Freddy Tiffou

Freddy Tiffou

Freddy Tiffou (1933 à Alger - 2002 à Bagnolet) était un peintre français. Il reçut le prix de Rome en 1962.

Sa vie

Freddy Tiffou est né en 1933 à Alger de l'union entre Lucienne Baille et d'Edmond Tiffou, un peintre enlumineur algérois. Il suivit ensuite l'enseignement de l'École des Beaux-Arts d'Alger. Il assista aux cours prodigués par Louis Fernez, un dessinateur célèbre. C'est ici que s'affina petit à petit son goût pour la peinture, pour les couleurs, pour les formes. C'est au cours de ces études qu'il rencontra certains amis artistes qu'il côtoiera pendant de nombreuses années. C'est également à Alger qu'il rencontra une jeune artiste, une sculpteur-dentellière qu'il épousa : Colette Frapolli dont le père était Maire de Fort National en Kabylie, assassiné en août 1955. De leur mariage naquit une fille, Caroline et un fils, Stéphane qui marcha sur les pas de son père et devint artiste.

En 1953, il partit pour Paris où il fut admis aux Beaux-Arts. Il travailla alors sous la direction de maître Legueult. Il fonda avec une dizaine de camarades le groupe dit « de Rosny ». Il confirma ses dons précoce dans la capitale où il vécut à l'hôtel, jusque en 1960, année où il dut partir au service militaire après avoir été chassé de son atelier de Rosny-sous-Bois par une bande de squatters installés avec femmes et enfants[réf. nécessaire].

C'est à Alger, en 1955, dans la Galerie Comte-Trinchant, que Freddy Tiffou connut sa première exposition. Le critique artistique de la revue Algeria remarqua alors sa tendance "Buffet"[réf. nécessaire]. Deux ans plus tard, en 1957, après avoir été mentionné lors du Prix Viking, il se vit attribuer le Prix de la Ville d'Alger. C'est alors qu'il réalisa deux grandes toiles (de 3 et 4 mètres) pour décorer la maternité de l'hôpital Parnet à Dussein-Dey.

Alors qu'il accomplissait ses obligations militaires, Freddy Tiffou continua d'exposer. Une première fois à Alger en 1960 et une deuxième en avril 1961, dont l'inauguration eut lieu la veille du "Putsch". Après deux ans de service, cette exposition devait marquer la rentrée de l'artiste. Elle présentait pour la première fois le "groupe des 7" à la Galerie Romanet. Cette réunion d'artistes comprenait, outre le sculpteur Henri Chouvet : Jacques Burel, André Cardona, Jean Simian, Jar-Durand et son élève René Sintès. Cette exposition fut un échec pour des raisons imputables à l'Histoire.

Malgré son amour de l'Algérie, Freddy Tiffou fut contraint de quitter son pays natal et plus particulièrement Alger, la ville de son cœur. Avec de nombreux "pieds-noirs", suite à la déclaration d'indépendance de l'Algérie, il rejoignit la ville de Bagnolet. Il fait donc partie de cette population partagée entre deux cultures, entre deux pays, entre deux modes de vie différents. C'est en 1962, la même année, qu'il remporta le Prix de Rome.

Freddy Tiffou fut l'un des derniers lauréats du prix de Rome. Il obtint cette bourse d'études et rejoignit alors l'Académie de France à Rome, la Villa Medicis. Il y passa trois ans, du 25 janvier 1933 au 30 avril 1966 sous la direction du peintre Balthus alors directeur de l'établissement. C'est d'ailleurs au cours de cette période que naquit son fils. C'est ici, à la villa Medicis, que Freddy Tiffou rencontra l'architecte Michel Dufour (prix de Rome 1962 également),un pensionnaire dont le travail eut un impact non négligeable sur l'œuvre de l'artiste.

Outre le prix de Rome, Freddy Tiffou reçut, en 1958, le prix Velasquez, une importante récompense espagnole. Malheureusement, cette bourse lui fut retiré pour « non-usage dans les délais ». Ainsi, il pouvait se targuer d'avoir obtenu la bourse pour la Casa Velazquez la même année que prix de la Jeune Peinture, l'équivalent du Prix Goncourt de la Littérature. Il fut également sélectionné en 1956 pour le prix Othon Friesz alors qu'il était boursier à Collioure. Ces récompenses furent accueillies avec beaucoup d'humilité par l'artiste. Ces nombreux prix lui permirent d'être exposé un peu partout dans le monde. Son œuvre voyagea de Paris à Tokyo (grâce à la Galerie Tamenaga) en passant par l'Italie, l'Allemagne, l'Algérie, les États-Unis, sans oublier Antibes dans une exposition intitulée « Les Cinquante Derniers Premiers Grand Prix de Rome » chez Picasso-Antibes. L'œuvre choisie pour représenter Freddy Tiffou n'était autre que celle qui lui avait permis de gagner le Prix de Rome : Autoportrait entouré d'objets, une œuvre aujourd'hui exposée à l'Ecole nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris (ENSBA).

En 1977, Freddy Tiffou vint enrichir la liste des professeurs de l'Ecole nationale des Beaux-Arts de Lyon. Malgré des peintures relativement « classiques », Freddy Tiffou était amateur de manifestations d'avant-garde et autres « performances ». C'est son profil alléchant et sa motivation qui décida le directeur de l'établissement, Philippe Nahoum, à faire appel à lui. Il y enseigna alors la peinture à de jeunes étudiants venus des quatre coins du monde. Il prenait très à cœur ce poste de professeur. Il se montrait très discret sur ses travaux et il ne se mettait jamais en avant. Pendant toute la durée de son contrat, il se tint à ce principe. Il s'investit totalement dans les tâches qui lui furent confiées, voire davantage. Il était l'un des syndicalistes CGT de l'école et était très engagé politiquement.

En 1983-1984, Jack Lang, alors ministre de la culture, lui confie une mission de réflexion à propos du statut de l'artiste. Il est l'un des membres les plus influents du Syndicat National des Artistes Peintres dont la porte-parole était Françoise Arthaud. Même si ces négociations n'aboutirent qu'à quelques peccadilles au niveau financier, Freddy Tiffou peut être en partie tenu responsable de la reconnaissance de la condition précaire de l'artiste. Grâce à lui, les peintres acquièrent un statut professionnel. Peindre devint leur métier. Jusqu'à alors, ils ne profitaient d'aucune protection vis-à-vis de leur profession incertaine.

C'est aussi au cours de cette période que sa production personnelle connut un net ralentissement pour s'arrêter complètement au début des années 90 au début de la maladie de son épouse qui est décédée le 6 octobre 2001.

Freddy Tiffou s'éteignit en 2002 à Bagnolet à l'âge de 68 ans. Tout au long de sa vie, il fut entouré d'artistes.

Son œuvre

Au cours de sa carrière, Freddy Tiffou signa une œuvre assez singulière. Navigant entre différentes influences, différents styles, différentes techniques, différentes sources d'inspiration, il atteignit rapidement une sorte de savoir-faire qui ne manque pas d'une certaine originalité.

Largement inspirée par le mouvement cubiste, une grande partie de l'œuvre de l'artiste s'emploie à décomposer les objets et les humains selon des volumes géométriques élémentaires (cubes, sphères, pyramides). Pour Guillaume Apollinaire, le cubisme « c’est l’art de peindre des ensembles nouveaux empruntés non à la réalité de vision, mais à la réalité de connaissance. » Il s'emploie à gommer les dernières distances entre le fond et le premier plan. Les règles de perspective classique disparaissent. Comme ses illustres maîtres, il parvient à faire le tour de l'objet sans bouger. En fait, il n’y a plus de motif ni de fond mais une entité qui est l’espace pictural. Sur bien des toiles, Freddy Tiffou tire la profondeur d'une surface plane. Il est une réflexion sur la forme, sur la représentation, sur le processus créatif. Il recherche plus de « vérité » dans la représentation de l'objet. Malgré la volonté de s'éloigner de ces pairs, il n'arrive pas à renier complètement son amour du cubisme, l'influence qu'il a pu avoir sur son envie de peindre.

Après une petite incursion vers l'abstraction dont en témoigne le « Palatin » peint lors de son séjour à Rome, Freddy Tiffou semble avoir trouvé sa voie. Du cubisme, il retiendra le jeu sur les formes, sur les couleurs, sur les ambiances. À partir de cette base, il développera une technique assez particulière. Lorsque l'on regarde les tableaux de manière assez brève, on a l'impression qu'il a recours à des collages, cependant, dès que l'on s'approche de la toile, on se rend compte que tous les détails sont peints à la peinture à l'huile. Au cours de sa vie, Freddy Tiffou n'a eu recours qu'à cette seule technique picturale : la peinture à l'huile. C'est ce moyen d'expression : le pseudo-collage, qui rend l'œuvre de Freddy Tiffou particulière. L'œuvre la plus intrigante à ce niveau là est Balthazar.

Outre cet hommage à Balthus, son directeur durant les trois ans qu'il passa à l'Académie de France à Rome, on peut voir un traitement balthusien des expressions, dans le traitement des visages dans certaines de ses œuvres, un mélange d'ironie et de naïveté qui mettent ces œuvres à part dans le travail de l'artiste. Freddy Tiffou avais pris soin d'écrire derrière certaines toiles des messages amoureux destinés à son épouse Colette[réf. nécessaire].

Il connut aussi des périodes de doute. C'est ce qui explique en partie certaines toiles d'inspiration funèbre. Cependant, son œuvre est surtout réputée pour être inspirée par la nature qui l'entoure. Il n'est pas rare de retrouver des fleurs, des oiseaux, des animaux. La faune et la flore sont au cœur de son œuvre. Une toile comme Pollution ainsi que de nombreux dessins de l'artiste sont là pour nous rappeler les dangers qui nous guette. Freddy Tiffou utilisait son art pour exprimer son inquiétude face à la pollution qui commençait déjà à ronger les villes. Actif sur le devant de la scène syndicale à la fin de sa carrière, il le fut également dans son œuvre picturale tout au long de sa vie. Il n'est pas exagéré de considérer Freddy Tiffou comme un artiste engagé[réf. nécessaire].

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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Freddy Tiffou de Wikipédia en français (auteurs)

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