Fouta-Toro

Fouta-Toro
Localisation du Fouta Toro sur une carte de 1860

Le Fouta-Toro ou Fouta Toro (parfois Fuuta Tooro) est une région du nord du Sénégal bordant la rive gauche du fleuve Sénégal entre Dagana et Bakel. Les habitants du Fouta-Toro sont appelés les Foutankobé (Foutanké au singulier).

Sommaire

Histoire

Le Fouta-Toro était un royaume de la vallée du fleuve Sénégal, sur le Sud de l'actuelle Mauritanie et le Nord de l'actuel Senegal où avait été fondé plus anciennement le royaume du Tekrour.

Sous l'empire du Ghana – donc à l'époque du Tekrour –, le Fouta-Toro était le plus grand foyer de population au Sénégal. À ce moment-là bon nombre d'ethnies, notamment les Sérères, ne vivaient qu'en ce lieu bien avant leurs migrations, c'est pourquoi ils sont présents dans ces régions aujourd'hui. Au commencement le Fouta était dirigé par diverses dynasties d'origine mandingue, notamment malinké, sarakhollé et sérère, qui se sont succédé de la chute de l'empire du Ghana jusqu'à l'arrivée du guerrier conquérant d'origine peulh et mandingue, Koli Tenguella. Les Sérères, qu'on retrouve aujourd'hui au Fouta-Toro surtout dans la branche sociale des Subalbe, ou Cuballo au sing, la caste des pêcheurs maîtres du fleuve, sont d'après la tradition, les plus anciens habitants du Fouta-Toro, ainsi que les Tekrouri, qu'on allait plus tard appeler Toucouleurs, puis viennent les Peuls et les Mandingues.

  • La dynastie des Dia-Ogo qui régna selon la tradition orale plusieurs siècles jusqu'au début de l'époque de l'empire du Ghana. Les Dia-Ogo étaient originaires de l'est, et sont d'abord passés par la Mauritanie, ils étaient d'origine sérère, soninké et peul. Les Dia-ogo gouvernaient également le Royaume du Namandirou, plus au sud. C'était une dynastie de forgerons.
  • La dynastie des Manna, qui régna trois siècles, toujours pendant l'époque de l'empire du Ghana jusqu'au début de l'empire du Mali. Ils étaient originaires du Royaume de Diarra, royaume à l'époque vassal de l'empire du Mali. Les Manna étaient d'origine soninké (de clan Soumaré). D'après les traditions orales, cette dynastie était musulmane, contrairement aux plus anciennes, de religion traditionnelle. Selon la tradition, ce fut le roi manna, War Diabi, sous l'influence des Almoravides, qui imposa pour la première fois l'islam dans cette État.
  • La dynastie des Tondyon, d'origine sérère. Ils ont régné un siècle, du XIVe et auXV siècles. Ils étaient de religion traditionnelle et se convertirent à l'islam vers la fin de leur règne. Ils sont arrivés au pouvoir en renversant les Mannas après une longue lutte.
  • La dynastie suivante était divisée en trois groupes, les lam-termés les lam-taga- et les lam-toro(ELIBANA BIROM SALL). Ils étaient tous d'origine peul et de religion traditionnelle. Le royaume de Diara les a vassalisés. Ils avaient divisé la région en plusieurs petits États, tous dirigés par l'un des groupes. Pendant leur règne, l'empire du Djolof sous le pouvoir de Tyukuli Ndiklam, avait réussi à conquérir la plupart des provinces du Fouta et à y installer des farbas, des gouverneurs wolofs qui payaient des impôts au Bourba Djolof.

C'est au milieu du XVIe siècle que Koli Tenguella entre dans l'histoire du Fouta, en renversant les différentes dynasties. Il créa et installa la dynastie des Deniankobé ou Denianke, une dynastie d'origine peul et mandingue. Très attachés à la spiritualité traditionnel, les Déniankobé était de la classe social noble des Ceddo ou Sebbe. Koli Teŋella réussit à reprendre les terres prises par l'empire du Djolof, affaibli par ses luttes avec le Cayor qui voulait se libérer de l'emprise du Djolof. Il réussit également à défaire le lien de vassalité qu'exerçait le royaume de Diara, qui était lui-même vassal de l'empire songhai, sur le Fouta. Sa dynastie dura jusqu'à l'année 1776. C'est sous son règne que le royaume prit le nom de Fouta-Toro.

Vue de l'armée du Fouta Toro en marche (1818)

En 1776, les Toucouleurs, en très grande partie islamisés depuis l'empire du Ghana, renversèrent la dynastie des Deniankobé en faisant la guerre sainte. Les Toucouleurs étaient dirigés par le toroodo Souleymane Baal. Il créa ce qu'on appelle la révolution toroodo. Souleymane Baal fut vite remplacé par le marabout toroodo Abdoul Kader Kane, qui lança des djihads dans divers royaume au Sénégal, mais qui fut vaincu par le damel du Cayor au début du XIXe siècle. Les Toroodos étaient très intolérants vis-à-vis de ceux qui pratiquaient la religion traditionnel. L'islam est déclarée religion d'État du Fouta et celui-ci devient un almamyat[1]. Les Toroodos, d'origines ethniques diverses, abolirent l'exportation d'esclaves mais pas l'esclavage local[2]. Du moins sous le pouvoir des deux premiers almamys. Ils souhaitaient une société égalitaire et islamisée. Durant le règne des Torooros, le roi du Fouta-Toro portait le titre d'almamy. Il devait être un savant musulman, un grand marabout. Après la réussite de Souleymane Baal, Les almamys étaient sans cesse renversés, les toroodo étaient connus pour leurs éternels désaccords, ils étaient divisés en plusieurs clans rivaux, ils ont répandu l'anarchie au Fouta. El Hadji Omar Foutihou Tall, né au Fouta près de Podor dans le village de Halwar, était un Toucouleur d'origine Mabo (tisserands). Il décida de partir faire la guerre sainte a l'est, au mali, après ses multiples échecs au Fouta avec les colons français. C'est avec cette caste toroodo que le royaume du Fouta-Toro prit fin avec la colonisation française à la fin du XIXe siècle.

Organisation sociale et territoirial

Le Fouta-Toro était divisé en neuf provinces dominées par diverses tribus: le Dimar, le Toro, le Law, le Boseya, le Halaybe, le Yirlabé, le Hebiyabe, le Nguenar, le Damga. Tous payaient leur tribut au roi, ou au divers chefs locaux qui reversait à la famille SALL.

Les ethnies majoritaires étaient les Peuls et les Toucouleurs. Le Fouta est le grand foyer historique des Peuls et des Toucouleur. Mais on y trouvait aussi des Wolofs, des Sérères, des Soninkés, des Malinkés, des Bambaras, diverses tribus maures et les Haratins.

Socialement le Fouta était extrêmement hiérarchisé et ce fut un lieu de grands brassages ethniques. Les habitants du Fouta étaient et sont connus, même encore aujourd'hui, pour leur patriotisme.

En plus des guerres intestines entre dynasties, le Fouta-Toro était souvent razzié par les Maures.

Économie

Le royaume avait une agriculture florissante. On y cultivait le mil, le riz, divers fruits et légumes.

L'élevage était aussi très pratiqué par les Peuls et les Toucouleurs, ainsi que la pêche.

Le commerce de la gomme arabique, de l'indigo, des tissus du coton, était pratiqué aussi.

Depuis l'époque du Tékrour, le Fouta-toro vivait aussi de la traite oriental initiés par les Arabes, puis plus tard de la traite atlantique des Européens.

Notes et références

  1. Dominique Auzias, Jean-Paul Labourdette, Sénégal, Petit Futé, 2007, 96 p. (ISBN 2746920069) [lire en ligne], p. 89 ]
  2. Jacques Giri, Histoire économique du Sahel: des empires à la colonisation, KARTHALA, 1994, 259 p. (ISBN 2865375072), p. 194 

Annexes

Articles connexes

Liens externes

Bibliographie

  • (en) The Islamic regime of Fuuta Tooro : an anthology of oral tradition, African Studies Center, Michigan State University, 1984
  • (en) James P. Johnson, The Almamate of Futa Toro, 1779-1836. A Political History, Madison, University of Wisconsin, 1974, 513 p. (thèse)
  • (en) Mouhamed Moustapha Kane, A History of Fuuta Tooro, 1890s-1920s : Senegal under Colonial Rule, The Protectorate, East Lansing, Michigan State University, 1987, XV-528 p. (Thèse)
  • (en) David Wallace Robinson Jr, Abdul Bokar Kan and the History of Futa Toro, 1853 to 1891, New York, Columbia University, 1971, 311 p. (Thèse)
  • (en) David Wallace Robinson Jr, Chiefs and Clerics. The History of Abdul Bokar Kan and Futa Toro. 1853-1891, Oxford, Clarendon Press, 1975, XIV+239 p. (Thèse éditée)
  • (fr) La Structure foncière au Fouta Toro, MISOES, 1959
  • (fr) La démographie du Fouta-Toro (Toucouleurs et Peulhs), Dakar, Mission socio-économique du fleuve Sénégal, MISOES, 1959
  • (fr) Samba Guéladio, épopée peule du Fuuta Tooro, I.F.A.N. Cheikh Anta Diop, 1992
  • (fr) Oumar Ba, Petit vocabulaire de la langue peul parlée au Fouta Toro, Centre de linguistique appliquée de Dakar, 1968
  • (fr) Oumar Ba, Le Fouta-Toro au carrefour des cultures : Les Peuls de la Mauritanie et du Sénégal, L'Harmattan, 1977, 426 p.
  • (fr) H. Bessac, « Fragments de poterie archéologique du Fouta sénégalais », Notes Africaines, Dakar, IFAN, 1964, no 103, p. 65-72
  • (fr) Kalidou Diallo, Les chefs de canton et de province du Fuuta sénégalais de 1860 à 1960, Dakar, Université de Dakar, 1985, 135 p. (Mémoire de Maîtrise)
  • (fr) Aliou Dioum, Amadou Madyou du Fouta. 1860-1875, Dakar, Université de Dakar, 1974, 120 p. (Mémoire de Maîtrise)
  • (fr) Ahmed El Kharroubi, Islam confrérique et colonisation du Fouta Toro : réactions et adaptations à la présence française (1884-1918), 1995
  • (fr) Oumar Kane, Le Fuuta Tooro des Satigi aux Almaami (1512-1807), Dakar, Université de Dakar, 1986, 3 t. t.I : XX, p. 1-509 t.II : p. 510-799 t.III : p. 800-1124
  • (fr) Oumar Kane, La première hégémonie peule : le Fuuta Tooro de Koli Teŋella à Almaami Abdul, Karthala, Presses universitaires de Dakar, 2004, 672 p. (ISBN 2-84586-521-x)
  • (fr) Alassane Mbaye Thiam, L'Histoire de l'enseignement et de la pédagogie au Fuuta-Tooro : l'école de Cilon : son histoire et son influence (18e-XXe siècle), 1987
  • (fr) Jean-Paul Minvielle, Paysans migrants du Fouta Toro : vallée du Sénégal, ORSTOM, 1985, 282 p. (Thèse)
  • (fr) Abderrahmane Ngaïdé, Les conflits fonciers au Fuuta Tooro de 1891 à 1960 : Étude critique des sources : 1889-1890, Dakar, Université Cheikh Anta Diop, 1990, 50 p. (Mémoire de DEA)
  • (fr) Seydou Touré, Migrations et développement agricole dans le Nord du Sénégal : Fuuta Tooro : 1954-1980, 1990
  • (fr) Jean Schmidt, La phonologie du Poular du Fouta Toro et les interférences français-poular, 1974
  • (fr) Saïdou Ibrahima Sy, Les foyers culturels musulmans au Fuuta Tooro, Dakar, Université Cheikh Anta Diop, 1983, 68 p. (Mémoire de Maîtrise)
  • (fr) Mbaye Alassane Thiam, L’histoire de l’enseignement et de la pédagogie coranique au Fuuta-Tooro. L’école de Ciloñ : son histoire et son influence (XVIIIe-XXe siècle), Paris, Université de Paris VII, 1987, 355 p. (Thèse de 3e cycle)
  • (fr) El Hadj Seydou Nourou Touré, Le Toro et Dimar face à la pénétration française, Dakar, Université Cheikh Anta Diop, 1975, 82 p. (Mémoire de Maîtrise)
  • (fr) El Hadj Seydou Nourou Touré, Histoire économique et sociale du Fuuta Tooro (1880-1980). Essai de synthèse, Dakar, Université de Dakar, 1982, 43 p. (Mémoire de DEA)
  • (fr) Amadou Abel Sy, Détermination traditionnelle et détermination extra-active dans le Pekane chez Guelaye Ali Fall : récits épiques pêcheurs du Fouta-Toro (Sénégal), Université de Dakar, Dakar, 1975, 210 p. (Mémoire de Maîtrise)
  • (fr) Yaya Wane, Les Toucouleurs du Fouta Toro (Sénégal) : stratification sociale et structure familiale, IFAN, 1966
  • (fr) Cheikhna Wagué, " Quand les identités sociales s’affrontent, la coexistence devient difficile au Fouta Toro. Les Soninkés face aux mutations du XXème siècle", Hypothèses 2006, Travaux de l’Ecole doctorale d’Histoire de l’Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, Paris, Publications de la Sorbonne, 2007, pp.215-226.
  • (fr) Cheikhna Wagué, Les communautés soninkées du Fouta Toro (Mauritanie, Sénégal) depuis la fin du XVIIIe siècle. Peuplements, migrations et stratégies identitaires, Thèse de doctorat d'Histoire, Paris 1 Panthéon-Sorbonne, directeur de thèse Pierre Boilley, 2008-2009, 551 p.

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