIII et le retour de Napoléon aux Tuileries le 20 mars 1815 marquent le début de la période dite des Cent-Jours. Napoléon fait établir l’Acte additionnel aux Constitutions de l’Empire (22 avril), connu aussi sous le nom de Charte de 1815. Une Chambre des représentants est élue.

Sur le plan international, Napoléon affirme ses volontés pacifiques puisqu’il n’avait pas le choix, mais les alliés n’acceptent pas ce retour et reprennent les hostilités contre la France. L’armée napoléonienne est finalement défaite à la bataille de Waterloo le 18 juin 1815. La jonction des armées prussiennes et britanniques, que ne peut empêcher le maréchal Grouchy, a raison des troupes impériales.

Le retour de Napoléon et sa défaite finale empirent la situation internationale de la France. Celle-ci est traitée plus durement encore que lors des traités de Vienne. Napoléon laisse en effet une France exsangue. Démographiquement, la France a perdu environ 1 700 000 hommes depuis 1792, dont la majorité pendant les guerres napoléoniennes. Économiquement, elle est ruinée. Ses ports et ses arsenaux le sont également. Le pays a aussi perdu toutes les colonies qui lui restaient de l’Ancien Régime. Son influence internationale, mise en place depuis Richelieu et Louis XIV, est réduite à néant. Il est plus petit territorialement que sous Louis XVI. Même la Sarre et les villes de Marienbourg, Philippeville et Landau, acquises sous Louis XIV, sont cédées aux coalisés. Il est également occupé, et doit, en outre, payer une lourde indemnité de guerre pour l’entretien des troupes étrangères établies sur son territoire.

Lorsque Napoléon quitte la France, il n’est pas regretté. C’est à Sainte-Hélène que va se forger sa légende.

Demandant l'asile au " plus constant de ses ennemis ", l'Angleterre, il est d'abord pris en charge par le Bellérophon, puis transféré le 7 août 1815 sur le Northumberland qui le déposera à Sainte-Hélène.

Il ne met pas un seul pied en Angleterre, les officiers britanniques voulant éviter absolument que Napoléon puisse demander le droit d'asile en invoquant l'Habeas Corpus.

Le capitaine, en l'accueillant, l'appelle "général Bonaparte", ce qui mettra Napoléon hors de lui. Les Anglais l'appelleront toujours ainsi puisqu'ils n'ont jamais reconnu l'Empire.

Déportation à Sainte-Hélène et mort

Article détaillé : Le Mémorial de Sainte-Hélène.
Napoléon à Sainte-Hélène.

Napoléon est emprisonné et déporté par les Britanniques sur l’île Sainte-Hélène, commandée d'abord par l'amiral Cockburn puis par Sir Hudson Lowe, avec une petite troupe de fidèles, parmi lesquels le comte de Las Cases, le général Montholon, et le général Gourgaud. Il se consacre à l’écriture de ses mémoires pour la postérité qu'il dicta à Las Cases.

Il essaye aussi d’apprendre l’anglais ; il reçoit plusieurs visiteurs de passage à Sainte-Hélène, qui est alors une escale importante pour tout navire contournant l'Afrique. Une fois installé à Longwood, il évite de sortir parce que Lowe a donné l’ordre que l’empereur devait partout être sous garde.

Progressivement, Napoléon tombe malade et s’affaiblit. Il demande dans son testament au général Baron de Marbot de continuer à œuvrer dans ses écrits « pour la grandeur de la France ». Dans la seconde moitié du mois d’avril 1821, il écrit ses dernières volontés et plusieurs codicilles lui-même, une quarantaine de pages au total. Ses derniers mots sont : « France, armée, Joséphine », ou, selon les mémoires de Sainte-Hélène : « tête… armée… Mon Dieu ! ». Nerval, dans son poème À la mort de l’Exilé, note : « Les dernières paroles de Napoléon mourant furent : « Mon Dieu et la nation française… française… mon fils… tête armée ». On ne sait ce que signifiaient ces mots. », et une version courante affirme qu’il aurait dit en fait : « tête d’armée », ce qui est bien moins énigmatique.

Napoléon meurt un samedi, le 5 mai 1821, « à 17 heures et 49 minutes », rendant ainsi « le plus puissant souffle de vie qui eut jamais agité l'argile humaine » (Chateaubriand). Cependant, les causes de sa mort ont fait l'objet de controverses ; officiellement les médecins ont conclu à une mort des suites d'un cancer de l'estomac, mais il fut avancé l'hypothèse d'un empoisonnement à l'arsenic.

Hudson Lowe, geôlier de Napoléon à Sainte-Hélène, devant son lit de mort, déclare :

« Messieurs, c’était le plus grand ennemi de l’Angleterre, c’était aussi le mien. Mais je lui pardonne tout. À la mort d’un si grand homme, on ne doit éprouver que tristesse et profond regret. »

Retour de ses cendres en France (1840)

Article détaillé : Le retour des cendres de Napoléon.

Napoléon demanda que ses « cendres reposent sur les bords de la Seine auprès du peuple français que j'ai tant aimé » comme il l'écrivit, mais lorsqu’il mourut en 1821 il fut inhumé à Sainte-Hélène.

Tombeau de Napoléon aux Invalides

Dix-neuf ans après la mort de Napoléon, le roi Louis-Philippe Ier a pu obtenir du Royaume-Uni la restitution des cendres de Napoléon. L’exhumation du corps eut lieu le 15 octobre 1840. Son corps fut rapatrié triomphalement à Paris et enterré aux Invalides, dans « un grand sarcophage (...) de porphyre rouge – en fait du quartzite aventuriné de Finlande, proche du porphyre –, posé sur un socle de granit vert des Vosges »[21],[22]. Le socle en marbre noir provient de la carrière de marbre de Sainte-Luce (Isère). Le transport de ce bloc de 5,5 mètres de long, 1,20 mètre de large et 0,65 mètre d'épaisseur, ne se fit pas sans peine[23].

À partir de 1854, l’Empereur Napoléon III négocia avec le gouvernement britannique l’achat de Longwood House et de la vallée du Tombeau (Sainte-Hélène), qui devinrent propriétés françaises en 1858 et sont gérées depuis par le ministère des Affaires étrangères.

Controverses sur sa mort

Article détaillé : Mort de Napoléon.

La cause officielle de sa mort était un cancer de l’estomac, et même si l’empereur montrait un certain embonpoint au moment de sa mort (75,5 kg pour 1,67 m, qualifié de « surpoids » et pouvant engendrer des risques médicaux non négligeables), certains chercheurs ont observé les pantalons qu’il mettait à l’époque et constaté qu’au cours des 5 derniers mois avant sa mort, il avait perdu près de 11 kg.

En 1955, le journal de Louis Marchand, le valet de Napoléon, fut publié. Il décrit les derniers mois de Napoléon jusqu’à sa mort et beaucoup en conclurent qu’il fut victime d’un empoisonnement à long terme à l’arsenic, qui l’aurait suffisamment affaibli pour que les traitements médicaux de l’époque puissent l’achever[24].

Pascal Kintz, de l’Institut Légal de Strasbourg, fit en 2001 une étude du niveau d’arsenic trouvé dans les cheveux de Napoléon après sa mort, de 7 à 38 fois le niveau normal, mais il ne conclut pas que cela soit le résultat d'un empoisonnement[25] ; les analyses du magazine Science & vie montrent que des concentrations similaires d’arsenic peuvent être trouvées dans des échantillons prélevés en 1805, 1814 et 1821.

Des études françaises ont montré que Napoléon plongeait quotidiennement ses cheveux dans des bains d’arsenic car la croyance populaire voulait que l’arsenic prolonge la vie et l’éclat de la chevelure, ce qui expliquerait le taux anormalement élevé d’arsenic retrouvé dans ses cheveux.

Une analyse des mèches de cheveux de sources variées permet de reconstituer un histogramme détaillé du contenu d'arsenic dans le corps de Napoléon. La concentration est le plus souvent basse puis de temps en temps une concentration très forte apparaît, indiquant qu'une dose forte d'arsenic aurait été absorbée. Toutefois les cheveux étudiés ayant été prélevés sans le bulbe, il est impossible d'affirmer avec certitude que ce soit les vrais cheveux de Napoléon[26].

En revanche, la thèse d'empoisonnement est rendue difficile suite à une étude clinico-pathologique le 12 janvier 2007 menée par des chercheurs suisses, américains et canadiens de l'université de Bâle et publiée dans la revue Nature Clinical Practice Gastroenterology and Hepatology, selon laquelle l'Empereur aurait été emporté par un cancer gastrique avancé avec envahissement des ganglions lymphatiques[27]. Leurs travaux, se fondant sur les rapports des médecins présents à Sainte-Hélène, indiquent que son cancer serait survenu sur fond d'inflammation chronique de l'estomac causé par un micro-organisme, et non pas sur fond de prédisposition familiale, toujours selon les descriptions contemporaines, la paroi de l'estomac présentait une lésion d'environ dix centimètres.

En mai 2009, Arne Sørensen, néphrologue danois à la retraite, publie Napoleons Nyrer (Les Reins de Napoléon), livre dans lequel il affirme que Napoléon serait décédé des suites d'« insuffisances et intoxications rénales[28] ».

L’héritage napoléonien

Article détaillé : Légende napoléonienne.

Fin 1799, l’état de la France est catastrophique. L’anarchie administrative règne, les impôts n’arrivent pas aux caisses de l’État, le brigandage s’est développé, les routes sont défoncées, les régions frontalières dévastées à cause de la guerre, le commerce est au plus mal, l’industrie (notamment celle de la soie à Lyon) ruinée, le chômage fait une percée, le prix du pain est trop élevé pour les ouvriers, les hôpitaux ne marchent pas… C’est le moment que Bonaparte, qui est à l’époque encore un général révolutionnaire, choisit pour abandonner son armée en Égypte et monter à Paris, fomenter un coup d’État, le 10 novembre 1799. Entouré d’une auréole de prestige (il vient de sortir vainqueur de la campagne d’Italie et la campagne d’Égypte est, pour le moment, encore une réussite), il ne trouve que peu de résistance et l’opinion publique ne le désavoue pas. Mais les républicains sont inquiets : Napoléon incarne-t-il l'avènement définitif des valeurs de la Révolution, ou promet-il, au contraire, la destruction de la pensée révolutionnaire ? On peut considérer aujourd'hui que Napoléon solidifiera à plus d'un titre l’héritage de la Révolution ; s'il en finit avec la République et arrête le mouvement révolutionnaire, il restera fidèle aux principes de la Révolution qu'il cherchera à exporter à l'échelle européenne voire mondiale. Le Consulat, en somme, objective ce mouvement.

Le Consul Napoléon Bonaparte, grâce à une série de mesures, permet à la révolution de s’installer dans le temps. Bonaparte va d'abord s'employer à créer des institutions neuves, lesquelles perdureront jusqu'à nos jours. La nouvelle constitution qu’il fait rédiger renforce le pouvoir exécutif au détriment du pouvoir législatif, crée une administration centralisée, organisée en directions et ministères (dont le nouveau ministère de l’Intérieur, confié à Fouché) spécialisés et uniformisés. Il garde les divisions administratives créées lors de la Révolution. Ces institutions solides permettent un renforcement de l’autorité de l’État, font revivre le pays et éloignent un peu plus le risque de retour à l’Ancien Régime. Les caisses de l’État sont renflouées, Napoléon décide également de fonder des villes nouvelles comme La Roche-sur-Yon ou Pontivy

Ensuite, Napoléon Bonaparte s’inscrit dans la lignée de la Révolution. Après le coup d’État, les institutions changent, mais la majorité des personnes qui vont occuper des postes étaient déjà en place lors du Directoire : dans les assemblées créées par la Constitution de l'an X, la plupart des sénateurs, tribuns ou membres du Conseil d’État avaient déjà des postes à responsabilité sous le régime précédent, les préfets sont choisis dans les assemblées révolutionnaires… Cela permet à Bonaparte de mieux contrôler l’opposition. Les réformes qu’il met en place sont la suite logique de celles déjà entreprises sous la Révolution. Les réformes financières et commerciales qui lui sont attribuées ont, pour une partie d’entre elles, été imaginées par les membres du Directoire.
Ceux-ci avaient déjà tenté le Blocus continental que Napoléon mettra en œuvre contre le Royaume-Uni en 1806. Même certaines techniques de guerre utilisées par Napoléon et dont il est considéré comme l’inventeur avaient déjà été mises en application sous la Révolution. La rédaction d’un Code civil français elle-même avait déjà été entreprise sous la Révolution. De plus, il stabilise le paysage politique en pacifiant le pays et garantit ainsi l’inscription dans la durée de son gouvernement. La paix signée avec les royalistes Vendéens, dès décembre 1799, marque un grand pas en avant dans l’apaisement du pays, aucun gouvernement auparavant n’avait réussi à l’obtenir.

La signature du Concordat en 1801 permet à Napoléon de s’assurer le soutien de beaucoup de catholiques qui étaient hésitants jusqu’alors, et les royalistes en perdent autant, l’une des raisons fondamentales de l’appui de la population à ce mouvement étant le caractère anti-catholique de la Révolution. Ce Concordat, qui n’instaure pas le catholicisme comme religion dominante et qui aurait pu être vu comme une volonté de retour à l’Ancien Régime, permet à Bonaparte d’obtenir une nouvelle légitimité et d’asseoir un peu plus son autorité. Le Concordat maintient la vente des biens nationaux. Grâce à ces deux traités, Bonaparte neutralise l’opposition royaliste et semble s’inscrire dans l’héritage révolutionnaire.

Finalement, le Code civil français est un ouvrage révolutionnaire. Commencé en 1800 et publié finalement en 1804, il remplace tout le droit antérieur, et conserve la méritocratie, l’impôt égalitaire, la conscription, la liberté d’entreprise et de concurrence ainsi que de travail, consacre la disparition de l’aristocratie féodale, et en principe l’égalité devant la Loi. En conservant et en inscrivant dans le Code tous ces acquis de la Révolution, Bonaparte leur permit de traverser les régimes et rassura une grande partie de la population.

Mais Napoléon a aussi supprimé bon nombre d’acquis révolutionnaires. Tout d’abord, les cultes révolutionnaires sont abolis. Les libertés d’expression, de réunion, de circulation et de presse sont supprimées au profit d’un état autoritaire et d’une surveillance très accrue de la population, orchestrée par Fouché. L’égalité proclamée dans le Code civil n’est pas respectée : la femme dépend de son mari ; les patrons ont un très grand pouvoir sur les ouvriers, le livret ouvrier les réduisant à être des quasi-serfs ; l’esclavage est rétabli dans les colonies ; les fonctionnaires sont privilégiés en matière de Justice… Ensuite, l’instauration des préfets, qui sont l’équivalent des intendants, la création du conseil d’État, équivalent du conseil du roi, d’une nouvelle noblesse basée sur la notabilité, les faux plébiscites organisés (des votes sont inventés, il n’y a pas de secret de vote, on ratifie un fait déjà accompli…) font redouter le pire aux jacobins. Le spectre du retour à la monarchie les hante.

Finalement, en devenant tour à tour premier consul, consul à vie puis empereur, il en finit avec la République. La faveur publique lui permet de rédiger la Constitution de l’an VIII, qui lui donne la réalité des pouvoirs et surtout ne fait pas mention de la souveraineté nationale. Cette constitution divise le pouvoir législatif, qui à partir de ce moment, perdra toute influence. C’est au cours de l’an X que s’est opérée la transformation du régime encore républicain en un despotisme auquel ne manquait qu’une couronne. Le poste de premier consul à vie sonne le glas de la République. Ces changements de régime permettent surtout à Napoléon d’être de moins en moins dépendant de ses succès ou échecs et lui donnent une autre dimension vis-à-vis des autres dirigeants européens. Napoléon a donc aussi supprimé bon nombre d’acquis révolutionnaires.

Napoléon arrête le mouvement révolutionnaire mais non la Révolution. En obtenant la confiance des bourgeois (grâce à la vente des biens nationaux, à la paix maritime et continentale, à la création d’une noblesse méritocratique…), grâce au prestige de grandes victoires (Marengo 1800), à la bonne résolution des crises telle celle de 1802 (disette et chômage), Napoléon obtient le soutien populaire et s’affranchit peu à peu du processus révolutionnaire, qui ne lui est plus nécessaire. Au fil des années, alors que sa popularité ne va cesser de croître, il va monter en puissance et s’éloigner de la République. En 1804, après divers complots visant son assassinat et la reprise des hostilités avec le Royaume-Uni, il est perçu comme le seul rempart face aux ennemis de la Révolution, et la question de l’hérédité devient un sujet de préoccupations. Il en profite pour se faire sacrer Empereur (ou plutôt, se sacrer). Ce qui pourrait être vu comme l’aboutissement du projet d’un tyran ne l’est pas. En effet, lors du sacre, Napoléon déclare être dans la continuité de la révolution, et est soutenu par les révolutionnaires eux-mêmes, malgré la fin du processus révolutionnaire.

Les guerres impériales ont perpétué la Révolution. Dans tous les pays conquis, Napoléon Ier impose le Code civil et par conséquent toutes les notions révolutionnaires qui en font partie. Il est considéré dans un premier temps comme le libérateur de l’Europe. Mais à partir de la Quatrième coalition, qui commence en 1806, le but de ces guerres ne sera plus la propagation des idées révolutionnaires. Malgré la défaite napoléonienne de 1815, les idées de liberté et d’égalité resteront fermement implantées dans les pays qui avaient été conquis, et de nombreux bouleversements au fil du XIXe siècle en découleront.
Grâce à la modernisation des institutions françaises et européennes, à la pacification du pays, à ses victoires militaires et la conquête de la majeure partie de l’Europe, Napoléon a permis l’expansion et la perpétuation de la Révolution. Ainsi, malgré les nombreux changements de régime lors du XIXe siècle, le Code civil français restera en vigueur dans l’Europe entière, et les nombreux principes révolutionnaires qu’il contient. Napoléon est donc plus le continuateur que l’assassin de la révolution, malgré l’impasse qu’il fit sur la République. En supprimant les cultes révolutionnaires et autres acquis révolutionnaires qui mettaient en danger l’œuvre de la révolution elle-même, il permit aux autres de traverser les époques.

Rétablissement de l'esclavage

Napoléon n’est pas esclavagiste comme le prouve pendant sa jeunesse, et jusqu'en 1789 au moins, sa passion pour les ouvrages de l’Abbé Raynal. Toutefois, la première abolition de l’esclavage dans les colonies en 1794 et ses conséquences économiques et politiques néfastes amènent le Premier consul à se saisir du problème. Dès leurs entrées en fonction, les trois Consuls assurent aux anciens esclaves que la liberté qui leur a été accordée par la Convention sera respectée. C'est le cas jusqu’en 1802. Car, à la signature du Traité d'Amiens le 25 mars 1802, l’Angleterre doit rendre à la France les îles occupées. Parmi celles-ci se trouvent notamment Sainte-Lucie et la Martinique qui n’ont pas bénéficié de la loi sur l'abolition de l’esclavage. Face à cet imbroglio, le pouvoir en place se décide au statu quo : les îles où il n’y a plus d'esclavage resteront libres, par contre celles occupées jusque là par l'Angleterre conserveront les lois existantes. Une commission composée de Cambacérès et de trois conseillers d'État Dupuis, Régnault de St Jean d’Angély et de l'amiral Bruix travaille sur un projet qui allait dans le sens désiré par Bonaparte. Mais il apparaît difficile de faire cohabiter deux principes opposés dans le même projet de loi. Il est décidé de ne mentionner que le cas des territoires récupérés à l'occasion du traité d'Amiens, et de ne rien mentionner pour les colonies où l'esclavage était déjà aboli. Dans le maintien de l'esclavage en Martinique, le Premier Consul est poussé notamment par ses ministres (l'amiral Décrès, Talleyrand...) et l'intendant général aux colonies Guillemin de Vaivre, originaire de Saint Domingue, mais aussi par son épouse Joséphine, d'origine martiniquaise et dont la famille et les amis avaient de nombreux intérêts en Martinique... « L’esclavage ainsi que la Traite des Noirs et leur importation dans les colonies restituées par le traité d'Amiens auront lieu conformément aux lois et règlements antérieurs à 1789 ».

Article détaillé : Loi du 20 mai 1802.

Début juin, il fait arrêter et déporter Toussaint Louverture, qui avait pris la tête de la révolte des esclaves de Saint-Domingue onze ans plus tôt, et qui avait gardé la colonie à la France. L'Antillais devait mourir - de froid - un an plus tard au fort de Joux, dans le Doubs, département réputé pour la rigueur de ses hivers. Une deuxième phase de la guerre de Saint-Domingue débute, elle provoque bien des massacres de part et d'autre. Ce sont les révoltés de Saint-Domingue qui sortent victorieux de ces terribles combats et créent, en janvier 1804, la première République noire indépendante Haïti.

Article détaillé : Expédition de Saint-Domingue.

La Guadeloupe se révolte aussi en 1802 mais la rébellion conduite par Louis Delgrès échoue et se termine par le suicide collectif des insurgés. À des milliers de kilomètres de la France, le général Richepance et son état-major ont rétabli l'ordre avec beaucoup de brutalité. Ils vont progressivement réimposer l'ancien Code noir et l'esclavage.

À noter que dans les armées françaises, il se trouvait des généraux et des soldats noirs et métis (mulâtres). La lutte entre les révoltés et le pouvoir consulaire n'a pas toujours eu des origines raciales au sens où l'on entend aujourd'hui mais plutôt sociales entre possédants et possédés.

De retour de l'île d’Elbe en 1815, Napoléon décrète l'abolition de la traite des esclaves, qui aligne la France sur la décision que vient de prendre le Congrès de Vienne. Sa décision est confirmée par le traité de Paris le 20 novembre 1815. Néanmoins, à la Restauration, celle-ci reste souvent lettre morte.

Les réalisations de Napoléon Bonaparte

Sous le Consulat

Le Consulat est essentiellement une période de pacification et de stabilisation de la France, après la décennie révolutionnaire. De nombreuses institutions sont fondées, qui survivent longtemps à leur créateur ; elles reprennent certains acquis de la Révolution et existent encore de nos jours.

Ainsi dès le 13 décembre (22 frimaire an VIII) 1799, la Constitution de l'an VIII rédigée par Bonaparte, en son article 52 crée le Conseil d’État. Cet organe est au départ chargé de rédiger les lois pour décharger les ministères et doit conseiller le gouvernement sur la législation à entreprendre. Dans cette Constitution, Napoléon Bonaparte crée également le Sénat, s'inspirant du Sénat romain, il est chargé de veiller au respect de la Constitution et ses membres sont nommés par le Premier Consul, puis par l'Empereur. En 1800, le Premier consul Bonaparte crée deux institutions importantes, existant toujours : d'une part, le 13 février (24 pluviôse an VIII), il instaure la Banque de France ; d'autre part, le 17 février (loi du 28 pluviôse an VIII), Bonaparte crée les préfectures avec à leur tête un corps préfectoral nommé par l'Empereur et représentant de l'État. Toutes ces institutions permettent de réorganiser l'administration en France, qui ne fonctionnait plus depuis le début de la Révolution en 1789[réf. nécessaire]. Cette réorganisation permet de ramener l'ordre et de relancer l'économie. Mais l'ordre intérieur sera totalement ramené le 15 juillet 1801, quand Napoléon Bonaparte signe avec le pape Pie VII le Concordat réconciliant la France avec l'Église, tout en maintenant la liberté de cultes établie par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Bonaparte souhaite réorganiser la société française dans de nombreux domaines :

Napoléon Bonaparte instaure aussi la Légion d'honneur, décernée aux personnes méritantes et ayant accompli une bonne action.

La période du Consulat est considérée comme la période la plus bénéfique et prolifique du règne de Napoléon[réf. nécessaire]. En effet, durant cette période, Bonaparte réorganise tout et pose les fondations de la France actuelle ; ainsi la quasi-totalité des réalisations de Bonaparte existent-elles encore aujourd'hui malgré les réformes successives. Durant cette période, la France voit son économie redynamisée, son administration réorganisée, une justice plus performante, une éducation développée et la paix retrouvée tant à l'intérieur qu'à l'extérieur. Mais toutes ces transformations ne sont qu'une manière de parvenir à la plus haute marche, celle de l'Empire.

Sous l’Empire

L’œuvre législative

Bonaparte opère dès les débuts du Consulat de nombreuses réformes dans l’éducation, la justice, la finance et le système administratif.

Son ensemble de lois civiles, rédigé par Cambacérès et connu sous le nom de Code Napoléon de 1804, a encore une forte influence dans de nombreux pays de nos jours.

Le Code civil français est toutefois très largement inspiré d’un éventail de lois et coutumes diverses déjà existantes sous l’Ancien Régime qu’il unifia. Son œuvre administrative se prolongea jusqu’en 1814. Entre autres réformes, il débutera le travail de cadastrer le territoire français.

En architecture et urbanisme

À Paris

En dehors de l'Île-de-France

Regards des contemporains

D'après Jean-Antoine Chaptal,

« Napoléon se servait lui-même des journaux pour faire la guerre à ses ennemis, surtout aux Anglais. Il rédigeait personnellement toutes les notes qu’on insérait dans Le Moniteur, en réponse aux diatribes ou aux assertions qu’on publiait dans les gazettes anglaises. Lorsqu’il avait publié une note, il croyait avoir convaincu. On se rappelle que la plupart des notes n’étaient ni des modèles de décence, ni des exemples de bonne littérature ; mais nulle part il n’a mieux imprimé le cachet de son caractère et de son genre de talent. »

Surnoms

  • Le petit caporal ;
  • Le Père la Violette : la violette est la fleur de l'amour caché. Après sa première abdication, on croyait qu'il reviendrait à l'époque où fleurissent les violettes, chose qui se réalisa ; la violette devint un signe de ralliement des Bonapartistes après la Seconde Restauration ;
  • Le tyran, l'Ogre sont des surnoms couramment donnés par ses adversaires et ses caricaturistes.

Correspondance

Napoléon Bonaparte a entretenu une abondante correspondance, en partie à usage privé, mais surtout une importante correspondance officielle. De son vivant, quelques-unes de ces lettres ont été publiées, soit isolément, soit en recueils, mais souvent dans un but d’exaltation ou au contraire de polémique.

Dans les années 1850, l’empereur Napoléon III fait publier la correspondance de son oncle. Si cette nouvelle publication a aussi un but de propagande, elle sera plus sérieuse que ce qui avait été fait jusque-là. Toutefois, certaines lettres n’ont pas été retrouvées, d’autres ont été volontairement omises, et le texte a parfois été expurgé sous divers prétextes. Lorsque paraît en 1869 le dernier volume de la correspondance de Napoléon Ier, l'officier Louis Rossel démontre que les livres de stratégie attribués à ce dernier par la commission chargée de publier la correspondance, ne sont pas et ne peuvent pas être de lui.

Dans les années suivantes, de nouvelles lettres ont été publiées, souvent sous la forme de recueils spécifiques (lettres de Napoléon à un même correspondant). D’autres réapparaissaient ponctuellement.

La Fondation Napoléon a entrepris depuis quelques années une vaste entreprise de publication scientifique de l’ensemble de la correspondance de l’empereur. Elle a lancé pour cela un appel afin de récupérer les documents qui pourraient se trouver dans différents dépôts d’archives ou bibliothèques, et surtout chez des particuliers.

Pour les références des éditions, voir plus bas.

Napoléon et l'islam

Comme il le confie après sa campagne d'Égypte, Napoléon s'est inspiré des ouvrages censés aider à la domination de l'Orient de Volney, voire les a appliqués de façon littérale[29]. Ainsi, dès son arrivée et celle de ses troupes en Égypte, tout est fait pour convaincre les musulmans qu'il se bat pour l'islam[29]. Pour illustrer cela, il proclame le 2 juillet 1798 à Alexandrie, en parlant de lui et de son armée : « nous sommes les véritables musulmans[29]. » Éternellement sans identité fixe, il renaît en tant que Sultan el-Kebir (« le Grand ») et converti à l'islam. Il porte à titre expérimental le turban et le kaftan, il se promeut comme l'apôtre de Mahomet envoyé pour restaurer la gloire de l'islam d'antan, il aurait voulu que ses soldats se convertissent en masse mais cela ne fut pas possible comme ils buvaient tous de l'alcool et étaient principalement non circoncis[30].

Certains chercheurs estiment que Napoléon était sincèrement intéressé à l'islam[31], et a même fait ode à l'islam, la considérant comme l'accomplissement de la religion, réussissant là ou le christianisme et le judaïsme ont échoué[32].

Toutefois, au crépuscule de sa vie, il avoua à Las Cases, son mémorialiste et confident à Sainte-Hélène, que ces paroles relevaient de « la haute charlatanerie[33] ».

La famille

Famille d’enfance

Parents

Frères et sœurs

Mariages et enfants

« Divorce de Napoléon et Joséphine », estampe de Bosselman gravée par Chasselat.
Caricature anglaise de Rowlandson, 1810, Napoléon et sa nouvelle épouse

Napoléon s’est marié deux fois :

Napoléon s'était fiancé le 21 avril 1795 à Désirée Clary (1777-1860), future reine de Suède et de Norvège. Mais la rencontre par Napoléon de Joséphine de Beauharnais à Paris, le 15 octobre 1795, par le biais de son ami Paul Barras, le fait renoncer à ce projet de mariage, non sans mauvaise conscience comme en témoigne sa correspondance avec Désirée.

Napoléon a également eu au moins deux enfants illégitimes, qui tous les deux ont eu des descendants :

Et selon des sources plus contestées :

Neveux et nièces

Oncle

  • Joseph Fesch, cardinal, évêque de Lyon et primat des Gaules. Il est en fait frère utérin de la mère de Napoléon, Maria Letizia Ramolino. La mère de celle-ci Angèle-Marie Pietra-Santa, veuve de Jean-Jérôme Ramolino, se remaria avec François Fesch, officier suisse au service de la République de Gênes.

Descendance célèbre

Voir aussi

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Liens internes

Vie personnelle

Événements – Régimes

Divers

Chevaux de Napoléon

Liens externes

Bibliographie



Iconographie

  • Odile Nouvel-Kammerer (dir.), L'Aigle et le Papillon. Symboles des pouvoirs sous Napoléon, Paris, Les Arts Décoratifs, 2008. ISBN 978-2-916914-01-5

Filmographie sélective


Musées

Notes et références

  1. Pierre Larousse, dans son dictionnaire, donne la définition suivante :
    « Bonaparte, - le nom le plus grand, le plus glorieux, le plus éclatant de l’histoire, sans excepter celui de Napoléon, général de la République française, né à Ajaccio (Corse), le 15 août 1769, mort au château de Saint-Cloud près de Paris, le 18 brumaire, en l’an VIII de la République française, une et indivisible (9 novembre 1799). » et il rajoute, dans la droite ligne des encyclopédistes :
    « Ce début, qui va faire dresser plus d’une oreille, montre tout simplement qu’en toutes choses nous aimons les situations tracées ; et les oreilles reviendront à leur état normal quand nous aurons dit que nous voyons deux hommes, aussi bien que deux noms, en Napoléon Bonaparte : Bonaparte et Napoléon ; le général républicain, l’écolier de Brienne, le brillant officier de Toulon, le convive républicain du Souper de Beaucaire, le vainqueur d’Arcole, etc. ; puis le colosse d’Austerlitz, le maître de l’Europe, le vaincu de Waterloo, le prisonnier de Sainte-Hélène. Oui, il y a deux hommes en cette personne, en cet être si singulièrement doué, dont le double nom et le double visage, d’un caractère tout particulier, se sont trouvés admirablement appropriés au double rôle qu’il a joué dans le monde. Auguste a beau s’appeler Octave ; Octave a beau se nommer Auguste ; c’est toujours le même homme, rusé, timide, hypocrite, astucieux, reniant ses amis quand son intérêt lui commande de les sacrifier. Ici, nous le répétons, nous avons un homme distinct, en même temps que deux noms séparés. »
  2. Jean Tulard Napoléon ou le mythe du sauveur p. 40. Depuis 1616, les Bonaparte sont membres du conseil des Anciens d'Ajaccio ; ils sont aussi avocats et fréquemment alliés aux anciennes familles seigneuriales insulaires ; voir aussi Valynselee 1954, Le sang des Bonaparte
  3. Chuquet, La Jeunesse de Napoléon, tome 1, p. 66. En fait, la vraie graphie corse est « Napulione », car dans la phonétique de cette langue, on doit prononcer "b" la consonne p, quand elle est précédée d'une voyelle.
  4. orthographié sur l'acte de décès Lapulion cf. J. Godechot in Mistler Napoléon 1. Naissance d'un empire p. 29
  5. J. Tulard, L. Garros Itinéraire de Napoléon p.13
  6. André Castelot, Bonaparte, p. 30
  7. a  et b J.Tulard, L.Garros Itinéraire…, p. 15
  8. J.Tulard, L.Garros Itinéraire…p.16
  9. Mémoires de Bourrienne tome premier p.33 selon Jacques Godechot les témoignages sur le séjour de Brienne sont contradictoires et sujets à caution (sous la direction de Jean Mistler, 1969) Napoléon : tome 1. Naissance d'un empire chapitre 1 p.35
  10. Longtemps attribué à Bourrienne, en fait, selon J. Tulard et L. Garros, Ibid., p. 17, cet épisode provient d'une brochure anglaise traduite sous le titre de Quelques notions sur les premières années de Bonaparte parue en l'an VI et reprise dans les Mémoires de Bourrienne sur Napoléon (1829), tome premier, p. 25.
  11. J. Tulard, L. Garros Itinéraire… p.18
  12. Castelot Bonaparte p.47
  13. J. Tulard, L. Garros Itinéraire… p.21
  14. Jean Massin, Almanach du Premier Empire p.3
  15. J. Tulard, Napoléon ou le mythe du sauveur, p. 41
  16. F. Masson et Guido Biagi Napoléon, Manuscrits inédits 1786-1791
  17. Cf. dossier de presse de l'exposition « Bonaparte et l'Égypte » à l'Institut du Monde arabe.
  18. F. Bluche, Manuel d'histoire politique de la France contemporaine, PUF, 2008, p.90
  19. Napoléon - Les Grands Moments d'un destin, par Jean Tulard - chap. 44
  20. On ne sait pas exactement comment Bonaparte a survécu à la dose de poison qu’il avait ingérée, et deux hypothèses existent : soit son estomac s'est révulsé, ce qui expliquerait les vomissements, soit le poison avait perdu de sa force
  21. Hors série « les Invalides » du magazine « l'estampille/l'objet d'art » N°21 janvier 2006, page 51 par François Lagrange, chef de la division de la recherche historique et de l'action pédagogique de l'Armée
  22. La carrière de Carélie dont la pierre avait été extraite, au prix de grandes difficultés, appartenait au tsar Nicolas Ier ; il en coûta environ 200 000 francs, payés par la France (L. Léouzon Le Duc, Études sur la Russie, p. 12, cité par : Octave Aubry, Sainte-Hélène, Paris, Flammarion, coll. « L’histoire », 1973, p. 461, note 3). Contrairement à ce qu’on lit un peu partout, cette roche très dure et quasiment inaltérable n’est pas du marbre, encore moins du porphyre, mais un grès métamorphisé.
  23. R. Reymond, Énigmes, curiosités, singularités, 1987 p. 158
  24. Sten Forshufvud, Napoléon a-t-il été empoisonné ?, Plon, Paris, 1961.
  25. Thierry Lentz, Dr Jean-François Lemaire, Dr Paul Fornès, Dr Pascal Kintz Autour de l'empoisonnement de Napoléon pp.72 et 88
  26. Thierry Lentz, Dr Jean-François Lemaire, Dr Paul Fornès, Dr Pascal Kintz, Autour de l'empoisonnement de Napoléon, p. 64
  27. Nature Clinical Practice Gastroenterology & Hepatology (2007) 4, 52-57 doi:10.1038/ncpgasthep0684 [1]
  28. « Les reins fragiles de Napoléon », Radio Canada, 5 mai 2009.
  29. a , b  et c (en) Scott Appelrouth, Laura Desfor Edles, Classical and Contemporary Sociological Theory: Text and Readings, Pine Forge Press, 2007, 912 p. (ISBN 076192793X), p. 835 
  30. Andy Martin(2002), Napoleon the Novelist, Polity Press, p. 74
  31. Steven Englund (2005), Napoleon: A Political Life , Harvard University Press, p. 132
  32. « Puis enfin, à un certain moment de l’histoire, apparut un homme appelé “Mohamed”. Et cet homme a dit la même chose que Moïse, Jésus, et tous les autres prophètes : il n’y a qu’Un Dieu. C’était le message de l’Islam. L’Islam est la vraie religion. Plus les gens liront et deviendront intelligent, plus ils se familiariseront avec la logique et le raisonnement. Ils abandonneront les idoles, ou les rituels qui supportent le polythéisme, et ils reconnaîtront qu’il n’y a qu’Un Dieu. Et par conséquent, j’espère que le moment ne tardera pas où l’Islam prédominera le monde, car il prédominera le monde. » - Correspondance de Napoléon Ier, tome V, p. 518 Correspondance de Napoléon Ier, pièce N°3148
  33. Andy Martin (2002), Napoleon the Novelist, Polity Press, p. 75

Chronologies

Précédé par Napoléon Ier Suivi par
Directoire
Premier consul
1799-1804
(fin de la Ie République)
Consulat
Imperial Coat of Arms of France (1804-1815).svg
Empereur des Français
1804-1814 et 1815
Louis XVIII
Louis XVI
Louis XVIII
Coat of arms of Andorra.svg
Coprince d'Andorre
avec Francesco Antonio de la Dueña y Cisneros
1806-1812 - 1815
Louis XVIII
Napoléon II
-
Coat of Arms of the Kingdom of Italy (1805-1814).svg
Roi d'Italie
1805-1814
Victor-Emmanuel II en 1861
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