Fusion froide

Fusion froide
Diagramme d'un calorimètre utilisé à l'institut de la nouvelle énergie à base d'hydrogène au Japon.

La presse a nommé fusion froide ce qui semblait être une fusion nucléaire réalisée dans des conditions de température et de pression ambiantes, utilisant des techniques dérivées d'une expérience réalisée par Martin Fleischmann et Stanley Pons en mars 1989. Cette expérience se caractérisait par un dégagement de chaleur non explicable par la quantité d'énergie électrique reçue (faisant fondre l'électrode).

Echaudés par l'expérience de fusion froide décrite par Pons et Fleischman, difficilement reproductible et ayant déclenché une polémique mondiale sur la vérification effectuée par les comités de lecture, le principe de la fusion froide reste controversé au sein de la communauté scientifique, certains n'hésitant pas à assimiler ces expériences à celles d'alchimie et de tentative de "transmutation du plomb en or" ; les processus physiques reconnus permettant d'aboutir de façon avérée à des réactions de fusion nucléaire utilisables pour la production d'énergie nécessitent des pressions et des températures extrêmement élevées ; dans diverses expériences isolées des phénomènes inexplicables sans faire appel à la physique nucléaire ont été décelés mais se heurtent à des difficultés pour obtenir des crédits complémentaires pour approfondir du fait que les revues à comité de lecture semblent réticents à publier sur ce thème de recherche[1].

Sommaire

Origines

Fusion froide est un terme populaire pour désigner le domaine de recherche sur les « réactions nucléaires à basse énergie ». Il est devenu commun suite à la controverse entourant l'expérience de Fleischmann et Pons en mars 1989. Plusieurs équipes de recherche ont alors tenté de reproduire leurs résultats, sans y parvenir. Un comité organisé par le Département de l'Énergie des États-Unis a alors conclu qu'il n'y avait pas de preuves convaincantes qu'une source d'énergie utile pourrait résulter de ces recherches. Cinq ans plus tard, la plupart des gouvernements et des chercheurs déclaraient ne plus poursuivre de recherches sur le phénomène.

Indépendamment, en 1989, en observant des échantillons de matière organique, des gangliosides placés dans une atmosphère d'hydrogène sur un support de nickel, le professeur italien Francisco Piantelli a remarqué une production de chaleur anormale[2]. Avec Sergio Focardi et Roberto Habel, il a alors étudié ce phénomène et ils sont arrivés à une expérience parfaitement vérifiable, dont le développement a conduit en 2011 à la réalisation du Catalyseur d'énergie de Rossi et Focardi. Ils ont toujours estimé que ce phénomène était différent de celui de Fleischmann et Pons et le désignaient plutôt comme une réaction nucléaire à basse énergie (LENR).

Quelques chercheurs ont cependant continué les recherches et participé à des conférences internationales sur la fusion froide. Leur travaux, publiés dans des revues scientifiques réputées, confirmaient un dégagement d'énergie non expliqué, ou parfois des effets nucléaires. La précision des calorimètres a progressé, conclut en 2004 un second comité du Département de l'Énergie des États-Unis, et les indices de génération anormale d'énergie semblent moins contestables qu'en 1989. Cependant, selon son rapport, de nombreuses expériences sont mal documentées, l'amplitude du phénomène n'a pas augmenté, il est difficile à reproduire, et une origine nucléaire reste généralement exclue. Le comité s'est donc opposé au financement d'un programme de recherche majeur, et a identifié différents domaines de recherche susceptibles de résoudre la controverse scientifique.

Dans la nature, Louis-Nicolas Vauquelin a décrit en 1799 le phénomène de transmutation biologique, par lequel les poules transformeraient la silice en calcium lorsqu'elles vivent sur un terrain non calcaire afin de produire une coquille d'œuf dure. À partir de 1959, Corentin Louis Kervran, physicien, émet l'hypothèse que cette transformation de silice en calcium serait une manifestation du phénomène de fusion froide et publie 2 revues avec des phénomènes similaires[3].

Aperçu

Lorsque l'eau est électrolysée dans un vase entouré d'un calorimètre, il est possible de vérifier la loi de conservation de l'énergie en utilisant les théories de l'électricité, de la thermodynamique et de la chimie: l'énergie électrique en entrée, la chaleur accumulée dans le vase, l'énergie chimique stockée, et la chaleur s'échappant du vase s'équilibrent parfaitement. Lorsque la cathode est constituée de palladium, et lorsque l'eau est remplacée par de l'eau lourde, on s'attend aux mêmes transferts d'énergie.

Fleischmann et Pons observèrent dans leurs expériences que, dans certains cas, la quantité de chaleur mesurée par le calorimètre semblait plus grande que prévue. Lorsqu'ils ont calculé la densité de puissance sur base du volume de la cathode, ils ont obtenu une valeur trop grande pour être explicable par une réaction chimique. Ils en conclurent provisoirement que l'effet pouvait être nucléaire, malgré l'absence de preuves expérimentales.

D'autres scientifiques ont essayé de reproduire ces résultats. Beaucoup ont échoué, mais quelques uns ont réussi et ont publié leurs résultats dans des journaux scientifiques comme le Japanese Journal of Applied Physics et le Journal of Electroanalytical Chemistry[4]. Certains chercheurs pensent qu'il y a suffisamment de preuves expérimentales pour établir la validité scientifique du phénomène, tandis que d'autres rejettent ces preuves : en 2004, le comité d'évaluation du département de l'énergie américain est maintenant divisé de façon égale sur cette question (changement significatif par rapport aux conclusions du comité équivalent de 1989).

La recherche de produits de fusion nucléaire a donné des résultats contradictoires, ce qui a amené deux tiers du comité de 2004 à rejeter la possibilité de réactions nucléaires lors de ces expériences. Les théories physiques actuelles n'expliquent pas comment la fusion nucléaire pourrait survenir dans ces expériences ou l'énergie générée serait convertie en chaleur (plutôt qu'en rayonnement ou particules). Cependant, en 2006, Mosier-Boss et Szpak, chercheurs à la marine américaine, ont annoncé des indices non ambigus de réactions nucléaires, qui devront être confirmées de façon indépendante par d'autres chercheurs[5].

Le bureau américain des brevets a accordé un brevet concernant la fusion froide en 2001[6]. La connaissance actuelle du phénomène, s'il est réel, ne permet pas d'envisager des applications commerciales dans un avenir proche. Le comité de 2004 a identifié plusieurs domaines de recherche à conduire par la méthode scientifique : la recherche continue.

D'autre métaux que le palladium peuvent, selon plusieurs rapports d'expérimentateurs et sous couvert de l'affirmation de l'existence de la réaction, servir à la fusion froide : typiquement, la famille des métaux précieux, tel que l'iridium, l'osmium, le platine, le rhodium et le ruthénium est suspectée d'avoir les propriétés suffisantes pour entretenir cette réaction. Des expériences, néanmoins jamais reproduites par la communauté, ont aussi mis en cause le nickel ou le fer. Dans le cadre d'une possible utilisation industrielle, le remplacement du palladium cher par un métal plus abondant est primordial.

Les expérimentateurs affirment que la fusion s'accompagne aussi d'une transmutation au niveau de la cathode[7]. De l'or, de l'argent, du chrome, du fer et du cuivre auraient ainsi été découvert, ce qui alimente les théories ésotériques de la proximité de l'alchimie et de la fusion froide, même si les scientifiques apprécient peu ce rapprochement. De plus, près de 1000 fois le bruit de fond neutronique auraient été détecté aux abords d'un réacteur à fusion froide. Toutes les expériences ne produisent cependant pas des neutrons, ou alors à trop faible quantité pour être significative.

Historique

Depuis 1989, des conférences internationales se sont réunies sur le sujet, ainsi que des réunions moins solennelles soit sur la fusion froide proprement dite, soit sur le thème plus général des nouvelles énergies ; la presse scientifique les ignora. La première, ICCF1, se tint à Salt Lake City en mars 1990 et les suivantes successivement à Côme (Italie) en juin-juillet 1991, à Nagoya (Japon) en octobre 1992, à Hawaii (USA) en décembre 1993, à Monte-Carlo (Monaco) en avril 1995, à Sapporo (Japon) en octobre 1996, à Vancouver (Canada) en avril 1998, à Lerici (Italie) en mai 2000, à Pékin (Chine) en mai 2002, à Cambridge (USA) en août 2003, à Marseille (France) en novembre 2004, à Yokohama (Japon) fin novembre 2005 et à Moscou (Russie) ICCF13 en juin 2007. La conférence ICCF 14 [8], [9] s’est réunie en août 2008 à Washington, et la conférence ICCF 15[10] a eu lieu à Rome en 2009. La conférence ICCF 16[11] a eu lieu à Madras en février 2011. L’Académie des Sciences de la Fédération de Russie organise tous les ans les conférences RCCNT[12]. (Russian Conferences on Cold Nuclear Transmutation of Chemical Elements)

Des équipes américaines, italiennes et japonaises continuent à travailler depuis plus de dix ans sur le sujet et elles estiment avoir obtenu des résultats confirmant qu'un tel phénomène existe (on ne le nomme toutefois plus « fusion froide », mais Réactions Nucléaires dans la Matière Condensée ou réactions nucléaires à basse température ou réactions nucléaires chimiquement assistées). Ces équipes revendiquent la réalité du dégagement de chaleur (supérieur de 25 % à 70 % à l'énergie fournie). Certaines affirment avoir mis en évidence la production d'hélium. Toutes soulignent le caractère transitoire et rare du phénomène. Certains physiciens, comme Peter Hagelstein du MIT (Cambridge, USA) en ont proposé une théorie.

Argentine

Au début des années 1950, un docteur en physique autrichien appelé Ronald Richter avait persuadé le général Peron, président argentin, que l'énergie de fusion était maîtrisable à l'échelle de laboratoire. Il se basait sur le fait que sur une population d'atomes, il y avait statistiquement une fraction (très petite) d'atomes possédant une énergie suffisante pour obtenir la fusion.

Peron lui alloua un budget qui a permis à Richter de s'équiper avec le matériel le plus avancé de l'époque, et il lui a confié la construction de ses installations sur une île dans un lac des Andes Patagoniens, près de la ville de Bariloche, une colonie suisse fondée en 1904. Le projet a été appelé Projet Huemul, selon le nom de l'île.

Suite à une erreur d'interprétation dans une expérience de Richter, ce dernier annonça l'obtention de la fusion nucléaire. Malgré cette annonce, qui a suscité beaucoup de controverses, une commission d'enquête à la charge de physiciens argentins est arrivée à la conclusion que Richter n'avait pas obtenu de fusion, et Richter a dû quitter le pays. Le projet a été fermé en 1952.

En 1955, Peron a été remplacé suite à un putsch militaire. Le nouveau gouvernement a donné ce qui restait de l'équipement du laboratoire de Richter à un jeune physicien argentin formé en Angleterre et membre de la commission d'enquête, José Antonio Balseiro. Avec cet équipement, et une poignée de professeurs, il a créé en 1955 l'Institut de Physique qui porte aujourd'hui son nom.

Un livre du Dr. Mario Mariscotti narre comme dans un roman les faits dans son livre El secreto atómico de Huemul.

États-Unis

Le 23 mars 1989, la « Une » du Financial Times déclencha une onde de choc : deux électrochimistes, Stanley Pons et Martin Fleischmann de l'université d'Utah, y déclaraient avoir réussi à obtenir une réaction de fusion nucléaire lors d'une relativement banale expérience d'électrolyse effectuée avec une simple paire d'électrodes (dont une de palladium) reliées à une batterie et immergées dans de l'eau lourde

Lors de cette expérience, ils auraient mesuré un important dégagement de chaleur excédentaire qu'ils interprétaient comme la résultante d'un phénomène de fusion nucléaire contrôlée. Ce type de réaction nucléaire, au cours de laquelle des noyaux atomiques fusionnent en générant une très grande quantité d'énergie, est en quelque sorte le Graal des physiciens qui s'efforcent depuis plus de cinquante ans de contrôler les mécanismes à l'origine du fonctionnement des étoiles, mais également des bombes thermonucléaires. La maîtrise de cette source d'énergie quasi-illimitée libérerait l'humanité des contraintes liées à l'exploitation de ressources énergétiques non renouvelables ou générant des déchets dangereux, comme c'est le cas actuellement pour le nucléaire « classique » reposant sur le principe de la fission des noyaux atomiques.

L'annonce du Financial Times arrivait dans un contexte bien particulier : trois ans auparavant, Tchernobyl avait rappelé à l'ensemble de la planète que l'énergie nucléaire de fission pouvait présenter des dangers considérables et les programmes électro-nucléaires engagés au lendemain du premier choc pétrolier de 1973 commençaient à être de plus en plus critiqués par l'opinion publique des principaux pays industrialisés.

Les travaux sur la fusion thermonucléaire contrôlée marquaient toujours le pas depuis 50 ans malgré les milliards de dollars investis et, après les chocs pétroliers des années 1970, les consommations énergétiques avaient repris leur progression. Enfin, même si on assistait à l'implosion du Bloc de l'Est, le contexte géopolitique restait incertain avec la montée des fondamentalismes religieux et du nationalisme dans les principaux pays producteurs de pétrole.

Dans ce contexte, la perspective ouverte par Pons et Fleischmann de produire des quantités d'énergie quasi-illimitées à partir de l'eau, tombait à point nommé.

Le débat dépassa donc le cadre feutré des publications scientifiques : l'information fut reprise par la plupart des quotidiens et chaînes de télévision du monde et présentée comme ce qui pouvait être, à juste titre, une découverte scientifique majeure, mais également la promesse d'un nouvel âge pour l'Humanité.

Quand la découverte de cette « fusion froide » fut publiée, de nombreux scientifiques contestèrent, sinon la réalité du dégagement de chaleur décrit par les deux électrochimistes, du moins leur hypothèse concernant une fusion thermonucléaire. Ils rappelèrent qu'il n'est théoriquement pas possible de vaincre par des moyens « électro-chimiques » tels que l'électrolyse décrite par Pons et Fleischmann, les forces électriques qui font que deux noyaux atomiques se repoussent.

Selon les théories scientifiques admises depuis plusieurs décennies, deux noyaux atomiques exigent pour fusionner une énergie permettant de franchir la Barrière coulombienne. La fusion "à chaud" permet d'obtenir cette énergie, mais sauf effet nucléaire comparable à la catalyse en chimie, cette barrière ne peut être franchie à froid.

Trois jours après la publication du Financial Times, Steven Jones de la Brigham Young University n'observa pas de dégagement de chaleur mais l'émission de neutrons pouvant indiquer une réaction nucléaire, qui confirmerait indirectement l'hypothèse de Pons et Fleishmann.

De nombreux scientifiques, dont quelques Prix Nobel de physique[Qui ?], déclarèrent confirmer également des dégagements inexplicables alors qu'ils tentaient de reproduire l'expérience des deux électrochimistes.

L'Energy Research Advisory Board du département américain pour l'énergie réunit ainsi une commission scientifique afin d'enquêter sur la fusion froide. Celle-ci ne put reproduire la fusion froide en question.

Le débat s'intensifia entre les tenants d'un phénomène encore inexpliqué mais devant faire l'objet de travaux approfondis, et les opposants pour lesquels, dans le meilleur des cas, le dégagement de chaleur était imputable à un mauvais protocole opératoire, et dans la pire hypothèse, à un coup monté par des chercheurs à la recherche de notoriété et de budget. Les cours du palladium, quant à eux, montaient et descendaient au fur et à mesure des annonces et contre-annonces.

Pour les gardiens de l'orthodoxie scientifique[Qui ?], la « fusion froide » devait être classée sans autre forme de procès dans la catégorie des « sciences pathologiques », comme sans doute la mémoire de l'eau, l'homéopathie ou les mouvements perpétuels de première et deuxième espèce.

Le fait que Pons et Fleischmann, aient annoncé leur découverte par le biais de la presse grand public plutôt que dans une revue scientifique avec évaluation par les pairs, procédure habituelle en matière de communication scientifique d'importance, leur fut reproché. Il est en effet d'usage d'annoncer les résultats de travaux scientifiques dans des revues qui soumettent l'article en premier lieu à un ou plusieurs experts scientifiques chargés de vérifier que la description de l'expérience, l'analyse des résultats et les conclusions qui en découlent répondent aux critères de la démarche scientifique.

Les revues scientifiques d'audience internationale, telles que Nature, s'attendent à ce protocole, et les scientifiques qui espèrent obtenir pour leurs travaux une reconnaissance internationale se soumettent à cette règle importante pour l'obtention de crédits, la notoriété de leur laboratoire et éventuellement la suite de leur carrière (c'est le fameux « publish or perish » conditionnant depuis quelques années, avec la quête de financement, le quotidien des chercheurs).

Cependant, Pons et Fleischmann avaient bien soumis à Nature un article relatant leur découverte, mais son comité de lecture a constaté qu'il ne pouvait pas être publié avant que certaines erreurs ne soient fixés. Fleischmann et Pons ont dit qu'ils n'avaient pas le temps de corriger ces erreurs, et l'article ne sera jamais ressoumis.

Dix ans après les faits, la « précipitation médiatique » dont ont fait preuve les deux scientifiques est encore citée comme exemple de manque de sérieux. L'expérience décrite par Pons et Fleischmann manquait de robustesse : ils ne précisaient pas s'ils avaient observé la formation de neutrons et d'hélium, normalement présents lors d'une réaction de fusion thermonucléaire (on les qualifie de « cendres » de la réaction de fusion), et les conditions mêmes de mesure des températures lors de l'expérience pouvaient être cause d'erreurs.

En 2009, Pamela Mosier-Boss, chercheuse à la marine américaine, place des électrodes soit en nickel soit en or dans un électrolyte obtenu par co-déposition de chlorure de palladium et de deutérium. En quelques secondes, l'électrolyse produit des neutrons détectés par leurs traces dans du plastique CR-39[13],[14].

France

En France, pays engagé dans une politique énergétique reposant très largement sur l'électronucléaire, le débat fut très vite clos : Jean Teillac, alors Haut-commissaire à l'énergie atomique (CEA), refusa d'engager des recherches sur la question.

On engagea cependant un rapide programme d'expériences à la centrale du Bugey, autant pour démontrer qu'en France il n'y avait pas d'interdit sur la fusion froide au CEA, que pour tenter de démontrer l'inanité de recherches en ce domaine. Peu de temps après, Michel Martinot, son directeur de cabinet, expliqua dans les colonnes du Figaro du 9 juin 1993 que rien ne s'opposait à ce que les chercheurs du CEA travaillent sur la question de la fusion froide, pourvu qu'ils le fissent chez eux, le week-end, et sur leurs propres ressources financières.

Cependant, quelques scientifiques français, tel Jean-Paul Bibérian à Marseille, s'engagèrent sur cette voie. D'autres purent bénéficier d'un financement de la part de certaines compagnies pétrolières attentives aux développements d'une possible découverte majeure pour l'humanité.

Michel Rambaut, ancien du CEA, développa à partir de 1994 un modèle théorique faisant intervenir des clusters d'électrons, mais pointa les limites de puissance qui empêchaient, selon lui, toute possibilité d'application industrielle[15].

Enfin, Jacques Dufour, du Laboratoire des Sciences Nucléaires du Conservatoire national des arts et métiers de Paris, aurait réussi à faire financer ses recherches sur le sujet par Shell.

Les « pères fondateurs » Pons et Fleischmann se sont vu offrir par Toyota la possibilité de poursuivre en France leurs travaux dans un laboratoire abrité au sein de l'Institut Minoru de Recherches Avancées (IMRA) de Sophia Antipolis et ce jusqu'à la retraite de Pons qu'il prit en France en 1999 (Fleischmann l'avait prise deux ans auparavant en Angleterre). Les enjeux industriels étant considérables, très peu d'informations ont filtré de ce laboratoire. Cependant, en 1993, à ICCF4 à Maui, les deux chercheurs annonçaient pouvoir produire vers la fin de l’année jusqu'à 200 kW...

Autres pays

Malgré le scepticisme officiel de la communauté scientifique internationale, Science et Vie révèle en 2004 des expériences peu connues qui tentent d'obtenir de véritables réactions nucléaires à température ambiantes. Antonella De Ninno travaillant à l'ENEA affirme que son équipe a montré, dans une expérience qui s'est terminée fin 2002, qu'à partir d'une certaine concentration de deutérium dans le palladium, on observe un excès de chaleur et une production d'hélium 20 fois supérieure au « bruit de fond » lié aux contaminations extérieures[16]. Selon Giuliano Preparata et Martin Fleischmann, il convient d'utiliser la théorie quantique des champs qui conçoit les interactions elles-mêmes en termes de particules[17].

Le magazine New Scientist a annoncé dans son édition en ligne le 27 avril 2005 qu'une réaction de fusion tiède aurait été obtenue par Seth Putterman, Brian Naranjo et James Gimzewski à l'Université de Californie. En utilisant des cristaux de tantalate de lithium et l'effet pyroélectrique (il faut réchauffer de -33 °C à +7 °C en quelques minutes ces cristaux plongés dans un bain de gaz de deutérium, afin de produire un champ électrique local), ils auraient réussi à produire un flux, faible mais mesurable, de neutrons.

Les auteurs soulignent à grands traits qu'ils n'ont pas mis au point une nouvelle source d'énergie : leur expérience produit quelques centaines de neutrons par seconde, alors qu'un réacteur nucléaire commercial aurait besoin d'en produire des dizaines de millions par seconde.

Le 22 mai 2008, Yoshiaki Arata, un physicien nucléaire Japonais, a fait publiquement une expérience de ce qu'il appelle la « fusion de la matière condensée »[18] avec une méthode dérivée de Pons et Fleischmann.

Fusion froide par cavitation

Depuis 2002, des chercheurs explorent les possibilités de la cavitation pour réaliser la fusion froide[19] et pour mieux comprendre les conditions de production de neutrons et d'énergie par cette voie[20],[21].

  • L'expérience de base consiste à injecter un liquide sous haute pression dans un tuyau de 1 mm de diamètre, ce qui provoque à la sortie une cavitation où les atomes sont fortement projetés les uns contre les autres. On observe alors des fusions ou fissions nucléaires, des effets thermiques, l'émission de lumière et des décharges électriques[22].
  • En 2005, une équipe américano-canadienne observe un jet à 70 bar qui produit des étincelles électriques et une lueur bleue caractéristique d'une température de 5000K[23].
  • En 2009, A.A. Kornilova et V.I. Vysotskii observent des émissions optiques et rayons X corrélées à la cavitation d'un jet d'eau supersonique entre 200 et 3000 atmosphères. Sur une surface d'argent pur, par cavitation à 3000 atmosphères, des atomes transmutent en C, O, Na, Al, S, K, Ca[24],[25].

Transmutations par effondrement électrons-noyaux

En 2003, une équipe russe a découvert un nouveau processus physique en sur-compressant un faisceau d'électrons, sur une cathode de métal pur[26],[27].

Ils sur-compressent un faisceau d'électrons de 0,5 MeV, sur une zone de moins d'un angström, pendant 30 ns, sur une cathode de métal pur. Une masse de 0,5 à 1 mg d'atomes se transforme sur la cathode et sur des plaques de métal pur distantes de 1 à 10 cm.

Les produits émis par la zone active (électrons, positrons, ions, particules nucléaires et paquets (clusters), chargés et neutres) sont analysés en temps réel, et après chaque expérimentation, des analyses mesurent les éléments chimiques, isotopiques, la répartition spatiale des atomes et les rayonnements visibles, microondes et gamma.

Presque tous les atomes qui se forment dans les plaques distantes sont dans quelques petites zones, dans certaines directions précises par rapport au faisceau et à la cathode, aux mêmes profondeurs et avec la même dispersion pour tous les éléments. Ce positionnement des atomes n'est pas compatible avec la décélération de Coulomb d'atomes ionisés déjà formés.

Ces chercheurs interprètent ainsi ces observations :

  • Globalement, les électrons à faible énergie s'effondrent avec les noyaux en un plasma à faible énergie.
  • De grosses particules composées de quelques milliers de nucléons se forment.
  • Ces grosses particules sont projetées vers les plaques, y sont décélérées et finissent par se décomposer en atomes. Cela :
    • surtout en surface sur 200 angströms d'épaisseur ;
    • puis pour 25 % vers 0,3 micron de profondeur avec une masse de particule de l'ordre de 5 700 nucléons, selon l'amortissement du mouvement des particules ;
    • puis un résidu vers 7 micron de profondeur avec une masse de particule de l'ordre de 100 000 nucléons.

Globalement, ils ont réalisé plus de 15 000 analyses et observent :

  • Pendant le processus d'effondrement et ses suites pendant 100 ns, une intense radiation x et gamma.
  • Une synthèse de noyaux atomiques tous stables, de l'hydrogène H au plomb Pb (avec 1 ≤ A ≤ 240), dont certains étaient inconnus sur Terre.
  • Une fusion d'éléments transuraniens super-lourds (avec 250 ≤ A ≤ 500), surtout A = 271, 272, 330, 341, 343, 394, 433.
  • Les éléments formés n'ont pas la même composition isotopique que les éléments naturels, souvent dans un rapport de 5 à 100 en plus ou en moins.

Controverse

Les annonces de résultats positifs de fusion froide en dehors des publications scientifiques à évaluation par les pairs sont controversées et sont sujettes à caution. Néanmoins, échaudées par la polémique de 1989, la plupart des revues à comité de lecture refusent simplement et à titre préventif toute publication sur la fusion froide[réf. souhaitée]. Selon Martin Fleischmann, la vraie raison de l'hostilité envers la fusion froide réside dans le fait que l'incorporation d'hydrogène dans des métaux lourds concerne d'importants développements récents en matière d'armements couverts par le secret militaire[28],[29]. Selon un journaliste de Rai News 24, Flaviano Masella, la découverte dans la région de Khiam, au Liban, après la guerre du Liban de 2006, de traces d'uranium enrichi pourrait s'expliquer par ces nouveaux processus militaires signalés par Fleischmann[28],[29]. Selon le journal Horizons et débats, ces faits peuvent être rapprochés d'un cas dénoncé par un biologiste de Falloudja, Mohamad Tareq al Deraji, qui a constaté chez des cadavres, causés par les destructions de l'armée des Etats-Unis au printemps 2004, que les morts comportaient des blessures inconnues et des corps étaient carbonisés alors que leur vêtements étaient intacts[30].

Références

  1. Jacques Foos, Directeur du laboratoire des sciences nucléaires au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) (Science et Vie, numéro spécial de mai 2004) : « Je suis aujourd’hui convaincu que le phénomène existe! J’ai accepté de soutenir des recherches sur la fusion froide au CNAM sans y croire vraiment, mais en pensant démasquer l’artefact. Aujourd’hui, je suis convaincu que le phénomène existe même si ce n’est pas de la fusion classique. [...] J’aimerais pouvoir consacrer plus de moyens à ces recherches : avec seulement 1 ou 2 millions d’euros, on pourrait régler l’affaire en trois ou quatre ans! Mais il est impossible de trouver des budgets décents pour ces recherches. Les scientifiques sont devenus frileux : ils n’osent plus rien de peur de se tromper! C’est vraiment dommage. »
  2. (it) Foresta Martin Franco, La fusione fredda alla senese accende di nuovo la speranza, Corriere della Sera, 19 février 1994
  3. Science et Vie mai 2004 - L'alchimie - la poule aux oeufs d'or, voir aussi l'article consacré à Corentin Louis Kervran
  4. cité par les chercheurs consulté par le comité du département de l'énergie américain en 2004:
    M.H. Miles et al., "Correlation of excess power and helium production during D2O and H20 electrolysis using Palladium cathodes", J. Electroanal. Chem. 346 (1993) 99
    Y. Arata and Y-C Zhang, "Anomalous difference between reaction energies generated within D20-cell and H20 Cell", Jpn. J. Appl. Phys 37, L1274 (1998)
  5. Daviss and Krivit, "Extraordinary evidence", New Energy Times, Nov 10, 2006 [1]
  6. Davis, et al. "Electrolysis apparatus and electrodes and electrode material therefor"", US patent 6,248,221, cité par Infinite energy
  7. Rapport sur L’International Conference on Cold Fusion ICCF10
  8. (en) Volume 1 14th International Conference on Cold Fusion (ICCF-14), Volume 1, 10 August 2008, Washington DC
  9. (en) Volume 2 14th International Conference on Cold Fusion (ICCF-14), Volume 2, 10 August 2008, Washington DC
  10. (en) 15 th International Conference on Condensed Matter Nuclear Science, ABSTRACTS, Roma, Italy, October 5, 2009
  11. (en) TOPIC WISE INDEX and PRESENTING AUTHORS 16th INTERNATIONAL CONFERENCE ON CONDENSED MATTER NUCLEAR SCIENCE CHENNAI, INDIA. February 6, 2011
  12. (en) The 16th Russian Conference on Cold Nuclear Transmutation and Ball-Lightning (RCCNT&BL-16), Dagomys, Sochi, Russia, June 1, 2009
  13. (en) ScienceDaily, 23 mars 2009, http://www.sciencedaily.com/releases/2009/03/090323110450.htm
  14. (en) P.A. Mosier-Boss, Characterization of tracks in CR-39 detectors obtained as a result of Pd/D Co-deposition, THE EUROPEAN PHYSICAL JOURNAL APPLIED PHYSICS, accepté le 5 mars 2009, pdf : http://www.google.fr/url?sa=t&source=web&ct=res&cd=8&ved=0CDcQFjAH&url=http%3A%2F%2Fwww.lenr-canr.org%2Facrobat%2FMosierBosscharacteri.pdf&ei=FbtSS5bPBMyhjAfO6tCaCg&usg=AFQjCNFhEnpAjh5MqE7HY2u7HwxUsOEr_A&sig2=LqB0yk6xo3JYISgVsDALMQ
  15. Rambaut M. Electron clusters and nuclear fusion. Annales de la Fondation Louis de Broglie 2004 ; 29 : 1131-47
  16. « Alchimie : les physiciens commencent à y croire ! », Hervé Poirié et Cécile Bonneau, Sciences et vie, nº 1040, 2004, pages 53.
  17. « Alchimie : les physiciens commencent à y croire ! », Hervé Poirié et Cécile Bonneau, Sciences et vie, nº 1040, 2004, page 62.
  18. (en) http://www.thaindian.com/newsportal/sci-tech/cold-fusion-success-in-japan-gets-warm-reception-in-india_10053182.html
  19. (en) Bubblegate Investigation Portal
  20. (en) R.P. Taleyarkhan, Modeling, analysis and prediction of neutron emission spectra from acoustic cavitation bubble fusion experiments , Purdue University, West Lafayette, IN 47907, USA, Available online 5 August 2008
  21. (en) 15th International Conference on Condensed Mater Nuclear Science, Roma, Italy, 5 October 2009
  22. (en) Alexandr I. Koldamasov, Hyun Ik Yang, Denis B. McConnell, Alla A. Kornilova, V. I. Vysotskii, Observation and investigation of nuclear fusion and self-induced electric discharges in turbulent liquids , Journal of Surface Investigation. X-ray, Synchrotron and Neutron Techniques, Vol. 3, No. 2, pp. 275–283, 2009
  23. (en) Koldamasov de Russie et Yang de Corée, société IESI du Canada, ICCF 12, 6 – Cavitation, Observation and Investigation of He-4 Fusion and Self Induced Electric Discharges in Turbulent Distilled Light Water, Yokohama, Japon, du 27 novembre au 2 décembre 2005
  24. (en) Alla A. Kornilova, V. I. Vysotskii, N. N. Sysoev, A. V. Desyatov, Generation of X-rays at bubble cavitation in a fast liquid jet in dielectric channels, Journal of Surface Investigation. X-ray, Synchrotron and Neutron Techniques, Vol. 3, No. 2, pp. 275–283, 1 mai 2009
  25. (en) Alla A. Kornilova, V. I. Vysotskii, N. N. Sysoev, A. V. Desyatov, Investigation of Radiation and Transmutation Processes at Bubble Cavitation in Supersonic Free Water Jet, Journal of Surface Investigation. X-ray, Synchrotron and Neutron Techniques, Vol. 3, No. 2, pp. 275–283, 2009
  26. (en) S.V. Adamenko and Vladimir I. Vysotskii, Experimental observation and a possible way to the create anomalous isotopes and stable superheavy nuclei via electron-nucleus collapse, Electrodynamics Laboratory “Proton-21”, Kiev, Ukraine, 2003, Cambridge, MA: LENR-CANR.org.
  27. Voir aussi : 2003 Transmutations par surpression d'électrons et effondrement
  28. a et b Rai News 24, interview réalisée par Angelo Saso, diffusée le 24 avril 2008, émission réalisée par Maurizio Torrealta
  29. a et b Horizons et débats, 21 juillet 2008, n°29, p.1, Armes à l'uranium et fusion froide
  30. Horizons et débats, La guerre et ses conséquences, n°38, 22 septembre 2008, p. 3

Voir aussi

Bibliographie

  • (en)Edmund Storms, Science of Low Energy Nuclear Reaction: A Comprehensive Compilation of Evidence and Explanations, World Scientific Publishing Company, 2007
  • (en) Hideo Kozima, The Science of the Cold Fusion Phenomenon, Elsevier, 2006
  • (en) David Adam, article dans the Guardian, le 24 mars 2005 In from the cold [2]
  • (fr)S. Krivit, N. Winocur, The rebirth of cold fusion, Pacific Oak Press, 2004
  • (fr)Science & Vie n° 1040 de mai 2004 : Le magazine de vulgarisation scientifique a consacré sa une à la fusion froide (« Alchimie, les physiciens commencent à y croire »). La revue a mené une enquête très fouillée de 18 pages sur la question. Conclusion : des dégagements de chaleur anormaux ont bien été répliqués par quelques équipes indépendantes de par le monde mais, échaudées par l'affaire Pons et Fleischmann et le manque de confirmation, les revues scientifiques comme Science et Nature refusent de publier la moindre ligne sur le sujet. Des crédits de recherche supplémentaires sont demandés pour apporter la preuve du phénomène.
  • (en)Charles G. Beaudette, Excess Heat: Why Cold Fusion Research Prevailed, Oak Grove Press, 2002
  • (en)Robert L. Park, Voodoo Science: The Road from Foolishness to Fraud, New York: Oxford University Press, 2000
  • (fr)Michel de Pracontal : L'Imposture scientifique en dix leçons
  • (ja) & (en) Tadahiko Mizuno, Nuclear Transmutation: The Reality of Cold Fusion, Concord, New Hampshire: Infinite Energy Press, 1998
  • (en)Charles Seife, Sun in a Bottle: The Strange History of Fusion and the Science of Wishful Thinking, New York: Viking,
  • (en)John O'M. Bockris and Amulya K. N. Reddy: Modern Electrochemisty, Plenum Press, 1998
  • (en)Antony Cyril Sutton, Cold Fusion: Secret Energy Revolution, 1997.
  • (en)Frank Close, Too Hot to Handle: The Race for Cold Fusion, Princeton Univ Pr, 1991
  • (en)Eugene Mallove, Fire from Ice : Searching for the Truth Behind the Cold Fusion Furor, 1991.
  • (es)Mario Mariscotti, 1985, El Secreto Atómico de Huemul: Crónica del Origen de la Energía Atómica en la Argentina, Sudamericana/Planeta, Buenos Aires, Argentina ISBN 950-37-0109-0. En espagnol.

Articles connexes

Liens externes

Le réacteur CFR v2.1 en fonctionnement
  • Le site officiel de la 12ème Conférence Internationale sur la Matière Nucléaire Condensée, nouvelle appellation des conférences internationales sur la fusion froide, qui s'est tenue à Yokohama (Japon), du 27 novembre au 2 décembre 2005.

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